La dimension subjective [623292]

1
UNIVERSITATEA “ALEXA NDRU IOAN CUZA” IASI
FACULTATEA DE LITERE
La dimension subjective
dans l’enseignement du
nom en classe de FLE
LUCRARE DE GRADUL I

Coordonator:
Conferen țiar doctor : Diana GRADU

Candidat: [anonimizat] : Zăvoi Monica -Maria (c ăs. Ursu)

Iași – 2017

2
SOMMAIRE
Argumentation ………………………………………………………………………………….. 4

Chapitre 1 : Français langue étrangère (FLE )……………………………………………….. 6
1.1. Historique et motivation du concept ……………………………………………… .. 6
1.1.1. La diffusion de la langue française ……………………………………… . 8
1.1.2. L’expansion de la langue française ……………………………………… . 9
1.1.3. Le concept de « champ » du FLE ……………………………………… … 9
1.2. Les acteurs institutionnels ………………………………………………………… 10

Chapitre 2 : La didactique du FLE …………………………………………………………. 16
2.1. La DDL, un e science humaine à part entière ? ………………………………… 16
2.2. L’objet de la DDL ……………………………………………………………… 17
2.3. Quelques concepts organisateurs en didactique des langues ………………….. 19
2.3.1. Le concept de langue …………………………………………………….. 20
2.3.2. La langue comme obje t d’enseignement et d’apprentissage ……………. 20

Chapitre 3 : Les conditions de réussite dans l’appropriation d’une langue étrangère ….. 23
3.1. Les conditions de réussite pour l’objet d’enseignement (langue, culture) …….. 24
3.1.1. La « langue » comme objet d’enseigne ment …………………………… 24
3.1.2. La « culture » comme objet d’enseignement …………………………… 26
3.2. Les conditions de réussite concernant l’apprenant …………………………….. 27
3.3. Conditions de réussite externes ……………………………………………….. . 29
3.4. Le rôle et l’implication du maître …………………………………………… … 30

Chapitre 4 : Panorama des grands courants méthodologiques dans l’enseignement du
français langue étrangère …………………………………………………………………….. 34
4.1 La méthodologie traditionnelle …………………………………………………….. 34
4.2. La méthode naturelle ……………………………………………………………… . 36
4.3. La méthodologie directe ………………………………………………………….. 37

3
4.4. La méthodologie active …………………………………………………………… 38
4.5. La méthodologie Structuro -globale audio -visuelle (SGAV) …………………….. 39
4.6. L’approche communicative ………………………………………………………. 41
4.7. La méthodologie audio -orale …………………………………………………….. 43
4.8. L’approche ou la perspective actionnelle ………………………………………… 45

Chapitre 5 : L’enseignement de la grammaire …………………………………………….. 51
5.1. La compétence de communication ……………………………………………….. 52
5.2. La composante grammaticale …………………………………………………….. 53
5.3. La place de la grammaire en classe de FLE ……………………………………… 54
5.3.1. L’apprenant …………………………………………………………….. 54
5.3.2. Les objectifs à atteindre ………………………………………………… 55

Chapitre 6 : De la subjectivi té ………………………………………………………………. 59
6.1. La relation corps -esprit ……………………………………………………….. 59
6.2. Le sujet et la subjectivité ……………………………………………………… 60
6.3. Genèse de la subjectivité …………………………………………………………. 61
6.4. La dimension subjective dans le langage …… …………………………………… 65
6.5. La dimension subjective de la cohérence textuelle ………………………………. 69
6.6. La dimension subjective dans l’enseignement …………………………………… 72

Chapitre 7 : Applications …………………………………………………………………… 76
7.1. Questionnaires ……………………………………………………… …………… 76
7.1.1. Questionnaires appliqués aux enseignants de FLE ……………………. 76
7.1.2. Questionnaires appliqués aux élèves …………………………………… 80
7.2. Une brève analyse de quelques manuels de français …………………………….. 83

En guise de c onclusion s …………………………………… ………………………………… 95
Annexes ………………………………………………………………………………………. 97
Bibliographie sélect ive ……………………………………………………………………… 122

4
Argumentation

La question de l’enseignement des langues étrangères ne représente pas une nouveauté .
Aujourd’hui, les travaux sont essen tiellement centrés sur la question suivante : comment
apprendre mieux une langue étrangère ? Les progrès que manifeste l’informatique dans les
dernières années, influencent aussi l’enseignement des langues. Son succès est cependant
discutable étant donné q ue l’informatique exclue le facteur humain, ce qui demeure le plus grand
problème qu’elle n’a pas pu surmonter jusqu’à maintenant. Puisque l’informatique exclue le
facteur humain, l’enseignement des langues étrangères soutenu par des espaces virtuels const itue
un problème difficile à franchir, car l’homme est un être essentiellement subjectif qui transmet sa
subjectivité à sa parole et c’est ainsi que la subjectivité apparait dans le langage.
Les discussions sur la subjectivité remontent à l’Antiquité et se poursuivent jusqu’à nos
jours. Les premiers travaux sont effectués dans le domaine philosophique. Dans le domaine
linguistique, le problème de la subjectivité est mis au jour au XXe siècle par Emile Benveniste.
Selon lui, « le fondement de la subjectivi té est dans l’exercice de la langue »1 et elle se manifeste
par « la présence du sujet parlant dans son discours »2. Elle est donc un fait omniprésent, car elle
apparait à chaque emploi de la langue sous la forme de parole.
Étant un être subjectif et déf ini par l’ensemble de ses actes et de ses expériences,
l’homme s’exprime par l’intermédiaire de ses paroles, comportements, mimiques et gestes.
Pourtant, la subjectivité dans la langue n’est pas la simple étude de l’expression des sentiments et
des opinion s du sujet parlant, mais cette « étude de la subjectivité dans la langue s’étend à
l’ensemble du lexique dans la mesure où le choix des mots est susceptible de renvoyer à
l’énonciation et au rapport qu’il entretient avec ce qu’il dit »3.
Dans la lignée de Kerbrat -Orecchioni, nous pouvons dire que nous communiquons dans
la vie quotidienne avec des expressions subjectives et qu’elles sont plus fonctionnelles que celles

1Benveniste , E., Problèmes de linguistique générale 1, Paris, Gallimard, 2001, p. 260
2 Dubois, J., Giacomo, M., Gespin, L., Marcellesi, Ch., Marcel lesi, J. -B., et Mélvel, J. -P., Dictionnaire de
linguistique et des sciences du langage , Paris, Larousse , 1994, p. 452
3Ringoot R., & R obert -Demontrond, Ph., (sous la direction), L’Analyse du discours, Paris , Editions Apogée, 2004, p.
40

5
qui sont objectives4. Quelles sont les marques de la subjectivité? En est -il de même dan s
l’enseignemen t des langues étrangères? Ce sont les questions auxquelles nous allons essayer de
répondre , en analysant l’enseignement du nom en classe de FLE.
Dans cet ouvrage on voudrait voir s’il y a une subjectivité dans l’enseignement du nom,
dans le choix des méthodes utilisées pour enseigner le nombre, le genre des noms. Il y a des
profs qui utilisent le jeu, d’autres qui utilisent la découverte à partir des documents authentiques,
etc. On peut parler aussi d’une subjectivité dans la présentation du nom dans les différentes
méthodes de français. Quels sont les facteurs qui nous mènent à cette subjectivité dans
l’enseignement du nom ? Ce sont quelques questions auxquelles nous cherchons la réponse.

4 Kerbrat -Orecchioni , C., L’énonciation : de la subjectivité dans le langage, Paris, Armand Colin, 1980, p. 71

6
Chapitre 1: Français langue étrangère (F LE)

1.1. Historique et motivation du concept

Il y a une expression qui fait , aujourd’hui , partie du vocab ulaire universitaire français, mais
qui garde encore du mystère ; il s’agit de l’expression « français langue étrangère ». C’est à peu
près clair ce que signifie « français » et « langue étrangère », mais l’association des termes
devient un fait curieux , du point de vue académique. En effet, si le français est de façon évidente
une langue étrangère, c’est pour ceux qui se l’approprient autrement que de façon native. Mais,
ceux -là ont conscience d’apprendre le français, et non le français langue étrangère, ainsi que
ceux qui l’enseignent, s’ils sont francophones natifs ; ce n’est pas une langue étrangère pour eux,
mais leur langue à des étrangers, et, s’ils sont des étrangers, i ls se trouvent dans la même
situation langagière que leurs élèves . On voit par là que le français ne peut être le support
objectif de la classification d’étrangère, et qu’il ne peut s’agir que du type de relation que ceux
qui l’app rennent ou l’enseignent entretiennent avec elle5.
On peut dire que tous les étrangers peuvent être de potentiels apprenants de français, mais en
réalité, certains le sont plus que d’autres. D’ici, on peut avoir deux grandes catégories :
– Des jeunes scola ires dans des pays qui offrent le français comme choix disciplinaire ;
des adultes volontaires qui éprouvent un désir ou des besoins linguistique ou culturels
particuliers.
– Ceux qui vivent dans des pays où le français est aujourd’hui présent pour des raiso ns
historiques et politiques.6

Traditionnellement, l’étranger est celui qui ne partage pas le même idiome, et cela peut
aller, par degrés plus ou moins sensible s, du patois du village voisin à la langue la plus exotique.
De ce point de vue, le mythe de l’ universalité de la langue française et des valeurs qu’elle était
seule censée véhiculer, a longtemps entretenu la fiction que le français n’était étranger à
personne.

5 Cuq J. -P., & Gruca, I., Cours de didacti que du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 13
6 Ibid., p. 14

7
Et pourtant, les travaux récents des historiens du FLE ont montré comment, dans les pays
d’Europe en particulier, le français a été enseigné comme une langue étrangère.
Mais de l’afin d’obtenir une cohérence disciplinaire, il faut que les chercheurs aient
ressenti la nécessité, à la fin du XXe siècle de se regrouper en une Société savante in ternationale
pour établir son Histoire. Valérie Spaëth7 propose ainsi « de travailler sur quatre plans qu’il
s’agit sans cesse d’articuler : les plans politique, théorique, méthodologique et pédagogique. »
Ces cadres généraux sont eux -mêmes théoriquement s tructurés8 :
– Le cadre politique de la diffusion du français, qui est le cadre le plus général, est
structuré par six types de relations : les relations de conquête, les relations de
dépendance politique avec la France, la relation de dépendance légale et
institutionnelle, la relation de dépendance culturelle, la relation de dépendance
sociale, la relation neutralisée politiquement par l’interdépendance culturelle, relation
non-chargée politiquement et culturellement ;
– Le cadre institutionnel, qui « donne a ccès aux variations de normes linguistiques
diffusées et, par conséquent, offre une véritable articulation avec les aspects
méthodologiques et pédagogiques de la recherche » ;
– Le cadre théorique et méthodologique : il concerne l’étude des rapports entre
l’enseignement du français et l’enseignement des autres langues étrangères, les
différents usages des méthodologies d’enseignement des langues ;
– Le cadre pédagogique : il concerne l’étude des applications effectives des
prescriptions officielles (par exemple dans les manuels) en fonction des réalités
économiques ou sociales.
Les différentes études qui relèvent de ces cadres théoriques montrent comment, dans les
mentalités des populations concernées, mais aussi dans celles des chercheurs et des enseignants,
s’est peu à peu précisée la relation même entre étranger et langue française . C’est l’étude des
différentes facettes de cette relation qui constitue l’objet même de la discipline.

7 Spaëth, V., Généalogie du français langue étrangère , Documents nș21, 1998, p. 53 -61

8 Cuq J. -P., & Gruca, I., Cours de didactique du fr ançais langue étrangère et seconde , Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 16

8
1.1.1. La diffusion de la langue française

La diffusion d’une langue impliq ue le fait de mettre en œuvre rapidement ce qu’on
pourrait appeler une logistique linguistique. Plusieurs exemples d’échec ou d’échec relatif de
diffusion linguistique en témoignent. C’est le cas par exemple de ce qui s’est passé dans certains
pays africai ns, comme la Guinée, qui ont légitimement tenté, après l’indépendance, de diffuser
certaines de leurs langues nationales par le biais de l’école : le manque d’enseignants qualifiés,
de manuels scolaires, d’ouvrages de référence, a non seulement voué ces te ntatives à l’échec
mais a gravement retardé la prise de conscience de leur utilité par les populations concernées. 9
Le français a bénéficié de circonstances plus favorables. Il a eu pour lui non seulement la
durée de diffusion, mais il a même été le princ ipal agent de la scolarisation de masse, dès qu’elle
a été initiée à la fin du XIXe siècle.
Le français a donc pu développer, au fil des années, une logistique de diffusion qui se
manifeste sur plusieurs plans.
Le plus manifeste est le plan humain et ins titutionnel, celui des enseignants, des
diffuseurs de la langue, et des institutions qu’ils font vivre et qui, en revanche, structurent leur
activité.
Mais le moyen le plus connu est sans doute celui qu’on qualifiera dans un premier temps
de méthodologiqu e. Le français, en tant que langue étrangère, s’est en effet peu à peu forgé un
arsenal de moyens destinés à faciliter son appropriation par des non natifs10.

9 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 17
10 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 18

9
1.1.2. L’expansion de la langue française

Il est fondamental que les enseignants de FLE aient en tête au moins les grandes lignes
des étapes de la diffusion historique de la langue française. En effet, le français n’est pas sorti
tout armé de la tête de son père, le latin parlé. Pendant son expansion, il a évolué, il s’est
transformé et enric hi au contact d’autres langues et par ses créations propres. Cette évolution se
poursuit aujourd’hui encore, en France comme dans les autres pays francophones, et fait du
français un objet éminemment soumis à des variations de nature diverses.11
En tout ca s, ce sont les circonstances de cette immense aventure historique et
géographique, mais aussi l’appétence culturelle que beaucoup d’autres éprouvent encore tout
autour du monde pour elle, qui assurent au français sa place actuelle, à la fois enviable et fr agile,
dans le concert des langues du monde, et qui lui ont assuré un statut international encore
incontestable, mais toujours remis en cause. C’est cette place particulière, fruit d’une diffusion
historique et aujourd’hui politiquement entretenue, qui jus tifie le triple statut didactique de
langue maternelle, de langue seconde et de langue étrangère qui la constitue en un objet
d’enseignement et d’apprentissage particulier. 12

1.1.3. Le concept de « champ » du français langue étrangère

Le français langue étrangère peut être décrite en synchronie sous de nombreux aspects
qui tous s’interpénètrent. En tant qu’objet de réflexion didactique, sans laquelle l’action
linguistique et éducative ne saurait être qu’opportuniste, il ne peut toutefois être appréhendé
correctement sans disposer d’un outillage conceptuel adéquat. Toutes ces notions sont incluses
dans une plus gra nde notion, celle de « champ ».13
A l’intérieur du champ s’établissent des rapports de solidarité, mais aussi de domination.
Un champ est surtout un être complexe, lui -même composé de sous -champs.
Le Français langue étrangère comme champ est lui -même composé de champs (par
exemple, le champ universitaire spécialisé, le champ éditorial spécialisé, etc.) Chacun d’eux est

11 Ibid., p.19
12 Ibid., p. 22
13 Ibid., p. 22

10
structuré par des principes o rganisateurs propres, et leur appartenance au champ global fait qu’ils
se font écho entre eux. Le champ du Français langue étrangère, comme tous les champs, est
constitué par un ensemble de positions en relation constante les unes avec les autres. La
configuration du champ évolue, donc, sans cesse, produite par le jeu de positions qu’elle
contribue à produire. Le champ du français langue étrangère comprend :
– Les acteurs personnalisables – individuellement et collectivement – : apprenants,
enseignants, che rcheurs -formateurs, éditeurs, administrateurs ;
– Les institutions : établissements d’enseignement, de formation -recherche, institutions
de diffusion (revues), d’édition, institutions techno -politiques (ministères) ;
– Les objets et les produits ;
– Le propos (c e à propos de quoi) : la langue et la culture française.
Le champ du FLE est un « jeu » dont il faut repérer les joueurs, les règles et les enjeux,
en sachant qu’à chaque instant se jouent simultanément de multiples parties qui sont singulières
(chacune jo uant sa propre partie selon ses propres règles et ses propres enjeux) mais qui
obéissent en même temps à des principes communs14.
Le champ du FLE est un système, c'est -à-dire un ensemble structuré d’éléments et de
relations. L’objet de la did actique est, d ’une part, de décrire le système et d’autre part le
développer et contribuer à son enrichissement.
L’un des paramètres qui conditionnent l’évolution du champ est la politique linguistique.
Elle est définie par les choix opérés par les autorités pour régle r les rapports entre une société et
les langues qui la définissent. Une politique linguistique peut être nationale, internationale ou
régionale. Les paramètres historiques, politiques, économiques et idéologiques sont très
importants pour l’établissement d es politiques linguistiques.

1.2. Les acteurs institutionnels

Les acteurs institutionnels sont les entités collectives au sein desquelles se meuvent les
acteurs individuels, particulièrement enseignants et apprenants. D’après la définition de

14 Porcher L., Champ de signe, Paris , Didier, 1987. Les fragments cités sont extrait s du premier chapitre.

11
Louis Por cher, on constate que certaines des ins titutions énumérées ci -dessous sont internes
au champ proprement dit du FLE, et que d’autres, au contraire, lui sont a priori externes mais
contribuent aussi à le définir.15
On va seulement énumérer les plus important es institutions qui, par leur politique ont le
pouvoir d’aider le FLE à gagner plus de terrain.
A. Les ministères français et leurs opérateurs :
A.1. Le ministère des affaires étrangères (MAE)
A.2. L’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger (AEFE)
A.3. Le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche
(MEN)
A.4. EDUFRANCE
Le MAE et le MEN ont créé conjointement le 1er novembre 1998 une agence
destinée à proposer une offre française dans le domaine de la formatio n et des échanges
scientifiques. Elle s’adresse particulièrement aux institutions et aux étudiants étrangers et
propose conseil, expertise, transfert de savoir -faire et de technologie.
A.5. Le ministère de la culture
A.6. La Délégation générale à la langu e française et aux langues de France (DGLELF)
Créée le 2 juin 1989, la DGLF a pour mission la coordination des actions des
administrations et des organismes qui, quel que soit leur domaine d’activité, œuvrent à la
diffusion et à l’usage du français. le 16 octobre 2001 ses missions se sont élargies aux
langues de France.
A.7. La Radio France Internationale (RFI)

B. Les associations professionnelles :
B.1. La Fédération internationale des professeurs de français (FIPF)
La FIPF a été fondée en 1969 à l’in itiative de 26 associations nationales de
professeurs de français. Elle compte aujourd’hui environ 70 000 membres et elle est
devenue une OING.

15 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 25

12
Le FIPF publie la revue Dialogues et cultures , les actes de ses colloques
internationaux et la responsabilité d u Français dans le monde. Tous les quatre ans, elle se
réunit en congrès.
B.2. L’Association des centres universitaires d’études françaises pour l’étranger
(ADCUEFE)
Elle regroupe 25 universités françaises qui proposent des programmes de français
langue étrangère pour étudiants et enseignants étrangers. Un des rôles de cette association
est de veiller à l’harmonisation des diplômes universitaires préparés par les différents
centres universitaires qui s’engagent à en reconnaître la validité réciproque.
Les centres appartenant à l’ADUEFE préparent aussi aujourd’hui pour le DELF et
le DALF.
B.3. SOUFFLE
B.4. L’Association des attachés de coopération éducative, des attachés de coopération
pour le français et des attachés de coopération (ADACEF) et l’Associ ation des agents
détachés auprès de la Direction générale du MAE (ACAD -MAE)
L’objectif de cette association est de favoriser des échanges professionnels entre
ses membres, et d’organiser leur réflexion sur la politique linguistique de la France.
B.5. L’A ssociation de didactique du français langue étrangère (ASDIFLE)
Elle a pour objet principal de rassembler les didacticiens du FLE et de stimuler la
recherche en didactique. Elle publie un annuaire des chercheurs qui lui sont affiliés, une
Lettre régulièr e et des Cahiers où l’on trouve les actes des rencontres bisannuelles
organisées par l’association.
B.6. La Société internationale pour l’histoire du français langue étrangère et seconde
(SIHFLES)

C. Les institutions d’enseignement, de formation et de re cherche :
C.1. L’Alliance française
C.2. La Mission laïque française
Contrairement à l’Alliance française, qui n’assure pas en principe de scolarisation,
la Mission laïque a construit des écoles, des lycées, des institutions. Elle est présente

13
aujourd’ hui dans 40 pays où elle gère une dizaine de lycées, une quinzaine d’écoles et
plus de cinquante écoles d’entreprises, soit environ 20 000 élèves.
C3. L’Alliance israélite universitaire
C.4. L’œuvre des écoles d’Orient
C.5. Le Centre international d’é tudes pédagogiques (CIEP)
Ses activités sont l’expertise et la coopération éducative, les échanges scolaires,
l’enseignement du FLE et du français langue seconde, les prestations de ressources
documentaires grâce à une très intéressante bibliothèque.
C.6. Le BELC (Bureau pour l’enseignement de la langue et de la civilisation française à
l’étranger)
Aujourd’hui le BELC a perdu beaucoup de terrain, dès l’apparition de CIEP, il
n’est plus qu’une partie du département de FLE, mais ses objectifs originaux ét aient
multiples :
– Etude des conditions de l’enseignement du français en milieu scolaire à l’étranger ;
– Recherche linguistique comparative (français/langue maternelle des apprenants) ;
– Elaboration de matériel didactique ;
– Perfectionnement des professeurs ;
– Liaison entre les centres de recherche et entre les chercheurs et les utilisateurs.
C.7. Le Crédif
C’est avec le BELC une des institutions phares des années 60 à 90. Ses objectifs
étaient, au début, l’exploration du français moderne par des enquêtes, l’ élaboration et
l’expérimentation de méthodes audiovisuelles, la formation de personnels spécialisés
dans ces techniques. Peu à peu ses activités étaient devenues tout à fait comparables à
celles du BELC avec lequel il partageait la notoriété la plus grande dans les institutions
du FLE. Comme le BELC, il a subi la montée en puissance de recherche universitaire en
FLE et a dû abandonner ses stages longs pour ne conserver que les stages d’été.
Le Crédif a élaboré des méthodes parmi lesquelles Voix et Images de France,
Bonjour Line et Archipel.
C.8. Les universités

14
D. Le monde éditorial
Les éditeurs sont aussi des acteurs importants du champ du FLE. C’est eux qui
décident des publications par la tenue de collections didactiques ou méthodologiques.
Leurs dé cisions éditoriales influent parfois beaucoup sur la forme définitive des
méthodes. On donnera ici quelques des plus importants noms d’éditeurs français.
D.1. Clé International
D.2. Didier -Hatier
D.3. Hachette
D.4. Les Presses Universitaires de Grenoble ( PUG)
D.5. Le Français dans le Monde16

E. La Francophonie
Les orientations générales de la politique de la Francophonie sont définies tous les
deux ans par le Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement qui ont le français en
partage. La Francophonie est é galement dotée d’un certain nombre d’organismes
ministériels et d’organismes opérateurs dont on décrira succinctement quelques -uns des
plus importants pour la langue proprement -dite.
E.1. La Conférence des ministères de l’Education des pays ayant le frança is en partage
(CONFEMEN)
E.2. L’Agence intergouvernementale de la Francophonie (AIF), ex Agence de
coopération culturelle et technique (ACT)
E.3. L’Agence universitaire de la Francophonie (AUF)
E.4. L’université Senghor
E.5. TV517

On a voulu seulement fa ire un petit inventaire des institutions qui ont une grande
contribution à rependre le français dans le monde.

