Les Gestes Des Amants Dans Les Poemes Tristaniens

Les gestes des amants dans les poèmes tristaniens

Contenu

Introduction

Chapitre I Les gestes dans la littérature

1.1. La définition des gestes

1.2. La gestes au Moyen Age

1.3. Les gestes dans la littérature

Chapitre II Les gestes des amants dans les poèmes tristaniens

2.1. Les gestes tristaniens

2.2. Les gestes et l’aventure de Tristan et Iseut

2.3. Le rôle des amants dans les poèmes tristaniens

Conclusion

Introduction

Pendant le Moyen Age, les histoires d’amour des amants étaient condamnées par les autres. Une femme qui trompait son mari avec un autre homme, elle était vue comme une femme sans mœurs et elle était condamnée à la mort dans la plupart des situations.

Dans un monde qui les condamnait pour leurs actions, les amants étaient obligés à vivre leur amour dans un cadre interdit. Pour accomplir leur amour, les amants devraient se cacher ou trouver une modalité de se rencontrer sans que les autres le sachent.

Condamnés ou non par les autres, les amants faisaient presque tout pour un amour parfait. Ils passaient par toute sorte de situations et ils affrontaient tout péril pour accomplir leur but.

Les histoires d’amour entre deux amants étaient parfois trahies par leurs gestes. Les actions des amants étaient perçues par les autres et leur amour était détruit pour toujours. D’autres fois, les gestes des amants les aideraient à vivre une très belle histoire d’amour, même si elle était interdite.

Malheureusement pour les amants du Moyen Age, les amours entre eux étaient découverts par les autres. Dans ce cas-là, soit les amants se séparaient, soit ils mouraient l’un pour l’autre.

Les histoires d’amour entre les amants ont été présentées et transmises par plusieurs écrivains, soit connus, soit anonymes. Pendant le temps, ces histoires ont devenu plus ou moins connues et elles ont inspirés aussi d’autres écrivains. Les plus connus poèmes qui décrivent les histoires d’amour des amants sont les poèmes tristaniens.

Le travail qu’on se propose présente les gestes des amants qui apparaissent dans les poèmes tristaniens. Comme on a déjà dit, parfois, les gestes des amants les aidaient à accomplir leur amour, parfois, même ces gestes détruisaient une histoire d’amour.

Le premier chapitre du travail se développe le long de plusieurs sous chapitres qui présentent les gestes et leur place dans la littérature. On présente une définition des gestes et leur influence sur la littérature du Moyen Age.

Le même chapitre décrit et met en scène les gestes des amants, leurs attitudes et les moyens par lesquelles les amants cherchent à garder leur aventure loin des yeux des autres.

Dans un autre chapitre, on décrit le cadre dans lequel les poèmes tristaniens ont fait leur apparition et la place des romans tristaniens dans la littérature du Moyen Age. On y présent aussi les caractéristiques des poèmes tristaniens et les personnages qui apparaissent dans ces poèmes.

Dans ce chapitre, partagé aussi dans plusieurs sous chapitres, on décrit Tristan et Iseut, les protagonistes des poèmes tristaniens et la raison de leurs gestes. Le même chapitre présente le sentiment d’amour et sa valeur pour les amants tristaniens.

La conclusion du travail proposé vient renforcer les faits présentés le long des deux chapitres. Les sacrifices des amants pour leur amour, l’importance de ce sentiment pour les amants et surtout l’influence des gestes des amants sur leur amour représentent seulement quelques aspects qui apparaissent dans la conclusion.

Chapitre I

Les gestes dans la littérature

1.1. La définition des gestes

Pour donner une définition des gestes, Jean-Claude Schmitt partait du latin gestus, dans son œuvre, La raison des gestes dans l’Occident médiéval. Selon Schmitt, le geste dont on parle était utilisé dans les écritures du Moyen Age pour évoquer une norme, une valeur sociale ou une modalité gestuelle. Dans toutes les situations, les gestes devenaient des objets de pensée.

,,Le geste est le mouvement et la figuration des membres du corps adaptes a toute action et attitude. ” selon Schmitt, cette définition est la plus complexe définition du mot geste.

C’est toujours Schmitt celui qui notait dans son œuvre que le mot gestus ,, désigne, sans les distinguer, au sens large, un mouvement ou une attitude du corps, et en un sens plus particulier le mouvement singulier d’un membre, avant tout de la main.’’

Tout le temps, dès l’Antiquité, les gestes ont constitué le moyen par lequel les gens ont exprimé leurs sentiments envers les autres, une façon de montrer et non seulement de penser tel ou tel sentiment.

,,En ancien français, le mot utilisé habituellement pour parler des gestes est contenance, avec les sens variés de manière d’être…Le mot gest apparaît dans l’ancien français au début du XIIIème siècle, comme une référence explicite à la latinité classique, puisqu’il est mentionné pour la première fois dans la traduction française des Faits des Romains.’’ Entre les deux mots, contenance et gest, le premier sera le plus utilisé jusqu’à la fin du Moyen Age.

Les clercs utilisaient les gestes pour comprendre l’écriture sacrée. Les gestes illustrent le concept chrétien de la nature pécheresse de l’homme, qui diffère de la définition antique de la nature. Dans la culture chrétienne, le corps et l’âme communiquent par un réseau de signes.

Dans les textes bibliques et dans les représentations des anges et des saints, les gestes occupent une place privilégiée, dès les anciens temps. La liaison entre les anges et Dieu est représentée à l’aide des gestes.

Même la relation entre le roi ou l’empereur et Dieu était représentée à l’aide des gestes. La main de Dieu qui vient poser la couronne sur la tête de l’empereur est une image qui domine les textes et les représentations antiques.

,,…aux gestes du prêtre, emblématiques de la société cléricale, répondent ceux du chevalier, les plus représentatifs de l’aristocratie laïque, qui dispute au haut clergé le rôle dominant dans la société. Les gestes rituels de l’Eglise et du château remplissent au premier chef cette fonction de distinction. ”

Par ces gestes, les clercs se distinguaient des laïcs. Le geste devient le signe de la raison. ,,…ce sont les personnages et les gestes négatifs qui, au registre inferieur, fixent les descriptions les plus concrets, les plus réalistes, les plus actuelles. Leurs contrepoints vertueux restent plus volontiers des idéaux hors du temps. Plus encore que les bons gestes ce sont les mauvaises gestes dans les images comme dans les textes, qui permettent de classer les hommes. ”

Les prières étaient aussi faites à l’aide des plusieurs gestes. Chaque prière était accompagnée par certains gestes qui avaient le rôle d’agrandir la force de la demande qu’on faisait à Dieu.

Beaucoup de critiques littéraires lient les gestes à la musique. Selon eux, la musique est transmise plus facile quand elle est accompagnée des gestes. La musique est utile à l’Église et aussi pendant la prédication.

Selon Schmitt, les gestes faits pendant la prière ont deux fonctions : ,, ils expriment la dévotion intérieure et ils excitent le désir que nous avons de nous soumettre à Dieu.’’

