La communication interculturelle et ses obstacles Valérie Auger, Université de Sherbrooke Résumé L’évolution des politiques et des pratiques… [613478]

ESSAI DE MAÎTRISE
La communication interculturelle
et ses obstacles
Valérie Auger, Université de Sherbrooke
Résumé
L’évolution des politiques et des pratiques québécoises dans la gestion de la
diversité culturelle a mené à l’adoption d’un modèle d’intégration où la com-
munication joue un rôle essentiel. Les compétences de communication des
citoyens doivent favoriser non seulement la compréhension interculturelle mais
aussi la satisfaction des besoins des individus et des groupes dans le respect
des valeurs de la démocratie québécoise. La pratique du psychologue en re-
lations humaines s’inscrivant dans ce contexte, il peut lui être utile de com-
prendre les éléments qui structurent la communication en situation profes-
sionnelle ou entre des personnes de cultures différentes ainsi que les éléments
qui peuvent nuire à la communication et à l’intégration de certains individus
ou de certains groupes. C’est pourquoi cet essai propose d’approfondir les
concepts de culture, d’identité culturelle et de concept de soi ainsi que le
phénomène d’ethnocentrisme, à partir duquel on peut comprendre et expli-
quer la plupart des obstacles qui nuisent à la communication interculturelle,
voire même à l’intégration. Pour améliorer les compétences de communica-
tion du psychologue en relations humaines ou de tout citoyen québécois, on
recommande la recherche d’un équilibre entre la reconnaissance des diffé-
rences et la recherche de ressemblances, la compréhension de l’autre et la
connaissance de soi ainsi que l’écoute et l’affirmation de soi.
Très tôt dans son histoire, la société québécoise a dû apprendre à composer
avec les réalités de la diversité et de l’immigration. Aux trois peuples fonda-
teurs, Autochtones, Français et Britanniques, s’ajoutèrent des Irlandais ainsi
qu’un certain nombre d’Antillais au XIXe siècle, puis des Juifs et des Euro-
péens du Sud et de l’Est jusqu’au milieu du XXe siècle. Cependant, ce n’est
que tout récemment, dans les années 60, que le Québec s’est véritablement

124 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005ouvert à une immigration non européenne ainsi qu’à la diversité des croyances
et des habitudes de vie qui en découle. Comme dans plusieurs autres sociétés
démocratiques modernes, le gouvernement québécois dut s’interroger sur la
nature des rapports qu’il voulait établir avec les populations nouvelles qu’il
accueillait sur son territoire, ainsi que sur les paramètres qu’il devait établir
pour faciliter la cohabitation entre ces populations et les membres de la so-
ciété d’accueil.
L’évolution des politiques et des pratiques québécoises qui se succédèrent dans
la gestion de la diversité mena peu à peu à l’adoption d’un modèle d’intégra-
tion. Or, la mise en pratique et le succès de ce modèle reposent en grande
partie sur la capacité des citoyens à communiquer efficacement dans le respect
mutuel pour améliorer la compréhension interculturelle et favoriser la satis-
faction des besoins des différentes communautés et des individus. Même si la
plupart des personnes développent des compétences de communication qui
leur permettent d’établir des relations interpersonnelles harmonieuses dans
leur vie de tous les jours, il arrive que ces compétences ne suffisent pas quand
vient le temps de négocier en contexte interculturel.
Étant donné le contexte québécois, le psychologue en relations humaines est
amené à communiquer avec des gens de culture différente. En raison de ses
fonctions professionnelles, il est appelé à faciliter la communication entre des
individus qui peuvent rencontrer des difficultés relevant de la différence cultu-
relle ainsi qu’à soutenir ces individus dans la satisfaction de leurs besoins. Cet
essai vise à contribuer à l’enrichissement des connaissances dans le domaine
de la communication interculturelle pour soutenir la pratique professionnelle
du psychologue en relations humaines dans ce contexte de diversité culturelle
et d’intégration des différences.
Dans un premier temps, nous considérerons les éléments qui marquèrent l’évo-
lution des pratiques dans la gestion de la diversité québécoise, cette évolution
justifiant l’intérêt porté à la communication interculturelle et ses obstacles.
L’engagement et les efforts des Québécois à développer une communication
efficace avec leurs concitoyens seront tributaires de leur motivation à le faire,
et cette motivation sera d’autant plus grande qu’ils comprendront pourquoi le
Québec en est venu à adopter un modèle d’intégration et comment la commu-
nication s’inscrit comme un des éléments principaux de la mise en pratique de
ce modèle en favorisant la compréhension interculturelle et la satisfaction des
besoins des groupes et des individus.
Puis, nous porterons notre attention sur des éléments pouvant être utiles à une
meilleure compréhension de la communication interculturelle. Nous aborde-
rons les concepts de culture, d’identité culturelle et de concept de soi et nous

La communication interculturelle et ses obstacles 125
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005déterminerons les implications de chacun de ces concepts dans la compréhen-
sion des comportements de communication de l’individu, ainsi que leur lien
avec la satisfaction de ses besoins fondamentaux. Ensuite, nous tenterons de
comprendre ce qui peut nuire à la communication entre deux individus de
cultures ou d’appartenances socioculturelles différentes. Nous ferons l’inven-
taire des obstacles à la communication interculturelle qui ont été identifiés par
un certain nombre d’auteurs, nous verrons comment ces obstacles sont liés au
phénomène de l’ethnocentrisme et nous examinerons les causes de celui-ci.
Nous conclurons en proposant quelques pistes à explorer dans l’amélioration
des compétences de communication interculturelle du psychologue en rela-
tions humaines et de tout citoyen.
Le choix de l’intégration dans la construction de la société
québécoise
L’évolution des pratiques dans la gestion de la diversité culturelle
Jusque dans les années 70, l’assimilationnisme (Barrette, Gaudet et Lemay,
1996) fut l’option la plus en vogue, sinon la seule, au Québec comme ailleurs
au Canada. Les membres de la société d’accueil, en particulier les membres du
groupe majoritaire, s’attendaient à ce que les nouveaux arrivants abandonnent
leur identité culturelle et adoptent rapidement la culture de leur pays d’adop-
tion, considérant celle-ci comme la mieux adaptée à la vie en société. Cette
position rencontra cependant de fortes résistances. Les immigrants, en effet,
acceptaient mal de se voir imposer un mode de vie qui ne leur correspondait
pas et qui, à la limite, niait leur héritage culturel. En outre, dans les sociétés se
voulant respectueuses des différences, on dénonce de plus en plus l’option
assimilatrice comme une pratique raciste et oppressante qui, à long terme, nuit
à une collectivité « en étouffant la source vive des différentes individualités
qui la composent » (Delorme, 1996b, p. 9). Pour ces raisons, l’assimilationnisme
fut abandonné.
Par la suite, on chercha davantage à favoriser l’expression des différences, en
mettant l’accent sur l’enrichissement qu’on pouvait en tirer. En 1971, le Canada
adopta la politique du  multiculturalisme (Barrette et coll., 1996), qui visait la
préservation des cultures d’origine des immigrants et la reconnaissance de ces
cultures par la société d’accueil. Dans les années 80, cette politique se concré-
tisa par des actions centrées sur la lutte contre le racisme, l’adaptation des
institutions et la sensibilisation de la société d’accueil; les efforts étaient orientés
vers la promotion de la tolérance au sein de la société d’accueil et vers la
protection des cultures particulières. Or, malgré l’importance et la valeur de
cette approche, celle-ci comporte un danger. Alors que dans l’option