16 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 25 -39
17 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 39 -41

15
***
Le concept de FLE est vaste. Il inclut le français enseigné en France et dans nombre de
pays étrangers dans des institutions officielles fra nçaises (comme les centres culturels dépendant
des ambassades de France) ou locales (comme les établissements primaires, secondaires et
supérieurs où son étude – facultative ou obligatoire – est inscrite au programme, en tant que
première, deuxième ou troi sième langue vivante).
Distinct du FLM18 et du FLS19, le FLE a acquis, graduellement avec les années, une
existence autonome rendue obligatoire par la riche palette de ses statuts, des situations
d’apprentissage et des publics d’apprenants.
En conséquence, l ’enseignement du FLE a développé des stratégies et des choix
différents de ceux du FLM, relatifs :
– à la sélection de notions et d’actes de parole ciblés sur les besoins spécifiques des
apprenants ;
– à la priorité (et non à la primauté) donnée à l’oral et à l’étude de la phonétique;
– à la mise en scène de situations de communication simulées ;
– à la prise en compte des phénomènes d’interférences entre français et langue source ;
– au respect des spécificités culturelles locales ;
– à l’enseignement des comportement s des usagers de la langue cible ;
– à la conception d’un enseignement dans une perspective plurilingue et pluriculturelle,
etc.
Le FLE est un monde à part entière avec ses institutions, ses enseignants et ses
associations, ses élèves, ses méthodes, ses manu els et ses revues.

18 Français Langue Maternelle
19 Français Langue Seconde

16
Chapitre 2 : La didactique du FLE

Une autre façon d’aborder le problème de la didactique aujourd’hui est de se demander
quelle est la place de la didactique des langues dans le champ des sciences. En effet, l’accord est
loin d’êtr e fait entre les chercheurs sur l’appartenance épistémologique de la didactique des
langues, et par conséquent du FLE : la didactique du FLE, comme celle des autres langues
étrangères, fait -elle partie des sciences de l’éducation ou des sciences du langage ?
Ce qui est en tout cas admis par tous aujourd’hui, c’est que la DDL20 ne saurait se réduire à
un nouvel étiquetage de ce qu’ on appelait jadis la pédagogie.21

 La DDL, une science humaine à part entière ?

Quand on parle de DDL, on accepte implicitement l’existence de didactiques portant sur
d’autres objets que les langues et aussi l’existence d’une didactique générale. La DDL doit
accepter d’être une branche d’une discipline plus large, qui reste encore largement à construire,
ou bien de partager une par tie de son nom avec une ou des disciplines voisines.
Pour Francine Cicurel22 deux éléments majeurs établissent la différence entre la DDL et les
autres didactiques :
– La DDL n’a pas de discipline objet. Par rapport aux autres disciplines, l’objet de la
DDL n’est pas l’appropriation par l’apprenant des savoirs construits par des
disciplines comme la linguistique ou, plus traditionnellement, les études littéraires ;
– Contrairement aux autres didactiques, qui ont la quasi exclusivité des modes
d’appropriation d e leur discipline objet, la DDL est en concurrence avec un mode
d’appropriation naturel, l’acquisition.
En effet, la didactique des langues ne peut se contenter de construire un appareillage
conceptuel : elle doit s’interroger sur les limites de son interv ention, c’est -à-dire sur ses objectifs

20 La Didactique Des Langues
21 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Univ ersitaires de Grenoble, 2002, p. 48
22 Cicurel, F., « Didactique des langues et linguisti que: propos sur une circularité » in Études de Linguistique
Appliquée, n°72, 1988, p. 15 -23

17
et sur la manière dont elle conceptualise la dimension humaine de son champ. La légitimité de
l’enseignement d’une langue à des étrangers n’est pas évidente a priori : où sont les limites entre
une aide à des décision s librement choisies et un expansionnisme voire un impérialisme
culturel ? Sans doute, les réponses dépendent largement de la prise en compte des différentes
situations d’enseignement : en contexte scolaire ou d’adultes, en FLE et en FLS, etc. La
didactiqu e doit s’interroger aussi sur les moyens mis à sa disposition ou qu’elle peut générer,
bref, sur ses rapports avec l’argent.
Quelle que soit la réponse, l’enseignant doit savoir ce qu’il fait. Or, pour Louis Porcher,
l’agent social pondère ce qu’il est con duit à faire et ce qu’il aimerait faire. Il s’inscrit ainsi dans
la lignée du sociologue allemand Max Weber, selon lequel la responsabilité individuelle résulte
d’un équilibre entre deux éthiques. Une éthique dite de la conviction, qui est définie par l’id entité
morale de l’individu (en termes de juste, de bien, de bon…) et une éthique dite de la
responsabilité qui priv ilégie la réalité et le devoir.23

 L’objet de la DDL

La DDL a pour objet l’étude des conditions et des modalités d’enseignement et
d’appropr iation des langues en milieu non naturel. En son sein, la didactique du FLE a pour objet
d’étude des conditions et modalités d’enseignement et d’appropriation du français en milieu non
naturel.
L’évocation d’un milieu non naturel limite les investigations de la DDL à l’enseignement,
conçu comme le guidage d’un ou plusieurs apprenant(s) dans son (leur) acte d’appropriation
linguistico -culturel. Les études qui concernent l’acquisition des langues en milieu naturel ne font
pas partie de la DDL, mais de la (ps ycho) linguistique. Toutefois, dans la mesure où la frontière
entre les situations dites en milieu naturel et les aspects de la recherche en acquisition des
langues intéressent fortement le didacticien. L’acquisition des langues est donc un secteur de
recherche qui est aujourd’hui exactement à la charnière entre la didactique et la linguistique.24

23 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 51
24 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français lan gue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 52

18
Il faut concevoir une DDL unifiée ; dans ce cas seulement la didactique des langues sera une
science humaine à part entière. De telle façon la DDLES25 pourrait s’o rganiser à plusieurs
niveaux :
 Le niveau métadidactique
C’est le niveau descriptif et spéculatif de la discipline. C’est à ce et impératifs de
l’enseignement/apprentissage des langues. En tant que sciences humaine, l’histoire de
l’enseignement, la sociolo gie, l’économie, les sciences politiques, la philosophie, la psychologie,
peuvent fournir un outillage utile à la description et à l’interprétation des objets didactiques : leur
rôle est de dire pourquoi et comment les objets didactiques ont atteint le poi nt où ils se trouvent
au moment de leur appréhension en tant qu’objets didactiques. La didactisation de concepts
extérieurs et la production de concepts propres ont pour objet de produire un système conceptuel
cohérent, qui détermine la méthodologie de l’e nseignement.
 Le niveau méthodologique
La méthodologie de l’enseignement a un objet double :
– D’une part, elle a pour objet le paramétrage théorique optimum de l’action
d’enseigner, et, en ce sens le niveau méthodologique est la partie praxéologique
(Mart inez P.) de la didactique ;26
– D’autre part, la méthodologie de l’enseignement a pour objet de produire une série
organisée de principes d’action. En ce sens, le niveau méthodologique est la partie
perspective de la didactique.

 Le niveau technique
– La méth odologie dégage une praxis, c'est-à-dire un ensemble de techniques (de
pratiques) à mettre en œuvre dans des situations préalablement objectivées en vue
d’obtenir un certain résultat.
– C’est à ce niveau qu’elle utilise les technologies disponibles.27

25 La Didactique des Langues Etrangères et Secondes
26 Martinez, P., « De la didactique comme praxéologie, ou quelques bonnes raisons de revenir à une science du
langage des l angues naturelles pour enseigner les langues secondes et étrangères », Actes du deuxième colloque de
la COFDELA, nov. USHS Strasbourg, 1998

19
Il semb le que la conception de la didactique qui prévalait , il y a une dizaine d’années,
c’est -à-dire un ensemble de discours, est une attitude fortement marquée par le
poststructuralisme de son époque. Cette conception de rupture a permis d’assurer les fondement s
de la discipline, mais elle court le risque de ne produire aujourd’hui qu’un discours autotélique.
En effet l’aspect praxéologique de la discipline, c’est -à-dire l’enracinement de l’objet du
discours dans le monde, ou encore les liens qu’entretient le di scours avec les pratiques non –
discursives dont le discours est l’objet, a pu paraître passer au second plan. Il en est de même du
niveau technique, qui, à l’exception peut -être un peu trop intellectualiste de la didactique lui est
aussi souvent reprochée p ar beaucoup d’enseignants : tout autant que de retourner à un
pédagogisme limité par nature, ce serait un risque majeur de ne développer qu’un discours
ressenti comme de plus en plus éloigné de la réalité de la classe.28

 Quelques concepts organisateurs en didactique des langues

Comme toutes les disciplines, la DDLES dispose de concepts propres et de concepts
transférés. Si la conceptualisation propre est une activité scientifique non soumise à suspicion, el
n’en va pas toujours de même avec le transfert. En effet, le transfert, ou re -conceptualisation,
porte sur des méthodologies ou sur des résultats de recherches effectuées dans d’autres
disciplines. Il est légitime parce que certains concepts intéressent plusieurs disciplines, mais
aussi dans la mesure où il permet une économie de temps et de moyens. Mais il ne faut jamais
oublier qu’il est fondé sur une intuition analogique. Pour quitter ce simple statut métaphorique, le
concept emprunté doit impérativement être reformulé en tenant compte29 :
a) Des condit ions de sa production dans son domaine de validité d’origine (lieu, date,
idéologie…) ;
b) Des conditions prévalant dans son nouveau domaine de validité, dans lequel il va être
soumis à l’épreuve d’efficience ;

27 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Unive rsitair es de Grenoble, 2002, p.72-73
28 Ibid. , p.73
29 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du français langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p .77

20
c) De sa compatibilité avec les autres concepts déj à actifs dans le domaine.

 Le concept de langue

Pour la linguistique elle -même, le concept de langue peut être conçu de façon plus ou
moins retreinte : il peut se limiter à l’étude du système abstrait ou englober, de façon plus large
la mise en acte de ce système et par conséquent les locuteurs, que ce soit à titre individuel ou
collectif.
Il n’est pas peut -être superflu de rappeler encore que ce qui distingue la didactique des
langues des autres didactiques c’est son objet linguistique : les connaissanc es établies par les
différentes branches de la linguistique sont donc indispensables à la didactique des langues. C’est
cette évidence qui a de fait conduit, dans un premier temps, à inclure la DDL au sein de la
linguistique. Il existe deux paramètres qui fondent le concept de langue en didactique et qui ne
sont pas pris en compte en tant que tels par la linguistique. Le premier est que la didactique fait
de la langue un objet d’enseignement et d’apprentissage. Le second, qui élargit considérablement
l’obje t lui-même, est l’aspect culturel de la langue. En effet on ne peut pas séparer l’idiome de la
culture.
De point de vue didactique, nous définirons la langue comme un objet d’enseignement et
d’apprentissage composé d’un idiome et d’une culture.30

 La lang ue comme objet d’ enseignement et d’apprentissage

L’objet de la DDLES est l’étude des conditions et modalités d’enseignement et
d’appropriation d’une langue étrangère en milieu non naturel. En d’autres termes, elle est l’objet
du contrat qui lie pour un te mps donné et en un lieu donné une partie guidante et une partie
guidée en vue d’un transfert de compétences idiomatico -culturelles. La langue étrangère qu’il
s’agit pour l’apprenant de s’approprier sous le guidage de l’enseignant est le résultat de la
procédure d’objectivation didactique d’un idiome et d’une culture abstraits de leur

30 Ibid., p. 79

21
environnement naturel. Cet objet didactique n’est pas égal à une quelconque des descriptions de
son système (objet linguistique) ni à une quelconque des descriptions de son usa ge (objet
sociolinguistique) ; il est le résultat d’une convergence provisoire et évolutive des représentations
systématisées d’éléments idiomatiques et culturels de la part de la partie guidante (institutions,
enseignant) et de la partie guidée (apprenant ). La légitimité de la partie guidante est fondée sur la
plus ou moins grande conformité de ses représentations idiomatico -culturelles avec des savoirs
reconnus à un moment donné comme valides par la communauté scientifique et sur des savoir –
faire qu’il s’ agit d’aider la partie guidée à s’approprier. La marque d’une appropriation réussie
est la réduction chez l’apprenant de cette dissymétrie de représentations des savoirs et la mise en
pratique effective des savoir -faire.
Du point de vue de la partie guidan te, la langue se matérialise par un syllabus , c’est -à-
dire par l’établissement d’une série d’objectifs et de contenus idiomatico -culturels.
L’établissement d’un syllabus se fait selon la procédure de compression qui consiste à prendre en
compte le fait que l’acte didactique s’effectue sous des contraintes de temps, de lieu et de
matériaux dont la caractéristique principale est d’être réduits par rapport aux éléments non
didactiques dont ils sont abstraits.
Du point de vue de l’apprenant, la langue se matéri alise par un système évolutif de
savoirs et de savoir -faire qu’on appelle interlangue. L’interlangue de l’apprenant se manifeste
par la procédure d’expansion, qui est la procédure qui permet de faire des savoirs ou des activités
didactiques des savoir -faire non didactiques.31
Du point de vue pédagogique, les concepteurs de méthodes et les enseignants de langues
savent d’expérience que, pour tirer le meilleur profit certains supports sont préférables à d’autres
dans telle ou telle circonstance d’enseignement et d’apprentissage. Selon Maddalena De Carlo32,
trois critères au moins peuvent guider dans le choix du matériel de classe :
– La pertinence, pour vérifier s’il contient au moins un élément connu par l’élève, s’il
peut lui suggérer quelque chose d’ « autre » ou éveiller une connaissance par
contiguïté ;

31 Cuq J. -P. & Gruca I., Cours de didactique du frança is langue étrangère et seconde, Grenoble, Presses
Universitaires de Grenoble, 2002, p. 80 -81
32 De Carlo, M., « L´Interculturel » in Didactique des langues étrangères , Paris, Clé International, 1998, p. 57

22
– La performativité, pour délimiter les limites de temps imparti, prévoir le degré de
participation et la qualité de la réception ;
L’exploitabilité, afin d’établir jusqu’où aller dans la proposition des activit és, en tenant
compte de la variabilité des exercices, de l’utilité à l’intérieur du programme, de la motivation
des élèves.
De façon plus générale on peut dire qu’un support pédagogiquement performant est un
support qui, dans une situation d’enseignement -apprentissage donnée, aide l’apprenant à
structurer les références culturelles qui permettent à ses connaissances idiomatiques de devenir
de véritables savoir -faire linguistiques.
***
On constate que toutes les disciplines sont étroitement liées entre ell es : la langue est liée
à la didactique ; la didactique à la linguistique. Donc, on ne peut pas étudiées une langue, plus
exactement l’approfondir, sans avoir quelques notions de base de linguistique ; tout comme
l’enseignant ne peut pas enseigner une lang ue sans avoir des notions de didactique des langues.
De la même façon, il est impossible de séparer une langue de sa culture et civilisation, parce que
celles -ci lui donnent sa propre identité.

23
Chapitre 3 : Les conditions de réussite dans l’ap propriation d’une
langue étrangère

La « Langue Vivante Etrangère » est une discipline scolaire très spécifique: elle ne saurait se
réduire à un ensemble de savoirs à transmettre aux élèves, car elle implique que ces derniers
parviennent à mobiliser les sa voirs (en l'occurrence : sur et dans la langue -objet) au service des
quatre savoir -faire de la communication (dans la « langue -en-acte " finalisée et pragmatiquement
fonctionnelle), sous peine d'inefficacité dans l'apprentissage; c'est ce passage à la
«procéduralisation» 33 qui est problématique. De plus, le Sujet apprenant n'est jamais
complètement extérieur à la langue; de ce point de vue, les rapports Sujet apprenant -objet
d'apprentissage diffèrent de ce qu'ils sont lorsqu'il s'agit d'une matière scolaire où le corporel,
l'affectivité, la pensée ou l'opinion individuelle sont moins directement impliquées: la langue,
prolongement sémiotique du Sujet, expose celui -ci et engage sa personnalité propre comme ses
rapports avec autrui; autant de difficultés prévi sibles pour le traitement pédagogique de ce
vulnérable et instable objet d'enseignement. On ne saurait pourtant prendre prétexte de cette
spécificité de la LVE34 pour lui dénier le statut de discipline scolaire à part entière, aussi
formatrice que d'autres disciplines plus traditionnellement reconnues comme telles: il ne serait en
effet pas tolérable de la réduire à n'être qu'un simple outil, à ne comporter qu'une dimension
strictement codique et instrumentale (univoque, mécanique, exclusivement dénotative), utilitaire,
ce qui reviendrait ipso facto à la mutiler et la dénaturer radicalement.35
Compte tenu de toutes ces particularités, hors d'une immersion dans le pays étranger, il est
nécessaire de réunir un certain nombre de conditions pour que l'appropriatio n de la langue,
culturellement contextualisée, s'effectue efficacement. Ces conditions ont trait à trois domaines :
• l'objet d'enseignement (qui doit relever d'une conception définie) ;
• l'apprenant et ses processus d'apprentissage (auxquels on doit port er spécifiquement
attention) ;

33 Bange, P., L'Usage de la règle dans l'enseignemen t et l'apprentissage de langue étrangère , Actes du colloque
FOCAL , Université Paris VIII, 1999
34 Langue Vivante Etrangère
35 Bailly, D., Université Paris VII -Denis Diderot, « Les conditions de réussite dans l´appropriation de la langue
étrangère en classe » in Les langues modernes , no.3 , 1999, p. 8

24
• les rôles de l'enseignant (dont on doit caractériser la marge de manœuvre).
Aucune de ces « centrations » n'est exclusive des deux autres, aucune ne peut être
minorée sans dommage global. C'est donc de ces trois pôles de so lidité indispensables qu’on se
propose de traiter successivement, soulignant au passage que, paradoxalement, l'évolution
officielle actuelle du système scolaire semble nous éloigner de plus en plus de leur prise en
compte équilibrée.

3.1. Les conditions de ré ussite pour l’objet d’enseignement (langue, culture)

3.1.1. La « langue » comme objet d’enseignement

L'objectif pédagogique étant d'obtenir de l'apprenant une maîtrise réelle, en compréhension
comme en production, de la langue de base, les contenus à enseigner doivent être d'une part
substantiels, d'autre part, constitués de composantes clairement différenciées (morphosyntaxe,
lexique, éléments phonétiques -phonologiques, tournures communicatives…), même si elles sont
étroitement liées. Ces contenus doivent en outre être soigneusement choisis, spécifiés, et
précisément gradués en complexité selon les niveaux, classe par classe. Une telle gradation
préfigure d'ailleurs souplement la progression, elle -même flexible et raisonnable, qui devra en
être élaborée lors d e la présentation des « échantillons· de langue aux élèves, à travers les
supports.36
L'objet langue à enseigner doit ainsi être pensé dans sa nature propre, organisé, « construit »
trié et hiérarchisé selon certaines priorités pédagogiques, par le truchem ent d'une conception
didactique du guidage enseignant, ayant pour but d'en faciliter l'appropriation cognitive par les
élèves. Dans cette visée, l'objet -langue à enseigner doit être assez tôt mis en relation, « non –
applicationniste » évidemment, avec le do maine scientifique qui lui correspond : la linguistique
pour la morphosyntaxe, la phonétique -phonologie pour la composante audio -orale, la lexicologie
pour le lexique, la pragmatique et l'analyse de discours pour les tournures de la communication :

36 Danielle Bailly , Université Paris VII -Denis Diderot , « Les conditions de réussite dans l´appropriation de la
langue étrangère en classe » in Les langues modernes, no.3, 1999, p. 9

25
« La linguistique a pour objectif d'expliquer le fonctionnement de la langue chez le sujet
produisant et comprenant. [Ce travail] ne peut pas ne pas mettre au jour des « invariants – à
l'œuvre dans toutes les langues humaines; [il] ne peut pas laisser indifférent le didacticien qui a
pour objectif le montage de ce même fonctionnement chez des apprenants. [‘. . J Ce qui unit
indissociablement [linguistique et didactique], c'est le processus mental de conceptualisation
[…], comme moteur de la construction des signi fiés de la langue par le linguiste pour expli quer
les faits et par le didacticien pour construire l'apprentissage. »37
Une définition rénovée, actualisée, de l'objet -langue à enseigner découlera, par transposition
didactique, de cet appui théorique ; pour a utant, il ne cessera à aucun moment d'être strictement
et directement piloté par les besoins d'apprentissage des élèves et adapté à leurs capacités
cognitives et motivationnelles.
Les supports doivent contextualiser la langue de façon intelligible : les s tructures, items
lexicaux, tournures « fonctionnelles » destinés à être présentés en classe doivent être associés de
façon claire à l'évocation des types de situations correspondant à leur utilisation dans la vie
réelle. S'il s'agit de documents authentiqu es, ceux -ci doivent éviter les foisonnements de langue
par trop « naturalistes ». S'il s'agit, par exemple, de documents – légitimement – élaborés pour les
besoins de la cause (dits « didactiques »), ils doivent revêtir les caractéristiques de ce qui est, du
point de vue de l’énoncé, plausible en situation de communication, même s'ils offrent une
concentration plus grande que dans la vie langagière naturelle de phénomènes de langue
intéressants et emblématiques du fonctionnement des systèmes.