Comme on a déjà dit, les images mettaient en relief ou plutôt elles renforçaient, au Moyen Age, les gestes des hommes. En même temps que les vêtements, l’apparence physique et les objets, les gestes faisaient la distinction entre les rôles sociaux : aux clercs, les gestes sacres, aux laïcs, les gestes techniques et aux femmes, les expressions de la douleur.

Au début, les gestes ont été attribués seulement aux quelques personnes, qui appartenait à une certaine catégorie sociale. Beaucoup plus, les actions gestuelles étaient envisagées comme un art de vivre, faisant la preuve de l’influence que les gens qui faisaient ces gestes exerçaient sur la société du temps : ,,À notre avis, il y a pourtant une autre raison qui justifie, dans la société féodale, une pareille valorisation de certains gestes, allant de pair, certes, avec la dévalorisation d’autres gestes : l’étude était réservée alors de manière presque exclusive à une minorité, les clercs, qui apprenaient à lire et à écrire dans les couvents ou dans les écoles abbatiales et épiscopales. Quant à la courtoisie, qui fleurit dès la fin du XIe siècle dans le Midi, pour s’affirmer pleinement au siècle suivant, lorsque ses valeurs furent diffusées également dans le Nord, elle fut conçue d’abord comme un « art de vivre » propre à l’aristocratie, supposant à la fois politesse, élégance des mœurs, générosité (largueza en occitan) et un savoir parler. Mais, par-dessus tout, cet art de vivre mettait l’accent sur la mesure (mezura) – un équilibre psycho-affectif…, ce qui prouve sans aucun doute à quel point la culture ecclésiastique surplombait alors la société.”

La raison est la seule chose qui fait la différence entre les gestes des hommes et celles des animaux. En pensant, l’homme peut juger ses actes et les situations dans lesquelles il doit faire tel ou tel geste. Un homme avec des gestes désordonnés n’est qu’un homme qui semble fou ou orgueilleux aux autres. De l’autre côté, les gestes qui suivent un certain ordre devient l’image de la bonté et de la prudence.

,, La nature de l’homme ne suffit pas pour que son corps accomplisse les actes qui conviennent. C’est pourquoi la discipline est nécessaire aux gestes: sous le contrôle de la raison et de l’intelligence, elle permet d’ordonner les membres en fonction des gestes que l’homme doit accomplir. Grâce à la discipline, l’homme apprend à tendre l’oreille pour entendre mais sans ouvrir la bouche, à parler avec la bouche mais sans agiter les pieds, les mains ou les épaules.’’

Tout le corps participe à la représentation des gestes. L’âme et le corps devient une seule partie quand on parle des gestes.

Les gestes deviennent ainsi la manière par laquelle l’homme peut mieux exprimer ses pensées ou ses sentiments. Un geste fait sans une raison devient un signe sans valeur qui n’exprime aucune certitude.

1.2. Les gestes au Moyen Age

,, Le Moyen Age, lui aussi a défini, une forme de psychologie, à mi-chemin de la théorie médicale des humeurs et du discours morale, qui lui a permis de penser la fonction expressive de certains gestes. Dans la longue durée, qui déborde le Moyen Age, son principe élémentaire est que les gestes sont censés exprimer les réalités cachées, l’intérieur de la personne, tandis qu’inversement, la discipline des gestes, à l’extérieur du corps, peut contribuer à reformer l’homme intérieur. D’où aussi, face aux gestes, l’attention privilégiée qui est portée aux parties jugées les plus expressives du corps : le visage et le regard et les mains qui semblent parler.’’

Dans cette période, les gestes étaient le moyen le plus utilisé pour qu’on exprime ce qu’on voulait dire ou ce qu’on penser. A l’aide des gestes, les hommes, même les plus timides, pouvaient faire connaitre aux autres leurs pensées et leurs sentiments.

Pour que le message exprimé à l’aide des gestes soit mieux compris, les actions des gens étaient accompagnées des signes représentatifs, comme le mouvement du corps.

Au Moyen Age, les gestes étaient omniprésents. L’image est toujours associée aux gestes et accompagnée par les gestes pour montrer, non seulement pour évoquer. Ainsi, le geste qui symbolise le couronnement d’un roi est toujours mis en valeur par des images qui le suggèrent. De la même façon, on parle quand on a à faire avec les gens de l’Eglise. Leur prière est accompagnée des gestes symboliques et spécifiques à une telle opération.

A côté des fonctions accomplies dans les relations sociales, les gestes utilisés par les hommes médiévaux avaient aussi le rôle de mettre en valeur certains sentiments comme ceux d’amour.

La forme écrite sous laquelle se sont transmis les textes littéraires du Moyen Age présente dans une manière assez pauvre le moyen par lequel ces œuvres ont été produites, mimées, reçues. Et dans ce cas-là le geste, comme dans les relations sociales, les gestes utilisés par les hommes médiévaux avaient aussi le rôle de mettre en valeur certains sentiments comme ceux d’amour.

La forme écrite sous laquelle se sont transmis les textes littéraires du Moyen Age présente dans une manière assez pauvre le moyen par lequel ces œuvres ont été produites, mimées, reçues. Et dans ce cas-là le geste, comme la parole, il occupe un rôle majore.

A l’église, la prière était faite à l’aide des gestes. Il suffisait qu’on fasse un geste pour que la prière soit complète. ,, Même s’ils sont moins importants que l’intention et peut être les paroles de l’orant, les gestes ont une efficacité psychologique, en entraînant l’âme dans leur mouvement.” Le corps et l’âme participaient à la transmission d’un message à l’aide des gestes dans la société médiévale.

Le prédicateur lui aussi il utilisait des gestes pendant la messe. Comme ça, le message qu’il voulait transmettre était plus convaincant. Les gestes de la prière, commençant avec le signe de la croix, étaient propres au christianisme.

Pour les clercs du XIIIème siècle, faire des gestes du prédicateur une vertu était une préoccupation majeure. L’accord e la voix, de l’expression du visage et des gestes constituaient le principe majeure de cette action.

Les jongleurs ont aussi jouaient un grand rôle dans les représentations des gestes pendant le Moyen Age. Certains d’entre eux étaient condamnés pour le métier qu’ils pratiquaient. Parfois, les gestes des jongleurs étaient utilisés pour représenter les péchés des hommes.

„Après le succès de l’anthropologie culturelle, personne ne doute plus, de nos jours, que chaque société comporte des énormes propres vouées à modeler le corps dans ses postures, dans son apparence, dans ses attitudes, autant que dans ses rapports à l’espace, aux autres et à soi-même. En tant que mouvements extérieurs du corps ou de l’une de ses parties, principalement des bras, des mains et de la tête, volontaires ou involontaires, qui visent à exprimer une manière d’être ou de faire de quelqu’un, les gestes n’y font pas exception. En dépit du fait qu’ils nous semblent parfois « naturels », entièrement rattachés au charnel, voire commandés de manière exclusive par le corps, ils relèvent, en réalité, de la culture, renvoyant à un idéal de maîtrise de soi que toute communauté rêve d’atteindre à travers des codes qui changent en diachronie aussi bien qu’en synchronie.”