126 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005assimilatrice, il revenait aux immigrants de s’adapter à la société d’accueil
même au prix de leur identité, ici c’est surtout les membres de la société d’ac-
cueil qui devaient s’ajuster, ou du moins faire preuve de tolérance à l’égard
des nouveaux arrivants (Pagé, 1991a : voir Ouellet, 1994, p. 167). À plus ou
moins long terme, la tolérance atteint ses limites et les frustrations accumulées
se transforment en des réactions de défense qui se retournent contre ceux qu’on
cherchait à protéger initialement (Rusu : voir Delorme, 1996a, p. 4; Delorme,
1996b, p. 9).
Un autre problème lié au multiculturalisme est le principe de relativisme qui
lui est sous-jacent. En vertu de ce principe, tout système culturel est légitimé
par sa fonction de « protéger l’homme contre l’hostilité de la nature et les
turbulences de l’histoire » (Abou, 1992 : voir Ouellet, 1994, p. 153). La cul-
ture ayant pour fonction générale d’assurer la survie d’un groupe, toute culture
a sa raison d’être et ne peut être jugée en fonction d’une autre culture. Il n’existe
ni étalon absolu, ni valeurs universelles. À l’extrême, ce raisonnement justifie
l’oppression qu’une société ou qu’un groupe exerce au nom de sa culture et
peut remettre en question les Droits de l’homme et les valeurs de liberté et
d’égalité sur lesquels reposent les fondements de la démocratie (Abou, 1992 :
voir Ouellet, 1994, p. 154-155). Or, c’est grâce à ces valeurs que le Québec est
devenu une terre d’accueil pour des milliers d’individus en quête d’une vie
meilleure. En sanctionnant des pratiques culturelles incompatibles avec les
valeurs fondatrices de la société québécoise, c’est la survie de celle-ci que le
relativisme radical met en péril.
Pour dépasser les limites de l’assimilationnisme et du relativisme, on parle
maintenant d’une position mitoyenne qui cherche à établir « jusqu’où peut
aller l’ouverture à la diversité sans compromettre la viabilité des institutions et
de la vie publique » (Gagnon, McAndrew et Pagé, 1996 : voir Séguin, 1997, p.
398). Le modèle retenu à ce jour, l’intégrationnisme (Barrette et coll.,
1996, p. 48 à 50; Conseil des Relations Interculturelles, 1997) , comporte
deux éléments-clé : le cadre civique commun et le contrat moral. Le cadre
civique commun désigne un certain nombre de règles et de valeurs fonda-
mentales – entre autres la démocratie, les droits à la liberté, à l’égalité et à la
sécurité ainsi que le français comme langue officielle de communication – dont
le respect permet à tout citoyen de prendre part au débat politique tout en
assurant la résolution pacifique des conflits et le maintien de l’ordre public.
Le cadre civique commun limite toutefois les droits et libertés des individus
lorsque l’exercice de ces droits et libertés pourrait menacer les valeurs démo-
cratiques, le bien-être collectif ou les droits et libertés d’autres personnes; par
exemple, dans le cas où la liberté de croyance ou de religion d’une personne
porterait atteinte au droit à l’égalité hommes/femmes ou à l’intégrité du corps
d’une autre personne.

La communication interculturelle et ses obstacles 127
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005En ce qui a trait au contrat moral, il s’agit, en quelque sorte, de l’engagement
mutuel que prennent les nouveaux arrivants et la population d’accueil à res-
pecter le cadre civique commun et à assumer les responsabilités qui vont de
pair avec l’exercice de la citoyenneté. Au-delà de la protection ou de la tolé-
rance des cultures minoritaires, on favorise la participation des immigrants à
la définition d’un projet de société commun mais leur intégration réussie dé-
pend à la fois de leurs propres efforts et de l’ouverture de leurs nouveaux
concitoyens à leur égard. Il s’agit donc d’une responsabilité partagée. En
d’autres termes, le contrat moral cherche à établir un équilibre entre, d’une
part, les droits et les attentes légitimes des immigrants et ceux de la société
d’accueil, et, d’autre part, leurs obligations réciproques. Les membres des
cultures minoritaires ont le devoir de participer à la vie publique et de se join-
dre aux délibérations alors que les membres de la culture majoritaire doivent
reconnaître que l’ordre des choses établi par eux est « sujet à la délibération,
non pas dans ses valeurs constitutives qui rendent la délibération possible,
mais dans tout le reste » (Gagnon, McAndrew et Pagé, 1996 : voir Pagé, 1997, p. 9).
Le rôle de la communication dans l’application du modèle d’intégration
Dans l’application du modèle d’intégration et dans la gestion de la diversité, la
communication joue un rôle essentiel. Principal instrument de participation du
citoyen au projet de société commun, elle permet à chacun d’exercer son
pouvoir personnel dans son milieu de vie, entre autres dans la recherche
d’accommodements raisonnables ou de compromis. Sur la scène politique mais
d’abord et avant tout à l’école, au travail, dans les activités du quotidien, cha-
cun a la responsabilité de développer et d’adopter des comportements de
communication qui lui permettent de faire connaître ses besoins, ses désirs et
ses opinions dans le respect de ceux des autres, tout en encourageant ceux-ci à
se comporter réciproquement. Autrement dit, pour favoriser l’intégration, la
communication doit autant viser la compréhension interculturelle entre les
citoyens que la satisfaction de leurs besoins et l’atteinte de leurs buts respec-
tifs. Comprendre l’autre ne suffit pas : ce n’est pas parce qu’on comprend son
désir qu’on répondra à ce désir, surtout si on perçoit celui-ci comme un obstacle
à ses propres ambitions.
Comme outil essentiel à la réussite du projet d’intégration et à la satisfac-
tion des individus dans leurs interactions quotidiennes, la compétence de
communication désigne non seulement la capacité à se faire comprendre et à
comprendre l’autre, mais aussi la capacité à se comporter d’une manière qui
soit appropriée et efficace : un comportement est approprié s’il ne viole pas les
règles, les normes et les attentes liées au contexte de communication; il est
efficace s’il permet à l’individu d’atteindre le résultat le plus satisfaisant
possible étant donné la situation (Spitzberg, 2000). Sur la scène québécoise,

128 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005la menace et la coercition peuvent être considérées comme des comportements
efficaces mais inappropriés : même si l’individu qui les utilise parvient à ses
fins, il ne respecte pas les principes d’une démocratie pluraliste. Inversement, des
exemples de comportements appropriés mais inefficaces sont la soumission et
la résignation, car ces comportements permettent rarement à un individu de
satisfaire pleinement ses besoins.
Les éléments de la communication interpersonnelle
Pour comprendre ce qui peut rendre la communication difficile entre deux
personnes de cultures différentes, il faut d’abord définir ce qu’on entend par
communication. La communication est un processus complexe qui se déroule
en grande partie à notre insu. Différents modèles ont été élaborés pour décrire
ce processus (voir A. DeVito, Chassé et Vézeau, 2001, p. 4-12). Quel que soit
le modèle auquel on se réfère, cependant, l’idée de communication suppose le
transfert d’un message d’un émetteur à un récepteur. Les éléments principaux
du processus de la communication sont donc l’émetteur, i.e. la personne à
l’origine de la communication; le message, i.e. l’ensemble des mots et des
gestes utilisés par l’émetteur pour traduire ce qu’il pense, ressent, désire; et le
récepteur, i.e. la personne à qui est destiné le message.
Le processus de la communication comporte également deux étapes signifi-
catives : l’encodage et le décodage. Lors de l’encodage, l’émetteur transpose
une idée, un sentiment ou une intention sous forme de signes, en puisant ceux-ci
dans un répertoire de codes verbaux (mots, expressions) et de codes non ver-
baux (gestes, mimiques, regard), codes auxquels il attribue des significations
précises. Au cours du décodage, le récepteur doit donner un sens à ce qu’il voit
et entend en utilisant son propre répertoire de signes (ou codes) et de significa-
tions correspondantes.
La communication implique donc, d’une part, deux interlocuteurs, deux
personnes uniques ayant des besoins et une histoire propres et, d’autre part, un
message qui doit être encodé et décodé correctement pour qu’il y ait compré-
hension mutuelle. Dans la première partie de cet essai, nous porterons notre
attention sur les interlocuteurs eux-mêmes et sur certains éléments qui les dé-
finissent, particulièrement en contexte de communication interculturelle. Dans
la seconde partie, nous tenterons de comprendre ce qui peut perturber
l’encodage et le décodage des messages et nuire au processus de la communi-
cation interculturelle.