37 cf. Janitza , J., La Conceptua lisation : processus de construction du signifié ?, in Catégories et connexions ,
ouvrage collectif d'hommage à Jean Fourquet, Villeneuve – d'Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 1999

26
3.1.2. La « culture » comme objet d’enseignement

Les contenus culturels à enseigner doivent être aussi substantiels que les contenus de langue:
il faut munir l'élève d'une compétence interprétative – liée à la connaissance des savoirs factuels
de base – concernant la c ulture -cible (« compétence culturelle » stricte) ainsi que d'une «
compétence interculturelle » permettant à l'élève de comparer culture -source et culture -cible
avec ouverture, tolérance, et de surmonter ou relativiser un certain nombre de stéréotypes. Les
savoirs concernés par ce domaine ne relèveront pas d'une ambition encyclopédique, exhaustive,
mais on ne se résignera pas non plus à n'enseigner qu'une « culture en miettes », superficielle,
non formatrice, vaine. Comme pour la langue, l'objectif culturel sera éclairé par une mise en
relation de l'objet avec les sciences ou les appareils méthodologiques de référence. L'objet à
enseigner devra être reconstruit dans sa cohérence, non contradictoire avec son caractère
composite, hétérogène, fonctionnant en ré seaux; les «angles d'attaque» que constitueront les
phénomènes choisis pour l'enseignement devront ainsi présenter un caractère de significativité,
être «métonymiquement » illustratifs de la culture -cible, pour faciliter une approche de cette
culture -cible , et même de la culture en général, qui dépasse le descriptif.38
Langue et culture sont indissociables de divers points de vue : la langue nécessite d'être
contextualisée et ancrée dans des situations de communication pour que ses utilisateurs puissent
tout simplement (re)construire du sens; les mots évoquent des réalités culturelles vécues, larges
et complexes, inconscientes chez le natif évidemment, mais devant faire l'objet d'une prise de
conscience chez le non -natif à l'Ecole ; la langue est en elle -même un fait culturel, puisqu'elle
reflète le « découpage » de la réalité effectué par la culture concernée; les œuvres littéraires,
entre autres, sont vouées à perdre beaucoup de leur signification lorsqu'on les arrache à leur
medium d'origine: en effet, une fois traduites, elles entraînent souvent un placage inconscient des
schémas de la civilisation -source sur ceux de la civilisation -cible, placage qui peut lui -même
déboucher sur faux -sens et non -sens; d'une manière générale, d'ailleurs, les liens entre lang ue et
littérature sont si étroits qu'il n'est pas pensable, en ce domaine, de dissocier « fond » et
«forme ». Au -delà des conceptions de l'objet d'enseignement lui -même, du choix et de la

38 Bailly , D., Université Paris VII -Denis Diderot , «Les conditions de réussite dans l´appropriation de la langue
étrangère en classe » in Les langues modernes no.3, 1999, p. 11

27
préparation didactiques de cet objet, il restera à y confronter l'él ève et à l'accompagner dans ses
démarches d'appropriation.39

3.2. Les conditions de réussite concernant l’apprenant

Deux types d'exigences concomitantes s'imposent à cet égard à l'apprenant:
– la compréhension du système des relations formes -valeurs de la langu e (associées
souplement à des «types » de situations communicatives repérables) ;
– l'entraînement intensif à la pratique de la langue elle -même, en situation simulée (ou
réelle, dans le meilleur des cas).
L'élève doit commencer par être exposé à la langue, aussi massivement que possible et
d'une manière qui rende didactiquement l'organisation de cette langue aussi « parlante » pour lui
que possible. Sur la base de ce « corpus » auquel s'appliquera l'analyse inconsciente et
consciente, cet élève sera, à l'ai de du guidage enseignant, conduit et incité, à partir d'une
démarche inductive, à observer le fonctionnement de la langue, ainsi que les circonstances
précises de son utilisation. A un moment donné de la classe, non dogmatiquement décrétable,
viendra l'éta pe où ce guidage intégrera, avec toutes sortes de variantes possibles, une courte
phase de « conceptualisation ». Celle -ci pourra comporter la formulation – en termes d'abord
particuliers au contexte d'apprentissage, puis plus généraux – du fonctionnement de la langue tel
que le groupe d'élèves de cette classe spécifique l'aura plus ou moins intuitivement compris.40
L'enseignant aidera alors les élèves à caractériser le fonctionnement langagier en question
avec davantage de rigueur métalinguistique que ce qu e leur spontanéité épi linguistique,
brouillonne mais personnelle, leur avait d'abord permis d'appréhender. Cette phase de
conceptualisation, principalement grammaticale, est vouée à se poursuivre par une application
cette fois déductive des principes de f onctionnement découverts à d'autres exemples analogues à
ceux travaillés: l'entraînement à ces opérations de transfert et d'élargissement, dans l'ensemble
assez systématique mais toujours contextualisé, s'effectuera à l'aide d'exercices et d'activités de

39 Bailly , D., Université Paris VII -Denis Diderot , «Les conditions de réussite dans l´appropriation de la langue
étrangère en clas se» in Les langue s modernes , no. 3, 1999, p. 11
40 Ibid., p. 12

28
simulation énonciative (exemples: jeux de rôle, débats, mais aussi échanges de jugements sur des
textes, etc.).
Il est clair cependant que la compréhension (même non superficielle) du système de la
langue, bien que constituant pour l'élève une aide incontes table à l'apprentissage, ne suffit pas: il
faudra passer au plus vite à l'automatisation des performances de compréhension et de
production, car la langue étrangère est une discipline d'entraînement, et rien ne peut se substituer
à une quantité importante de pratique suivie de cette langue. L'élève aura encore, bien entendu, à
se soumettre, en classe et à la maison, à des tâches complémentaires de familiarisation et
d'entraînement, puis de fixation, pour accéder à une capacité de généralisation de ce qu'il aura
appris à ce que nécessiteront ses propres besoins langagiers.41
Le guidage enseignant doit offrir à l'apprenant une « masse critique » , de données de la
langue étrangère et lui demander de mettre en œuvre les stades successifs d'une réelle pratique de
cette langue (impliquant manipulations, réutilisations, reformulations, enrichissement, etc.),
stades constitués d'abord, d'une manière certes de nos jours très déguisée (non mécanique et en
contextes variés), de répétition de modèles, donnant lieu à un a pprentissage cognitif multiforme
(à base d'attention / perception/prise de conscience, verbalisée ou
non/identification/discrimination/comparaison/mémorisation), depuis la compréhension jusqu'à
la production de texte, puis, dans les étapes assez tardives d e l'appropriation (pour un point
donné), des réalisations personnelles de prise de parole et de rédaction, supposant elles -mêmes
prise de risque, essais et erreurs dédramatisés, élargissement créatif et conceptualisations
nouvelles sur la base de ce qui au ra été appris, etc. L'élève aura à parcourir activement toutes ces
étapes. Pour ne pas que le concept d' « autonomie », soit un leurre démagogique et hypocrite, il
convient de ménager des «doses », de guidage qui aillent progressivement en diminuant et
d'assurer la transmission d'une méthodologie de travail (apprendre à apprendre) transférable à la
gestion de l'inconnu ou du complexe. L'entraînement aboutira ainsi à une rapidité néo -réflexe de
la mobilisation par l'élève d'outils de langue engrangés dans un « lexique mental » bien classé, en
relation avec des besoins communicatifs bien identifiés. Les seules approches behavioristes, on
le sait aujourd'hui, échouent à aboutir à une telle appropriation (d'où la nécessité de la
conceptualisation); néanmoins, on doit continuer à se donner comme enjeu majeur

41 Bailly , D., Université Paris VII -Denis Diderot , «Les conditions de réussite dans l´appropriation de la langue
étrangère en classe » in Les langues modernes , no.3, 1999, p. 13

29
l'automatisation des processus de compréhension et de production de la langue, ce qui suppose le
passage du très conscient au non -conscient, et l'atteinte d'une vitesse croissante de traitement
dans les perfor mances. Il faut donc bien en passer, classiquement, par un suivi ininterrompu de
l'entraînement aboutissant à une mémorisation stabilisée des éléments de langue essentiels,
laquelle suppose elle -même la réactivation régulière, à effets cumulatifs et renfor çateurs, de ce
qui aura pu, dans un premier temps de l'apprentissage et en toute normalité, être oublié, ou mal
engrangé, etc. L'efficacité cognitive de l'entraînement requiert l'intensivité.42

3.3. Conditions de réussite externes

Pour que l'ensemble de la te chnicité pédagogique du cours de langue fonctionne
correctement, il faut que l'élève y soit réceptif et accepte d'entrer dans le « contrat ». Il ne le fera
que si l'enseignement qu'il reçoit a pour lui un sens, le prépare à un avenir qu'il ressent comme
désirable; s'il a du plaisir à apprendre; s'il se sent disponible, affectivement, cognitivement,
socialement, pour l'apprentissage; si son environnement familial l'a préparé à accueillir
positivement les objectifs, contenus et méthodes qui lui sont proposés dans cette institution de
formation qu'est l'École.
De tous ces points de vue, il est trivial de constater que l'échec de la société, comme celui de
la famille, est devenu patent, pour une fraction croissante de la population scolaire. Pour les
élèves con cernés, un certain nombre de phénomènes pèsent lourd sur l'inappétence à apprendre,
notamment: le chômage (chômage familial passé et/ou présent, chômage personnel prévisible), la
pauvreté, la médiocrité de l'habitat et de l'environnement, la désintégration des rôles familiaux, le
développement « abîmé· de la personnalité et l'ensemble de ce qui tient lieu de manière dévoyée,
chez des jeunes grandissant sous l'influence de modèles négatifs, de «régulations»
interindividuelles, (antivaleurs, anti -culture, loi du plus fort, violence et transgression des tabous
éthiques, civiques, etc.).

42 Bailly , D., Université Paris VII -Denis Diderot , «Les conditions de réussite dans l´appropriation de la langue
étrangère en classe » in Les langues modernes , no.3, 1999, p. 14

30
Ces phénomènes, lorsqu'ils deviennent dominants, paralysent le fonctionnement de la
mission fondamentale de l'Ecole, jusqu'à remettre celle -ci en question en tant que service pu blic.
Tous ces problèmes doivent être traités à leur juste niveau, c'est -à-dire à une échelle sociétale
globale (économique, culturelle, …), avec un volontarisme politique farouche. Ce n'est
évidemment toujours pas le cas. Au contraire, on sent trop souv ent chez les décideurs une
résignation, baptisée « réalisme » à s'accommoder du délabrement de l'Ecole (voir à cet égard le
film très illustratif de Bertrand Tavernier, Ça commence aujourd'hui ); ils vont ainsi tenter de
régler quelques problèmes à l'intéri eur même de cette École (Pédagogie Différenciée,
discrimination positive au compte -gouttes, etc.), sous prétexte qu'elle doit constituer « son propre
recours» (ce qui pourtant, dans l'absolu, est une bien belle idée républicaine), mais ils ne
prennent pas en considération le fait que cette École n'en peut plus. En fin de compte, ils vont
tout simplement adapter celle -ci à l'état de choses existant (inégalité sociale, marginalisation
et/ou refus de coopération des exclus ou des défavorisés, etc.).43
Certes, t ous les « il n'y a qu' à » imaginables ne déchargeront pas l'Ecole de ses propres
obligations, face à une société et à des mentalités qui changent vite et auxquelles elle devra de
toute façon s'adapter: il lui incombe en effet, dans sa marge d'intervention propre, de se poser la
question de ses missions citoyennes et sociales à côté de ses missions de transmission de savoir
et d'acquisition de compétences disciplinaires proprement dites, et elle doit donc évoluer quant à
sa manière d'enseigner ces disciplin es.

3.4. Le rôle et l’implication de l’enseignant

La méthodologie pédagogique a certes un rôle fondamental dans la réussite ou l'échec de
l'enseignement -apprentissage: les praticiens l'ont expérimenté, les didacticiens l'ont confirmé;
mais elle n'est pas to ute-puissante, ce serait une illusion de type « scientiste » que de le croire, et
l'on ne saurait exagérer son importance. Au demeurant, on sait désormais quelles sont les
méthodes qui dans le passé ont échoué, on connaît les raisons cognitives de cet éche c ; il ne

43 Bailly , D., Université Paris VII -Denis Diderot , «Les conditions de réussite dans l´appropriation de la langue
étrangère en classe » in Les langues modernes , no.3, 1999, p. 15

31
serait donc pas raisonnable pour l'avenir de ne pas tenir compte des expériences du passé. A cet
égard, sans doute serait -il souhaitable de se tenir à égale distance de deux attitudes outrancières :
– une absurde et réactionnaire conception «cycliq ue » de la méthodologie (les
méthodes apparaîtraient, disparaîtraient et referaient surface périodiquement selon
des « modes » arbitraires, dans l'amnésie collective et l'immobilisme éternel des
idées et des techniques) ;
– et une naïve et béate croyance en un progrès linéaire ininterrompu, rejetant d'ailleurs
comme négatif tout ce qui ne serait pas « moderne », tout ce qui ne serait pas le
dernier gadget en date, v olontiers baptisé « innovant ».

Il serait plus sage de tirer la leçon de certaines inefficaci tés passées, d'extraire et de garder le
tronc commun méthodologique de ce que le bon sens des pédagogues de terrain a jugé au long
cours efficace (à condition toutefois que les composantes de ce tronc commun soient compatibles
entre elles, dans leurs fonde ments théoriques comme dans leurs procédures concrètes), de
continuer bien entendu à inventer et promouvoir collectivement des perfectionnements dans les
techniques de classe, sans autocensure et en toute liberté d'imagination. C'est dans un tel cadre
relativisé, équilibré, contextualisé à l'évolution de la société, qu'il apparaît opportun de resituer le
courant communicatif.44
Il faut intégrer toujours plus « organiquement » la phase de conceptualisation grammaticale à
l'intérieur même des démarches d'échan ges langagiers, afin que les savoirs grammaticaux «
passent » plus directement dans les savoir -faire «fonctionnels » et qu'ils soient mobilisés de
façon perceptible, reproductible, dans les étapes progressives de la «procéduralisation ». Cette
osmose souha itable entre pratique communicative et grammaire s'obtiendra en adaptant l'objet
de la conceptualisation (exemple: travail sur les structures de la langue considérées, au -delà de
leur simple signification sémantique et de leur construction apparente, comme les traces
d'opérations cognitives et linguistiques) à ce qui répond au besoin d'outils fonctionnels précis
qu’implique l'entraînement sur la langue -en-acte, sur le discours en situation. Il s'agira ainsi de
placer les élèves au cœur de fonctionnements co mmunicatifs bien catégorisés, de mettre à leur
disposition les outils exacts de langue les rendant aptes à communiquer, en même temps que des

44 Ibid., p. 16

32
motifs et mobiles pour le faire (circulation d'information, de pensée et d'analyse, de points de vue
et d'opinions , éléments répondant au besoin d'expressivité, etc.). On munira ces élèves de
procédures cognitives visant à résoudre les problèmes et surmonter les obstacles de manière de
plus en plus autonome.45
La méthode communicative, même enrichie d'une conceptualisa tion digne de ce nom, n'est
pas l'alpha et l'oméga de la conduite de la classe : par exemple, certains aspects de
«conditionnement » de l'élève, liés aux exigences de l'entraînement à la pratique de la langue,
demeureront présents quelles que soient les év olutions: on les retrouvera dans l'exploitation de
certains supports « didactiques » martelant intensivement les rapports formes -valeurs qui font
l'objet de l'enseignement -apprentissage, de même que dans certains exercices assez
systématiques, surtout dans les premières années de l'apprentissage de la langue.46
D'autre part, restent légitimes et utiles certaines composantes pédagogiques faisant une part «
libérée » à quelques activités relativement « spontanéistes » exploitant à chaud telle ressource
offerte par l'actualité, tel élément lié à l'environnement spécifique d'une classe donnée (par
exemple dans le cadre d'un projet d'établissement, etc.), tel élément jugé opportun par le
professeur pour une raison ou pour une autre. Enfin, dans le sillage de la « naturalisation »
langagière voulue par la méthode communicative, et avec le souci de redonner à l'échange verbal
en langue étrangère une fonctionnalité directe, finalisée par l'Action, on peut chercher à faire
oublier à l'élève l'artificialité d'un travail en langue non maternelle en s'appuyant sur le ludique,
sur la résolution d'énigmes logiques, etc.
Il faudrait compléter ce trop rapide panorama par la prise en compte, au sein de
l'enseignement lui -même, des démarches d'apprentissage des élèves (analysées en termes
psycholinguistiques), dans leur diversité : il s'agirait par exemple de tenir compte de leurs «
styles cognitifs » différents, d'individualiser autant que possible l'aide et la remédiassions (pour
ces raisons aussi, s'impose la nécessité absolue d'effectifs constamment réduits!).
On constate que pour une réussite du processus d’enseignement on a besoin de plusieurs
facteurs. On doit avoir des élèves ouverts à la connaissance, de bons moyens matériaux
d’enseignements et de bonnes conditions de tra vail. Le rôle du maître doit être reconnu et
respecté, ainsi comme, les besoins des élèves doivent être accomplis. Le système d’enseignement

45 Ibid. , p. 18
46 Ibid., p. 18

33
doit analyser de nouveau les conditions de sa réussite et il doit se mettre à jour. Pour une réelle
réussite de l’e nseignement, on doit accomplir tous les conditions demandées par la société et son
évolution et on doit assurer une très bonne collaboration entre tous les organismes impliqués
dans l’éducation et l’enseignement des élèves.

***
Pour la réussite du proc essus d’enseignement on a besoin de quelques conditions
accomplies. D’une part, on a besoin des élèves ouverts à la connaissance et les besoins des élèves
doivent être accomplis par les informations que le professeur leur transmet. D’une autre part, on
doit avoir de bonnes conditions de travail et des matériaux convenables mis à la disposition de
l’enseignant et à la portée des élèves.
Si on réussit à accomplir ces conditions, on aura l’idéal du processus d’enseignement.

34
Chapitre 4 : Panoram a des grands courants méthodologiques dans
l'enseignement du français langue étrangère

Avant d'apporter quelques précisions terminologiques et de brosser brièvement le tableau
des différentes méthodologies qui se sont succédées depuis le XIXème siècle et jusqu’à présent,
il nous parait opportun, en vue d'une appropriation critique des meilleurs acquis de chacune des
méthodologies envisagées, de citer Christian Puren, professeur émérite de l'Université de Saint –
Etienne, auteur de plusieurs ouvrages, dont l ' Histoire des méthodologies de l'enseignement des
langues, et plus d'une centaine d'articles sur des thèmes très variés de la didactique des langues –
cultures :
« L’enjeu actuel dans nos classes n’est pas de privilégier systématiquement telle ou telle
appr oche supposée optimale (en particulier pour la raison fort discutable qu’elle est la
dernière…), ni même de construire un modèle idéal de réglage entre ces différentes approches,
mais de leur appliquer en permanence, comme aux contenus, les trois opération s de sélection, de
séquenciation et de distribution. […] Les séquences à construire en classe de langue seront donc
désormais fortement différenciées et diversifiées, puisqu’elles devront constamment être le plus
en adéquation possible avec les élèves, les objectifs, les dispositifs et situations
d'enseignement/apprentissage. » Conférence du 2 novembre 2004: L'évolution historique des
approches en didactiques des langues -cultures, ou comment faire l'unité des «unités
didactiques ».

4.1. La méthodologie trad itionnelle

Directement issue de l’enseignement des langues classiques , la méthodologie
traditionnelle, également appelée méthodologie classique ou méthodologie grammaire -traduction
a été l argement adoptée dans le 18e et la première moitié du 19e siècle . Beaucoup de chercheurs
considèrent que son utilisation massive a donné lieu à de nombreuses évolutions qui ont abouti à
l'apparition des nouvelles méthodologies modernes. 47

47 Manuel de formation , Professeurs de français, Projet Ministère de l´Education, de la Recherche, de la Jeunesse et
du Sport – SIVECO; «La formation continue des enseignants à l'utilisation des instruments informatiques modernes

35
Cette méthodologie se basait sur la lecture et la traduction de textes littéraires en langue
étrangère, ce qui plaçait donc l’oral au second plan. La langue étrangère était décortiquée et
présentée comme un ensemble de règles grammaticales et d’exceptions, qui pouvaient être
rapprochées de celles de la langue maternelle. L’importance ét ait donnée à la forme littéraire sur
le sens des textes, même si celui -ci n’est pas totalement négligé. Par conséquent, cette
méthodologie affichait une préférence pour la langue soutenue des auteurs littéraires sur la
langue orale de tous les jours. La cu lture était perçue comme l’ensemble des œuvres littéraires et
artistiques réalisées dans le pays où l’on parle la langue étrangère.
Au XVIIIe siècle, la méthodologie traditionnelle utilisait systématiquement le thème
comme exercice de traduction et la mém orisation de phrases comme technique d’apprentissage
de la langue. La grammaire était enseignée de manière déductive, c'est -à-dire, par la présentation
de la règle, puis on l’appliquait à des cas particuliers sous forme de phrases et d'exercices
répétitifs .
Au XIXe siècle, on a pu constater une évolution provoquée par l’introduction de la
version -grammaire dont les pratiques consistaient à découper en parties un texte de la langue
étrangère et le traduire mot à mot dans la langue maternelle. Cette traduct ion était le point de
départ d’une étude théorique de la grammaire, qui n’occupait plus une place de choix dans
l’apprentissage. Par conséquent, les points grammaticaux étaient abordés dans l'ordre de leur
apparition dans les textes de base.
Etant donné le faible niveau d’intégration didactique que présentait cette méthodologie, le
professeur n’avait pas besoin de manuel, il pouvait en effet choisir lui -même les textes sans tenir
vraiment compte de leurs difficultés grammaticales et lexicales. L’enseignant dominait
entièrement la classe et détenait le savoir et l’autorité, il choisissait les textes et préparait les
exercices, posait les questions et corrigeait les réponses. Ce pouvoir du savoir donna aux
enseignants le titre de « Maître » ou de « Maîtresse » .48
La langue utilisée en classe était la langue maternelle et l’interaction se faisait toujours en
sens unique du professeur vers les élèves. L’erreur et l’hésitation étaient refusées et passibles de
punition pour outrage à la langue.

dans l´enseignement efficace du français et l´évaluation au niveau européen des compétences linguistiques»,
coordinateur de l´équipe MATHE Maurice, FONDUL SOCIAL EUROPEAN 2007 -2013, p. 23
48 Ibid., p. 23

36
Le vocabulaire était enseigné sous forme de listes de centaines de mots présentés hors
contexte et que l’apprenant devait connaître par cœur. En effet, le sens des mots était appris à
travers sa traduction en langue maternelle. La rigidité de ce système et ses résultats déceva nts ont
contribué à sa disparition et à l’avènement d’autres théories plus attrayantes pour les élèves.
Remise en question, la méthodologie traditionnelle coexistera vers la fin du XIXe siècle
avec une nouvelle approche.

4.2. La méthode naturelle

Histor iquement, elle se situe à la fin du XIXe siècle et a coexisté avec la méthodologie
traditionnelle bien qu'elle suppose une conception de l'apprentissage radicalement opposé.
Ce sont les observations sur le processus d’apprentissage de la langue allemande d e F.
Gouin qui en sont à l’origine. Il a en effet été le premier à s’interroger sur ce qu’est la langue et
sur le processus d’apprentissage d’une langue pour en tirer des conclusions pédagogiques. Il
affirme que la nécessité d’apprendre des langues viendra it du besoin de l’homme de
communiquer avec d’autres hommes et de franchir ainsi les barrières culturelles. C’est pourquoi
il faut enseigner l’oral aussi bien que l’écrit, même si l’oral doit toujours précéder l’écrit dans le
processus d’enseignement -appre ntissage.49
C’est à partir de la méthode de F. Gouin que les méthodes didactiques vont se baser sur des
théories de l’apprentissage (psychologiques, sociologiques, linguistiques, etc.) et vont prôner
l'importance de l'oral.
Selon F. Gouin, l’apprentissage d ’une langue étrangère doit se faire à partir de la langue
usuelle, quotidienne, si l’on prétend que cet apprentissage ressemble le plus possible à celui de la
langue maternelle par l’enfant. D’après lui l’enfant n’apprendrait pas des mots sans rapport, mai s
plutôt ajouterait les nouvelles connaissances à son acquis personnel. La langue étant
essentiellement orale, l’oreille serait l’organe réceptif du langage, c’est pourquoi l’enfant devrait
être placé en situation d'écoute prolongée en langue étrangère.

49 Ibid. , p. 24

37
C’est pour cela que F. Gouin peut être considéré comme le pionnier de l’immersion et le
premier à avoir prime le sens sur la forme et la proposition sur le mot.50
En dépit des critiques qui ont été faites à la méthode naturelle de F. Gouin et de la
difficulté de sa mise en place dans le système scolaire, il est indéniable que cette méthode a
provoqué une certaine révolution en s’opposant radicalement à la méthodologie traditionnelle
utilisée par ses contemporains.

4.3. La méthodologie directe

On appelle mét hodologie directe la méthode utilisée vers la fin du XIXe siècle et le début
du XXe siècle. Fruit de la cohabitation des méthodes précédemment citées, la méthodologie
directe est considérée historiquement comme la première méthodologie spécifique à
l’ensei gnement des langues vivantes étrangères.
Dès la fin du 19ème siècle la France désirait s’ouvrir sur l’étranger. La société ne voulait
plus d’une langue exclusivement littéraire, elle avait besoin d’un outil de communication qui
puisse favoriser le dévelop pement des échanges économiques, politiques, culturels et touristiques
qui s'accélérait à cette époque.
L’évolution des besoins d’apprentissage des langues vivantes étrangères a provoqué
l’apparition d’un nouvel objectif appelé “pratique” qui visait une m aîtrise effective de la langue
comme instrument de communication.
Les principes fondamentaux qui la définissent sont :51
• L’enseignement des mots étrangers sans passer par l’intermédiaire de leurs équivalents en
langue maternelle. Le professeur explique l e vocabulaire à l’aide d’objets ou d’images, mais ne
traduit jamais. L’objectif est que l’apprenant pense en langue étrangère le plus tôt possible.
• L’utilisation de la langue orale sans passer par l’intermédiaire de sa forme écrite. On accorde
une import ance particulière à la prononciation et on considère la langue écrite comme une langue
orale “scripturée”.

50 Ibid., p. 24
51 Ibid., p. 25

38
• L’enseignement de la grammaire étrangère se fait d’une manière inductive (les règles ne
s’étudient pas d’une manière explicite). On privilégie les exercices de conversation et les
questions -réponses dirigées par l’enseignant.
La méthodologie directe se base sur l’utilisation de plusieurs méthodes : méthode directe,
active et orale.