Dès le X siècle, les gestes étaient utilisés à l’Eglise dans les drames liturgiques. Comme ça, est né le théâtre religieux : ,,les moines et les nonnes peuvent ainsi apprendre non seulement les paroles qu’ils doivent chanter et la manière de les chanter, mais en accord avec ce chant, la manière de se mouvoir ou les gestes précis à accomplir.’’ Les gestes étaient toujours accordés avec la signification des paroles mais aussi avec le chant et le rythme de la musique qu’on chantée pendant les représentations bibliques.

,, Aux XIème-XIIème siècles, deux gestes de prière s’imposent et deviennent caractéristiques de la prière chrétienne occidentale : les mains jointes à hauteur de la poitrine, les doigts étant allongés et la génuflexion’’. Les gestes faits par le chrétien pendant la prière deviennent les signes d’un hommage apporté à Dieu. Les mains jointes font la différence entre les âmes du purgatoire et les damnés qui n’ont aucun espoir.

Pour la société médiévale, les gestes étaient donc envisagés comme un moyen de s’exprimer, comme un moyen de vivre, en fait. On leur accordait une place privilégiée dans les relations avec les autres : ,,La civilisation médiévale (…) a parfois été appelée une civilisation du geste (…) non seulement les gestes, définis de la manière la plus générale, comme les mouvements et les attitudes du corps revêtent au Moyen Age, dans les relations sociales, une très grande importance, mais ils sont perçus comme tels et ils peuvent devenir, ou moins pour les clercs, objets de réflexion politique, historique, étique et même théologique.”

Les gestes formaient, pendant le Moyen Age des liaisons entre les hommes, soit qu’on parle des gens simples ou des gens de l’église. Tous étaient les membres d’une société dans laquelle les gestes influençaient les relations entre les hommes.

1.3. Les gestes dans la littérature

Tout comme dans la vie sociale, aussi dans la littérature du Moyen Age, les gestes occupaient une place privilégiée. La société du temps a beaucoup influencé l’apparition des gestes, comme les gestes ont influencé le développement de la société.

En France, la littérature médiévale est représentée par des œuvres écrites entre l'an mil et l'an 1500 dans diverses textes. On parle d’abord de la littérature des chansons de geste qui font part de genre épique et qui relèvent les aventures de chevaliers.

Il y a aussi la littérature courtoise, apparue au XIIè siècle et dont les personnages centrales sont les troubadours qui chantent l'amour parfait dans leurs poèmes. On trouve dans la littérature du Moyen Age un amour courtois, un sentiment pour lequel le chevalier doit vaincre tout obstacle. La courtoisie des chevaliers était un art d’aimer qui n’était pas accessible à tout le monde, un mélange entre passion et désir érotique. Le personnage courtois est celui qui connaît l’art d’aimer.

On ne doit pas oublier qu’au Moyen Age, toute personne qui commettait une erreur ou qui avait une relation adultère, comme on peut découvrir dans les poèmes de Tristan, elle était punie. Dans ce cas-là, les gestes des certaines personnes sont parfaitement naturels.

,,Dans le cas des chansons de gestes, les textes ont conservé deux traits caractéristiques de la performance originelle. D’une part, des formules récurrentes marquent les articulations du récit comme autant des jalons reconnaissables par tous….d’autre part, le texte lui-même indique des gestes, mimétiques ou déictiques, que le jongleur accomplit en même temps qu’il décrit l’action des personnages ou en prononce les discours.’’

Si dans certaines situations, les gestes sont mis en relief à l’aide des images, dans d’autres cas, les gestes sont mis en valeur par les textes dans lesquels ils apparaissent représentés.

Les gestes qu’on trouve dans les chansons de gestes sont spécifiques à ce type d’écriture et ils se répètent, d’un texte à l’autre. Plusieurs fois, les gestes d’un héros sont présentes ou spécifiques aussi à un autre héros, qu’on peut trouver dans une autre histoire.

Dès le XIe siècle, des poèmes, les chansons de geste, racontent les aventures de chevaliers pendant des événements historiques remontant aux siècles antérieurs. Mais c’est bien l’idéal de la société féodale qui est en fait mis en scène : respect absolu des engagements féodaux entre suzerain et vassal, morale chevaleresque, qualités guerrières au service de la foi.

Le chevalier obéit à un code d’honneur très exigeant : méprisant la fatigue, la peur, le danger, il est irrémédiablement fidèle à son seigneur. Le chevalier vit pour la guerre, il est fier de ses exploits guerriers. La femme n’a pas de place dans cet univers.

Pendant cette époque, les seigneurs féodaux participaient à des grandes expéditions militaires en Terre sainte pour libérer le tombeau du Christ des mains de l’envahisseur musulman. Ce sont les croisades.

En même temps qu’elles affermissent le régime féodal et consacrent le prestige de la classe aristocratique, les croisades engendrent un idéal humain : celui du chevalier croisé, sans peur et sans reproche. Le preux chevalier est un modèle de toutes les vertus : homme d’une générosité sans limites, il se montre vaillant au combat, loyal à son seigneur, à sa patrie et à son Dieu. Le sens de l’honneur lui importe autant que sa vie.

Les chansons de geste ont ainsi devenus l’expression littéraire de ces entreprises autant militaires que religieuses. Ce genre littéraire est typiquement médiéval. L’analyse psychologique y importe bien moins que l’exaltation nationale. C’est l’histoire revue et corrigée par la légende et le merveilleux.

Les récits aiment exagérer les faits d’arme accomplis. Prouesses physiques, exploits extraordinaires, luttes merveilleuses et parfois même affrontements téméraires contre des monstres et des forces maléfiques mettent en valeur les chevaliers, symboles du bien. Les qualités du héros sont encore magnifiées lorsqu’elles sont mises au service de Dieu, suzerain suprême.

D’ailleurs, afin de mettre davantage en relief les qualités exceptionnelles du héros épique, on l’oppose régulièrement à un antagoniste, félon et traître – le félon suprême étant celui qui refuse de se soumettre à Dieu, plus grand des souverains : le musulman, ou Sarrasin.

Les écritures du Moyen Age ont apporté une nouveauté dans la littérature, par la présence de l’amour dans les textes du temps. Ces écritures médiévales ont donné valeur au sentiment de l’amour.

L’apparition de la notion d’amour dans les textes médiévaux a donné naissance à un autre thème représentatif pour la littérature du Moyen Age. On y parle du thème des amants, obligés à vivre une histoire d’amour interdite.

Les histoires d’amour décrites dans les écritures du Moyen Age sont nées dans un monde dans lequel l’ordre et la morale étaient les plus importants attributs des hommes. La société du temps a eu un rôle décisif pour les créations médiévales. Ceux qui ne respectaient pas l’ordre établi auparavant étaient exclus. C’est le cas des amants dont les histoires d’amour ont devenu indispensables dans les écritures du Moyen Age.