La communication interculturelle et ses obstacles 129
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005Les éléments structurants de la communication en contexte
interculturel
La culture
Culture et centralité émotive . Dans un contexte interculturel, l’émetteur et le
récepteur sont porteurs de cultures différentes. Pour comprendre ce qui nuit à
la communication, on doit considérer les éléments « cachés » de la culture, par
opposition à ses éléments « visibles ». Ces éléments comportent des attitudes,
des croyances et des valeurs (Singer, 1987). Les attitudes désignent ce que
nous aimons ou n’aimons pas, nos préférences ou nos répulsions concernant des
objets, des idées, des situations, des personnes ou des groupes de personnes.
Les croyances sont des hypothèses ou des attentes – conscientes ou non – qu’un
individu accepte comme vraies à un moment de son existence . Les valeurs
sont des croyances persistantes selon lesquelles un objectif de vie ou un mode
de comportement est personnellement ou socialement préférable à l’objectif
de vie ou au mode de comportement qui lui est opposé; elles définissent ce qui
est désirable et indésirable.
Les éléments cachés de la culture sont particulièrement déterminants dans la
constitution et le maintien d’un système culturel ainsi que dans le comporte-
ment des êtres humains; ils règlent les normes de conduite qui régulent les
relations entre les personnes et donnent un sens aux codes verbaux et non
verbaux qui sont utilisés pour communiquer. Les éléments matériels d’une
culture (dans les domaines de l’alimentation, de l’habillement, de la religion,
des technologies, etc.) ou les comportements observables des individus ne
sont souvent que des manifestations concrètes de leurs croyances et de leurs
valeurs; c’est pourquoi celles-ci s’accompagnent d’une charge émotive très
importante. Les réactions les plus vives, lors d’une rencontre interculturelle,
découlent souvent d’un sentiment de menace de certains de ces éléments ca-
chés de la culture qui, s’ils sont démentis, remettent en question tout le mode
de vie de la personne ou de son groupe. Aussi est-il fréquent que des croyances
ou des valeurs divergentes soient au centre de conflits interculturels.
La charge émotive de la culture s’explique aussi par sa fonction de répondre
au besoin de l’être humain de vivre dans un univers prévisible et de s’y sentir
en sécurité. La culture fournit à l’individu des normes qu’il peut utiliser pour
adopter une conduite adéquate ou pour prévoir le comportement d’autrui; elle
comporte des croyances grâce auxquelles il peut expliquer les événements;
elle véhicule des valeurs qui donnent une orientation à sa vie et guident sa con-
duite vers l’atteinte de buts précis. En ce sens, la culture rend la réalité

130 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005« maîtrisable ». La rencontre d’une personne de culture différente est mena-
çante : par ses comportements, par ses attitudes ou par ses idées, elle bouscule
les certitudes de son interlocuteur et suscite des remises en question de ses
propres normes, croyances et valeurs; son système de référence habituel ne lui
suffit plus à donner un sens à ce qu’il observe et à se sentir compétent dans son
environnement.
Culture et conscience culturelle. La culture est transmise par enculturation
– processus au cours duquel un individu intègre les valeurs et les normes de sa
collectivité et apprend à interpréter le monde et à se comporter comme les
membres de son entourage (Alboudy, 1976 : voir Guimond, 1974, p. 671;
Barrette et coll., 1996, p. 29). Dès son plus jeune âge, l’individu apprend ce
qui est (ou ce qui n’est pas) permis, correct, normal ou naturel grâce à des
pratiques et à des prescriptions culturelles qui permettent aux valeurs et aux
idéaux d’une collectivité d’exister concrètement au sein de celle-ci. Les croyan-
ces, les valeurs, les impératifs et les interdits sociaux sont transmis et renfor-
cés par le biais de coutumes, de normes et de pratiques qui règlent les relations
dans les activités de tous les jours, au sein de la famille, à l’école, au travail,
dans les loisirs. En répondant aux demandes et aux attentes plus ou moins
explicites qui lui sont adressées par ses parents, ses professeurs, ses amis, son
employeur, ses collègues, etc., l’individu intériorise les valeurs collectives pré-
dominantes (Markus et Kitayama, 1994).
L’enculturation se déroule en grande partie avant l’âge de l’abstraction, par
observation et par imitation plutôt que par des indications verbales et explicites
(Andersen, 2000). La nature de ce processus fait en sorte que la culture est
apprise et vécue plus ou moins à notre insu, sans que nous en soyons pleine-
ment conscients. Le fait que nous ne soyons pas toujours conscients des va-
leurs et des croyances qui motivent nos comportements rend celles-ci plus
difficiles à identifier quand elles sont au coeur d’un conflit, ce qui, en retour,
rend celui-ci plus difficile à résoudre.
Culture et normalité. Avec l’ensemble des gènes hérités à la naissance, l’en-
vironnement social est le principal déterminant de l’identité et du comporte-
ment (Andersen, 2000; Barrette et coll., 1996). Comme la socialisation
commence dès notre arrivée au monde, il n’est pas toujours facile de départa-
ger l’influence du milieu de celle des gènes. Comment savoir si un individu est
ou se comporte d’une certaine façon parce que c’est « dans sa nature » plutôt
que « dans sa culture » d’être ou d’agir ainsi? L’impact de la culture sur le
comportement est et a souvent été confondu avec celui de la nature. Ainsi, la
théorie à l’origine du racisme soutenait que les différences entre les groupes
humains provenaient de différences génétiques héréditaires, plutôt que de la

La communication interculturelle et ses obstacles 131
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005diversité des milieux de vie; les différences sociales et culturelles ainsi que les
inégalités de statut, de richesse et de pouvoir étaient considérées comme des
conséquences directes de la biologie, ce qui justifiait la discrimination et, en
retour, le maintien du statut quo (Barrette et coll., 1996).
Dans les faits, il est difficile de faire le lien entre biologie et comportement,
entre autre parce qu’un gène ne contrôle pas directement la manifestation d’un
trait. En effet, le milieu, i.e. l’ensemble des conditions internes et externes de
l’organisme, intervient avec le matériel génétique pour déclencher, inhiber,
moduler l’expression d’un trait (Barrette et coll., 1996). Bien que la science
ait permis d’invalider les fondements théoriques du racisme, il demeure par-
fois difficile de distinguer les effets de la culture et ceux de la nature. Étant
donné l’enracinement profond de la culture dans l’éducation et dans le déve-
loppement d’un individu, celui-ci peut facilement en arriver à confondre la
« nature humaine », la « normalité » ou toute vérité «  universelle » avec sa
propre culture.
Sans nier l’existence d’une vérité absolue, la recherche ou la définition de
cette vérité n’est pas le but principal de la communication interculturelle dans
le contexte québécois d’intégration. Malgré l’existence de besoins communs à
tous les êtres humains, il n’existe pas de réponse universelle à ces besoins.
Dans un contexte d’entraide et de solidarité, les interlocuteurs doivent
chercher à favoriser la satisfaction des besoins mutuels tout en demeurant cons-
cients que les moyens de satisfaire ces besoins varient selon la culture.
L’identité culturelle
Culture versus identité culturelle. Bien qu’il soit nécessaire de s’interroger
sur le concept de culture  pour déterminer les implications que peut avoir la
présence de différences culturelles sur la communication, il ne suffit pas de
connaître divers systèmes culturels pour prévenir et surmonter les difficultés
que peuvent rencontrer des interlocuteurs de cultures différentes. La connais-
sance des croyances, des valeurs, des normes de conduite et des codes de
communication qui prévalent dans une culture peut nous aider à prévoir et
à expliquer le comportement d’une personne dans la mesure où celle-ci
s’identifie à cette culture – ce qui n’est pas toujours le cas.
Ainsi, l’identité culturelle qu’on attribue à une personne (identité prescrite) ne
correspond pas nécessairement à l’identité culturelle telle que vécue par cette
personne : ce n’est pas parce qu’on catégorise une personne comme membre
d’un groupe que cette personne s’identifie à celui-ci ou qu’elle agira en fonc-
tion des idées préconçues concernant ce groupe. Par exemple, un individu