4.4. La méthodologie active

La méthodologie active a été utilisé e d’une manière généralisée dans l’enseignement
scolaire français des langues vivantes étrangères depuis les années 1920 jusqu’aux années 1960.
Cependant on constate une certaine confusion terminologique en ce qui concerne cette
méthodologie. En effet, on la nommait également “méthodologie éclectique”, “méthodologie
mixte”, “méthodologie orale”, “méthodologie directe”, etc. Cette réticence à nommer cette
nouvelle méthodologie révèle la volonté d’éclectisme de l’époque et le refus d’une méthodologie
unique.
La méthodologie active représente un compromis entre le retour à certains procédés et
techniques traditionnels et le maintien des grands principes de la méthodologie directe. C’est
pourquoi on peut dire que la méthodologie active se veut une philosophie d e l’équilibre.52
Les méthodologues actifs revendiquent un équilibre global entre les trois objectifs de
l’enseignement -apprentissage : formatif, culturel et pratique. Faisant preuve de pragmatisme, ils
permettaient l’utilisation de la langue maternelle en classe. En ce sens, on peut dire qu’ils ont
réellement assoupli la rigidité de la méthode précédente.
Ils ont opté pour un assouplissement de la méthode orale et rendu au texte écrit sa place
comme support didactique. Les textes de base étaient plus souv ent descriptifs ou narratifs que
dialogues.
On a également privilégié l’enseignement de la prononciation à travers les procédés de la
méthode imitative directe.

52Ibid., p. 26

39
En outre on constate un assouplissement de l’enseignement du vocabulaire puisqu’on
avait de n ouveau recours à la langue maternelle comme procédé d’explication. Par conséquent il
était permis d’utiliser la traduction pour expliquer le sens des mots nouveaux.
Cependant, dans tous les cours de FLE de cette époque on retrouve des leçons sur des
thème s de la vie quotidienne dans lesquelles on utilisait des images pour faciliter la
compréhension et éviter si possible la traduction du vocabulaire.
L’enseignement de la grammaire s’est également assoupli. On a privilégié l’apprentissage
raisonné en consid érant que l’apprenant avait besoin de se rendre compte du pourquoi des
phénomènes. On essayait donc d’éviter l’empirisme dans l’enseignement de la grammaire et on
utilisait une démarche inductive qui privilégiait la morphologie sur la syntaxe.
Avec la mét hodologie active, l’enseignement du vocabulaire et de la grammaire ne se
faisait plus sur le mode de la répétition intensive, on lui préférait plutôt la répétition extensive
des structures.

4.5. La méthodologie Structuro -globale audio -visuelle (SGAV)

Suite à la seconde guerre mondiale et à la décolonisation, la France se trouve obligée de
lutter contre l'expansion de l'anglo -américain comme langue de communication internationale et
cherche à retrouver son rayonnement culturel et linguistique et cela dè s le début des années 50.
Des équipes de recherches, constituées de linguistes, de littéraires et de pédagogues, s’activent en
France et à l’étranger pour trouver les meilleurs outils pour diffuser le FLE.53
C’est au milieu des années 1950 que P. Guberina de l’Université de Zagreb donne les
premières formulations théoriques de la méthode SGAV (structuro -globale audio -visuelle). La
méthodologie audiovisuelle (MAV) domine en France dans les années 1960 -1970 et le premier
cours élaboré suivant cette méthode, p ublié par le CREDIF (Centre de Recherche et d'Étude pour
la Diffusion du Français) en 1962, est la méthode “ Voix et images de France ”.
La cohérence de la méthode audiovisuelle était construite autour de l’utilisation conjointe
de l'image et du son. Le s upport sonore était constitué par des enregistrements magnétiques et le
support visuel par des images fixes.

53 Ibid., p. 28

40
En effet, les méthodes audiovisuelles avaient recours à la séquence d’images pouvant être
de deux types: des images de transcodage qui traduisaien t l’énoncé en rendant visible le contenu
sémantique des messages ou bien des images situationnelles qui privilégiaient la situation de
communication et les composantes non linguistiques comme les gestes, les attitudes, les rapports
affectifs, etc.
Selon C . Puren, la MAV française est une méthode originale, parce qu’elle constitue une
synthèse inédite entre l’héritage direct, la méthodologie induite par les moyens audiovisuels et
une psychologie de l’apprentissage spécifique, le structuro globalisme.
La mét hodologie SGAV repose sur le triangle : situation de
communication/dialogue/image.54
Dans la méthodologie audio -orale, les quatre habiletés étaient visées, bien qu’on accordât
la priorité à l’oral sur l’écrit. La MAV55 prend aussi en compte l’expression des sentiments et des
émotions, non considérés auparavant.
Sur le plan de l’apprentissage, la MAV suivait la théorie de la Gestalt, qui préconisait la
perception globale de la forme, l’intégration par le cerveau, dans un tout, des différents éléments
perçus par les sens. Dans le cas des langues, l’apprentissage passerait par l’oreille et la vue. La
langue étant considérée comme un ensemble acoustico -visuel, la grammaire, les clichés, la
situation et le contexte linguistique avaient pour but de faciliter l'int égration cérébrale des stimuli
extérieurs.
Cette méthode s’appliquera aussi bien à l’enseignement du lexique (sans recourir à la
traduction en langue maternelle) qu’à l’enseignement grammatical (sans l’intermédiaire de la
règle, l’apprenant saisit les règl es de manière intuitive). La méthode audiovisuelle s’appuie sur
un document de base dialogué conçu pour présenter le vocabulaire et les structures à étudier.
Cette méthode ouvre la voie, par certains aspects, aux approches communicatives. « Elle
met dava ntage la grammaire au service de la communication et elle sollicite plus activement la
réflexion des apprenants au cours d’activités de compréhension »56.

54 Ibid., p. 28
55 Méthode Audio -Visuelle
56 Defays, J. -M., Le français langue étrangère et seconde. Enseignement et apprentissage. Liège, Mardaga, 2003, p.
229

41
Ces méthodes, qui permettent, il est vrai, d’apprendre assez rapidement les bases d’une
langue étrang ère, ne répondent cependant pas aux véritables besoins de communication des
apprenants.

4.6. L'approche communicative

L’approche communicative s’est développée en France à partir des années 1970 en
réaction contre la méthodologie audio -orale et la méth odologie audio -visuelle. Il n’y a pas de
rupture dans les objectifs entre les méthodes structurales et la méthode fonctionnelle comme cela
avait été le cas entre les méthodologies directe et traditionnelle. La différence se situe au niveau
de la compétence : pour les structuralistes l’important est la compétence linguistique tandis que
pour les fonctionnalistes il faut privilégier la compétence de communication.
L'approche communicative part du principe que la langue est avant tout un outil de
communication et d'interaction sociale qui s'exerce à travers 4 habiletés : compréhension orale
(CO) et écrite (CE), expression orale (EO) et écrite (EE) et que l'on communique grâce à des
actes de langage (dire à quelqu'un de faire quelque chose, proposer, accepter, r efuser, etc.) et des
notions transversales (se situer dans l'espace, dans le temps, caractériser, quantifier). 57
Les tenants de l’approche communicative considèrent qu’une communication efficace
implique une adaptation des formes linguistiques à la situat ion de communication (statut de
l’interlocuteur, âge, rang social, lieu physique, etc.) et à l’intention de communication (ou
fonction langagière): demander d’identifier un objet, demander une permission, donner des
ordres, etc.
Selon l’approche communica tive, apprendre une langue ne consisterait pas, comme le
croyaient les béhavioristes et la méthode audio -orale, à créer des habitudes, des réflexes. Les
constructions ne devraient jamais fonctionner hors des énoncés naturels de communication
construits à p artir des besoins langagiers des apprenants.

57 Manuel de formation , Professeurs de français, Projet Ministère de l´Education, de la Recherche, de la Jeunesse et
du Sport – SIVECO; «La formation continue des enseignants à l'utilisation des instruments informatiques modernes
dans l´enseignement effi cace du français et l´évaluation au niveau européen des compétences linguistiques»,
coordinateur de l´équipe MATHE Maurice, FONDUL SOCIAL EUROPEAN 2007 -2013, p. 29

42
L’apprentissage n’est plus considéré comme passif, recevant des stimuli externes, mais
comme un processus actif qui se déroule à l’intérieur de l’individu et qui est susceptible d’être
influencé par cet individ u. Le résultat dépend du type d’information présenté à l’apprenant et de
la manière dont il va traiter cette information.
Les supports étudiés ne sont plus créés artificiellement pour la classe avec le nombre
exact de structures à assimiler mais ils sont choisis parmi une source vaste de documents
authentiques (extraits littéraires, articles de journaux, émissions de radio, clips vidéos, etc.)
Le document authentique est théoriquement, dans l’approche communicative, le support
de base de toute la progre ssion. La progression pédagogique suit celle des actes de parole que
l’on souhaite aborder. Les situations de communication mettent en scène:
– un émetteur (celui qui a quelque chose à dire);
– un message (ce qu’il a à dire);
– un récepteur (celui à qui s’adre sse le message).
Le message répond à un objectif : l’acte de parole (par exemple: donner une consigne).
Pour parvenir à cet objectif, l’émetteur doit utiliser des outils linguistiques appropriés au
contexte (qui imposera alors les formes linguistiques, le registre de langue).
Une séquence en approche communicative s’articule donc ainsi :58
a) analyse de la situation de communication (où, quand, qui, à qui, quoi, pourquoi) ;
b) répétition, imprégnation, reproduction ;
c) mise en relief des outils linguistiqu es utilisés ;
d) conceptualisation du fait de langue ;
e) appropriation de celui -ci par des exercices ;
f) production dans une situation différente de celle proposée comme exemple.
La langue orale enseignée est présente sous la forme de documents sonores ou de
dialogues qui servent toujours de base à l'apprentissage. Ils sont proches de la réalité, voire
authentiques.
L'écrit est présent en compréhension et en expression dès le début de l'apprentissage et
est approché comme un moyen de communication à pa rt entière.

58 Ibid., p. 30

43
La grammaire est explicite, mais ne donne pas lieu à des " cours de grammaire ": le
professeur propose aux élèves des séances de conceptualisation qui leur permettent de découvrir
eux-mêmes le fonctionnement de la langue à partir d'un corpus.
En classe on utilise de préférence la langue étrangère, mais il est possible d’utiliser la
langue maternelle et la traduction. En ce qui concerne l’erreur, elle est considérée comme
inévitable et traitée de façon positive, faisant partie du processus d'ap prentissage. On ne parle
plus de faute (à connotation négative). On pratique la pédagogie de l'erreur qui utilise l'erreur
produite de façon dynamique.
L’élève devient un « apprenant » et par conséquent un acteur de son apprentissage. Sa
participation est fortement sollicitée et on lui fait acquérir des stratégies d'apprentissage.
L'approche communicative introduit la notion " d'apprendre à apprendre ".
Selon D. Coste, l’acte de parole dans l’approche communicative est un outil d’analyse
encore trop stat ique et manque de réalité psychologique. Les listes de structures
morphosyntaxiques et de mots ont fait place aux listes d’actes de parole et de notions: on n’aurait
alors pas dépassé le stade de la description -inventaire.
Cependant, l’approche fonctionne lle a eu le mérite de montrer que l’apprenant devait être
situé au premier plan, que l’écrit devait récupérer son statut et qu’il n’est pas nécessaire de suivre
un cours général de langue pour atteindre un objectif spécifique.

4.7. La méthodologie audio -orale

La méthodologie audio -orale naît, au cours de la deuxième guerre mondiale, pour
répondre aux besoins de l’armée américaine de former rapidement des gens parlant d'autres
langues que l'anglais.
On a alors fait appel au linguiste Bloomfield qui va c réer “la méthode de l’armée”. Cette
méthode n’a duré en réalité que deux ans, mais elle a provoqué un grand intérêt dans le milieu
didactique. C’est dans les années 1950 que des spécialistes de la linguistique appliquée ont créé
la méthode audio -orale (MAO ), en prenant pour socle la Méthode de l'Armée et en y appliquant
systématiquement :
– une théorie du langage : la linguistique structurale distributionnelle et

44
– une théorie psychologique de l'apprentissage : le behaviorisme.
La linguistique structurale conçoit le langage comme un système composé d’unités de
rangs différents, qu’il suffit d’assembler et de mettre en relation pour transmettre de
l’information. Les psychologues behavioristes, quant à eux, étudient les comportements
observables, parmi lesque ls se trouve la pratique d’une langue. Selon eux son acquisition
s’expliquerait en termes de réactions à des stimuli extérieurs et relèverait donc d’un
conditionnement, que l’enseignement pourrait créer par le recours à des répétitions mécaniques.
Le but de la MAO était de parvenir à communiquer en langue étrangère, raison pour
laquelle on visait les quatre habiletés afin de communiquer dans la vie de tous les jours.59
Cependant, on continuait à accorder la priorité à l’oral. On concevait la langue comme u n
ensemble d’habitudes, d’automatismes linguistiques qui font que des formes linguistiques
appropriées sont utilisées de façon spontanée.
Comme on ne considérait pas le niveau sémantique, la signification n’occupait pas une
place prioritaire en langue ét rangère. C’est pourquoi le vocabulaire était relégué au second plan
par rapport aux structures syntaxiques.
De plus, les habitudes linguistiques de la langue maternelle étaient considérées
principalement comme une source d’interférences lors de l’apprent issage d’une langue étrangère
; afin de les éviter, il était recommandé que le professeur communique uniquement dans la
langue étrangère.
La place de la culture étrangère est très importante mais elle est introduite comme une
cause d’erreurs de compréhen sion. Aussi la M.A.O. développe -t-elle un projet de comparatisme
culturel mettant l’accent sur les différences dans les façons de vivre.
Cette méthodologie a besoin pour s’appliquer d’instruments comme les exercices
structuraux et les laboratoires de lang ues pour réaliser une acquisition et une fixation
d’automatisme linguistique. On remarque que la linguistique et la psychologie de l’apprenant
sont présentes dans la conception didactique de la méthodologie.
La MAO a été critiquée pour le manque de transf ert hors de la classe de ce qui a été
appris et on a considéré que sa validité se limitait au niveau élémentaire. De même, à
l’enthousiasme pour les exercices structuraux a succédé la déception. En effet les exercices

59 Ibid. , p. 27

45
ennuyaient les élèves, les démotivaien t et le passage du réemploi dirigé au réemploi spontané ne
se faisait que rarement.

4.8. L'Approche ou la perspective actionnelle

Après l’approche communicative des années 80, nous sommes maintenant, depuis le milieu
des années 90, dans une nouvelle ap proche pédagogique appelée « approche actionnelle ».
L’approche actionnelle, reprend tous les concepts de l’approche communicative et y ajoute l’idée
de « tâche ». Elle « considère avant tout l’usager et l’apprenant d’une langue comme des acteurs
sociaux a yant à accomplir des tâches (qui ne sont pas seulement langagières) dans des
circonstances et un environnement donné ». (CECR, p.15)
Pour réaliser des tâches concrètes, l'élève va mobiliser des compétences, qui dépassent le
simple fait de maîtriser des sa voirs linguistiques, et va mettre en œuvre des stratégies. Et c'est en
réalisant des tâches que l'élève va pouvoir développer des compétences: compétences
langagières, certes, mais aussi compétences générales individuelles. Une tâche, contrairement à
un ex ercice formel, ne va pas spécifier de manière précise la/les structure(s) linguistiques que
l'élève va devoir utiliser. C'est à lui de mobiliser, pour réaliser la tâche, les connaissances et
savoir -faire qui sont à sa disposition à un moment donné. Dans le cadre d’une perspective
actionnelle, les activités de classe sont étroitement liées aux activités sociales que les apprenants
sont (ou peuvent) être appelés à accomplir en société car «si les actes de parole se réalisent dans
des actions langagières, cell es-ci s’inscrivent elles -mêmes à l’intérieur d’actions en contexte
social qui seules leur donnent leur pleine signification ». (CECR, p.15) Selon Paulo Da Costa
dans Regards sur la perspective actionnelle , la tâche « sort l’apprenant de la dimension
métali nguistique imposée par les traditionnels exercices . La tâche montre qu’en classe de langue,
les activités réalisées sont avant tout des activités extralinguistiques fondées sur l’interaction ».60
Dans l'article La perspective actionnelle définie par le CECR et ses répercussions dans
l’enseignement des langues , Monique Denyer, inspectrice des langues romanes en Communauté
Française de Belgique, auteur de manuels de FLE et des guides pédagogiques 1 et 2 de la

60 Ibid., p. 32

46
méthode Rond -Point (Difusión), affirme qu'une « tâc he d’enseignement -apprentissage, dans
quelque discipline que ce soit, doit donc répondre au schéma suivant :
 contexte: physique, institutionnel, socioculturel
 problème (agir, s’informer, se former …)
 but (résoudre le problème)
 ressources (intégrées) ACTION (autonome)
 produit (+/ – imprévisible) (langagier)”
Il nous faut donc ajouter trois nouvelles et dernières caractéristiques à notre définition de la
tâche :
 elle est complexe car elle présuppose la maîtrise de ressources ou d’outils, en
l’occurrence de sav oirs et de savoir -faire, voire d’attitudes (ce qui exige préalablement
toute une séquence d’apprentissage) et, durant l’exécution de la tâche, leur «
orchestration », leur « intégration », la plus pertinente, c’est -à-dire efficace et
économique;
 elle est o uverte : son produit n’est jamais (totalement) prévisible ;
 elle est à didactique ou non guidée : elle consiste en une consigne, mais c’est aux
élèves à savoir comment la résoudre, quels outils utiliser et… le faire, de façon
autonome!».
Pour résumer, quel les sont les spécificités de la tâche par rapport à l'exercice ?
La tâche est complexe, ouverte, non guidée : elle consiste en une consigne, mais c'est aux
élèves de savoir comment la résoudre, quels outils utiliser. Elle est contextualisée et le problème
à résoudre est non seulement linguistique mais aussi extralinguistique.
Les exercices sont axés sur la manipulation des formes (syntaxiques, phonologiques par
exemple), en l'absence de tout contexte.
Monique Denyer systématise les différences entre une « t âche » et un « exercice » de la
manière suivante:61
Tâche Exercice
Contextualisation oui non

61 Ibid., p. 32

47
Problème à résoudre oui: extra linguistique +
flopée de linguistiques
oui: linguistique
(généralement un)
Finalisation oui: extra linguistique oui: linguistiqu e
Complexité oui!!! non
Produit peu prévisible et long
(plusieurs critères
d’évaluation) prévisible et limité
(juste/faux)
Didactisation non oui

Selon le même auteur, « Il est donc bien clair que la tâche n’exclut pas l’exercice -elle
l’appelle même, et en quantité – alors que l’exercice n’appelle pas la tâche… »
La relation entre les deux types d’activités s’impose donc et se pose dans les termes
suivants : quels sont les ressources/outils/savoirs/savoir -faire nécessaires à la réalisation de telle
tâche ?

Tâche – apprenant – enseignant

L'approche par tâche provoque des changements importants dans les rôles de l'apprenant
et de l'enseignant. Si le rôle de l'apprenant n’est plus «d’ouvrir son cerveau tout grand pour y
recevoir la bonne parole, ni même d’accomplir une petite activité bien délimitée», le rôle de
l'enseignant n'est plus «de déverser des savoirs (et d’en vérifier la restitution) ou de diriger des
exercices (et d’en contrôler l’exécution».
Dans la logique d'agir -réagir -interagir qui est cell e de la perspective actionnelle,62
L'enseignant L'apprenant
 est médiateur, conseiller, metteur en
scène, animateur, accompagnateur;
 organise l'acte d'apprendre de façon
à " faire faire " aux apprenants.  est actif;
 est responsabilisé pour organiser une
action sociale;
 surmonte les obstacles langagiers,

62 Ibid., p. 33

48
" Faire agir, réagir et interagir " deviennent
des "a ctions" incontournables de
l'enseignement de FLE. affectifs, sociaux et pragmatiques;
 agit en coaction avec les autres;
 a un objectif social de référence qu i
dépasse la situation d'enseignement –
apprentissage scolaire.
"Agir, réagir, interagir" deviennent des "
gestes " nécessaire à l'apprentissage de la
compétence communicative.

L’approche actionnelle introduite par les programmes implique un pilotage par l a tâche;
c’est au travers de la réalisation de tâches que l’on va développer les différentes composantes de
la compétence de communication, entraîner aux activités langagières et découvrir des éléments
culturels. On n’entre plus dans la pédagogie par du le xique, une thématique, une notion, une
fonction mais on pilote par la tâche.
La mise en place de la pédagogie du projet est l'implication didactique majeure de
l'approche actionnelle.
Selon Francis Goullier, IGEN, auteur de l'ouvrage Les outils du Conseil de l’Europe en
classe de langue. Cadre européen et Portfolios , Paris, Didier, 2005, « la pédagogie du projet est
certainement la forme la plus aboutie d'une démarche actionnelle ».
Dans la pédagogie du projet on est dans ce que Christian Puren appelle « agir avec l'autre
en langue étrangère » ; «la langue n'est plus (ou plus seulement) un instrument de
communication, mais un instrument d'action sociale. »63

En ce qui concerne l’utilisation de ces méthodes en classe de FLE aujourd’hui, on va voir
quel en est le pourcentage dans un chapitre suivant où on va interpréter les réponses de plusieurs
enseignants. On va observer aussi s’il y existe une subjec tivité et de quel type est -elle.

63 Ibid., p. 33

49
Pour avoir une image d’ensemble , on fait ici une brève révision des métho des présentées
et on introduit les caractéristiques les plus important es dans un tableau comparatif.

1. La méthodologie traditionnelle
(XVIIIe et XIXe s.)

– une connaissance grammaticale et
littéraire de la langue
– un apprentissage déductif de règles
gramm aticales
– des listes de vocabulaire hors
contexte
– le recours à la langue maternelle
– des exercices de mémorisation et
restitution (récitation),
d’applications des règles de
grammaire, et de traductions de
phrases, puis de textes
– une pratique orale très limitée
– ses outils privilégiés : manuels,
recueils de textes, œuvres entières,
dictionnaires 2. La méthode naturelle (coexiste avec la
traditionnelle XIXe)

– enseigner l’oral aussi bien que
l’écrit, même si l’oral doit toujours
précéder l’écrit dans le pr ocessus
d’enseignement -apprentissage
– l’apprenant devrait être placé en
situation d'écoute prolongée en
langue étrangère
– l’apprentissage à partir de la langue
usuelle, quotidienne
– l’oral doit toujours précéder l’écrit
– le sens prime sur la forme, la
propos ition sur le mot

3. La méthodologie directe

– pratique orale de la langue
– rejet de la langue maternelle
– réduction des activités de
traduction
– écrit relégué au second plan
– deux axes principaux: le
vocabulaire , introduit de manière
inductive et impli cite (objets,
images), et la prononciation
– grammaire enseignée de manière
inductive
– exercices de conversation et
questions/réponses dirigées
– l’écoute et la prise de parole sont
encouragées chez l’apprenant
4. La méthodologie audio -orale

– la priorité à l’oral
– la langue = un ensemble
d’habitudes, d’automatismes
linguistiques
– le vocabulaire – relégué au second
plan par rapport aux structures
syntaxiques.
– le professeur communique
uniquement dans la langue
étrangère.
– les exercices structuraux

5. La méth odologie active

– assouplissement de la méthode
orale 6. La méthodologie S tructuro -globale
audio -visuelle (SGAV)

– utilisation conjointe de l'image et du

50
– réutilisation de la langue maternelle
– retour du texte en tant que support
didactique mais peu de dialogues
– apprentissages organisés autour des
thèmes de la vie quotidienne
– usage d'images qui facili tent la
compréhension
– importance accordée à
l'enseignement de la prononciation
– grammaire enseignée de manière
inductive avec l'accent mis sur la
morphologie
– répétition non plus intensive mais
extensive des structures de la langue
son
– primauté absolue accordée à l'oral
– dialogues en situations de vie
quotidienne les plus courantes
– apprentissage par immersion,
imprégnation directe (lexique
enseigné sans rec ours à la traduction,
grammaire enseignée de manière
intuitive)
– exercices structuraux remplis de
sens et non seulement mécaniques

7. L'approche communicative

– l’erreur – dimension formative
– objectif: développer une
compétence de communication
– enseignem ent articulé autour des «
fonctions langagières », recensées
dans le « Niveau -Seuil », travail sur
les 4 compétences (CO, CE, PO,
PE);
– prise en compte des besoins
langagiers des apprenants;
– mise en place de situations réelles
d’échanges, documents
authen tiques ou dialogues à
caractère vraisemblable;
– sensibilisation des apprenants aux
différents registres de langue;
– grammaire enseignée de manière
inductive/explicite, contenus
grammaticaux regroupés autour de
macro objectifs : décrire, raconter,
exprimer ;
8. L'Approche ou la perspective
actionnelle
LA TÂCHE
– complexe, ouverte, non guidée,
contextualisée ;
– le problème à résoudre est non
seulement linguistique mais aussi
extra -linguistique
– évaluation criteriée
L’APPRENANT
– est actif, responsabilisé pour
organiser une action (en co -action)
sociale qui dépasse la situation
d'enseignement -apprentissage
scolaire;
– Surmonte obstacles langagiers,
affectifs, sociaux et pragmatiques;
– "Agir, réagir, interagir" deviennent
des " gestes " nécessaire à
l'apprentissage de la compétence
communicative.
L’ENSEIGNANT
– médiateur, conseillé, metteur en
scène, animateur, accompagnateur
– organise l'acte d'apprendre de façon
à faire faire aux apprenants
– " Faire agir, réagir et interagir "
devient des " actions "
incontournab les de l'enseignement
de FLE.