La religion a eu aussi une influence significative pour la littérature médiévale. La société féodale du XIIè siècle était très ancrée dans la chrétienté et la religion était le garant de l'ordre moral. Le roi consolidait son pouvoir avec le soutien du clergé et l’église, à son tour, était protégée par le roi et ses compagnons.

Dans un monde dominé par des conduites bien consolidées par le clergé et par le roi, les histoires d’amour interdites n’étaient que des moyens par lesquels les amants sortaient du quotidien. Par l’accomplissement des amours interdits, les amants enfreignaient les règles établies par la société médiévale.

Pour la littérature du Moyen Age sont spécifiques les jeux de mots. Il y a des romans arthuriens qui racontent les aventures des chevaliers et les poèmes tristaniens qui racontent l’histoire de l’amour interdite.

On doit noter que la littérature médiévale est, avant tout, de tradition orale. Les écritures du Moyen Age ont été transmises à l’aide des troubadours, qui s’exprimaient dans la langue connue dans le sud de la France et des trouvères, qui parlaient le dialecte du nord de la France. Ils chantaient des chansons de gestes ou ils récitaient des textes narratifs comme les poèmes.

Pendant le temps, les chansons des troubadours ont été écrites et transmises par voie écrite, à l’aide des auteurs plus ou moins connus ou parfois anonymes. Les mythes populaires et les histoires d’amour des gens du Moyen Age étaient envisagés dans les romans du XIIe et XIIIe siècles.

Chapitre II Les gestes des amants dans les poèmes tristaniens

Les gestes tristaniens

Le nom des poèmes tristaniens est donné même par le personnage principal de ces roman, Tristan, le neveu du roi Marc et, selon certaines versions de ces écritures, l’un des chevaliers du roi Arthur. Les aventures de ce héros ont fait naître la légende de Tristan et ils ont marqué le commencement du cycle des poèmes tristaniens.

L’histoire développée dans les poèmes tristaniens donnera naissance à ce qu’on appelle le roman courtois. Elle deviendra l’un des plus caractéristiques mythes européens, en envisageant l’idée de fidélité d’une personne à l’autre, née dans le féodalisme et qui s’applique au lien amoureux.

Les poèmes tristaniens sont des écritures dans lesquelles on trouve représentées les réalités de la société médiévale, les problèmes et les joies des hommes du temps, leurs gestes et leurs aventures.

Connue comme l’une des œuvres privilégiées de la littérature médiévale, l'histoire de Tristan et Iseut est devenue, pendant le temps, un modèle de l’amour pour les amants authentiques et la meilleure expression de la passion.

La légende de Tristan et Iseut est dans le même temps centrale et marginale. On y trouve une passion sans bout entre deux hommes mais aussi des conflits qui apparaissent le moment où l’amant doit veiller à la réputation de sa dame.

Les quelques quatre-vingts manuscrits qu’on connaît font la preuve du succès que Tristan en prose a eu le long des siècles. L'amour passion, la nouveauté, la beauté et la simplicité de l'histoire présentée dans ce poème ont mis leur empreinte sur la littérature et sur l’imagination des lecteurs.

Avec une origine celtique et une histoire qui se déroule dans la région anglaise de Cornouailles, la légende de Tristan et Iseut a fait son entrée dans les écritures du Moyen Âge sous diverses formes littéraires. Les plus connus sont les romans, en vers ou en prose et les récits brefs.

Le poème tristanien a beaucoup influencé les romans parus dans les XIIe et XIIIe siècles et après cette période. La légende dont on parle, cette histoire qui oppose les amants aux lois religieuses, morales et sociales et qui à la fin leur apportera la mort, peut être aussi envisagée comme un mythe de l’amour qui résistera le long des siècles.

Les versions les plus connues de la légende appartiennent à Béroul, dans la seconde moitié du XIIe siècle et à Thomas d'Angleterre environ les années 1170-1175. L’histoire y présentée s’est répandue dans des textes fragmentés.

La variante de Béroul présente la partie centrale de l'histoire et celle de Thomas, trouvère anglo-normand, représente une tentative d’adapter la légende aux exigences de l'éthique courtoise. On y met en scène les moments clé de l'histoire des deux amants. Toujours présent, le narrateur commente les faits, provoquant ses lecteurs à participer dans le procès du Bien et du Mal.

De l’autre côté, chez Thomas, l’action est assez courte et elle offre la possibilité d’analyser le sentiment amoureux. Les longs monologues, les plaintes lyriques ou les interventions du narrateur font possible l’analyse de l’amour. On y parle d’une méditation douloureuse sur la nature de l'amour, sur les joies et surtout sur les souffrances qu'il impose.

Toutes les versions connues de la légende de Tristan et Iseut présentent la même histoire. L'histoire de Tristan et Iseut reproduit, en fait, un archétype de l'imaginaire qu’on retrouve dans de nombreuses civilisations. L'originalité des versions françaises de la légende est donnée par la présentation de l'amour par le philtre.

Une fois le poème courtois paru, les formes narratives en vers se développeront à côté des formes en prose. Destiné à la lecture, le poème apporte un changement dans la littérature, s’opposant à la chanson de geste et à la poésie lyrique qui étaient chantées.

Les romans français en vers ont été oubliés dès le Moyen Âge. Les nombreux manuscrits du roman de Tristan, souvent illustrés, se sont perpétués durant tout le Moyen Âge et au-delà et dans toute l'Europe.

Les œuvres ayant Tristan comme personnage principal ont été écrites dans la seconde moitié du XIIe siècle. La mise en prose de ces romans est commencée dans un autre siècle et elle suivait dans ses grandes lignes la version de Béroul. Seulement quelques épisodes ont été empruntés à Thomas.

Le poème de Tristan et Iseut est une composition issue de l’imagination populaire. On y parle d’un amour courtois, avec certaines règles auxquels les amants doivent se soumettre. Le texte a été transmis sous forme de variantes fragmentaires ou sous la forme de récits consacrés à un seul épisode de la légende.

Au Moyen Age, Tristan en prose, composé au XIIIe siècle, est devenu la plus connue version de la légende de Tristan et Iseut. Les textes en vers de Béroul et de Thomas se sont perdus le long des siècles. On en trouve seulement quelques extraits, plus ou moins liée à la version originelle. Plus précisément, il nous reste environ trois mille vers du roman de Béroul et pareil de celui de Thomas, ainsi qu'un autre roman, anonyme, qui garde quinze cent vers. M. Bédier a traduit le fragment de Béroul , en essayant de redonner la forme et la tente de ce dernier.