132 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005d’origine étrangère adopté en bas âge peut s’identifier davantage à la culture
d’accueil qu’à sa culture d’origine. Par ailleurs, même si notre interlocuteur
confirme son appartenance à un groupe, son identification peut ne pas être
totale ni exclusive. Il peut se différencier du reste du groupe soit en rejetant
certains ou plusieurs éléments culturels de ce groupe, soit en accordant à d’autres
éléments plus (ou moins) d’importance que les autres membres du groupe, soit
encore en intériorisant d’autres appartenances. C’est souvent le cas des
enfants d’immigrants socialisés dans deux cultures différentes, le jour à l’école,
dans la société d’accueil, et le soir dans leur famille.
La culture est un ensemble d’éléments partagés par un large groupe et transmis
de génération en génération au sein de ce groupe (Samovar et Porter, 2000 ;
Singer, 1987); elle ne désigne pas l’individualité de chaque membre de ce
groupe. Or, la communication met en relation non pas des cultures mais des
individus, ceux-ci ayant une expérience personnelle de leur culture. L’expé-
rience d’une culture peut être désignée par le terme d’identité culturelle, qui se
définit plus précisément comme l’identification d’un individu à un groupe et
le sentiment de cet individu d’être accepté par ce groupe (Collier et Thomas,
1988 : voir Belay, 1996, p. 321).
L’identité culturelle dérive d’une tension constante entre un besoin d’affilia-
tion et un besoin de différenciation (Brewer, 1991 : voir Gudykunst, 1994, p.
23). Le fait d’être unique et différent est aussi important que d’être semblable
à d’autres personnes et d’être intégré à un groupe. En se conformant à certai-
nes normes pour être accepté au sein d’un groupe, l’individu répond à son
besoin d’affiliation; en faisant valoir les caractéristiques qui permettent à son
groupe de se démarquer des autres groupes, il répond à son besoin de diffé-
renciation. C’est peut-être ce qui explique l’attachement des Québécois à la
langue française : celle-ci leur permet en effet de se distinguer de tous les
autres groupes ethnolinguistiques d’Amérique du Nord.
Comme l’identité culturelle d’un individu vise à satisfaire ses besoins d’affi-
liation et de différenciation, la revendication de cette identité peut être un enjeu
importan t lors d’une communication. La non reconnaissance ou le non respect de
l’identité culturelle d’un individu peut être perçu ou vécu comme une menace
par celui-ci. Toute situation ou toute personne qui remet en question son identité
peut être perçue comme une menace – particulièrement si ce changement
concerne des aspects ou des engagements centraux à son identité. Belay (1996)
suggère cinq éléments de définition de l’identité culturelle qui peuvent nous
aider à identifier ce qu’il importe de considérer dans la reconnaissance de
l’identité culturelle d’un interlocuteur. Il s’agit de la « temporalité », de la
« territorialité », de la « multiplicité », de la « contrastivité » et de

La communication interculturelle et ses obstacles 133
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005l’ « interactivité ». Ajoutons également le pouvoir, un aspect de l’identité
culturelle ayant été documenté par Martin (2000), Orbe (1998) et Singer (1987).
Identité culturelle, temporalité et territorialité. La temporalité signifie que
l’identité culturelle se situe dans le temps. Elle émerge d’une histoire et s’ins-
crit dans cette histoire; elle est le produit de contextes historiques particuliers.
Un groupe culturel a une origine, lointaine ou récente. Il a aussi une existence
dans le présent. Il a une évolution : les Québécois furent d’abord des Français,
puis des Canadiens et plus tard, des Canadiens français. Cette évolution est
marquée par des événements significatifs : la défaite des Français contre les
Anglais à la fin du 18ème siècle est l’exemple d’un événement qui a eu des
répercussions importantes sur leur identité.
La construction de l’identité est aussi un processus qui se situe dans l’espace :
c’est ce qu’on entend par territorialité. L’identité d’un groupe est liée à la
revendication d’un territoire et à des stratégies ou à des justifications pour
gagner ou défendre ce territoire. L’ actualité en fournit un exemple avec le
conflit qui oppose Palestiniens et Israëliens, ces deux groupes ayant déve-
loppé un sentiment identitaire pour le même territoire. Plus près de nous, les
revendications territoriales des autochtones illustrent également l’importance
du territoire dans la constitution de l’identité.
La temporalité et la territorialité nous permettent de définir deux types impor-
tants d’éléments d’identification chez les membres d’un groupe culturel : les
éléments historiques et les éléments territoriaux. Des lieux et des événements
participent au développement et à l’évolution des identités culturelles et
peuvent être au centre de revendications ou d’enjeux identitaires importants
lors d’une interaction entre des personnes de cultures différentes; ils sont ac-
compagnés d’une charge émotive plus ou moins grande selon la signification
qui leur est attribuée.
La temporalité et la territorialité sont particulièrement centrales à la formation
des identités nationales et ethniques. Barrette et coll. (1996, p. 8) définissent
une nation comme une population « qui habite un pays ou une partie de son
territoire et qui a pu participer à sa création »; pour Singer (1987), une nation
désigne un groupe qui occupe un environnement spécifique et qui a une his-
toire propre. Une ethnie, d’autre part, est « une population qui se définit (…)
par une culture et une histoire communes à ses membres » (Barrette et coll.,
1996, p. 4). Même s’il arrive qu’une ethnie soit représentée par plusieurs grou-
pes en différents lieux du monde, ses membres partagent le sentiment d’une
origine commune (Martin, 2000) et leur histoire est généralement associée à
une région du monde en particulier.

134 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005Identité culturelle et multiplicité. La troisième particularité de l’identité cul-
turelle, la multiplicité, nous indique que le sentiment identitaire n’est exclusif
ni à l’appartenance ethnique, ni à l’appartenance nationale. Un danger de la
communication interculturelle est de réduire l’identité de son interlocuteur à
sa nationalité ou à son ethnicité. La communication interculturelle désigne la
communication entre des personnes de cultures différentes parmi lesquelles la
culture ethnique et la culture nationale, mais celles-ci interfèrent avec d’autres
éléments d’identification comme le sexe, l’âge, la religion, la classe sociale,
l’orientation sexuelle, la profession, etc. L’individu n’est pas enfermé dans
une seule catégorie sociale : tout au long de sa vie, il est membre, de façon
contrainte ou choisie, de groupes plus ou moins nombreux.
À l’instar des groupes nationaux ou ethniques, les groupes qui se définissent
sur la base de caractéristiques autres que la nation ou l’ethnie évoluent dans le
temps et dans l’espace. Ainsi, la révolution sexuelle a marqué l’évolution des
identités basées sur le genre; elle a bouleversé les rôles de l’homme et de la
femme occidentaux ainsi que les territoires respectifs qui leur étaient réservés,
i.e. le travail à l’extérieur du foyer et les tâches ménagères à la maison. Les
sous-groupes culturels donnent aussi naissance à des systèmes culturels qui
leur sont propres et qu’ils transmettent à leurs membres. En raison de ses ap-
partenances multiples, un individu peut partager certaines convictions ou
une perception semblable de la réalité avec le s membres de groupes variés
( DeVito et coll., 2001; Singer, 1987). Aussi, des membres d’un même groupe
social (ex. : adolescents) qui appartiennent à des communautés ethniques dif-
férentes (ex. : haïtienne et vietnamienne) ont parfois plus en commun qu’avec
d’autres membres de leur propre communauté ethnique qui appartiennent à
un groupe social différent (ex. : personnes âgées).
Identité culturelle et saillance identitaire. Les appartenances d’un individu
n’auront pas toutes le même poids dans la définition de son identité. Cons-
ciemment ou non, il les rangera en ordre d’importance. Certaines particulari-
tés de son environnement, comme le genre des gens qu’il côtoie au quotidien
ou le type et la concentration des groupes ethniques dans son milieu de vie,
pourront jouer un rôle important dans le développement de son identité
(Vallerand et Losier, 1994). Ainsi, pour une personne de couleur qui habite
dans un quartier majoritairement blanc, la race pourra devenir une dimension
d’appartenance très significative; pour un garçon élevé parmi plusieurs soeurs,
il pourra plutôt s’agir du genre. Comme il est peu probable que deux individus
s’identifient exactement à tous les mêmes groupes sociaux avec la même
intensité, deux interlocuteurs n’ont jamais tout à fait la même culture person-
nelle et la même perception de la réalité. Par contre, plus le nombre d’apparte-
nances communes est élevé, plus leur perception de la réalité est semblable, et
plus il leur sera facile de communiquer (Singer, 1987).