51
Chapitre 5 : L’enseignement de la grammaire

Actuellement, il s’avère bien difficile de se faire une idée précise des pratiques en usage dans
les classes de FLE en ce qui concerne l’enseignement de la grammaire. Cette comp osante
linguistique, qui a connu une période de disgrâce, une sorte de passage à vide dans les années
soixante et soixante -dix, semble revenue en force aujourd’hui dans la classe de langue. Ce retour
démontre qu’elle est incontournable pour quiconque veut apprendre à communiquer en français.
À l’heure où l’éclectisme paraît légitimé, les pratiques les plus hétérogènes se côtoient. Certains
enseignants, très marqués par la grammaire notionnelle/fonctionnelle dans la lignée du Niveau –
seuil et d’ Archipel , prat iquent un enseignement fondé sur le sens; d’autres, peu convaincus par
ces méthodes, sont revenus à une approche beaucoup plus traditionnelle; d’autres encore, dans le
doute, tentent de concilier les extrêmes, partagés entre l’attrait pour une démarche
onomasiologique et l’influence d’une grammaire (très) traditionnelle qu’ils connaissent et
maîtrisent bien. Au milieu de cette confusion, il est difficile de dégager quelques lignes
directrices porteuses d’une cohérence génératrice de principes eux -mêmes cohé rents pouvant
donner lieu à des pratiques de classe plus unifiées, sécurisantes pour l’enseignant comme pour
l’apprenant.64
Rojas a remarqué qu’aucune méthode d’enseignement du français ne saurait se dispenser de
la réflexion grammaticale, quelle que soit l a part faite explicitement à la grammaire dans la
classe. Mais on n’enseigne pas la grammaire pour apprendre la grammaire mais pour acquérir
une certaine compétence grammaticale, intérioriser une certaine connaissance grammaticale afin
d’en arriver à utili ser adéquatement la langue. Dans cette perspective, enseigner la grammaire
veut dire entre autres activités, exposer l’apprenant à un certain type de description ou de le faire
découvrir et apprendre la grammaire d’une langue signifie se familiariser avec une certaine
description de cette langue. Pour ce faire, il faut d’abord délimiter le champ d’étude de la
grammaire. Est -ce l’ensemble des connaissances morphologiques et syntaxiques orales et écrites
d’une langue comme on prétendait avant les années 60 ? Dans ce cas, connaître la grammaire
d’une langue signifiait connaître les terminaisons verbales, les suffixes, les préfixes, l’ordre des

64 Fougerouse M. -C., « L'enseignement de la grammaire en classe de français langue étrangère » in ELA. Études de
linguistique appliquée , 2001/2 no 122, p. 165

52
mots dans la phrase. Mais avec N. Chomsky et son école, grammaire est synonyme de
linguistique ou langue. Pourtant, on reproche à cette école de ne pas tenir compte des situations
de communication concrètes dans lesquelles toutes langues s’utilisent, c’est -à-dire des règles
d’emploi de la langue qui varient selon les situations. Pour remédier à cela D. Hymes, un
sociolingu iste américain propose de recourir au concept de compétence de communication.65

5.1. La compétence de communication

D. Hymes définie la compétence de communication comme comprenant non seulement les
connaissances grammaticales mais aussi la connaissance des rè gles d’emploi que possèdent les
locuteurs d’une langue donnée. Après Hymes, il y avait des débats des linguistes et didacticiens
sur ce problème qui ont des conséquences considérables sur la didactique des langues. A la suite
de ces débats, de nombreux aut eurs en didactique des langues s’entendent en ce qui concerne la
compréhension de la compétence de communication. Aussi, M. Canale &M. Swain (1980)
définissent -ils que toute compétence de communication est constituée des quatre composantes
suivantes :
 Comp osante grammaticale , comprenant la connaissance du code linguistique (du
vocabulaire, des règles de la formation des mots, de la prononciation, de la formation des
phrases)
 Composante sociolinguistique qui est la connaissance des règles socioculturelles
permettant d’interpréter la signification sociale des énoncés.
 Composante discursive comprenant des règles de cohésion (les liens entre phrases ou
entre parties de phrase, des règles de cohérence (les liens de sens entre énoncés avec ou
sans marques linguist iques formelles.)

65 Phan Thi Tinh, École Supérieure de Langues – Université de HaNoi, « Enseignement/Apprentissage de la
Grammaire du FLE. Observations et propositions pédagogiques. » , Séminaire régional de recherche en didactique
du FLE du 2 au 5 décembre 2002 à Phnom Penh – Cambodge, p. 120

53
 Composante stratégique : ce sont les mécanismes de compensation (la paraphrase,
l’emploi des mots génériques…) qu’utilisent les locuteurs pour contourner les ratés de la
communication, les oublis de mots, etc.66

5.2. La composante gramm aticale

Quant à C. Germain & H. Séguin qui optent pour une conception relativement élargie de la
grammaire, la composante grammaticale comprend la connaissance à la fois des règles d’usage et
des règles d’emploi.
 Les règles d’usage (structures grammatica les, aspects morphologiques, et syntaxiques)
C’est la connaissance des règles d’usage qui permet de produire des énoncés bien formés
grammaticalement.
 Les règles d’emploi : Selon bon nombre de linguistes appliqués et de didacticiens, pour
bien communiquer dans une langue donnée, il faut, d’une part, connaître les règles de
cette langue, de l’autre, l’énoncé doit être approprié au contexte linguistique et à la
situation de communication en tenant compte des caractéristiques du locuteur, de son
statut social, du registre de langue utilisé, etc. Les règles d’emploi englobent, donc, les
règles de cohésion à l’aide des marques linguistiques formelles et les règles de cohérence
qui est d’ordre sémantique. Ainsi, pour la deuxième tendance, acquérir une langue
consi ste non seulement à comprendre et à produire des énoncés grammaticalement
corrects grâce à la connaissance des règles d’usage mais aussi à maîtriser les règles
d’emploi de façon à ce que les énoncés soient appropriés à l’intention et à la situation de
comm unication.
Il en résulte que règles d’usage et règles d’emploi sont toutes les deux nécessaires dans la
communication et doivent toujours aller de pair.

66 Phan Thi Tinh, École Supérieure de Langues – Université de HaNoi, « Enseignement /Apprentissage de la
Grammaire du FLE. Observations et propositions pédagogiques. » , Séminaire régional de recherche en didactique
du FLE du 2 au 5 décembre 2002 à Phnom Penh – Cambodge, p. 120

54
5.3. La place de la grammaire en classe de FLE

On sait qu’enseigner une langue n’est pas seulement enseigner la grammaire parce qu’elle
n’est qu’une composante de la langue. Mais quelle est la place qu’occupe la grammaire dans un
programme ou un cours de langue ? Cela dépend de beaucoup de facteurs surtout des apprenants
(de leur âge, de leur niveau de connaissance, de leur niveau de scolarité, etc.) mais aussi des
objectifs à atteindre.

5.3.1. L’apprenant

L’enseignement en général et l’enseignement des langues en particulier, présuppose qu'il y
ait quelqu’un qui soit prêt à les apprendre. C’est donc une action dont le résultat dépend de deux
protagonistes : l’enseignant et l’apprenant. Cependant, il n’y a l’enseignement que s’il y a
quelqu’un qui apprend quelque chose. Mais, on peut apprendre une langue sans passer par
l’enseignement. Aussi, est -il plus logique d’aborder en premier lieu l’apprentissage des langues
au lieu de leur enseignement. H. Besse et R. Porquier, font à peu près la même remarque sur
l’apprentissage et l’apprenant à propos de l’analyse contrastive et l’analyse des erreurs : « Les
notions de grammaire pédagogique et de grammaire d’apprentissage prennent en compte
l’influence de la langue maternelle et l’apparition d’erreurs, grammaticales ou autres dans toute
situation d’enseignement/apprentissage. Une esquisse de l’évolution récent e des conceptions des
idées et des recherches en ce domaine aide à comprendre comment et pourquoi la didactique des
langues en vient à donner actuellement une place et un rôle centraux à l’apprenant et à
l’apprentissage ».67 L’apprenant est donc un élément important dans l’activité
d’enseignement/apprentissage. Un programme de ce type doit tenir compte de son style
d’apprentissage. L’âge de l’apprenant est aussi un facteur non négligeable. En effet, on
n’enseigne pas de la même façon à un enfant de 6 ans qu’ à un enfant de 10 ans. Plus l’apprenant
est jeune moins il est en mesure de comprendre les règles ou de vraiment les intérioriser. Par

67 Phan Thi Tinh, Ecole Supérieure de Langues – Université de H aNoi, « Enseignement/Apprentissage de la
Grammaire du FLE. Observations et propositions pédagogiques. », Séminaire régional de recherche en didactique
du FLE du 2 au 5 décembre 2002 à Phnom Penh – Cambodge, p. 121

55
ailleurs, les adolescents et les adultes ont besoin, en règle générale, d’accorder de l’importance
aux aspects formels de la langue.
La question de degré de scolarité joue également un rôle, plus l’apprenant a un degré élevé
de scolarité reçue, plus il réclame lui -même de grammaire, et vice versa.
Le rôle de la langue maternelle doit également être revalorisé et elle est con sidérée comme le
filtre obligé de tous les apprentissages. La méthodologie cognitiviste est considérée comme une
approche indirecte de la langue étrangère puisqu’elle a recours à la langue maternelle, elle
accepte la comparaison et même la traduction pour faire réfléchir les apprenants sur les analogies
et les différences des systèmes communicatifs en présence, sur les rapports entre connaissance de
la langue maternelle et acquisition de la langue étrangère, surtout en ce qui concerne la
grammaire.
Le vécu langagier de l’apprenant est aussi reconnu et largement pris en compte dans le cursus
de l’enseignement. Enfin, le bagage linguistique de la langue maternelle et/ou une autre langue
est considéré comme précieux, ce dont on doit profiter pour enseigner et a pprendre une ou
plusieurs autres langue(s).68

5.3.2. Les objectifs à atteindre

Pour fixer un programme, en dehors de la variable apprenant, il faut tenir compte également
des objectifs du cours ou du programme (quelles sont les connaissances à faire app rendre)
quelles compétences à développer ? Si l’on veut, par exemple, développer la compétence de
production écrite, l’importance accordée aux aspects formels de la langue est plus grande que s’il
s’agit de la compréhension. Une prise en compte des besoins langagiers des apprenants s’impose
aussi. Le traitement grammatical, en classe de langue sera en fonction du type de besoins
langagiers identifiés au préalable.

68 Phan Thi Tinh, Ecole Supérieure de Langu es – Université de HaNoi, «Enseignement/Apprentissage de la
Grammaire du FLE. Observation s et propositions pédagogiques. », Séminaire régional de recherche en didactique
du FLE du 2 au 5 décembre 2002 à Phnom Penh – Cambodge, p. 122

56
L’importance de la grammaire accordée à un programme ou à un cours de langue dépend
essentiell ement des facteurs reliant aux apprenants et aux objectifs. Mais il faut déterminer quels
sont ceux qui sont les plus importants ? Quel est le poids relatif à chacun ?69
On constate qu’aujourd’hui, il y a une diversité des situations scolaires, des milieux des
apprenants, des objectifs ; c’est pourquoi affirmer que le choix des éléments grammaticaux à
enseigner et du type d’enseignement approprié doivent varier en fonction de ces paramètres,
s’avère une banalité de la didactique des langues. Pourtant, avec l a diversité pédagogique, la
diversité et l’évolution de l’étude de la grammaire exigent un réexamen de la nature, de la place,
du contenu, du mode d’enseignement/apprentissage de la grammaire dans un programme ou un
cours de langue.

Pour les enseignants, la grammaire est la composante linguistique qu’ils estiment la plus
importante en classe de langue, avant le lexique, la civilisation et la phonétique. À l’aube du
nouveau millénaire, il semble bien que le rejet dont elle a souffert durant la période rigid e de
l’approche communicative ne soit plus à l’ordre du jour. Même s’il est incontestable que
l’apprenant apprend à communiquer en communiquant, il ne peut néanmoins se passer de
grammaire dans les pratiques langagières. Tout se déroule comme si la grammai re redevenait un
passage obligé pour l’enseignement du français. Toutefois, il ne faut pas en conclure que cette
dernière serait l’unique objet de l’enseignement, car il est précisé que la compréhension et
l’expression orales sont également importantes. Po ur les enseignants, il existe une relation
évidente entre un enseignement (/apprentissage) formel de la langue et la mise en pratique des
formes dans des situations de communication essentiellement orales. Les enseignants de FLE
appliquent le principe de l ’approche communicative selon lequel l’apprentissage de la langue
passe par des pratiques communicatives en langue cible, mais avec de la grammaire. Dans le
cadre de la classe, cette dernière est ancrée dans une réalité textuelle et contextuelle : il cesse rait
d’y avoir une coupure entre emplois et formes, on tendrait enfin vers la complémentarité.70

69 Ibid. , p. 122
70 Fouger ouse M. -C., « L'enseignement de la grammaire en classe de français langue étrangère », ELA Études de
linguistique appliquée , 2001/2 no 122, p. 166

57
Ce retour en force de la grammaire dans la classe de langue paraît correspondre aux attentes
des apprenants, car c’est elle qui suscite le plus d’intérêt de leu r part. Elle devance le lexique et
la civilisation, la phonétique n’apparaissant pas comme primordiale. Il y a donc correspondance
entre ce qu’attendent les apprenants et ce que proposent les enseignants. Cependant, il faudrait
éviter de tomber dans l’écue il d’un enseignement de la langue toujours plus grammaticalisé sous
prétexte que les apprenants sont enthousiastes et en réclament davantage. Il semble que les
enseignants, sous la contrainte de la demande, ont été obligés de réintroduire de la grammaire
dans leur enseignement. Cette réintroduction s’est faite au détriment d’une ou plusieurs autres
composantes qu’il est difficile de définir avec certitude. Tout au plus pouvons -nous émettre
l’hypothèse que la pratique de l’oral est moins présente, même si el le est indispensable pour
parvenir à la maîtrise du français.
Il convient d’autre part de s’interroger sur les causes de cette reconnaissance de la valeur de
la grammaire par les enseignants comme par les apprenants. Peut -être leur apporte -t-elle un
sentim ent de sécurité. Lorsque l’apprenant prend connaissance d’une nouvelle règle de
grammaire, il a l’impression de maîtriser une partie du système linguistique, même si le réemploi
dans des situations de communication ne va pas toujours de soi. Pour un appren ant en français,
apprendre la grammaire, même avec une approche traditionnelle, c’est parvenir progressivement
à appréhender la langue. Il la perçoit comme un élément de stabilité parmi le nombre plus ou
moins élevé de réalisations langagières potentiellem ent possibles pour un acte de parole. Ce
dernier étant lié à la situation de communication entendue au sens large, il n’est pas aisé – ni
d’ailleurs souhaitable – de proposer un inventaire exhaustif que l’apprenant apprendrait par
cœur. L’enseignant, consc ient de ces limites mais aussi de la nécessité de prendre appui sur ce
qui lui semble le plus stable dans la langue, intègre la grammaire dans son programme de
cours.71

71 Fougerouse M. -C., « L'enseignement de la grammaire en classe de français langue étrangère », ELA. Études de
linguistique appliquée , 2001/2 no 122, p. 167

58
***

Pour la réussite dans l’enseignement de la grammaire, l’enseignant doit tenir compte tout
le temps d’une part, de l’apprenant – de son âge, de son degré d’éducation, de sa culture, de sa
situation familiale et de ses intérêts – et, d’autre part, des règles de grammaire qu’il doit mettre
dans des contextes différents, mais pertinents .

59
Chapitre 6 : De la subjectivité

Pour avoir une vision plus ample sur la notion de subjectivité, nous allons procéder à une
brève présentation historique de la notion et de son poids dans l’enseignement du FLE, afin
d’aboutir à la subje ctivité de la cohérence textuelle et à la subjectivité didactique.

6.1. La relation corps -esprit

Dans l’ouvrage Du cerveau au savoir, J. R. Searle affirme : « La subjectivité des états
mentaux est la troisième caractéristique difficile à accorder avec notre conception scientifique de
la réalité. Cette subjectivité est pourtant si évidente que, lorsque j’éprouve une douleur, vous ne
l’éprouvez pas ! Je vois le monde de mon point de vue et mon voisin du sien. Je suis conscient de
mon identité et de mes ét ats mentaux, je sais qu’ils sont bien distincts de ceux des autres. »72

Quelle est l’origine de la subjectivité ? On ne peut pas le dire exactement ; de point de
vue rationnel on ne peut pas l’expliquer ; on sait seulement que c’est une caractéristique des êtres
humains. Nous sommes faits pour être différents, pour parler et penser de façon distincte. Searle
parle d’une subjectivité physique et d’une subjectivité de pensée, grâce auxquelles nous avons
notre propre identité.
On observe que de la subjectivité physique on arrive à la subjectivité de pensée, qui nous
fait avoir des opinions différentes et des pensées différentes, desquelles nous sommes tous
conscients. Searle parle aussi de trois autres caractéristiques de l’être humain : la conscience,
l’intent ionnalité et la causalité mentale. La conscience est celle qui nous fait percevoir la
subjectivité des gens, mais on a le libre -arbitre qui nous donne une grande indépendance et une
grande liberté. Grâce au libre -arbitre nous pouvons accepter ou non la sub jectivité, mais nous
observons de plus en plus, dans les situations quotidiennes, qu’il est mieux de l’accepter et de le
reconnaître, parce que de cette façon on se respecte soi -même et on respecte aussi la personne
voisine et son individualité.

72 Searles, R. J., Du cerveau au savoir, Paris, Collection savoir Hermann, 1984

60
6.2. Le s ujet et la subjectivité

Dans le PETIT LAROUSSE 2003, le terme de sujet est défini de la manière suivante:
SUJET n.m. (lat. subjectum , ce qui est subordonné). 1. Ce sur quoi on parle, en écrit, on
compose. Le sujet d’une conversation, d’un film. Sujet d’ examen. Sortir de son sujet. Etre hors
sujet. 2. Cause, motif d’une action, d’un sentiment. Quel est le sujet de votre dispute ? – Au sujet
de : à propos de, relativement à. – Avoir sujet de : avoir un motif légitime de. Avoir sujet de se
plaindre. 3. MUS. Thème principal d’une fugue. 4. a. GRAMM. Fonction grammaticale exercée
par un groupe nominal, un pronom, un verbe à l’infinitif, etc., et qui confère au verbe ses
catégories de personne et de nombre. b. LOG. Dans une proposition, ce à quoi se rapportent les
propriétés. 5. Etre humain que l’on soumet à des observations. – Bon sujet : personne digne
d’éloges – Mauvais sujet : personne dont on désapprouve la conduite. 6. Danseur, danseuse de
ballet, selon la hiérarchie du corps de ballet de l’Opéra de Paris. 7. DR. Sujet du droit : personne
titulaire de droits ou d’obligations. 8. PHILOS. a. Etre pour lequel le monde extérieur, le contenu
de sa pensée constitue un objet. b. Conscience libre et créatrice de sens, fonctionnant comme
principe explicatif de tout fait humain. c. Individu qui est le support d’une expérience, d’une
action, d’un droit, d’une connaissance. 9. LING. Actant, agent.73
Dans le même dictionnaire, la subjectivité est définie de la suite :
SUBJECTIVITE n. f. 1. Caractère de ce qui est subje ctif (par oppos. à objectivité ). 2. Domaine
de ce qui est subjectif.74
Depuis l’âge classique, qui l’a élaboré, le concept de sujet renvoie à la plus complexe des
réalités, la réalité humaine, à la fois évidente et problématique. Husserl parle de « présence
vivante de soi »75. Il y a dans le rapport que j'entretiens avec moi -même une évidence
préréflexive autoréférentielle. Mais le « sujet » implique un nécessaire décentrement : la
grammaire distingue le génitif objectif et le génitif subjectif (la crainte de s ennemis à la fois la
crainte éprouvée à l'égard des ennemis et celle éprouvée par les ennemis). Dans la question du
sujet, il est question de la place occupée .

73 Le Petit Larousse , 2003, p. 973
74 Ibid., p. 969
75 Christian Godin, Le sujet, source internet www.christian -godin.com/cours/1364820633_sujet.doc , con sulté le 15
novembre 2016, p. 1

61
Mais la subjectivité n'épuise pas, tant s'en faut, la question du sujet. Celle -ci n'est
d'aill eurs pas née avec elle. Le terme de « sujet » renvoie en effet à trois plans de sens différents:
la sujétion, la subjectivité, et « la subjectité », néologisme introduit par les phénoménologues76.
C'est Descartes qui, avec le cogito, a donné à la dimension de subjectivité son caractère
prévalant. Ce qui ne signifie pas la levée des incertitudes. L'ambivalence de la subjectivité
apparaît de façon particulièrement nette dans sa relation à l'objectivité, à laquelle elle s'oppose
mais dont elle est le fondement nécessaire. Il n'y a d'objet que pour et par un sujet. Seul un sujet
peut être objectif mais la dualité du subjectif et de l'objectif est récente : elle nous vient de
Baumgarten.
La subjectivité est plus qu'un caractère, elle est une essence et un fondemen t. Échappant
à la fois à l'observation empirique et à l'universalité du concept, elle n'est pas un objet aisé
d'analyse. Mais, depuis Descartes, tous les philosophes lui ont accordé une place centrale. « La
philosophie du sujet, écrit Michel Henry, est la métaphysique de la représentation, laquelle
s'inscrit dans l'histoire de la métaphysique occidentale »77. Cette histoire a une préhistoire, et
aussi peut -être une fin. Mais avant d'analyser cela, il convient d'examiner les différents sens que
« sujet » peut avoir et les différents termes qui gravitent autour de lui.