Bédier a ressuscité les personnages de Béroul en gardant la couleur de l'époque bien gravée dans leurs costumes et leurs allures d’antan, dans leur façon de vivre et de parler, de sentir et d'agir, dans leurs physionomies, leurs expressions et leurs gestes, en recréant une image fidèle de l'époque médiévale. Pourtant on réussit à bien déchiffrer au delà de cette image le trait qui représente l'idée principale et le sujet, qui est la passion. Cette passion amoureuse, aussi puissante que destructrice pour les couples des amants a toujours été, à cette époque chevaleresque, celle de l'amour interdit et, pour cela, maudit. Les deux couples représentatifs et les plus célèbres dans ce sens, connus dans la littérature, sont celui de Lancelot et Guenièvre et celui dont on va s'en occuper, de Tristan et Iseut ou Yseut, son nom étant écrit de plusieurs manières dans les différents textes.

Le vrai amour écrit, celui qui est resté à travers les siècles et qui attendrie les cœurs aujourd'hui encore était toujours un amour impossible et cela parce qu'il n'était pas né dans une relation normale, mais toujours dans le cadre d'un adultère. Il s'agissait donc de deux amants adultérins qui transcendaient la normalité et les règles imposées par les lois et le bon sens. Dans ce cadre impur du point de vue moral, l'amour était celui qui, par la force et la pureté des sentiments, dépassait ces limites et devenait ainsi plus fort que tout, mais, étant maudit, finissait mal : les deux amants étaient condamnés dès le début, à mort, car un amour construit sur des bases impures, quoi qu'il soit véritable et fort, ne pouvait guère avoir une finalité heureuse. La conséquence était donc inévitable : la mort des deux amants, coupables d'avoir osé franchir les lois de la moralité et des mœurs de l'époque.

Les deux couples, même s'ils incarnent l'adultère, sont opposés d'un point de vue de la conception de l'amour, c'est à dire : le couple de Lancelot et Guenièvre incarne l'amour courtois, tandis que celui de Tristan et Iseut ,,…incarne au contraire un amour immotivé, une force irrépressible, qui ne s'entretient par du culte de la prouesse et du service de la Dame mais au contraire se solde par l'exclusion de héros du monde féodal. ”

2.2 Les gestes et l'aventure de Tristan et Iseut

Joseph Bédier, professeur au Collège de France, dans un ouvrage couronné par l'Académie Française, a renouvelé le Roman de Tristan et Iseut, en apportant à l'histoire manquante les parties qui racontent les enfances de Tristan, ses exploits et les circonstances de la rencontre avec Iseut, et la continuation après la mort des barons jusqu'à la mort des deux amants.

Le début du poème de Béroul est perdu. Néanmoins, toutes les versions du récit se mettent d'accord sur la partie manquante comme racontant la naissance de Tristan et ses exploits en Cornouailles et en Irlande. Ce qu l'on connaît avant que le poème commence proprement dit c'est que le héros, neveu du roi Marc de Cornouailles, emporte une victoire sur le Morhout d'Irlande et il en sort blessé. Sa blessure est guérie par Iseut, qui est la nièce de Morhout et la fille du roi d'Irlande. Il y a aussi allusion au combat que Tristan livre contre un affreux dragon et au philtre préparé par la reine d'Irlande pour sa fille Iseut et le roi Marc qui sont censés à se marier, mais qui, mal gardé par la suivante d'Iseut, fini par être bu par Tristan et la jeune fille pendant la traversée d'Irlande en Cornouailles. C'est ce breuvage fatal qui est, à la base, la cause de l'amour des deux, mais qui, durant le poème, s'avère comme étant la raison de l'attraction physique, jouant peu sur les sentiments des amants, beaucoup plus profonds et pour cela, dépassant une simple passion charnelle.

Le terme philtre n'apparaît pourtant qu'au 14 siècle. Béroul utilise le mot lovendric, qui signifie breuvage d'amour, de vin herbé, de poison, mais sans connotation négative, et de potion. Ayant bu ce philtre , Tristan et Iseut se sentent irrésistiblement attirés et deviennent amants. Pour éviter tout scandale, la suivante d'Iseut, Brangien, prend la place de sa maîtresse dans le lit du roi Marc.

On pourrait en tirer la conclusion que l'amour de Tristan et Iseut a été imposé par quelque chose au dessus de leur volonté, que c'était un pur hasard et une fatalité. L'amour leur a été imposé et leur situation devient tragique : le philtre a pour conséquence aussi l'annihilation de la raison, en dépossédant les deux amants de leur liberté, car c'est plus fort qu'eux, ils ne sont donc plus maîtres de leurs actions.

De ce point de vue, le jugement change une peu : s'ils ne sont pas les auteurs authentiques de leur propre histoire d'amour, si tout ce qui s'est passé est lié à la fatalité et à la volonté de l'autre, voire Brangien, même si son erreur était involontaire, ils deviennent peu ou du tout coupables et l'on ne peut pas parler de culpabilité envers les deux amants. Quand à eux, ils sont parfaitement lucides : Tristan avoue : ,,Si elle m'aime, c'est la potion qui en est la cause. Je ne peux me séparer d'elle et elle de moi”, ,,C'était notre destin”.

Le philtre d'amour a donné naissance à une passion incontrôlable. Les conséquences ne se limitent pas à une liaison interdite, mais en attirent d'autres qui changent le cours des choses du point de vue politique, car il s'agit d'une trahison dans ce sens. Tristan, en enlevant l'épouse du roi, comment une violation envers son seigneur et met en danger la royauté. Dominique Boutet affirme :

  ,,l'univers de Béroul est un monde à l'envers : c'est le peuple qui approuve cet amour et non la cour, lieu habituel de l'amour courtois et Dieu paraît venir au secours des amants à plusieurs reprises. A cet égard, la légende de Tristan est subversive. La tension continue qui fait la force des romans de Tristan ne tient pas seulement au fait qu'ils dépeignent une passion extrême, sans compromis possible, qui ne s'accomplit finalement que dans la mort. Cette tension tient aussi au refus de Béroul comme de Thomas d'idéaliser les êtres comme les situations.”

Ce qui frappe c'est la ressemblance à la tragédie grecque dans le sens de la fatalité . Puisque les amants ont été attirés contre leur propre volonté dans une histoire amoureuse, puisque Tristan lui-même parle du destin et que c'est impossible pour les deux amants de lutter contre cette destiné, que tout rapport avec la raison est nié, il n'y a plus de libre arbitre. Mais cela jusqu'au point où les deux reconnaissent leurs sentiments réels au delà l'attirance physique. Car au bout de trois ans, quoi que délivrés de l'union corporelle, le sentiment de l'amour existe toujours, en toute lucidité et sincérité. Ce qui a changé c'est la conscience du devoir : Tristan rend son Iseut au roi Marc et part en exile. Il va épouser en Petite Bretagne une autre Iseut, celle aux Blanches Mains, car elle porte le nom de son amoureuse, mais il ne consommera jamais cette union.

On peut parler de culpabilité à partir du moment où le philtre a cessé d'agir, quand les amants deviennent conscients de leur choix. En ce moment, c'est évident que leurs sentiments ont franchi l'effet du philtre et que leur amour est sincère. S'ils sont coupables de continuer à s'aimer, de ne pas lutter contre cette passion qui s'avère véritable, c'est enfin une décision qui leur appartient et qui peut être assumée comme décidant leur culpabilité, en dehors de toute destinée impossible à surmonter.