La communication interculturelle et ses obstacles 135
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005Le contexte fait aussi en sorte que nous nous référions à un groupe en particu-
lier quand nous communiquons (Belay, 1996, p. 323; Collier, 2000;
DeVito et coll. 2001); une caractéristique identitaire sera plus ou moins saillante
selon le contexte. Certaines catégories sociales semblent être saillantes dans la
plupart des situations, comme le genre et l’ethnicité (Smith et Bond, 1993 :
voir Gudykunst, 1994, p. 20), qui s’accompagnent de différences physique-
ment observables (traits) ou de « marqueurs culturels » (habillement). D’autres
catégories sont significatives dans certaines circonstances seulement, par exem-
ple quand seuls quelques membres d’une catégorie sont présents au sein d’un
groupe plus large.
Nous sommes également plus conscients d’une appartenance sociale lorsque
nous sommes mis en présence d’une personne qui diffère sur cette dimension
d’appartenance. Le contexte québécois rend particulièrement saillantes les
identités ethnolinguistiques, surtout dans les quartiers où plusieurs groupes se
côtoient, ainsi que dans les institutions publiques et sur la scène politique. Une
appartenance peut aussi être activée en présence d’une personne perçue comme
hostile ou menaçante vis-à-vis cette appartenance (Singer, 1987), ce qui est le
cas quand les individus sont membres de groupes qui ont une histoire de riva-
lités et de conflits, de domination et de soumission, ou entre lesquels il y a un
écart significatif de pouvoir ou de prestige social. La compétition entre Cana-
diens anglais et Canadiens français en est un exemple et a sans doute contribué
à faire de la langue un élément structurant de l’identité québécoise.
Identité culturelle, contrastivité et interactivité. La contrastivité signifie
que l’identité d’un groupe ou d’un individu n’apparaît que par la mise en con-
traste avec d’autres groupes ou d’autres individus. Une identité n’existe
pas en elle-même, elle est créée en relation avec celle des autres groupes ou
individus qui sont présents dans l’environnement social . Quand un groupe
ou un individu est mis en présence d’un autre groupe ou d’un autre individu
différent de lui sur une dimension donnée, il ne peut que devenir plus cons-
cient de cette dimension qui le distingue.
L’interactivité sous-tend que l’identité se développe et évolue dans l’interac-
tion : au fil des messages échangés avec son entourage, un groupe ou un
individu voit son identité tantôt confirmée et renforcée, tantôt remise en ques-
tion et modifiée. C’est par la communication qu’un individu négocie ou
revendique certains éléments identitaires. Au cours de sa vie ou même d’une
seule journée, il est amené à négocier et à revendiquer des identités sociocul-
turelles variées autant qu’à se voir attribuer ou refuser des identités diverses
par les membres de son environnement social (Belay, 1996; Collier, 2000 ).

136 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005La contrastivité et l’interactivité sont deux particularités qui mettent en relief
l’importance de l’environnement social et de la communication dans l’émer-
gence, le développement et l’ évolution d’une identité socioculturelle. À
travers le jeu de la communication, les personnes qui composent notre en-
vironnement social ont le pouvoir d’évaluer de manière positive ou négative
l’identité revendiquée et de nous accorder ou de nous refuser la reconnais-
sance de cette identité. Le besoin d’être confirmée et valorisée dans son identité
culturelle rend toute personne vulnérable face à son interlocuteur. Même un
membre de la société d’accueil peut être incommodé par la menace que repré-
sente l’évaluation de l’étranger du pays hôte ou de la personne elle-même.
L’identité d’un individu peut être atteinte quand celui-ci n’est pas reconnu
comme membre d’un groupe auquel il s’identifie ou dont il prise l’apparte-
nance; par exemple, un Néo-Québécois qui revendique l’identité québécoise
mais qui n’est pas reconnu comme tel par ses concitoyens. On peut aussi être
placé dans un groupe auquel on ne s’identifie pas ou dont on rejette l’apparte-
nance; c’est souvent le cas des immigrants, considérés comme formant un seul
groupe indifférencié, ou affublés d’étiquettes qui ne leur correspondent pas.
Identité et pouvoir. Une façon de mieux comprendre certains problèmes de
communication en contexte interculturel est de les considérer non pas sous
l’angle de la différence culturelle mais sous celui du pouvoir, en vertu duquel
certaines identités occupent une position privilégiée dans la structure sociale.
L’autre peut constituer une menace non seulement par sa différence mais aussi
par son pouvoir, perçu ou réel. Plus un interlocuteur est perçu comme ayant du
pouvoir, plus ses évaluations et ses gestes sont perçus comme étant lourds de
conséquences; on peut craindre, par exemple, que le comportement ou l’éva-
luation de l’autre ait des conséquences négatives sur soi (Stephan et Stephan,
1985 : voir Gudykunst, 1994, p. 14).
Le pouvoir est la capacité à influencer ou à modifier le comportement des
autres groupes et/ou individus dans le sens désiré (Singer, 1987). Le pouvoir
d’un groupe dépend de plusieurs variables : 1) sa richesse, humaine ou maté-
rielle, i.e. les ressources matérielles qu’il possède et la valeur sociale de ses
ressources ainsi que la force numérique et psychologique de ses membres;
2) son organisation, formelle ou informelle, i.e. sa capacité à former des coa-
litions; 3) l’information qu’il détient, générale ou spécifique à un domaine, et
la capacité de persuasion de son idéologie; 4) son statut, prescrit ou acquis,
entre autres selon sa position historique; 5) et sa volonté ou son intention,
consciente ou inconsciente, d’exercer le pouvoir.
Dans la négociation d’une identité, le pouvoir est vital. Selon Martin (2000), il
existe, aux États-Unis (et, par extension, en Amérique du Nord), un continuum

La communication interculturelle et ses obstacles 137
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005le long duquel se situent les identités en fonction du pouvoir qu’elles détien-
nent. À l’une des extrémités se trouvent les hommes hétérosexuels de race
blanche, de religion protestante, de classe moyenne/élevée; à l’autre extrémité
se trouvent les femmes homosexuelles de couleurs, de religions autres que
protestante et de classe moins aisée. En situation de pouvoir, une identité est
perçue et vécue comme « la » norme (ou « normative »); l’individu ou le groupe
ne risque guère d’être remis en question. Par contre, les occasions de prises de
conscience identitaires sont moins fréquentes; c’est pourquoi un pouvoir
identitaire élevé est souvent associé à une conscience identitaire faible.
Au contraire, une identité en marge de la norme dominante est plus susceptible
de susciter des réactions, d’être évaluée négativement, d’être dépréciée ou
dénigrée. C’est souvent le cas des membres de groupes minoritaires. Une étude
réalisée aux États-Unis auprès d’un groupe de femmes d’origine indienne
révèle la nature des difficultés rencontrées dans la négociation d’une identité
non dominante (Hedge, 1998). Ces femmes rapportent être confrontées au
stéréotype de la femme asiatique soumise, docile, trop peu agressive et sans
leadership, traditionnelle et peu sociable. Elles ajoutent qu’elles se sentent
disparaître derrière des formulations généralisantes telles que « vous les
Indiens ». Il en résulte un sentiment d’appauvrissement et de manque de con-
trôle sur leur environnement ainsi que l’intériorisation d’une identité négative.
Toute remise en question du pouvoir d’un groupe peut être considérée comme
une menace à l’identité de ce groupe car il en résultera un changemen t dans
la capacité de celui-ci à contrôler les mécanismes sociaux par lesquels les
identités sont négociées. C’est pourquoi la réceptivité d’une société d’accueil
envers les membres d’un groupe ethnique varie selon la « vitalité ethnolin-
guistique » (Dodd, 1991, p. 116) de ce groupe, i.e. selon le statut économique,
social et politique, perçu ou réel, et selon la menace économique, sociale,
politique, perçue ou réelle, que représente ce groupe dans la société d’accueil
(Kim, 1997). Au Québec, le nouvel arrivant « se retrouve en position de force : il
comble un besoin démographique, il est souvent formé et préparé pour répon-
dre à des besoins urgents de main-d’oeuvre qualifiée, à moins qu’il n e soit un
investisseur. Il n’est pas seulemen t pauvre ou réfugié » (Guitouni, 1998, p . 12).
Le concept de soi
Identité culturelle versus concept de soi. Une culture peut influencer la
manière d’être, d’agir et de communiquer d’un individu dans la mesure où
celui-ci s’identifie à cette cult ure. Toutefois, un individu ne se définit pas tou-
jours que par son appartenance à un ou à des groupes culturels; en contexte
interculturel, il peut aussi communiquer sur une base personnelle . Une
compréhension plus juste de son comportement de communication doit inclure