6.3. Genèse de la subjectivité

Le réel peut avoir un triple fondement : sur une transcendance (Nature, Dieu), sur lui –
même, ou sur la subjectivité. Il est caractéristique que la théologie du Mo yen Âge se refuse à
définir Dieu comme sujet. Que l'émergence de celui -ci soit pour la première fois théorisée par
Descartes (c'est la thèse de Hegel reprise par Heidegger) ou par Pic de la Mirandole et les
hommes de la Renaissance (c'est la thèse d'Ernst Cassirer), il reste que l'homme moderne va se
penser comme la source de ses représentations et de ses actes, comme leur fondement (leur sujet )
ou encore comme leur auteur . À partir du moment où le sujet est conçu comme le fondement de
l'étant, se posera la question – parfaitement étrangère aux Grecs – de savoir si le monde existe
indépendamment de la pensée et s'il est bien tel que la pensée se le représente. Les problèmes de

76 Voir infra .
77 Michel Henry, Phénoménologie de la vie. De la subjectivité, (tome II), Paris, PUF, 2011, p. 17.

62
la réalité et de la vérité auxquels idéalisme et le réalisme donneront des réponse s inverses sont
directement issus de l'établissement du sujet fondateur par la philosophie moderne.
Deux voies s'ouvriront à la psychologie à partir du XIXe siècle : celle de l'intériorité et
celle de l'extériorité, l'intimité ou le comportement. La psycho logie scientifique suivra
l'injonction d'Auguste Comte : il n'y a de connaissable que ce qui peut être observé par un tiers.
L’intériorité est l'affaire des littérateurs ou des métaphysiciens. De fait, c'est de leur côté qu'on
repérera la genèse de la subj ectivité.
La philosophie s'est trouvée confrontée à un problème d'apparence aporétique : peut -il y
avoir une expérience objective de la subjectivité ? Lorsque les sciences nous disent que nous
pensons et sentons avec notre cerveau, elles nous l'apprennent, nous ne l’éprouvons pas. La
pensée du sujet implique une ontologie spécifique. La réponse tautologique faite par Yahvé à la
question de Moïse78 « Je suis celui qui suis » peut être interprétée ou bien comme l'expression
d'un refus de répondre, ou bien comm e : « Je suis l’Être même ». Le sujet, qui devrait être
fondement et plénitude, semble fatalement lié à une déchirure originaire. L'expression
paradoxale de « maîtrise de soi » dit l'assujettissement constitutif du sujet lui -même : si une
partie du sujet e st esclave et l'autre, maître, cela signifie de facto que le même est à la fois maître
et esclave.
Pour Foucault, le « se connaître soi -même » ne peut être compris que dans une question
plus vaste, et qui lui sert de contexte : que faire de soi -même ?79 La perception de soi, absente
chez Platon et Aristote, apparaît avec les Stoïciens. Le speculator , chez Sénèque, celui qui se
regarde soi -même, se voit comme dans un miroir ( speculum ) – de là la spéculation. Le souci de
soi, analyse Foucault, vient d'un chang ement de direction, d'une conversion vers soi. Le
christianisme aurait inversé le sens de cette conversion en l'interprétant comme une sortie hors
de soi vers le grand Autre (Dieu). Mais le christianisme n'est pas seulement une religion du salut,
rappelle Foucault, il est aussi une religion confessionnelle qui, bien plus que les religions
païennes, impose des obligations strictes en matière de vérité80. La confession des péchés et la
pénitence, inconnues des Grecs, ont rapport direct avec la vérité cachée (e t mauvaise) du sujet.
Foucault distingue trois grands types d'examen de soi: a) celui par lequel on évalue la

78 Exode , 3,14
79 M. Fo ucault, « Subjectivité et vérité », Dits et Écrits II, 1976 -1988 , Paris, Gallimard, 2001, «Quarto», p. 1032.
80 M. Fou cault, « Les techniques de soi », ibid., p. 1623.

63
correspondance entre les pensées et la réalité (c'est la démarche cartésienne) ; b) celui par lequel
on juge de l'adéquation entre les pensées et les règles (c'est la démarche stoïcienne) ; c) celui par
lequel on apprécie le rapport entre une pensée cachée et une impureté de l'âme (c'est la démarche
chrétienne fondée sur l'idée qu'il y a en nous quelque chose de caché, et un voile d'illusion qui
nous masque ce secret)81.
Le christianisme des premiers siècles offrait au fidèle deux moyens d'exprimer sa vérité
profonde et cachée de pécheur : la mise en scène théâtralisée et la mise en mots contrite. Ces
deux modes devaient déboucher sur le renoncement d u sujet à lui -même, à sa volonté. À partir
du XVIIIe siècle, analyse Foucault, les sciences humaines hériteront de la pratique de
verbalisation, mais, au lieu d'impliquer le renoncement du sujet, elles contribueront à constituer
celui -ci82.
C'est donc le ch ristianisme qui représenta le moment décisif pour l'émergence de la
subjectivité moderne. La découverte de celle -ci, en effet, va de pair avec l'invention d'un Dieu
transcendant. Dans un monde peuplé d'une multitude de dieux, qui enserre la totalité des ch oses
dans un réseau serré de puissances invisibles, l’être humain s'éprouve comme un élément, une
partie de ce monde ; il ne peut prendre conscience de soi, dans sa finitude et son irréductible
valeur. Face à un Dieu unique, à l'inverse, il peut se poser c omme moi à la fois fragile et pourvu
d'une valeur infinie.
Je ne puis saisir tout ce que je suis, constate saint Augustin. L'esprit serait -il donc trop
étroit pour se posséder lui -même ? Mais où donc peut se trouver ce qui de son être lui échappe ?
En deho rs de lui ? Mais comment ne le saisit -il pas ? Voilà pour l'auteur des Confessions motif à
grand étonnement. Saint Augustin distingue la question « Qui suis -je ? » que l'homme s'adresse à
lui-même de la question « Que suis -je ? » que l'homme adresse à Dieu83. Qui d'autre que le
créateur, en effet, peut connaître la créature ? C'est en présence de Dieu que saint Augustin pose
la question de sa nature, qui est proprement une question théologique.
« Je suis, je connais, je veux. Je suis celui qui connaît et qu i veut. Je connais que je suis
et que je veux. Je veux être et connaître. À quel point notre vie est inséparable de ces trois
phénomènes – vie une, intelligence une, essence une – sans qu'il soit possible d'opérer une

81 Ibid., p. 1629.
82 M. Foucault, « Les techniques de soi », op. cit. , p. 1632.
83 Saint Augustin, Les Confessions , X, à Québec, par Samizdat, traduction de M. Moreau, chapitre XVII, p. 162.

64
distinction qui est pourtant réelle, l e comprenne qui peut »84. Dans l'analyse de l’autre triade
mens (esprit), notitia (connaissance), amor (amour), la doctrine de la circumincession des
personnes est mobilisée pour penser l'immanence mutuelle de la mens et de ses actes. Chacune
de ces vérités est en soi et cependant elles sont mutuellement dans les autres – toutes en toutes et
tout entières85.
Un passage de La Cité de Dieu est connu pour être le modèle de la démarche cartésienne:
« Puisque donc je suis, moi qui me trompe, comment me puis -je tro mper à croire que je suis, vu
qu'il est certain que je suis si je me trompe ? Ainsi puisque je serais toujours moi qui serais
trompé, quand il serait vrai que je me tromperais, il est indubitable que je ne me puis tromper
lorsque je crois que je suis »86.
L'invention de la perspective en peinture, à la fin du Moyen Âge, signifie que le regard
du spectateur, donc du sujet humain, est privilégié désormais aux dépens du regard vertical de
Dieu sur le monde. Le portrait, et a fortiori l'autoportrait, sont l'autr e grande expression picturale
du sujet émergeant. Dans l'histoire de l'art, le portrait apparaît relativement tard. L'homme, des
millénaires durant, a peint les dieux et les animaux avant de se peindre lui -même. L'art du
portrait apparaît en Égypte après l 'effondrement de l’Ancien Empire avec les peintures du
Fayoum : la vie et le monde n'étaient alors plus regardés sous l'angle de l'éternité, des
préoccupations temporelles nouvelles s'exprimèrent par l'individualisation des traits87. Le XVe
siècle n'invente donc pas le portrait mais le portrait libre, indépendant du contexte religieux.
Désormais, la figure est donnée à voir pour elle -même, et au même moment apparaît
l'autoportrait88, en Europe : pour la toute première fois, le peintre se voit et se peint. Son regard,
habitué à balayer le monde réel des êtres et des choses, ou celui, imaginaire, des anges, se met
soudain en arrêt devant lui -même et se prend comme objet propre. Au XVe siècle, le créateur
prend la place du Créateur. Van Eyck signe ses tableaux89. Bientôt Montaigne fera de lui -même

84 Saint Augustin, Les Confessions XIII, à Québec, par Samizdat, traduction de M. Moreau, chapitre XI, p. 237
85 Saint Augustin, La Trinité , Livre IX, chapitre V et VIII, consulté sur le site internet www.abbaye -saint -benoit.ch ,
le 15 novembre 2016
86 Saint Augustin, La Cité de Dieu , Livre XI, chapitre XXIV, consulté sur le site internet www.abbaye -saint –
benoit.ch , le 15 novembre 2016
87 L'hypothèse a été faite que le portrait vient de la croyance en la résurrection. Or cette croyance manque à l’Orient.
La renaissance n'est pas la Résurrection.
88 L'autobi ographie en littérature est l'analogue de l’autoportrait en peinture.
89 Jean Le Bon […] est le premier roi qui ait signé de sa main ses lettres patentes ; il est aussi le premier dont on ait
peint un portrait.

65
la matière de son livre et Michel -Ange, significativement, gravera son nom sur le ruban qui barre
la poitrine de sa Pietà .
Ce que l'histoire de Roméo et Juliette modifie par rapport à celle de Tristan et Yseult,
c'est qu' elle fait l'économie du philtre, la cause extérieure de la passion : elle montre qu'il n'existe
aucune haine entre familles qui soit telle qu'elle rende impossible l'amour entre deux
individualités.
Sur le plan économique, on assiste au XVIe siècle à la na issance du capitalisme, du
système de libre entreprise ; la propriété privée devient dominante. Sur le plan religieux, c'est la
réforme protestante, avec l'idée d'une relation directe entre le fidèle et Dieu (sans passer par
l'intermédiaire d'une Église) q ui substitue à la confession (publique) l'examen de conscience
(individuel). Joseph de Maistre était fondé à caractériser le protestantisme par « l'insurrection de
la raison individuelle contre la raison générale »90.

6.4. La dimension subjective dans le langage

La manifestation de la subjectivité ne s’arrête pas au niveau des états mentaux ou
physiques, nous la rencontrons aussi dans le langage et nous allons voir les formes sous
lesquelles elle se manifeste.

Dans son ouvrage L’énonciation de la subjec tivité dans le langage, Catherine Kerbrat –
Orecchioni affirme : Toute unité lexicale est, en un sens, subjective, puisque les « mots » de la
langue ne sont jamais que des symboles subjectifs et interprétatifs des « choses ».91 Nous
pouvons dire que les mots, en fonction de notre choix, représentent la manifestation de notre
subjectivité, parce qu’un même mot dans des situations différentes peut signifier des choses
différentes, comme le mot « petite » dans les exemples suivants :
a) Mais, elle est petite !
b) Ah, elle est petite !

90 Maistre, J. de, Écrits sur la Révolution , PUF, 1989, p. 219 -220.
91 Kerbrat -Orecchioni, C., L’énonciation de la subjectivité dans le langage, Paris, Armand Colin, 1999 , passim

66
En fonction du contexte et de l’intonation du locuteur, le mot « petite » peut signifier : «
mauvaise » ou « belle ». De nouveau le contexte joue un rôle important, parce que ces phrases
peuvent être prononcées dans des situations différ entes. Par exemple, le fils annonce sa mère
qu’il veut lui faire connaissance avec son amie. Quand la mère la voit, elle est enchantée parce
qu’elle est petite comme son fils. Dans un tel contexte nous avons une intonation ascendante qui
traduit l’état de bonheur :
« Ah, elle est petite ! » (petite = belle)
Dans un contexte comme le suivant : quelqu’un cherche une fille pour faire le ménage
dans une maison où les visites sont faites par des gens d’affaire où le s filles de taille petite n’ont
pas la permission d’entrer, parce que l’employeur veut que ses clients soient bien servis et qu’ils
ne doivent pas s’incliner pour servir quelque chose du plateau des filles. Dans une telle situation
« petite » est synonyme avec « mauvaise » ou « inadéquate », parce nous avons ici une
intonation descendante, de dégoût :
« Mais, elle est petite ! » (petite = mauvaise)

Aucun individu n’est libre de décrire la nature avec une impartialité absolue, mais
contraint, au cont raire, à certains modes d’interprétation alors même qu’il se croit le plus libre,
dit B. Lee Wholf. Donc, l’individu ne peut pas être impartial, même si le libre -arbitre nous fait
croire, dans certains moments, qu’on est absolument libre. Il y a à l’intéri eur de nous une force
qui nous fait introduire, sans le vouloir, dans notre langage une ou plusieurs connotations
subjectives.

Dans l’ouvrage cité, C. Kerbrat -Orecchioni parle de deux types de discours : le discours
objectif et le discours subjectif. Tand is que dans le discours objectif l’individu s’efforce à effacer
toute trace d’un énonciateur individuel, dans le discours subjectif l’individu s’avoue
explicitement. Par exemple :
« Je trouve ça moche. »
La subjectivité ne caractérise pas seulement les i ndividus, elle caractérise aussi les unités
lexicales, parce qu’elles sont en elles-mêmes chargées d’une dose plus ou moins forte de

67
subjectivité.92 Si on prend les mots suivants : célibataire, jeune, petit, bon et si on les met sur une
échelle, on observe qu’ils vont de l’objectif au subjectif :

Objectif Subjectif

Célibataire Jeune Petit Bon
De cette façon la réponse à la question de Todorov est affirmative « bon » implique -t-il le
locuteur d’une manière plus forte que « jeune » ?

L’utilisation de la subjectivité d’une manière excessive peut nous faire tomber dans une
dimension plus dangereuse, dit Kerbrat -Orecchioni et c’est l’abus de langage.93 Dans cette
situation, le taux de subjectivité est assurément plus fort, comme dans l’ex emple suivant :
« Georges Durand est égoïste »
où le mot « égoïste » apporte une implication très grande de la part du locuteur.

Kerbrat -Orecchioni parle d’une subjectivité prononcée rencontrée dans la presse. Elle
donne plusieurs exemples de la presse française, des articles apparus dans : Le Figaro, Le monde,
L’Aurore ; et si on pense à notre expérience personnelle on peut dire que son affirmation est
vraie. Il y a des situations où l’on rencontre dans des journaux différents articles ayant le même
sujet, mais il est interprété de façon différente, propre à l’auteur de l’article, ce qui peut nous
indiquer, le plus souvent, des pistes informatives fausses ou des informations en totalité fausses.

Les exemples de subjectivité de langage de Kerbrat -Orecch ioni ne s’arrêtent pas ici ; elle
donne encore un exemple de texte descriptif de G. Perec, où l’on rencontre une grande
subjectivité :
« Il y a beaucoup de choses place Saint -Sulpice, par exemple : une mairie, un hôtel des
finances, un commissariat de pol ice, trois cafés, dont un fait tabac, une église à laquelle ont

92 Kerbrat -Orecchioni, C., L’énonciation de la subjectivité dans le langage, Paris, Armand Colin, 1999 , passim
93 Ibid. , passim

68
travaillé Le Vau, Gittard, Oppenord, Servandoni et Chalgrin et qui est dédiée à un aumônier de
Clotaire II qui fût évêque de Bourges de 624 à 644 et que l’on fête le 17 janvier, un éditeur, un e
entreprise de voyages, un arrêt d’autobus, un tailleur, un hôtel, une fontaine que décorent les
statues de quatre grands orateurs chrétiens (Bossuet, Fénelon, Fléchier et Massillon), un kiosque
à journaux, un marchand de piété, un parking, un institut de beauté, et bien d’autres choses
encore. »
Le texte ne notifiera du paysage urbain que des choses vues par Perec, d’un lieu précis, à
un instant précis.
Perec insiste constamment sur le fait que tout ce qu’il décrit l’est « d’un certain point de
vue » (« Sur la terre pleine, il y a des bancs, des bancs doubles avec un dosseret unique. Je peux,
de ma place, en compter jusqu’à six. »)

La subjectivité dans le texte de Perec vient des problèmes suivants :
a) Les visions panoramiques et perspectivisées ;
b) L’exhau stivité de la description ;
c) Intervention par sélection ;
d) Hiérarchisation des informations ;
e) Intervention de type affectif ;
f) Intervention de type interprétatif.
Ce sont les marques de la subjectivité de langage dans le texte de Perec.

On voit bien, donc, q ue la subjectivité est présente dans une mesure moins ou plus grande
dans tous les domaines de l’activité humaine. Elle est présente, bien sûr, dans les manifestations
physiques et psychiques des gens. De cette façon, la liaison entre subjectivité et cohér ence
textuelle est assurée, parce que si la subjectivité est présente dans l’esprit humain et la cohérence
tient beaucoup de l’esprit, alors on a de la subjectivité aussi dans la cohérence textuelle.

69
6.5. La dimension subjective de la cohérence textue lle

Comme on a vu, la subjectivité est présente dans plusieurs secteurs de la vie humaine et
elle peut avoir plusieurs sens, opposés ; cela dépend du fait si l’on considère, tout simplement,
comme la caractéristique de la personne qui énonce ou comme la s omme des marques
spécifiques aux capacités intellectuelles et émotionnelles de celle -ci.

On a dit que la subjectivité est présente dans l’esprit humain, donc la cohérence textuelle
peut avoir elle -aussi une dimension subjective parce qu’elle tient de l’es prit. Bien sûr, on doit
admettre qu’il n’y a pas de subjectivité absolue. Tout au long des années, on a essayé d’expliquer
en quoi consiste la cohérence d’un texte ; on a donné en ce sens des marques linguistiques
d’après lesquelles on reconnaît un texte c omme étant cohérent ou non. On reconnaît que ces
marques sont nécessaires, mais elles ne sont pas suffisantes, parce que la cohérence ne tient
seulement, de la matérialité du texte, mais de l’esprit du locuteur ou interlocuteur. Michel
Charolles a donné le s méta -règles de cohérence qui ont le même destin que les marques, lui –
même ayant reconnu qu’elles ne sont pas suffisantes. Après cela, on a essayé d’utiliser la
cohérence comme principe d’interprétabilité, qui nous paraît un peu plus pertinent. Dans ce se ns,
Petöfi dit qu’un texte est déclaré accessible/cohérent si on obtient satisfaction communicative.
Mais il faut dire qu’on obtient satisfaction communicative si on reconnaît les informations
transmises par le texte ; si on ne les reconnaît pas, on n’obti ent pas la satisfaction. Ici intervient
Grice qui dit que dans la langue il y a un contrat établit entre les participants à un échange
communicatif. Tout d’abord, on fait confiance à notre interlocuteur, on suppose qu’il veut nous
écouter / lire les pages que nous avons écrit ou, au moins, on suppose qu’il veut apprendre des
choses nouvelles, on lui accorde un crédit de confiance. La plus ample est la théorie de
pertinence proposée par Sperber et Wilson. Ils introduisent la notion de « connaissances »
encyc lopédiques et logiques que le locuteur doit posséder pour déclarer un texte cohérent ; et à
propos du contrat de coopération de Grice, Sperber et Wilson proposent la notion de
« environnement cognitif » : ce sont les informations connues par tous les parti cipants à la
communication. Ici intervient un problème : d’où on sait que l’interlocuteur possède les mêmes
informations que le locuteur ? On ne le sait pas, mais on le suppose et si cette supposition est

70
fausse, alors la communication finit par un échec. Un autre problème peut être le suivant :
l’interlocuteur possède d’autres informations que le locuteur, alors il peut donner au texte une
interprétation fausse ou subjective. Nous sommes arrivés de nouveau à la notion de subjectivité.
Jusqu’ici nous avon s parlé de la subjectivité dans la psycholinguistique et dans le
langage, maintenant nous allons essayer de dire en quoi consiste la subjectivité de la cohérence
textuelle.

Nous avons vu qu’il y a dans la cohérence textuelle une dimension rationnelle ass urée par
les marques linguistiques, les règles de cohérence et les maximes, mais il y a une partie dans
toutes ces théories qui est insuffisante et où intervient un phénomène qu’on nomme
« subjectivité ». Dans cette perspective, un texte peut être cohérent pour une personne et
incohérent pour une autre.
D’où vient cette subjectivité ? Nous avons vu que la subjectivité se trouve dans l’esprit
du locuteur, tout comme la cohérence, mais ici on trouve aussi les connaissances des individus
et, comme nous avons dit ces connaissances peuvent être partagées ou non. Donc, la subjectivité
est assurée :
– En premier lieu par les connaissances possédées qui sont très différentes d’une personne
à l’autre ;
– Un deuxième point de la subjectivité peut être la disponibilité à l’effort , les émotions
éprouvées par l’interlocuteur envers le texte ou envers le locuteur.
À partir de ces considérations on peut admettre :
1. Une subjectivité d’âge , parce que les connaissances des personnes peuvent être plus ou
moins solides en fonction de l’âge.
2. On peut avoir aussi une subjectivité des groupes sociaux : il y a des groupes sociaux qui
détiennent plusieurs informations que d’autres. Par exemple, il y a une très grande
différence entre les agents économiques et les poètes, et c’est facile à comprendre
pourquoi ; parce que le langage économique est connu seulement par ceux qui l’utilisent
et le langage poétique de même. Bien sûr, il y a des interactions, mais elles ne sont pas
suffisantes pour qu’un poète comprenne un texte économique.

71
3. Comm e on a affirmé plus haut, on peut avoir aussi une subjectivité qui vienne de la
disponibilité à l’effort de l’interprète. Les participants à l’échange communicatif
peuvent éprouver des émotions différentes et à cause de cela peuvent considérer le texte
cohérent ou incohérent. Ou, dans d’autres situations, l’interlocuteur peut ne pas vouloir
continuer à lire ou écouter ce que lui dit le locuteur parce qu’il n’a pas la disposition
nécessaire ou parce qu’il connaît tous ce qu’il dit. Donc, on ne peut pas dire que le savoir
est toujours partagé, il est seulement supposé partagé.

Sperber et Wilson parlent encore d’effort et d’effet ; en fonction de ces deux procédés on
peut déclarer un texte cohérent ou non. Mais, il faut préciser que l’effort est strictement l ié de ce
qu’on a parlé avant, des connaissances qui peuvent être partagées ou non. De cette façon, une
personne qui ne possède pas les connaissances demandées par le texte fait un effort plus grand et
elle peut même considérer le texte incohérent, et inver sement : une personne qui possède les
connaissances demandées par le texte fait un effort plus petit et elle obtient l’effet plus vite, donc
elle peut considérer le texte cohérent ou non, en fonction de sa disponibilité.
En voici un exemple :
« L’exception française qu’est le régime des intermittents du spectacle, largement remise en
cause ces derniers mois, a spectaculeusement mis en grève la culture »
(Le français dans le monde nș 330 nov. /déc. 2003)
Dans cet exemple le mot qui pose un problème c’est l e mot « intermittent » qui peut
déterminer la cohérence du texte, en fonction de sa connaissance. Un lecteur qui ne connaît pas
ce terme peut déclarer le texte incohérent, bien sûr en lisant l’article on comprend qu’il s’agit des
artistes français. Ce n’es t pas un exemple très éloquent, mais on peut observer mieux la
manifestation de la cohérence textuelle par l’étude de différents textes interprété de différentes
personnes.
Dans cet ouvrage on veut montrer qu’il y a de la subjectivité aussi dans l’acte d idactique ;
et si on analyse avec attention les informations qu’on a présentées jusqu’ici sur la subjectivité et
les facteurs de son apparition, on peut bien affirmer qu’il y a de la subjectivité, sinon une grande
subjectivité dans l’acte didactique. Mais, on va discuter ce problème plus largement dans un
chapitre suivant.