Le Tristan de Béroul en vers commence au moment où les deux amants sont soupçonnés par le roi Marc d'adultère et ils se rencontrent en cachette au bord d'une source qu'ombrage un pin. Le roi, prévenu par Frocin, le nain devin, est caché dans les branches pour espionner les deux coupables. De ce que Béroul nous dévoile, il est possible que Iseut ait vu le roi caché. Au vers 351-352, elle avoue :

,,Je vi son ombre en la fontaine

Dex me fist parler premeraine”

L'on peut dire que la chance est du côté des amants. Prévenus ainsi, ils réussissent à paraître innocents devant le roi grâce à un discours qui joue sur le double sens :

,,Com ele aprisme son ami

Oiez comme elle l'a devanci

« Sire Tristan, por Dieu le roi,

Si grant pechié avez de moi,

Que me mandez a itel ore ! »”

Dans ce discours habile qui rend cette scène digne d'une farce, les deux amants évitent le piège et parviennent à se justifier. Néanmoins, Tristan feint de quitter le pays, mais Iseut refuse. Ils continuent à vivre leur amour sans tenir compte des conséquences, sans se cacher et finissent par se faire surprendre par les barons précisément dans le lit du roi. Ils mettent le roi Marc face à un ultimatum, en lui demandant de chasser son neveu en menaçant de déclarer la guerre. Ainsi le roi, toujours aidé par le nain Frocin, envoie Tristan avec un message pour le roi Arthur, en mettant au point le plan de surprendre les deux amants ensemble avant le départ de Tristan.

Après la première rusée des deux amants, le roi était convaincu de l'innocence de sa femme et de son neveu et se prend la haine contre le nain Frocin, qu'il condamne à mort et autorise les deux amants à se voir à leur gré. (vers 255-319)

,,… Li rois qui sus en l'arbre estoit

Out l'asenblee bien veüe

Et la raison tote entendue.

De la pitié qu'au cor li prist,

Qu'il ne plorast ne se tenist

Por nul avoir : mout a grant duel.

Mot het le nain de Tintaguel.”

,,Por qoi cro je si fort outrage ?

Ce poise moi, si m'en repent.

Mot est fous qui croit tote gent.

Bien deüse ainz avoir prové

De ces deus genz la verité

Que jë eüse fol espoir.

Bien virent aprimier cest soir.

Au parlement ai tant apris,

Jamais jor n'en serai pensis.

Pa matinet sera paiez

Tristran o moi : s'avra congiez

D'estre a ma chambre a son plesir.

Or est remès li suen fuïrs

Qu'il voloit faire le matin.”

Les barons de la cour ne renoncent pas. Ils menacent le roi de déclarer la guerre s'il ne chasse pas non neveu. Dans ce sens, le nain Frocin prépare un piège pour surprendre les deux amants en flagrant délit pour que le roi soit convaincu une fois pour toutes de leur culpabilité. (vers 639-680)

,,Li rois respont : "Amis, c'ert fait."

Departent soi ; chascun s'en vait.

Mot fu li nain de grant voidie ;

Mot par fist rede felonie :

Cil en entra chiez un pestor,

Quatre derees prist de flor,

Puis la lia a son gueron.

Qui pensast mais tel traïson !”

La liaison des deux amants est découverte par le roi et les deux coupables sont condamnés à mort au bûcher. (vers 805-826)

,,Li troi qui a la chambre sont

Tristran ont pris et lié l'ont

Et liee ront la roïne.”

,,Ha ! Dex, porqoi ne les ocist ?

A mellor plait asez venist.

Li criz live par la cité

Qu'endui sont ensemble trové

Tristran et la reïne Iseut

Et que li rois destruire eus veut.”

Si Tristan s'en sort à l'aide de son ami Governal, Iseut est livrée aux lépreux pour avoir une fin encore plus immonde. Les deux amis arrivent à sauver Iseut d'un sort trop cruel par rapport à son crime et ils se rendent dans la forêt de Morois où va commencer un autre épisode de la vie des deux amants.

«Nous avons perdu le monde, et le monde nous; que vous en samble, Tristan, ami? Amie, quand je vous ai avec moi, que me fault-il dont? Se tous li mondes estoit orendroit avec nous, je ne verroie fors vous seule.» (Roman en prose de Tristan.)

Il n'y a rien d'idyllique dans la vie des deux amants dans la forêt du Morois sauf leur amour. La sérénité et la sécurité qu'ils ressentent nu durent pas longtemps, mais c'est le trouble et l'instabilité qui prennent la place des sentiments positifs. Les épreuves qui s'imposent deviennent de plus en plus pénibles et le havre de bonheur que devrait être la forêt n'existe plus. Les souffrances sont d'ordre matériel : ils manquent de nourriture, ils sont dépourvus de commodité et le climat n'est point en leur faveur. Il s'agit donc d'un impasse qui leur pourrit la vie et apporte de la peine et qui de traduit, dans la version de Béroul comme étant le prix à payer pour un tel amour : «  Non, jamais amants ne s'aimèrent tant et ne l'expièrent si durement. »

,,Trova Tristran l'arc qui ne faut.

En tel manere el bois le fist,

Rien ne trove qu'il n'oceïst.

Se par le bois vait cers ne dains,

Së il atouchë a ces rains

Ou cil arc est mis et tenduz,

Se haut hurte, haut est feruz,

Et së il hurte a l'arc an bas,

Bas est feruz en es le pas.

Tristran, par droit et par raison,

Qant ot fait l'arc, li mist cel non :

Mot a buen non l'arc qui ne faut

Rien qu'il en fire bas ne haut ;

Et mot lor out pus grant mestier :

De maint grant cerf lor fist mengier.

Mestier ert que la sauvagine

Lor aïdast en la gaudine,

Qar falliz lor estoit li pains,

N'il n'osoient issir as plains.

Longuement fu en tel dechaz.

Mervelles fu de buen porchaz :

De venoison ont grant planté.”

Ce fragment décrit la construction de Tristan de « l'arc infaillible » qui les aidera à survivre dans la forêt. Malgré les duretés de leur vie sauvage, l'amour et la tendresse n'y manquent jamais.

Après trois ans passés dans la forêt, quand l'effet du philtre aura passé, l'amour incontrôlable des deux va se trouver face à face avec la raison. Leurs sentiments s'avèrent sincères et profonds, au delà du hasard qui les avaient poussés dans une relation adultérine, mais c'est la raison qui décide la séparation au nom de la morale et de l'ordre social dans une scène des adieux :(vers 2718-2723)

,,Mais, por defense de nul roi,

Se voi l'anel ne lairai mie

Ou soir savoir ou soit folie

Ne face çou que il dira,

Qui cest anel m'aportera,

Por ce qu'il soit a nostre anor…”

Iseut est remise à son mari et malgré le fait que Tristan sollicite la permission de rester à la court de son oncle, il ne l'obtient pas. A la demande d'Iseut, il feint de s'en aller à Galloway, mais il va se cacher dans le cellier souterrain du forestier Orri.