138 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005une définition plus globale de son identité, ou de son concept de soi – i.e.
l’ensemble des idées et des perceptions qu’il a sur lui-même (DeVito et coll.,
2001). Le concept de soi est à distinguer de l’identité culturelle : celle-ci est
l’expérience personnelle d’une culture, alors que le concept de soi est l’image
qu’une personne a d’elle-même. Cette image est inclusive des appartenances
sociales, mais l’importance de ces appartenances dans la définition du
concept de soi peut varier en fonction des valeurs et des idéaux collectifs
intériorisés par l’individu au cours de la socialisation.
Le concept de soi influence et, dans bien des cas, détermine la nature de
l’expérience individuelle d’une personne, que ce soit au niveau cognitif, émo-
tif ou motivationnel (Markus et Kitayama, 1991); en retour, les cognitions, les
émotions et les motivations sont des composantes psychologiques qui ont des
répercussions sur le comportement observable des individus. Or, la nature du
concept de soi – et, par conséquent, celle des cognitions, des émotions et des
motivations – peut varier en fonction de la culture et se traduire par des diffé-
rences dans le comportement des individus, différences qui peuvent nuire à la
communication interculturelle. Examinons plus en détails les composantes
générales du concept de soi et les variations culturelles possibles.
Aspects universels du concept de soi. Certains aspects du concept de soi sont
universels. Quelle que soit sa culture, un individu a conscience d’être habité
par une certaine activité interne, un flot continu de pensées, de rêves, d’émo-
tions inaccessibles aux autres. L’ensemble de ces éléments compose le soi
privé. Les aspects de soi qui sont visibles et qui peuvent être observés directe-
ment par les autres (apparence physique, comportement, etc.), d’autre part,
composent le soi public DeVito et coll., 2001; Markus et Kitayama, 1991).
Tout individu identifie aussi des caractéristiques qui lui sont propres et qui lui
permettent de se distinguer des autres; ces éléments composent son identité
personnelle (DeVito et coll., 2001; McGuire, 1984; McGuire et Mcguire, 1981,
1988 : voir Losier et Vallerand, 1994, p. 143). Son appartenance à un ou des
groupes sociaux, d’autre part, donne naissance à son identité sociale (Bourhis
et Gagnon, 1994); celle-ci inclut les éléments du concept de soi qu’un individu
partage avec d’autres personnes (DeVito et coll., 2001). Le concept de soi
étant tributaire de la valeur subjective attachée à l’identité sociale, l’individu
cherche à s’associer à des groupes qu’il évalue positivement de manière à
servir une image de soi positive (Tajfel et Turner, 1986 : voir Bourhis et Gagnon,
1994).
Dans une situation de communication, un individu sera plus ou moins sensible
à la menace de son identité personnelle ou de son identité sociale selon l’im-
portance qu’il accorde à chacune. Or, l’importance relative du soi privé, du soi

La communication interculturelle et ses obstacles 139
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005public, de l’identité personnelle et de l’identité sociale dans la définition du
concept de soi varie en fonction de la culture. L’individualisme-collectivisme
(Hofstede, 1994), l’une des principales dimensions de variabilité culturelle
que nous retrouvons dans la littérature, peut nous éclairer sur ces variations
culturelles ainsi que sur leurs conséquences sur le comportement des individus
et sur la communication interculturelle. Voyons ci-dessous en quoi consistent
l’individualisme et le collectivisme.
Individualisme et collectivisme. L’individualisme et le collectivisme sont deux
systèmes de croyances et de valeurs sur lesquels reposent, à divers degrés, des
systèmes culturels variées. Une culture individualiste valorise la réalisation de
soi et l’accomplissement personnel. L’individu doit découvrir et assumer
ce qui le rend unique, promouvoir ses buts personnels et devenir indépendant
des autres. Il apprend à évaluer positivement des attributs comme l’authenti-
cité, l’autonomie et la capacité à faire des choix personnels. La dépen-
dance (affective ou matérielle) et l’incapacité à se démarquer ou à se faire
remarquer des autres sont perçues négativement.
Dans une culture collectiviste, l’idéal poursuivi est l’harmonie sociale et le
maintien de l’interdépendance avec d’autres personnes. L’individu doit
contribuer à l’ordre et à l’équilibre au sein de son groupe immédiat et dans sa
collectivité; il doit promouvoir les buts d’autrui et éviter les situations de con-
frontation. La faculté d’adaptation aux autres, la loyauté et la capacité à rem-
plir ses obligations sociales sont des qualités très prisées. L’incapacité à entre-
tenir des relations stables, la rupture de liens significatifs ou l’exclusion du
groupe d’appartenance sont des épreuves difficiles à traverser (Markus et
Kitayama, 1991).
Selon Triandis (1988 : voir Gudykunst, 1994, p. 44), le rôle et l’importance
relative des groupes d’appartenance dans la vie des gens est l’un des princi-
paux facteurs qui différencient les cultures individualistes et collectivistes.
Dans une société individualiste, le groupe d’appartenance principal est la
famille immédiate. Même si un individu s’associe, selon ses goûts et ses inté-
rêts, à divers groupes sociaux (clubs, ordres professionnels), il doit surtout
prendre soin de lui-même et de ses parents proches. Son identité repose sur
plusieurs appartenances sociales et chacune d’elles n’influence sa conduite
que dans des situations spécifiques, sans jouer un rôle très important dans le
maintien de l’estime de soi.
Dans une société collectiviste, la per sonne appartient à une famille étendue ou
à quelques groupes seulement (religion, université, entreprise) qui répondent
à ses besoins en général. Le groupe veille au bien-être et à la protection de ses
membres mais, en échange, ceux-ci doivent faire preuve de solidarité et de