72
6.6. La dimension subjective dans l´enseignement

L’objectif naturel de l’enseignement est de rendre l’apprenant de plus en plus autonome
dans sa capacité à produire en langue étrangère. Mais en didactique, l’autonomie de l’apprenant
est conçue comme la disparition progressive du guidage94. Cette disparition progressive suppose
une minoration progressive du rôle de l’enseignant et de l’enseignement au profit de
l’apprentissage.
Parallèlem ent à l’objectif d’acquisition de la langue, l’objectif que peut se fixer
l’enseignant, c’est de développer des compétences chez l’apprenant qui lui permettent de
participer activement à son apprentissage.95
D’ordinaire, on conçoit le rôle de l’enseignant comme étant le producteur de
l’apprentissage puisque c’est lui qui définit ce qui va être acquis, les moyens à mettre en œuvre
pour réaliser cette acquisition, les modalités de mise en œuvre de ces moyens et celui qui évalue
enfin le résultat de l’apprenti ssage. L’apprenant, quant à lui, fait ce qu’on lui dit de faire, comme
on lui dit de le faire.
Pour Porcher et Barbot96 « l’autonomie constitue à la fois un but et un moyen d’acquérir
une capacité à communiquer et à apprendre…seul. L’apprenant apprend, per sonne ne peut le
faire à sa place et le professeur doit résister à cette tentation. Il n’est qu’une aide à
l’apprentissage ». L’apprenant, en prenant en charge ses responsabilités dans son propre
apprentissage, apprend à apprendre ouvertement, cognitivemen t et explicitement.
Alors, un apprenant qui serait capable de produire son apprentissage, qui participerait à la
prise en charge de son apprentissage, ce serait un apprenant qui déterminerait, avec l’aide de
l’enseignant, ses objectifs, son parcours et le s moyens d’évaluer son apprentissage.
Il faut donner à l’apprenant les moyens d’exercer sa responsabilité sur son apprentissage
et le mettre en situation de le faire. Mais, comme il ne s’agit pas de le laisser diriger tout seul son

94 « …l’enseignement est une tentative de médiation organisée entre l’objet d’apprentissage et l’apprenant. C’est
cette médiation qui peut être appelée guidage. On appellera donc situation guidée la médiation organisée dans la
relation de classe. Dans cett e relation, l’enseignant est la partie guidante et l’apprenant la partie guidée. En revanche,
l’appropriation linguistique hors de la relation de la classe sera réputée non guidée » Cuq, J -P. & Gruca, I., Cours de
didactique du français langue étrangère et seconde , Grenoble, P.U.G., 2005, p. 123
95 Valenzuela, O., Université de Playa Ancha (Valparaiso -Chili), « La didactique des langues étrangères et les
processus d´enseignement/apprentissage », Synergies Chili n°6 – 2010, p. 83
96 Barbot, M. -J., Les auto -apprentissages , Paris, CLE International, 2000, p. 21

73
apprentissage, il faut lui apprendre à le faire, il faut lui apprendre à développer des compétences
de travail en autonomie.97
Bref, il s’agit d’apprendre à apprendre. Cela consiste à acquérir les savoirs et les savoir –
faire qui rendront l’apprenant capable de :
 se donner un o bjectif, c’est -à-dire définir ce que l’on va apprendre en fonction de ses
besoins et/ou de l’acquisition déjà réalisée ;
 sélectionner les moyens d’atteindre ces objectifs, c’est -à-dire comment l’on va
apprendre : choix des supports d’apprentissage et leurs techniques d’utilisation;
 organiser son apprentissage dans le temps et dans l’espace ;
 évaluer les résultats obtenus en fonction des objectifs visés ;
 évaluer l’apprentissage en tant que tel, c’est -à-dire la pertinence des décisions prises
en ce qui co ncerne le quoi et le comment.

Imaginons qu’un enseignant s’interroge sur les raisons pour lesquelles ses élèves ne
parviennent pas à assimiler une structure grammaticale qu’il a pourtant introduite, expliquée et
fait travailler comme les autres, et rech erche par conséquent la faille dans la méthode qu’il a
utilisée. La démarche véritablement didactique consistera de sa part à réfléchir à partir de chacun
des éléments extra -méthodologiques du champ didactique (donnés ici dans un ordre non
significatif) : 98
 l’évaluation : il se demandera, par exemple, combien exactement parmi ses apprenants
maîtrisent cette structure et à quel niveau (en reconnaissance, en production dans le cadre
d’exercices ad hoc, en situation d’expression personnelle spontanée), et il e nvisagera de
leur faire réaliser les tests correspondants ;
 les objectifs : il se demandera par exemple s’il n’a pas introduit trop tôt cette structure
dans la progression de son cours, ce qui fait que les apprenants manquent de la
motivation et/ou des moy ens linguistiques qui seraient nécessaires à son réemploi ;

97 Valenzuela, O., Université de Playa Ancha (Valparaiso -Chili), « La didactique des langues étrangères et les
processus d´enseignement/apprentissage », Synergies Chili n°6 – 2010, p. 84
98 Puren, C., « La di dactique des langues étrangères entre méthodologie et didactologie », Les langues modernes
n°3/1999, Paris – APLV, p. 6

74
 les pratiques : il se demandera par exemple s’il n’a pas expliqué la structure étrangère de
manière tout à fait différente de celle dont le professeur de langue maternelle ou d’une
autre langue é trangère explique le fonctionnement d’une structure parallèle dans ces
langues ; ou encore s’il n’a pas utilisé, pour le faire, des termes inconnus des élèves.
 les situations (d’enseignement/apprentissage) : il se demandera par exemple s’il n’a pas
expliqu é et fait travailler initialement cette structure à un moment où les apprenants
manquaient particulièrement de concentration (en fin de semaine, ou la veille de
vacances, ou à une heure qui précédait ou suivait un contrôle de mathématiques…) ;
 les matér iels : il se demandera par exemple si la structure n’a pas été introduite dans un
contexte (dialogue oral ou texte) qui oriente les apprenants sur des hypothèses erronées
concernant son fonctionnement,
 les modèles : il se demandera par exemple si ce n’est pas le modèle de description
linguistique auquel il a eu recours pour faire conceptualiser le fonctionnement de la
structure, et pour construire les exercices, qui est inadéquat ; ou si le modèle pédagogique
utilisé n’a pas été constamment trop directif (e xercices très guidés et fermés), ne
fournissant pas aux élèves suffisamment de situations personnelles de réemploi pour
amorcer chez eux le mécanisme d’appropriation ou transfert. 99

Il y a beaucoup de situations où l´enseignant ne réussit pas obtenir le résultat proposé au
commencement du cours, précisément à cause de cette subjectivité didactique qui intervient dans
le processus d´enseignement du FLE. On peut affirmer maintenant que cette subjectivité vient de
plusieurs facteurs :
 l´âge/le niveau des élè ves
 la disponibilité à l´effort des élèves et aussi de l´enseignant (ici on peut parler de l´heure
du cours, de l’état de santé)
 le matériel didactique (un film classique par exemple ne présentera beaucoup d’intérêt
pour les élèves d’un lysée technologique , par exemple)

99 Puren, C., « La didactique des langues étrangères entre méthodologie et didactologie », Les langues modernes
n°3/1999, Paris – APLV, p. 6

75
 le niveau d´éducation familiale (il y a des familles où le français n’est pas très apprécié et
alors, les élèves ne présentent pas beaucoup d’intérêt pour le français à cause de
l’éducation familiale)
 la situation matérielle des familles des élèves (on ne peut pas demander aux élèves de
faire une recherche sur internet s’ils n’ont pas d’internet ou bien, on ne peut pas leur
demander d’apporter à l’école des matériels qu’ils n’ont pas la possibilité de les acheter).
Il est impossible d´attend re le même résultat pour un même problème de grammaire, on
doit être conscient que les individus sont différents et subjectifs et à cause de ça on ne pas voir
tous les choses dans les mêmes couleurs. L´enseignant doit être satisfait si ses élèves connaisse nt
et reconnaissent les règles de grammaire, même s´ils les reproduisent de manières différentes.
Ainsi comme les élèves sont des individus différents, les enseignants sont aussi différents et ils
voient les choses de manières distinctes; c´est pourquoi, i ls doivent prendre les méthodes et les
didactiques seulement comme des exemples ou des modèles. Le parcours didactique est construit
/ doit être construit en tenant compte de la particularité du groupe des élèves, de leurs
préoccupations, de l´heure du cou rs et de tout autre facteur qui apparaît, connu par l’enseignant.
Certes, cela suppose de l´expérience, mais comme tout enseignant qui se respecte, nous croyons
aussi à la formation continue, tout au long de la vie.
Pour mieux comprendre la subjectivité d es enseignants, il suffit de regarder les fiches
postées sur le site internet www.didactic.ro . J’en choisirai quelques exemples, à voir dans les
ANNEXES de cet ouvrage.

76
7. Applications

7.1. Questionnaires
7.1.1. Questionnaire appliqué aux enseignants de FLE

On a appliqué un questionnaire à quelques enseignants de français pour voir quel est le
pourcentage de subjectivité en classe de FLE. A partir des réponses qu’on a reçues on va voir
quelles sont les facteurs qui déterminent cette subjectivité.

QUESTIONNAIRE

1. En classe de langue, à quoi accordez -vous le plus d´importance?
– au lexique
– à la phonétique
– à la civilisation
– à la grammaire
– autre …………………………………..
À cette qu estion la majorité des enseignants ont répondu qu’ils accordent le plus
d’importance au lexique, à la grammaire et puis à la phonétique. Très peu d’enseignants
accordent d’importance à la civilisation en classe de FLE.

2. En classe que -ce qui suscite le plu s d´intérêt de la part des apprenants?
– le lexique
– la phonétique
– la civilisation
– la grammaire
Les enseignants pensent que les élèves sont intéressés par la civilisation et puis par le
lexique. La grammaire n’est pas un point d’intérêt pour les élèv es.

77
3. Combien de temps (en %) consacrez -vous approximativement a la grammaire en classe?
………………………………………………………………………..
À cette question les réponses varient beaucoup. On accorde 50%, 30%, 40%, 60% à
l’étude de la grammaire en classe de FLE.

4. En cours, faites -vous un enseignement de la grammaire:
– implicite
– explicite
– déductif
– inductif
La majorité des enseignants font un enseignement déductif ou inductif. Une petite partie
fait un enseignement diff érent d’un problème à l’autre de grammaire.

5. Lors de l´étude du nom (le genre, le nombre):
– vous laissez les apprenants avec la règle sur laquelle ils se sont mis d´accord
– vous donnez la règle complète
– vous donnez une partie de la règle seulement
– vous donnez la règle approximative, rectifiable par la suite.
La majorité des enseignants ont répondu qu’ils donnent la règle complète ou une partie de
la règle seulement. Une autre partie ont dit qu’ils donnent la règle approximative, rectifiable par
la suite.

6. Quelles étapes suivez -vous en classe sur le nom?
……………………………………………………………………………………………………….
Les étapes décrites sont les suivantes :
– trouver des noms/identifier des noms
– identifier les règles
– trouver d’autres exemples
– utiliser les noms trouvés

78
7. Pour organiser la progression grammaticale en classe:
– vous vous appuyez sur un programme donné par votre centre de langue
– vous vous appuyez sur une méthode de langue
– vous organisez votre propre progression
Pour la progression grammaticale, les enseignants de FLE utilisent des méthodes de
langue et ils organisent leur propre progression.

8. Quand vous organisez la progression grammaticale vous tenez compte de (en %)
– l'âge des élèves
– l'heure de la classe
– du niveau des élèves
– la santé des élèves
Quand ils organisent la progression grammaticale ils tiennent compte du niveau des
élèves, de l’ âge des élèves et ensuite de l’heure de la classe.

9. Quel(s) ouvrage(s) de gr ammaire utilisez -vous pour préparer vos cours ?
…………………………………………………………………………………………………………….
Pour préparer les cours les enseignants utilisent les méthodes de langue c onsacrée s :
Alfred Jeanrenaud, Langue française contemporaine , la méthode „Bienvenue”, les livres de
grammaire de la Maison d’édition Booklet.

10. Quelle méthode de langue vous semble la plus proche de votre conception de
l´enseignement de la grammaire?
………… …………………………………………………………………………………………………….
La majorité considère qu’ils font un enseignement de la grammaire déductif.

11. Quels autres outils utilisez -vous pour l'enseignement du nom?
…………………………………………………………………………………………………………..
Les enseignants utilisent aussi des films, des jeux et des documents authentiques en
classe de grammaire.

79
12. Citez les types d'exerci ces que vous faites faire le plus souvent à vos apprenants ?
…………………………………………………………………………………………………………….. …..
Les exercices les plus utilisés sont les exercices de complétit ion, d’association, de type
V/F et de découverte (le sens, l’intrus).

MERCI!

80
7.1.2. Questionnaire appliqué aux élèves

Pour voir la différence d’opinion ou la grande subjectivité des acteurs de l’acte
d’enseignement, on a appliqu é un questionnaire similaire à quelques élèves de VIe, VIIe et VIIIe,
L1.

QUESTIONNAIRE

1. En classe qu’est -ce qui vous suscite le plus l´intérêt ?
– le lexique
– la phonétique
– la civilisation
– la grammaire
L’intérêt des élèves est très grand pour la civilisation; viennent après la phonétique et la
grammaire, et ensuite le lexique.

2. Lors de l´étude du nom (le genre, le nombre), vous préférez recevoir :
– la règle sur laquelle vous vous mettez d´accord
– la règle complète
– une partie de la règl e seulement
– la règle approximative, rectifiable par la suite.
Pour l’étude du nom, les élèves aimeraient avoir la liberté de se mettre d’accord sur la
règle de grammaire. Une autre partie ont répondu qu’ils aimeraient recevoir la règle complète.

3. Quand le prof organise la progression grammaticale vous pensez qu’il doit tenir compte
de (en %)
– l'âge des élèves
– l'heure de la classe
– du niveau des élèves

81
– la santé des élèves
Ici les réponses varient beaucoup. Il est certain que les élèves pensent q u’il faut tenir
compte de tous les facteurs pour organiser la progression grammaticale.

4. Quels types de documents voudriez -vous qu’on utilise pour l'enseignement du nom?
……………………………………………………………………….. …………………………………
Les élèves aimeraient travailler sur des méthodes de français, des documentaires, des
films, des jeux et des chansons.

5. Citez les types d'exercices que vous préférez ?
……………………………………. ……………………………………………………………………………
Les exercices préférés sont de découverte, d’identification et de transformation.

MERCI!

Remarques :

En analysant les réponses obtenues à ces deux questionnaires, on peut dire qu’il y a une
discordance entre les profs et leurs élèves. On dirait qu’il faut tenir compte davantage de l’élève
pour la réussite de la progression didactique et l’impliquer plus que d’habitude. On doit tenir
compte que lui -aussi est un être (un sujet), qu’il a des souhaits, qu’il a des problèmes d’ordre
physique ou psychique et que le prof doit le comprendre et l’écouter pour mieux pouvoir
l’intégrer et l’éduquer.
On observe que les élèves veulent participer activement à l’enseignement, ils désirent que
leurs professeurs présentent les problèmes de grammaire de manière plus compréhensible,
respectant leur niveau d’étude du français ; ils doivent également les impliquent souvent et les
maintenir toujours très actifs. C’est un problème assez d ifficile pour les enseignants, parce qu’on

82
ne peut pas faire cela tout le temps et, à ce point, interviennent de nouveau les facteurs dont on
déjà a parlé.
Il est certain qu’on doit essayer de trouver une solution de moment pour chaque situation
rencontré e et on doit être sûr que les progressions didactiques ne ressemblent entre eux, même si
on se propose un type de progression et on s’y organise. Une solution de réserve doit être
toujours à la portée de l’enseignant.
On peut dire que l’enseignement de no s jours est une sorte de contrat entre les élèves et
les enseignants. Les derniers sont aussi des observateurs, des médiateurs et des guides. Ils
doivent tenir compte, pour leur progression didactique, de tous les facteurs qui font qu’une
classe/un groupe d’élèves soit subjecti ve/f :
– l´âge / le niveau des élèves ;
– la disponibilité à l´effort des élèves et aussi de l´enseignant (ici on peut parler de l´heure
du cours, de l’état de santé des deux, etc.) ;
– le matériel didactique (un film classique ne présente ra beaucoup d’intérêt pour les élèves
d’un lycée technologique) ;
– le niveau d´éducation familiale (il y a des familles où le français n’est pas très apprécié
et, par conséquent, les élèves ne présentent pas beaucoup d’intérêt pour cette langue
étrangère) ;
– la situation matérielle des familles des élèves (on ne peut pas demander aux élèves de
faire une recherche sur internet s’ils n’ont pas d’internet ou bien, on ne peut pas leur
demander d’apporter à l’école des matériels qu’ils n’ont pas la possibilité d’a cheter /
procurer).
Si l’on réussit à intégrer dans notre démarche pédagogique tous les éléments qu’on a
présentés jusqu’ici, on peut dire qu’on a réussi à respecter le contrat et qu’on a une bonne
collaboration avec nos élèves.

83
7.2. Une brève analyse de quelques manuels de français

En Roumanie , on utilise encore , d’une façon assez continue, les manuels de l’édition
Humanitas Educational. La grammaire y est présentée très exhaustivement, on y met beaucoup
l’accent sur la grammaire, mais je crois qu’ ils sont dépassés, du point de vue de leur actualité et
l’enseignant doit les utiliser de moins en moins , s’il veut avoir des résultats. Il doit préparer sa
progression didactique en prenant en compte tous les facteurs de la subjectivité. Il faut considére r
qu’on prépare les élèves pour entrer dans la société actuelle et , à ce titre, il faudrait avoir en vue
leur personnalité, leurs problèmes, leurs souhaits et leur milieu familial.
Un autre manuel , couramment utilisé, est celui paru à la maison d’éditio n Cavallioti.
C’est une variante didactique plus accessible , mais de nouveau, qui date depuis longtemps . La
grammaire en est mieux (re) présentée, et pourtant l’enseignant doit utiliser aussi d’autres moyens
d’information pour maintenir éveillé l’intérêt de ses élèves.
On croit que c’est le cas pour la majorité des manuels de français roumains, il faut les
actualiser en utilisant d’autres moyens d’information afin d’ offrir aux élèves les renseignements
correcte s sous la forme accessible.
Par la suite, on présente quelques pages des manuels de Humanitas Educational, Ve
classe, L1 (p. 84 -85).

84

85

86

Le manuel de la même maison d’édition , pour la IIIe classe et la IVe classe, L1 , est construit
d’après le même schéma que celui de la Ve. Le problème le plus dif ficile est d’expliquer le genre
des noms quelle méthode utiliser ? Le plus souvent les enseignants expliquent aux élèves le
genre par « garçons » et « fillettes » (p. 86, 87, 88, 89, 90).

87

88

89

90

91
En ce qui concerne la méthode « Alex et Zoé », les choses sont différentes ; l’enseignant
a plus de liberté et il peut utiliser les ressources audio du manuel (p. 91, 92, 93, 94).

92

93

94

95
En guise de c onclusions

Dans ce travail, nous avons essayé de démontrer qu’il y a une dimension subjective au
niveau de l’en seignement du FLE, tout particulièrement dans l’enseignement du nom. On croit
que la réussite de la progression didactique dépend beaucoup de l’acceptation de cette
subjectivité. On doit traiter l’élève comme un partenaire de dialogue , non comme un témoin
passif de l’acte didactique. L e professeur est un médiateur, un ob servateur, un support « animé »
pour ses élèves, il les aide à découvrir le monde à travers ses yeux et grâce aux méthodes qu’il
considère les meilleures. Il doit toujours observer et analys er le résultat de sa progression
didactique et , s’il n’a pas réussi à obtenir le résul tat calculé , il doit en analyser les facteurs et être
prêt à changer ses méthodes, ses moyens d’information pour répondre aux attentes de ses élèves.
Imaginons qu’un ens eignant s’interroge sur les raisons pour lesquelles ses élèves ne
parviennent pas à assimiler une structure grammatica le qu’il a pourtant introduite et expliquée.
La démarche véritablement didactique consistera , de sa part , à réfléchir à partir de chacun d es
éléments extra -méthodologiques du champ didactique (énumérés de manière aléatoire) :
– l’évaluation : combien de ses apprenants maîtrisent cette structure et à que l niveau (en
reconnaissance et/ou en production dans le cadre d’exercices, en situation d’ex pression
personnelle spontanée), et il envisagera de les faire passer les tests correspondants ;
– les objectifs : il se posera la question, par exemple , s’il n’a pas introduit trop tôt cette
structure dans la progression de son cours, ce qui fait que les ap prenants sont dépourvus
de motivation et/ou de moyens linguistiques nécessaires à son réemploi ;
– les pratiques : il est très possible que l’enseignant fournisse des explications
inappropriées, complètement différentes par rapport à la langue maternelle de
l’apprenant, ou qu’il utilise des termes inconnus pour son public ;
– les situations (d’enseignement/apprentissage) : l’enseignant peut commettre la faute de
partager les connaissances dans un moment peu convenable pour les apprenants : en fin
de semaine, ou la veille de vacances, ou avant une épreuve écrite à passer en classe de
mathématiques) ;

96
– les matériels : l’enseignant peut introduir e les notions dans un contexte inadéquat
(dialogue oral ou texte) qui peut oriente r les apprenants vers des hypothèses err onées ,
concernant son fonctionnement,
– les modèles : le modèle de de scription linguistique auquel l’enseignant a eu recours pour
conceptualiser le fonctionnement de la structu re et pour construire les exercices, peut être
mal choisi ; ou si le modèle pédago gique utilisé n’a pas été constamment directif
(exercices très guidés et fermés), en ne fournissant pas aux élèves assez de situations
personnelles de réemploi pour amorcer , chez eux , le mécanisme d’appropriation ou de
transfert.
C’est pourquoi , pour un ré sultat satisfaisant, en tant qu ’enseignant , on doit tenir compte des
facteurs suivants qui font partie de la dimension subjective de l’enseignement :
– l´âge/le niveau des élèves ;
– la disponibilité à l´effort de l’apprenant et de l’enseignant ;
– le matériel d idactique ;
– le niveau d´éducation familiale de l’apprenant ;
– la situation mat érielle des familles des apprenants.
On ne peut attendre le s même s résultat s pour tous les apprenants, même si l’on considère
qu’on a utilisé les meilleur es méthodes et les docume nts authentiques les plus convaincants . La
subjectivité dans l’enseignement est une question délicate et variable, mais rien n’empêche
qu’elle soit maîtrisée par l’enseignant.