L’innocence de la reine est toujours mise en question par les félons qui entourent le roi, ce qui la pousse à se soumettre à la procédure du serment devant Dieu. Iseut se justifie par un serment porté sur des reliques. La scène du jugement suggère une relation entre le roi Marc et Tristan et le roi Arthur et les chevaliers de la Table Ronde.

Le plan du déguisement de Tristan en lépreux permet à Iseut de jurer ambigument et de satisfaire les soupçons de son mari. Le fragment de Béroul s'achève peu après cette scène qui finit par la mort de Godoïne par la flèche de Tristan.

Dans la version de Thomas, l'histoire continue avec le mariage de Tristan à Iseut-aux- Blanches-Mains et et les retrouvailles des deux amants par l'intermède de Brengain et finit par décrire la mort des de Tristan et Iseut comme fin inévitable.

Le rôle des amants dans les poèmes tristaniens

L'histoire de Tristan et Iseut est devenue légendaire. Les deux protagonistes se situent parmi les amants les plus célèbres de la littérature. Ils sont les figures typiques de l'amour impossible. A travers les siècles, plusieurs versions nous ont parvenu et Béroul lui-même suggère s'être inspiré d'autres récits.

La première version dont la preuve est resté semble appartenir à Thomas, vers 1175. Celle de Béroul est située vers 1180 et elle est rédigée en ancien français ou en roman, qui était la langue vulgaire de tous les laïcs. La version de Thomas est considérée celle « courtoise », tandis que celle de Béroul fait partie du tronc dit « commun ». Toujours de ce tronc « commun » ferait partie la version d'Eilhart von Oberg, rédigée en moyen haut allemand, intitulée « Tristran », une version plus complète qui va de la naissance du héros à sa mort.

Cette version est incomplète, car le texte de Béroul commence au cœur de l'histoire, au moment où le roi Marc, prévenu par les ennemis de Tristan, essaie de surprendre les deux amants en flagrant délit d'adultère et finit avec la mort où Tristan se venge de ses ennemis, en les tuant.

La version de Thomas commence comme chez Béroul, mais elle se continue avec le mariage de Tristan avec Iseut-aux-Blanches-Mains. En 1176, un autre écrivain connu du Moyen Âge, Chrétien de Troyes, prétend être l'auteur d'un Tristan et Iseut, mais ce texte n'a jamais été trouvé. Enfin, toujours au Moyen Âge, la poétesse Marie de France écrit un lai intitulé Le Lai du Chèvrefeuille où l'histoire ressemble bien fort à celle de Tristan et Iseut.

Les deux amants ont inspiré des écrivains, des poètes, des musiciens à travers les siècles. En 1833, Walter Scott publie Sir Tristem, Wagner compose en 1865 l'opéra Tristan und Isolde, Joseph Bédier publie en 1900 l'oeuvre qui raconte toute l'histoire à partir des enfances de Tristan jusqu'à la mort des deux amants et aussi on retrouve des références à Tristan et Iseut dans des textes comme celui de J.J. Rousseau dans La Nouvelle Héloïse ou de Balzac dans Le Lys dans la vallée, en comptant seulement quelques uns.

On pourrait affirmer que Tristan et Iseut sont les amants les plus célèbres de la littérature. En effet, ces deux personnages incarnent non seulement le prototype de l'amour idéal, d'autan plus admirable qu'il est impossible et pourtant vécu, mais détiennent des qualités qui les rendent en même temps intangibles, comme les personnages irréels et humains, comme parvenant à être identifiés à des êtres passionnels et tout à fait croyables.

A l'époque médiévale, vers le XIe siècle, la conception de la « fin'amor » est apportée par les chants des troubadours, une conception qui exalte l'amour hors mariage et à l'abri de toute réalisation charnelle, en gardant ainsi un air de pureté et de véridicité du sentiment. Au milieu de ses tendances, l'amour de Tristan et Iseut se distingue par quelques traits distincts. Tristan, à la base, n'avait pas conquis Iseut pour lui, mais pour le roi Marc, son oncle. De plus, leur union est incompatible au lien conjugal. L'amour qu'ils ont l'un pour l'autre est comblé par la fidélité des amants, d'abord soutenue par le philtre, mais prolongée au delà la magie, quand ses effets se dissipent. Leur fin en fait preuve de cette indissoluble liaison qui les accompagne dans la mort, car l'amour tristanien est tragique et transcend la mort, en étant plus fort qu'elle.

Le roman de Tristan est, en plus d'être un roman d'amour, un roman de chevalerie. Le chevalier est, originellement, un guerrier qui possède des armes et un cheval qui se met au service d'un seigneur tout puissant auquel il prête hommage et dont il défend les intérêts en échange d'une protection. Béroul utilise le terme « soudoier » pour Tristan qui paraît bien au service de Marc. Mais on connaît les origines de Tristan : par sa filiation, il est noble, car il est le fils de Kanelangres. Sa vaillance incontestable vient souligner ses origines : par son premier acte, il venge son père et combat le Morholt et vainc le dragon en Irlande. Sa chevalerie est confirmée par ses exploits qui décrivent le scénario du combat du héros et du monstre : le Morholt, qui est désigné par sa cruauté que rien n'attendrit et le dragon d'Irlande qui crache du venin et du feu et sa langue qui empoisonne Tristan même après l'avoir coupée. Dans l'épisode de la forêt, il est décrit comme un excellent archer, ce qui lui permet de subsister lors de sa vie forestière avec Iseut. On a donc une image claire d'un Tristan d'un caractère héroïque, un personnage d'exception dans toutes les version qui content les « enfances » du héros.

Pourtant, la version de Béroul fait passer au deuxième plan cette dimension chevaleresque du personnage. Il y a sous cette apparence, sous ce masque, des traits de sauvagerie primitive. Il se prouve un homme des bois et un bon chasseur dans le fragment du forêt du Morois, où il retrouve avec Iseut un mode de vie antérieur à la chevalerie. En parlant de masque, il faut souligner que Tristan est un personnage que l'amour oblige à se masquer, Iseut seule pouvant le reconnaître sous ses travestissements.

A la place de la vaillance héroïque de Tristan, le texte de Béroul insiste sur l'image de l'amant qui évolue au long du texte. Contre la félonie des barons qui le haïssent, ses qualités héroïques se prouvent peu efficaces. Il est tout simplement l'amant gouverné par la passion qu'il éprouve envers sa bien-aimée. A cause de cette passion irraisonnée, à laquelle il ne peut guère résister, il trahit son souverain et est prit en flagrant délit d'adultère. En trahissant son roi, qui est aussi son oncle, il nie son statut de chevalier, devenant tout simplement l'amant. Pour Iseut, il mène une vie de hors la loi dans la forêt de Morois , où il utilise toutes ses qualités qu'il devrait mettre au service de son roi, mais au contraire, il les met au service de son amour-passion. Même si, à un certain point, il retrouve un peu de sa gloire, au jour de jugement d'Iseut, mais toujours pour défendre la vie et l'honneur de son amante.