140 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005loyauté (Hofstede et Bond, 1984 : voir Gudykunst, 1994), par exemple en se
comportant conformément à ses normes. L’identité sociale est définie par des
appartenances moins diversifiées et plus exclusives que dans les cultures indi-
vidualistes; leur importance émotive est plus grande, leur influence sur leur
comportement est généralisée à la plupart des situations et elles jouent un rôle
déterminant dans le maintien de l’estime de soi.
L’individualisme-collectivisme est une dimension de variabilité qui a souvent
été utilisée pour différencier les cultures d’un point de vue nationale . Les
États-Unis, l’Australie, la Grande-Bretagne, le Canada et les Pays-Bas ont été
identifiés comme les nations les plus individualistes, alors que le Japon, la
Chine, la Corée, le Venezuela et la Colombie comptent parmi les pays les plus
collectivistes (Hofstede, 1994). Les degrés d’individualisme et de collecti-
visme diffèrent également à l’intérieur d’un même pays; il existe une grande
variabilité non seulement entre les nations, mais aussi à l’intérieur même des
nations. L’individualisme et le collectivisme cohabitent de plus en plus dans les
sociétés modernes en raison des mouvements migratoires et des individus qui
perpétuent leur culture d’origine au sein de leur communauté d’accueil, mais
aussi parce qu’aucun groupe n’est jamais tout à fait homogène de par la diver-
sité des êtres humains.
Construit de soi indépendant, construit de soi interdépendant. Deux types de
concepts de soi, le construit de soi indépendant et le construit de soi interdé-
pendant (Markus et Kitayama, 1991, 1994) ont été associés à l’individualisme
et au collectivisme (Gudykunst et coll. : voir Gudykunst, 1994, p. 44); ils
reflètent, au niveau individuel , les valeurs, les idéaux et les normes qui prévalent
dans chacun de ces systèmes culturels. Le construit de soi indépendant est plus
typique de la culture nord-américaine et des cultures ouest-européennes , alors
que le construit de soi interdépendant se retrouve en Asie, particulièrement au
Japon, ainsi que dans les cultures africaines, latines-américaines et sud-euro-
péennes. Comme pour l’individualisme-collectivisme, cette distinction doit
être considérée comme une tendance générale qui émerge quand les cultures
sont considérées globalement. Des variations existent à l’intérieur d’une même
culture : par exemple, Markus et Kitayama (1994) observent que les membres
de groupes marginalisés au sein d’une société ont tendance à développer un
construit de soi interdépendant alors que ceux qui détiennent le pouvoir inté-
riorisent plutôt un construit de soi indépendant.
L’individu qui se définit par un construit de soi indépendant se voit comme un
être unique et séparé d’autrui par des limites psychologiques clairement éta-

La communication interculturelle et ses obstacles 141
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005blies; ses relations sociales lui servent surtout à réaliser ses buts personnels.
Une personne au construit de soi interdépendant, au contraire, se définit en
grande partie par ses relations avec d’autres personnes; le développement et le
maintien de relations sociales sont des fins en soi. Cela ne signifie pas pour
autant que les individus au construit de soi indépendant sont incapables
d’entraide, d’amour, d’amitié, de sympathie ou de compassion – ni d’ailleurs
que les individus au construit de soi interdépendant sont incapables d’indé-
pendance. Par contre, dans les cultures individualistes, les comportements
prosociaux sont laissés à la discrétion des individus; ils suscitent le respect,
l’admiration. Dans les cultures collectivistes, de tels comportements ne sont
pas exceptionnels : ils constituent une norme, voire même un impératif. D’un
autre côté, la poursuite de l’indépendance, prioritaire dans les cultures indivi-
dualistes, est laissée à l’initiative de chacun dans les cultures collectivistes.
Une personne accorde plus ou moins d’importance au soi privé et au soi
public en fonction du type de construit de soi qu’elle a développé. Un individu
au construit de soi indépendant se définit et se comporte en fonction du soi
privé; les éléments importants de son concept de soi sont des attributs internes
: pensées, sentiments, désirs, préférences, habiletés, opinions, etc. L’individu
cherche à se présenter aux autres tel qu’il est intérieurement. De son côté, un
individu au construit de soi interdépendant s’efforce de faire abstraction
de ses attributs internes pour éviter que ceux-ci menacent le maintien d’une
relation harmonieuse. Il se conduit plutôt en fonction du soi public, i.e. en
fonction des rôles qui le définissent dans sa collectivité : père/mère, fils/fille,
frère/soeur, mari/femme, patron/employé, etc . Sa conduite est dictée non
pas par ses propres pensées, sentiments ou buts personnels mais par ceux des
personnes significatives ou par les normes et les attentes associées à sa posi-
tion dans l’organisation sociale.
La nature du construit de soi d’un individu a un impact au niveau de ses cogni-
tions, de ses émotions et de ses motivations. Au niveau cognitif, un individu au
construit de soi indépendant développe généralement une meilleure connais-
sance de lui-même que celui qui a un construit de soi interdépendant. Par
contre, ce dernier élabore des représentations plus complexes et élaborées des
autres, ce qui lui permet d’ajuster sa conduite à chaque personne ou à chaque
relation. Au niveau émotif, l’individu au construit de soi indépendant est plus
attentif aux émotions « centrées sur le soi » (frustration, colère, fierté), i.e. des
émotions qui lui permettent de faire valoir ses attributs personnels et de
les faire respecter par autrui, alors que la personne au construit de soi interdé-
pendant exprime plus souvent des émotions « centrées sur l’autre » (sympathie,
communion, honte), émotions favorables au maintien de relations

142 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005interpersonnelles. Au niveau des motivations, même si certains besoins sont
universels, leur satisfaction repose sur des éléments différents selon la culture.
Par exemple, l’accomplissement de soi passe par le développement d’un
construit de soi i ndépendant dans les sociétés individualistes , et par le
développement d’un construit de soi interdépendant dans les sociétés collecti-
vistes.
La nature du construit de soi d’un individu se reflète également dans ses
comportements de communication. Une personne de culture individualiste
cherche à confirmer un construit de soi indépendant et à se différencier d’autrui
alors qu’un individu de culture collectiviste tente de soutenir un soi interdé-
pendant et d’obtenir l’approbation des personnes significatives (Gudykunst,
1994; Ting-Toomey, 1988). Dans la gestion d’un conflit, un individu de
culture individualiste se concentre sur la tâche à accomplir, sur le problème à
résoudre, cherchant à se réaliser dans l’action. Il sépare le conflit des person-
nes; il aborde le conflit ouvertement, directement. À ses yeux, l’utilisation de
stratégies indirectes est un signe de lâcheté. Un individu de culture collecti-
viste, au contraire, se définit par ses relations et par sa capacité à maintenir
l’harmonie; il considère donc le conflit comme une menace pour lui-même,
pour son interlocuteur ou pour la relation. Si le conflit est inévitable, il l’aborde
subtilement et s’efforce de protéger son image et celle d’autrui en faisant preuve,
selon son rang et celui de son interlocuteur, de bienveillance ou d’humilité. Les
stratégies directes sont associées à un manque de savoir-vivre comparative-
ment aux stratégies indirectes, plus appropriées (Ting-Toomey, 1988, 2000).
Les obstacles à la compréhension mutuelle et à la satisfaction
des besoins
Nous avons tenté ci-dessus de résumer les principaux éléments qui peuvent
structurer la dynamique de la communication quand le psychologue en
relations humaines établit une relation professionnelle avec une personne de
culture ou d’appartenance socioculturelle différente, ou lors d’un échange en-
tre un membre de la société d’accueil et un immigrant. Cherchons maintenant
à comprendre ce qui peut nuire à la communication dans ces contextes de
diversité culturelle.
Les obstacles à la communication interculturelle : un aperçu
Barna (1997) identifie six pierres d’achoppement à la communication
interculturelle : la présomption de similarité; les différences dans le langage;
les interprétations erronées des codes non verbaux; les idées préconçues et
stéréotypes; la tendance à évaluer; et l’anxiété élevée. Samovar (1991) distin-