97
ANNEXE 1 – Fiches sur le nom
LE NOM

A. Classification
On peut class er les noms en:
● noms concrets (êtres, objets, phénomènes): livre, être humain, neige
● noms abstraits (idées, actions, caractéristiques): liberté, départ, intention
ou en:
● noms communs : homme, femme, ordinateur, ordre de paiement
● noms propres :
– prénoms: Mar ie, Louise, François
– noms de famille: Chirac, Raffarin
– noms de nations: les Roumains, les Français, les Italiens
– noms des habitants d’une localité: les Parisiens, les Viennois
– noms géographiques:
– pays: Roumanie, France, Belgique
– localités (vill es, villages): Paris, Château -Chinon
– régions: la Provence, la Normandie
– montagnes: les Carpates, les Alpes, les Pyrénées
– mers, océans: la Mer Noire, la Mer Méditerranée, l’Atlantique, le Pacifique
– rivières: le Danube
– institutions: l’Hôtel de Ville , le Palais de la Justice
– monuments: le Louvre, le Versailles
ou en:
● noms simples – un seul mot
● noms composés – deux ou plusieurs mots: sac à main, pomme de terre, timbreposte

98
B. Le genre des noms communs
1. arbitraire:
● Féminin en français : une affich e, une âme, une annonce, une armoire, une automobile, une
carotte, une chaîne, une chaise, une cloche, une conférence, une danse, une dent, une douche,
une enveloppe, une épaule, une foire, une horloge, une minute, une montagne, une mosaïque,
une montre, u ne poche, une pomme, une radio, une tête, une tour, une ville, une vitre.
● Masculin en français : un achat, un agenda, un art, un café, un champagne, un chiffre, un
climat, un doute, un front, un légume, un livre, un masque, un monde, un pain, un pays, un so uci,
un travail, un repas, un hiver, un bâtiment, un colis, un schéma.
Féminin:
● fruits: cerise, pomme, poire
exception: un abricot, un citron, un coing, un raisin, un melon
● sciences: la chimie, la géographie, l’histoire, la physique
exception: le droit
● arts: l’architecture, la danse, la peinture, la gravure
● fêtes religieuses: la Saint -Nicolas , la Saint Sylvestre
Masculin:
● arbres: le chêne, le pin, le sapin, le pommier, le poirier, le cerisier
● métaux: l’argent, l’or, le cuivre
● substances chimiques: le brome, l e chlore
● saisons: l’hiver, le printemps, l’été, l’automne
● jours: le lundi, le mardi
● mois: janvier, février
● langues: le romain, le français
● noms provenant des verbes:
– infinitifs: le dîner, le manger, le devoir, l’être
– participes présents: le passant, le vivant
– participes passés: le passé

2. sexe (mots différents)

99
● membres d’une famille: homme – femme; mari – femme; père – mère; fils – fille; frère –
sœur; gendre – bru; oncle – tante; neveu – nièce; parrain – marraine.
● animaux: cheval – jument; cerf – biche; singe – guenon
● oiseaux: canard – cane; dindon – dinde; jars – oie; perroquet – perruche; pigeon – colombe

3. sexe (formation du féminin)
● masculin + e muet: ami – amie
marchand – marchande
candidat – candidate
Français – Française chameau – chamelle
jumeau – jumelle
cadet – cadette
curieux – curieuse
loup – louve
vendeur – vendeuse
demandeur – demanderesse
mais: mineur – mineure
majeur – majeure
inférieur – inférieure
supérieur – supérieure artisan – artisane
paysan – paysanne
souverain – souveraine
copain – copine
cousin – cousine
voisin – voisine
boulanger – boulangère
berger – bergère
ouvrier – ouvrière acteur – actrice
directeur – directrice
ambassadeur – ambassadrice
empereur – impératrice citoyen – citoyenne
lycéen – lycéenne
patron – patronne

100
chat – chatte
hôte – hôtesse

4. métier / fonctions
● un (une) secrétaire, bibliothécaire, artiste, esclave, propriétaire, pensionnaire, touriste
● un auteur – une femme auteur
un médecin – une femme médecin
un magistrat – une femme magistrat
un ingénieur – une femme ingénieur
un écrivain – une femme écrivain
un historien – une femme historien
un professeur – une femme professeur
un journaliste – une femme journaliste
Monsieur le Maire – Madame le Maire
Monsieur le Préfet – Madame le Préfet
Monsieur le Président – Madame le Président

le critique – la critique
le mémoire – la mémoire
le parallèle – la parallèle
le souris – la souris
le vase – la vase

C. Le genre des noms propres
● personne s: Louis – Louise, François – Françoise, Jacques – Jacqueline
● pays:
féminin: la France, l’Italie, l’Egypte, la Hongrie, la Hollande
masculin: le Mexique, le Brésil, le Japon, le Canada, le Pérou, le Danemark, le Maroc
● villes:
masculin: Paris, Marseille, L ille, Bucarest, Belgrade, Le Havre

101
féminin: Rome, Venise, Genève, La Rochelle, La Havane
● montagnes:
masculin: le Jura, les Balkans
féminin: les Alpes, les Andes, les Carpates, les Vosges
● eaux:
masculin: le Rhin, le Rhône, le Danube, le Tibre
féminin: la Se ine, la Loire, la Tamise

D. Nombre des noms communs
Formation du pluriel:
● singulier + s: chèque – chèques
● s, x, z – invariable: corps, temps, prix, voix, gaz
● au – aux: noyau – noyaux
eau – eaux : chapeau – chapeaux
eu – eux: feu – feux, jeu – jeux
● ou – oux: bijoux, cailloux, choux, genoux, joujoux, poux
exception: clou – clous, cou, fou, sou, trou,
● al – aux: cheval – chevaux, signal – signaux
exception: bal – bals, festival – festivals
● ail – aux: bail – baux, corail – coraux, travail – travaux
exception: r ail – rails, détail – détails

E. Pluriel des noms composés
● un seul mot: un passeport – des passeports, un portefeuille – des portefeuilles, un
portemanteau – des portemanteaux
exception: bonhomme – bonshommes, gentilhomme – gentil shommes
madame – mesdames, monsieur – messieurs, mademoiselle –
mesdemoiselles
● deux mots:
– deux substantifs: un chef -lieu – des chefs -lieux

102
– adjectif + substantif: un coffre -fort – des coffres -forts
– deux adjectifs: un sourd -muet – des sourds -muets
– deux substant ifs + préposition: un timbre -poste – des timbres -poste
– demi + substantif: un demicercle – des demicercles
une demiheure – des demiheures
– …o, i + substantif: un GalloRomain – des GalloRomains
une tragi -comédie – des tragi -comédies
– verbe + substantif: un tire -bouchon – des tire -bouchons
un cure -dent – des cure -dents
exception: un (une) gardemalade – des gardes malades, gardebarrière
un porteallume tte – des porteallumettes
un porteavions – des porteavions
– préposition / adverbe + substantif: un avantposte – des avantpostes
un hautparleur – des hautparleurs
– verbe / mots invariables: un vaetvient – des vaetvient
un laiss epasser, un ouïdire, un passepartout

F. Pluriel des noms d’origine étrangère
● -s: un agenda – des agendas; un opéra – des opéras; un bazar – des bazars
● pluralul din limba respectivă: un gentleman – des gentlemen
● les deux: un minimum – des minimums – des minima
un maximum – des maximums – des maxima
une lady – des ladys – des ladies

G. Noms seulement au pluriel
annales, archives, échecs, environs, fiançailles, frais, honoraires, mathématiques, mœurs,
funérailles, représailles, vacances, vivres

103
H. Pluriels des noms propres
● pluriel: – familles historiques
– œuvres d’art
– pays, régions: les Indes, les Londres
– montagnes
– peuples
● pas de pluriel – art. pl.: – familles
– œuvres d’art
– villes
– voitures, appareils
– journaux, revues, magazines, livres

104
FICHE DE TRAVAIL
Nommer
« Nous étions dans la cour, en r ang pour entrer dans la classe, quand le surveillant nous a dit:
“Votre maîtresse est malade aujourd’hui” Et puis, monsieur Dubon, le surveillant, nous a conduit
en classe. Le surveillant, on l’appelle le Bouillon, quand il n’est pas là, bien sûr. On l’app elle
comme ça, parce qu’il dit tout le temps: “Regardez -moi dans les yeux” et dans le bouillon, il y a
des yeux. Moi non plus je n’avais pas compris tout de suite, c’est des grands qui me l’on
expliqué. » (Goscinny, “ Le Bouillon ”, in Anne -Marie Achard, Cat herine Caron, Vers l’écriture ,
Paris, Hachette Éducation, 1996).

Notes :
Les noms
– Le nom patronymique , ou patronyme est le nom de famille.
– Le surnom est un nom qu’on donne à quelqu’un en plus de son nom de famille et de son
prénom. Il est parfois moqu eur.
– Le diminutif est la transformation familière et affectueuse du nom ou du prénom.
– Le pseudonyme est le nom que prend un artiste et sous lequel il veut être célèbre.

Activités
1. Le surveillant s’appelle ……………………………………………..
2. Les é lèves l’appellent ………. parce que ……………………..
3. Je m’appelle ………………………………………………………
4. Je souligne mon prénom en bleu et mon patronyme en rouge.
5. Mes parents m’ont donné un diminutif, c’est ………………….

J’imagine que je suis célèbre. Quel pseudonyme ai -je choisi pour me faire connaître :
– Si j’étais acteur, je choisirais le pseudonyme ………………………
– Si ……………..chanteur, je ……………………………………………
– Si ……………..peintre, je ………………………………………………
– Si ……………..écrivain, je ……………………………………………

105
La formation du féminin
On forme gén éralement le féminin des noms en ajutant un –e au masculin.
Cas particuliers
1. Les noms terminés par –er font leur féminin en –ère: le boucher / la
bouchère.
2. Certains noms doublent la consonne finale : le paysan / la paysanne .
3. Certains noms change nt la consonne finale : le loup / la louve .
4. Les noms terminés par –eur se transforment au féminin: l’inspecteur /
l’inspectrice .
5. Certains noms en –e font leur féminin en –esse: le pauvre / la pauvresse.
6. Certains féminins ne sont pas construits ave c leur masculin:
gendre bru mari femme parrain marraine
bélier brebis bouc chèvre cerf biche
cheval jument jars oie lièvre hase
mâle femelle sanglier laie taureau vache
7. Certains noms de professions masculines n’ont pas de féminin. Le féminin
est marq ué par le mot femme suivi du nom de profession: une femme peintre.
8. Certains noms d’animaux ne marquent que l’espèce pour préciser le sexe,
on ajoute le mot mâle ou femelle: une belette mâle , une belette femelle .

106
NOMS DONT LE SUFFIXE EST INDIC ATEUR DE GENRE

Par ce système de dérivation, environ 85℅ des substantifs (noms) en français peuvent , selon leur
morphologie (suffixe) , être classés au masculin ou au féminin.

SUFFIXES MASCULINS SUFFIXES FÉMININS
Ment (appartement, gouvernement) Ture (voiture, confiture)
Isme (capitalisme, communisme) Ie (chimie, poésie) sauf :génie
Oir (tiroir, lavoir) Oire (armoire, baignoire)
Eme (système, phonème) Ee (soirée, allée) sauf : lycée, caducée
Voyelle+t (cadet, début, avocat, crédit,
sabot) Sure (usure , masure)
Monosyllabiques (90℅) (corps, mois,
cœur) Tion, ssion, sion (fonction ,mission,
dérision)
Age (entourage, courage) sauf : page,
mage, plage, cage, rage Ance, ence, anse (délinquance, cadence,
danse)
Our (velours, amour) Esse (tendresse,caresse)
Eau (créneau, bateau) Ise (cerise,église)
Es (accès, excès) Ourse (bourse,ressource)
Infinitif substantiv é (devoir, avenir) Té (liberté, beauté)
Tique (informatique, boutique)
Ite (hépatite, otite)

107
LE NOM
Accord dans le groupe du nom 1
OBSERVATION et EXPLICATION

Leur/leurs
Ils aiment leur chien . (leur devant un nom singulier)
Les oiseaux aiment leurs petits . (leurs devant un nom pluriel)

Au/aux
Elles parlent au diable . (au devant un nom singulier)
Elles mangent une tarte aux pommes . (aux devant un nom pluriel)

Tout/tous/toute/toutes
L'eau envahissait tout le navire . (tout devant un nom masculin)
L'eau envahissait tous les navires . (tous devant un nom masculin pluriel)
Elles ont bu toute l' eau de la cruche. ( toute devant un nom féminin)
Ils ont mangé toutes ces bananes trop mûres. ( toutes devant un nom féminin pluriel)
Elle partira tout de suite après le souper. (tout est adverbe dans les locutions tout de suite , tout à
coup , tout de même , tout d'un coup)

Cet/cette
Je comprends cet enfant . (cet devant un nom mascu lin singulier)
Je comprends cette jeune fille. (cette devant un nom féminin singulier)

Quel/quelle/quelles
Quel enfant agressif! ( quel devant un nom masculin)
Je sais quels enfants sont agressifs. ( quel(s) devant un nom masculin)
Quelle belle journée ! (quelle devant un nom féminin)
Quelle figure as-tu tracée? ( quelle devant un nom féminin)
Je sais quelles figures tu as tracées. ( quelles devant un nom féminin)

108
Mais: on écrit qu'elle(s) quand que est ou pronom relatif , ou adverbe ou mot de liaison
Je sais qu'elle est venue hier soir. (Maryse)
Qu'elle est belle, cette lune! (la lune)
C'est la maison qu'elle habite depuis trois ans. (la maison)
N.B. On écrit qu'elle(s) à chaque fois que le pronom elle pronominalise un nom.

LE GENRE DES NOMS:
Sont masculin s:
aéronef, albâtre, alvéole, amalgame, ambre,
antidote, antipode, antre, apogée, armistice,
asphalte, astérisque, augure, auspices,
chrysanthème, éclair, effluve, emblème,
éphémère, équinoxe, hémisphère, hyménée,
jade, lignite, ovule, pétale, planisphère, sépale,
tentacule, tubercule… Sont féminins:
acné, acoustique, alcôve, algèbre, anagramme,
antichambre, arrhes, atmosphère, autoroute,
azalée, campanule, ébène, échappatoire,
écritoire, épigramme, épitaphe, équivoque,
escarre, interview, nacre, oasis, o rbite,
oriflamme, réglisse, scolopendre…
Gens
Le genre de gens peut varier suivant la construction de la phrase.
Quand gens est accompagné d'un adjectif placé après lui, il est du masculin :
– les gens mal informés …
Quand l' adjectif est placé immédiate ment avant , il est du genre féminin :
– les bonnes gens..
– toutes les vieilles gens…
Dans les cas d'adjectifs ou pronoms placés avant et après gens, ceux placés avant gens prennent
aussi le féminin, tandis que ceux qui le suivent restent au masculin:
– toutes ces bonnes gens sont ennuyeux .
– ces petites gens d'entre lesquels je suis sorti…
mais :
– tous les gens sensés ..
– tous ces gens -là…
– tous les braves gens…

109
– qu'est -ce qu' ils diraient toutes ces bonnes gens…
– instruits par l'expérience, le s vieilles gens sont prudents …

Le pluriel des noms simples

Noms en ail: Les noms en ail font leur pluriel en ails.
Exceptions
– bail, corail, soupirail, travail, vantail, vitrail , qui font leur pluriel en aux.
Remarques
– bétail n'a pas de pluriel (be stiaux désigne des gros animaux domestiques, alors que le bétail est
un nom collectif), – bercail s'emploie fort peu au pluriel,
– ail fait au pluriel aulx, mais en termes de botanique on dit également des ails.

Noms en al: Les noms en al font leur pluriel en aux.
Exception
– bal, cal, carnaval, cérémonial, chacal, festival, récital, régal … dont le pluriel est als.
Remarque
– idéal fait au pluriel idéals ou idéaux .

Noms en au, eau, eu: Les noms en au, eau et eu prennent un x au pluriel .
Exceptions
– landau, sarrau, bleu, pneu, émeu, lieu (poisson), qui prennent un s.

Noms en ou
Les noms en ou font leur pluriel en ous.
Exceptions
– bijou, caillou, chou, genou, hibou, joujou et pou , qui prennent un x.

Abréviations et symboles

110
Les symboles mathématiques abréviatifs d'unités ne prennent pas la marque du pluriel:
– un km, des km…
mais : un kilogramme, des kilogramme s, un kilo, des kilo s

Noms à double forme au pluriel
– un aïeul, des aïeux (ancêtres) ou des aïeuls (grands -parents)
– un ciel, des cieux , des ciels de lit, ce peintre fait bien les ciels…
– un oeil, des yeux , des oeils -de-boeuf , des oeils -de-perdrix …

Noms d'origine étrangère
– un album, des albums
– un zéro, des zéros
– un minimum, des minimums ou des minima
– un solo, des solos ou des soli
– un box, des boxes

Noms sans singulier
– agrès, annales, archives, arrhes, auspices, dépens, doléances, environs, fastes, frais, moeurs,
obsèques, prémices, ténèbres, vêpres …
– accordailles, broussailles, entrailles, épousailles, fiançailles, funéra illes, relevailles, représailles,
retrouvailles, semailles …

Noms propres
-Prennent la marque du pluriel
* les noms de certaines familles illustres ou princières:
– les Condés , les Capets , les Bourbons , les Stuarts …
mais les noms non francisés restent invariables : les Habsbourg …
* les noms propres employés comme noms communs:
– la France eut ses Césars , ses Catons , ces Pompées … (c'est -à-dire des hommes comme César…) ,

111
mais si un article singulier entre dans la composition d'un nom propre, celui -ci reste invariable:
des La Fontaine …
-Restent au singulier
* les noms désignant une seule famille:
– je vais chez les Carnot , les Durand …* les noms qui ne désignent qu'une seule et même
personne:
– ici les Joffre , les Fayolle , les Foch , les Pétain …
* les titres de revues, de journaux, de livres:
– acheter deux " Almanach du Chasseur français"
– deux " Figaro littéraire"…
-Peuvent rester au singulier ou se mettre au pluriel
* les noms propres qui désignent des ouvrages célèbres ou des oeuvres d'art:
– ce musée possède deux Raphaël …
– des Titiens , des Rembrandts …
Remarque: les noms de marques restent invariables :
– acheter deux Peugeot …
– boire trois Perrier …

Noms d'origine étrangère
– un album, des albums
– un zéro, des zéros
– un minimum, des minimums ou des minima
– un solo, des solos ou des soli
– un box, des boxes

Noms sans singulier
– agrès, annales, archives, arrhes, auspices, dépens, doléances, environs, fastes, frais, moeurs,
obsèques, prémices, ténèbres, vêpres
– accordailles, broussaill es, entrailles, épousailles, fiançailles, funérailles, relevailles, représailles,
retrouvailles, semailles …

112
Noms composés s'écrivant en un seul mot
Le dernier élément prend seul la marque du pluriel :
– des bonheurs , des portefeuilles …
Exceptions
– mesdames, mesdemoiselles, messieurs, messeigneurs, bonshommes, gentilshommes .

Deux noms en apposition, un adjectif + un nom, deux adjectifs
Les deux mots prennent la marque du pluriel :
– une porte -fenêtre, les portes -fenêtres
– un rouge -gorge, des rouges -gorges
– un oiseau -mouche, des oiseaux -mouches
– un franc -tireur, des francs -tireurs
– un sourd -muet, des sourds -muets …

Nom + adjectif
Dans ce cas, il ne s'agit pas d'un nom composé et il n'y a pas lieu d'unir le nom et l'adjectif par un
trait d'union :
– des chênes verts , des gardes champêtres , des châteaux forts …
Exceptions
– des coffres -forts, du fer-blanc …

Grand, franc
Si le premier élément est grand ou franc, il ne prend la marque du pluriel qu'au masculin :
– un grand -père, des grands -pères
– une grand -mère, des grand -mères
– un Franc -Comtois, des Francs -Comtois
– une Franc -Comtoise, des Franc -Comtoises …

Nom complété d'un autre nom
Le premier seul prend la marque du pluriel :

113
– un chef-d’œuvre, des chefs -d'œuvre
– un bouton -d'or, des boutons -d'or
– un timbre -poste, des timbres -poste
– une pomme de terre, des pommes de terre
– un hôtel de ville, des hôtels de ville
– un char à bancs, des chars à bancs …Exceptions
– pot-au-feu, rez -de-chaussée … sont invariables .

Verbe + un complément
Le nom seul varie, à moins que le sens ne s'y oppose :
– un tire -ligne, des tire-lignes
mais :
– un faire -part, des faire-part
– un gratte -papier, des gratte -papier
– un porte -plume, des porte -plume
– un porte -clefs, des porte -clefs
– un réveille -matin, des révei lle-matin …

Mots composés avec ,,garde’’
Si le nom composé désigne une personne , garde est alors considéré comme un nom (gardien) :
– des gardes -chasse
Si le nom composé désigne un objet , garde est alors un verbe (invariable) :
– des garde -fous

Mot inva riable + nom
Le nom varie selon l'usage :
– une arrière -boutique, des arrière -boutiques
– un sous -sol, des sous-sols
– un après -midi, des après -midi
– un sous -multiple, des sous-multiples …

114
Remarque
Dans nouveau -né, nouveau est adverbe , donc :
– un nouvea u-né, des nouveau -nés
Dans dernier -né, dernier est adjectif , donc :
– le dernier -né, les derniers -nésmais : un mort -né, des mort -nés.

115
Fiche de travail
Le nom

1. Introduisez dans des phrases les noms suivants.Faites attention à l eur sens.
le tour / la tour • le physique / la physique • le mode / la mode
le mémoire / la mémoire • le vase / la vase • le poste / la poste
le critique / la critique

2. Mettez au pluriel les noms entre parenthèses.
Tous ces (cadeau) sont p our lui. Les (tapis) qu’ils ont achetés sont en laine. Elle avait des
(journal) ouverts sur ses (genou). Elle courait les (magasin) pour trouver des (chapeau)
modernes. Il a participé à plusieurs (festival). Les (travail) de ces (congrès) avaient du ré dix
jours. Il doit acheter des (pneu) pour sa voiture. Ils ont enfoncé des (clou) dans les (mur). Cet
enfant ne pense qu’aux (jeu). Il connaît l’histoire de ces (château) dans les moindres (détail).

3. Répondez aux questions en employant l’un des noms suivants au pluriel.
bijou, bal, journal, tableau, carnaval, joujou
Qu’est -ce que tu lis chaque matin? Où aimez -vous aller samedi soir? Où vont -ils avec ces
masques? Qu’est -ce que tu achètes pour ton petit frère? Qu’est -ce qu’on va voir à cette
exposition ? Qu’est -ce qu’il cherche pour sa mère?

4. Écrivez au pluriel les mots suivants. Consultez le tableau à la page 130.
un abat -jour, une demi -finale, un timbre -poste, un week -end, un tourne -disque, un ver à soie, un
couvre -lit, un avant -toit

5. Trouvez le féminin des noms suivants.
paysan – coiffeur – hôte – lecteur – maître – veuf – prince – époux – loup – patron – cousin –
instituteur – empereur – roi – homme – neveu – gendre – dieu – serviteur – héros – bélier .

116
Fiche de travail

Exercice 1:
Classez les expressions idiomatiques suivantes :
Etre sorti de la cuisse de Jupiter, Boire en Suisse, dire le mot de Cambronne, Tomber de
Charybde en Scylla, L’œuf de Christophe Colomb, Le fil d’Ariane, La femme de César ne doit
pas être soupçonnée, Une vérité de la Palice, Un quart d’heure de Rabelais, L’épée de
Damoclès, Le lit de Procuste, Une tour de Babel, Etre vieux comme Mathusalem, Tomber dans
les bras de Morphée, Parole d’Evangile, Les écuries d’Augias, Avoir des yeux d’Argus,La toile
de Pénélope, Travail de Sisyphe, Vous êtes orfèvre, Monsieur Josse, Fille d’Eve, Tous les
chemins mènent à Rome.

Histoire Littérature Mythologie Bible
Une vérité de la
Palice Un quart d’heure de
Rabelais Le fil d’Ariane Une tour de Babel

117
Exercice 2: Classe les noms propres suivants, d’après :

Métier Animaux Couleurs Aspect
physique Titres de
noblesse Caractère Lieu où
on habite Prénom
Nadia
Boulanger Jean
Lelièvre Pierre
Lerouge Michel
Legrand Moniq ue
Leduc Bernard
Letendre Jean de
la
Fontaine Jaques
Martin

Paul Charpentier
Emmanuel Petit
Thierry Henri
Paul Gentil
Nicole Poulet
Michel Leblanc
Michel Berger
Marius Dupont
Marie Laforêt
Pierre Lesauvage
Paul Prin ce
Paul Lenoir
Patrice Lecomte
Yves Lecoq
Jean Marc Thibault
Gaston Lerou

118

Nom et prénom:
Date :
Classe:
Epreuve écrite – le féminin / le pluriel des noms

1. Mettez au fé minin :
1. un ami => une ______________________________
2. un écolier => une ______________________________
3. un coiffeur => une ______________________________
4. un médiateur => une ______________________________
5. un fugitif => une ____________ __________________
6. un collégien => une ______________________________
7. un champion => une ______________________________
8. un orphelin => une ______________________________
9. un électeur => une ______________________________
10. un diable => une ______________________________

2. Mettez au féminin les mots soulignés:
– Le frère de Monsieur Martin est docteur.
– J'aime l'acteur du film.
– Le directeur de l'école s'appelle Monsieur Escande.
– J'aime les Américains et en particulier l es chanteurs et les danseurs.
– L'oncle de Denis est un journaliste de l'Express.

3. Mettez au pluriel:
1. Je possède trois petites ______________________________ (tortue).
2. Les ______________________________ (enfant) jouent au football pendant d eux heures.
3. Qu'est ce que vous faites!! Vous êtes ______________________________ (fou)?
4. Gros ______________________________ (bisou) à ton frère!

119
5. Vous avez deux ______________________________ (choix): aller faire des courses avec
votre mère o u rester à la maison avec votre père.
6. Tu es obligé de vider ces ______________________________ (seau)!
7. Quand tu es dans la forêt, fais attention aux ______________________________ (chacal), il
y en a beaucoup!
8. Je m'excuse, je ne connais pas tous les ______________________________ (détail). 9. Ce
matin, j'ai acheté deux ______________________________ (journal)
10. Nous avons commencé les ______________________________ (travail) pratiques.

Barème de notation : 30p x 3ex = 90p + 10p of = 1 00p

120

BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE

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