Tristan se dépossède de lui-même et de son identité de chevalier, en devenant un hors la loi, sans cesse obligé à se cacher, dans la forêt, dans une cave, déchiré par la crainte d'être découvert et dénoncé. Il devient ainsi la figure emblématique de l'être déchu.

C'est donc la version considérée « commune », de Béroul, où Tristan c'est l'amant par excellence, prêt à tout pour la femme qu'il aime. On n'ignore point que c'est un homme courageux ou qu'il détient tous les traits d'un digne personnage héroïque, mais ce côté est obscurci par l'autre, du héros assez primitif dont le destin est emportée par l'amour, à la ressemblance d'un héros tragique dont les dieux décident la destinée qui le conduit inévitablement à la mort.

Il y a trois Iseut dans l'histoire. A part Iseut la Blonde, qui est le personnage principal, apparaissent deux autres : Iseut, la reine d'Irlande, la mère d'Iseut la Blonde et Iseut-aux-Blanches-Mains, qui deviendra la femme de Tristan, mais le mariage ne va pas être consommé.

La reine mère est peu individualisée et n'est pas nommée la plupart du temps. Son rôle est déterminant dans l'histoire, car elle sauve la vie de Tristan et c'est elle qui préparera le philtre coupable de la passion des deux amants. Elle est donc présentée en tant que sorcière ou magicienne, et incarne un double visage de la féminité, bienveillante et inquiétante à la fois.

Iseut-aux-Blanches-Mains est importante dans la mesure où elle porte le même nom que la femme qu'aime Tristan. Au début sa présentation semble montrer un personnage qui manque d'importance et de qualités, mais qui évolue jusqu'à devenir essentiel dans le déroulement de l'histoire. Aisément séduite par les qualités et les talents de Tristan, elle deviendra une femme que la haine poussera à détruire l'objet de son amour : en annonçant que la voile de la nef est noire, et donc qu'Iseut n'est pas venue guérir Tristan, elle condamne celui qu'elle aime. Elle représente à travers ce geste une autre forme du tragique de l'amour : sacrifier ce que l'on aime.

Iseut la Blonde, désignée maintes fois par l'expression récurrente « la belle Iseut », est la fille de la reine d'Irlande et occupe un rôle important dans le texte de Béroul. La littérature du moyen âge n'accordait jusqu'alors qu'une place dérisoire aux personnages féminins. De ce point de vue, Béroul est un novateur.

Elle est décrite au début par rapport à sa mère. Comme elle, Iseut la Blonde est une connaisseuse des potions, ce qui lui donne un aspect magique presque de sorcière, surtout quand Béroul la qualifie de « guivre », dont la morsure envenime l'âme de Tristan. Elle a cette dimension surnaturelle, qui mélange beauté, intelligence et quelque chose de diabolique, dans la mesure où elle arrive à déjouer les pièges des barons et donc de ne pas perdre Tristan.

Ce don qu'elle semble avoir lui permet de s'échapper plusieurs fois aux dangers qu'elle court, en devinant la présence du roi Marc afin de les espionner, en trouvant des ruses pour ne pas jurer faux devant son mari, en faisant un serment ambigu. Son talent à utiliser les mots est indiscutable. Elle domine les deux hommes : Tristan, son amant et le roi Marc, son mari. Il s'agit d'une emprise amoureuse, sexuelle, mais aussi psychologique, qualités ou traits qui désigneront plus tard l'image de la femme fatale dans la littérature. Cela n’empêche Iseut d'être une femme amoureuse, qui risquera tout au nom de cet amour. Sa conduite s'explique par sa soumission à la puissance de l'amour. Elle a une force indiscutable et une liberté qui dépasse les codes sociaux de l'époque. En tout, elle apparaît comme une héroïne romanesque soumise au tragique de la passion amoureuse.

Conclusion

La première observation que l'on est censé de faire est rapportée à l'amour vue comme passion. Comme l'on a déjà souligné dans un chapitre de ce travail, l'histoire de Tristan et Iseut est mise sous l'influence d'un facteur extérieur : une boisson magique qui déclenche des sentiments impossible à maîtriser. Leur amour a été décidé par le facteur du hasard, et ils sont devenus amants contre leur volonté et contre toute raison ou bon sens qui les aurait empêché à avoir une relation interdite et vue comme la pire des choses à cette époque-là.

Né dans ces circonstances, cet amour est, dès le début, mis sous le signe de la fatalité et condamne les amants à mort. En effet, on sait très bien que cette relation ne peut que mal finir et que toutes les actions mèneront à la perte des amants. Il s'agit de l'amour fatal en un premier temps, qui deviendra pourtant, une fois l'effet du philtre terminé, l'amour véritable et passionnel par excellence, amour qui poussera les amants à toutes les sacrifices imposés par leur situation.

A part la version de Thomas et celle de Béroul, Marie de France décrit dans son lai cette histoire d'amour en se concentrant sur un seul épisode, celui où Tristan, séparé de son amante, invente un stratagème pour la revoir à l'insu du roi. Voilà de quelle manière elle présente les faits :

,,Assez me plest et bien le voil

Del lai qu’hum nume Chevrefoil,

Que la vérité vus en cunt

Pur quei fu fez, coment e dunt

Plusur le m’unt cunté e dit

E jeo l’ai trouvé en escrit

De Tristan et de la reïne,

De lur amur kit ant fut fine,

Dunt il eurent meinte dolur,

Puis en mururent en un jur.”

L'on ne peut pas lire un seul Tristan et Iseut, car il n'y a pas un seul Tristan et Iseut, de même qu'il n'y a pas un seul Tristan ou une seule Iseut, mais des dizaines, voire plus. Tellement cette histoire qui date depuis mille ans a suscité l'imagination, a ému les âmes et poussé les écrivains, les poètes, les artistes de toutes sortes non seulement à lire et à relire la légende, mais à la recréer, à ajouter les parties manquantes, à changer les pensées ou les actions, les gestes des personnages.

Il y a plusieurs auteurs, de même qu'il y a plusieurs versions à travers les siècles, d'une histoire simple, mais complexe, qui fait le tour de l'histoire du monde et de la vie elle-même. Car, en dehors de cette histoire d'amour tragique, qui fait allusion à la tragédie grecque, par sa tonalité fataliste envers la destinée à laquelle l'homme ne peut pas échapper et qui mène toujours à la fin inévitable et incontournable qui est la mort, elle contient des vérités auxquelles l'homme songe depuis la naissance de l'humanité.

Deux amants, poussés à s'aimer alors que tout le leur interdisait, au début non-coupables, mais plus tard décidés d'assumer ce sentiment en dépit de tout et de tous, prêts à n'importe quel sacrifice pour vivre leur amour et en mourir représentent le sens de la littérature telle qu'elle existe, écrite ou orale, depuis la nuit des temps.

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