La communication interculturelle et ses obstacles 143
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005gue, lui aussi, six obstacles potentiels à la communication interculturelle : la
recherche de ressemblances; la diversité des buts de communication; le retrait;
les stéréotypes et préjugés; l’ethnocentrisme; et la réduction de l’incertitude.
La plupart de ces thèmes ou des thèmes similaires se retrouvent chez d’autres
auteurs qui abordent les relations intergroupes et la communication
interculturelle : l’absence de prise en compte de la différence ou la prise en
compte défectueuse de la différence chez Camilleri (1989); la similarisation,
la catégorisation et la péjoration de la différence chez Camilleri et Vinsonneau
(1996); les stéréotypes, les préjugés, l’ethnocentrisme, la discrimination et le
racisme chez Barrette et coll. (1996); le racisme chez Carter et Thompson
(1997); ainsi que l’anxiété et l’incertitude chez Gudykunst (1994).
L’ethnocentrisme est sans doute le concept qui permet le mieux de mettre en
lumière les liens qui existent entre ces thèmes. Ceux-ci peuvent être vus tantôt
comme des manifestations de l’ethnocentrisme (présomption de similarité;
absence de prise en compte de la différence ou prise en compte défectueuse
de la différence; stéréotypes et préjugés), tantôt comme des causes de l’ethno-
centrisme (différences dans le langage ou dans les buts de communication;
recherche de ressemblances; incertitude et anxiété), tantôt comme des consé-
quences de l’ethnocentrisme ( interprétations erronées, tendance à évaluer,
discrimination et racisme) . Voyons en quoi consiste l ’ethnocentrisme et tentons
d’en identifier les causes ou les déclencheurs potentiels, les formes sous
lesquelles il se manifeste et ses conséquences sur la communication.
Ethnocentrisme  : éléments de définition
D’un point de vue cognitif, l’ethnocentrisme est la tendance à voir le monde à
partir de son propre cadre de référence. Summer, le premier à avoir utilisé ce
terme dans l’étude des relations intergroupes et de la culture, définit l’ethno-
centrisme comme une « attitude qui consiste à considérer son propre groupe
comme le centre de l’univers et à évaluer tous les autres groupes en fonction
du sien » (Summer, 1906 : voir Bourhis et Gagnon, 1994, p. 735; Summer,
1940 : voir Samovar et Porter, 2000, p. 9- 10). L’ethnocentrisme est la « ten-
dance à interpréter et à juger de la réalité observée à partir de nos propres
critères culturels » (Barrette et coll., 1996, p. 148); c’est la tendance à juger
tout groupe, son environnement, son mode de communication selon les caté-
gories et valeurs de sa propre culture (Samovar, 1991, p. 279).
L’ethnocentrisme s’accompagne d’un processus de catégorisation à partir
duquel on distingue les membres de l’endogroupe et ceux de l’exogroupe.
Souvent, ce mécanisme cognitif va de pair avec des jugements favorables à
l’égard de l’endogroupe et des jugements défavorables envers les exogroupes
(quoique des exceptions soient possibles chez les groupes sous la domination

144 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005d’autres groupes; Bourhis et Gagnon, 1994, p. 753). D’un point de vue affec-
tif, l’ethnocentrisme est donc un phénomène qui se caractérise par un biais
pro-endogroupe, i.e. par : 1) des attitudes positives envers l’endogroupe;
2) des attitudes négatives envers les exogroupes; 3) et la conviction que les
exogroupes sont inférieurs à l’endogroupe (Bourhis et Gagnon, 1994). Plus la
situation intergroupe est conflictuelle, plus cette tendance s’accentue.
L’ethnocentrisme est comparable à la culture en ce sens où il est lié à la satis-
faction de besoins fondamentaux. D’une part, en ayant recours à son propre
système de croyances et de représentations pour interpréter la réalité et pour
donner un sens aux événements, l’individu répond à son besoin de cohérence.
D’autre part, le biais pro-endogroupe ayant pour effet de rehausser son
identité, l’ethnocentrisme répond à son besoin d’estime de soi. À l’instar de la
culture, l’ethnocentrisme est également un phénomène universel et incons-
cient. Ainsi, Lipiansky (1989 : v oir Barrette et coll., 1996, p. 148) définit
l’ethnocentrisme comme un trait culturel, universellement répandu. Pour
Samovar et Porter (2000, p. 9-10), la culture est ethnocentrique. L’ethnocen-
trisme nous est transmis à notre insu et très tôt dans la vie : sur les bancs
d’école, des générations de jeunes Canadiens anglais ont appris à voir la
Conquête comme une libération pour les Canadiens français, alors que le même
événement était présenté à ceux-ci comme une catastrophe (Chartrand, 1998 ).
De part et d’autre, les individus acquièrent un point de vue ethnocentrique de
leur histoire et de celle des autres groupes.
La différence culturelle : cause réelle versus cause apparente
Camilleri (1989) définit les attitudes et les comportements ethnocentriques
comme des réactions à la différence culturelle. Nombreux sont ceux qui, comme
lui, associent la différence aux problèmes fréquemment rencontrés entre
des personnes de cultures différentes. Les différences dans les codes de
communication verbale et non verbale sont des éléments culturels qui comp-
tent parmi les obstacles à la communication interculturelle identifiés
par Barna (1997). L’absence d’une langue commune n’est souvent que la pointe
de l’iceberg : même si l’ utilisation d’une même langue facilite l’échange
des messages, elle ne garantit pas pour autant une communication efficace, les
mêmes mots pouvant être utilisés et interprétés différemment par les interlocu-
teurs; ainsi, des malentendus pourront naître autour d’un simple « oui » ou
« non ». La communication non verbale pose un problème semblable : un
regard, un signe de la main peuvent signifier des choses diamétralement oppo-
sées selon la culture, tantôt salutation, tantôt insulte.
La diversité des buts de communication est un autre élément de différence
culturelle ayant été identifié parmi les obstacles à la communication (Samo-

La communication interculturelle et ses obstacles 145
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005var, 1991). Une fois les messages verbaux et non verbaux décodés
adéquatement, il se peut que leur contenu révèle des différences plus profon-
des, au niveau des buts ou des valeurs des i nterlocuteurs. Par exemple, une
personne ayant des valeurs individualistes pourra poursuivre le but de
clarifier une tâche à effectuer (clarté) ou de mettre en valeur ses attributs
personnels (différenciation), alors qu’un individu ayant des valeurs collecti-
vistes communiquera surtout pour entretenir une relation significative
(harmonie) ou pour faire valoir des a ppartenances sociales qui le lient à
d’autres personnes (affiliation).
Bien que la différence culturelle soit identifiée comme un obstacle à la
communication, ce n’est pas tant la différence en elle-même qui nuit à la
communication mais plutôt les réactions plus ou moins conscientes qu’elle sus-
cite. Elles peuvent être de trois natures (Camilleri, 1989; voir aussi Camilleri
et Vinsonneau, 1996). La première manière de réagir à la différence est
l’absence de prise en compte de la différence, ou similarisation de la diffé-
rence (semblable à la présomption de similarité décrite par Barna, 1997). La
deuxième manière de réagir à la différence est la prise en compte défectueuse
de la différence par réduction de celle-ci, par la catégorisation ou par l’usage
de stéréotypes. La troisième manière de réagir à la différence est la prise en
compte défectueuse de la différence par la péjoration celle-ci, ce qui se mani-
feste par des préjugés et peut entraîner de la discrimination et du racisme.
L’absence de prise en compte de la différence. L’absence de prise en compte
de la différence se manifeste de plusieurs façons. Même s’il peut y avoir une
ignorance réelle des différences culturelles, en particulier dans les sociétés
homogènes, il est surtout question, dans les sociétés pluralistes, d’une mécon-
naissance de ces différences (Camilleri, 1989 , p. 365). On comprend mal
commen t celles-ci s’expliquent; on observe des différences dans divers domaines
sans toutefois connaître le système de croyances et de valeurs qui donne un
sens et une cohérence à l’ensemble de ces différences. On utilise donc son
propre système de référence pour tenter de comprendre le comportement de
l’étranger.
On peut aussi présumer que suffisamment de ressemblances existent entre les
êtres humains pour faciliter la communication : « Dans le fond, on est tous
pareils », se dit-on (Barna, 1997). On se base sur l’existence d’émotions
fondamentales (colère, peur, surprise, tristesse, dégoût, joie), sans considérer
les différentes raisons qui peuvent donner naissance à ses émotions ainsi
que les différences au niveau de l’intensité et des circonstances où elles sont
exprimées. Ou encore, on réfère aux besoins communs à tous les êtres humains
sans considérer les différences qui se sont développées dans les réponses à ses
besoins. Le partage de plus en plus répandu de codes communs (anglais comme

146 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005langue de communication, codes vestimentaires occidentaux, etc.) peut faire
naître ou renforcer la présomption de similarité qui, la plupart du temps, de-
meure pourtant une illusion, même pour un immigrant installé au Québec de-
puis un certain temps.
Le fait de choisir, plus ou moins consciemment, d’ignorer, voire de nier la
différence peut s’expliquer par une tendance générale, chez l’être humain, à
rechercher la ressemblance (Samovar, 1991). Celle-ci peut se situer dans l’ap-
parence, le « background » (âge, statut socio-économique), les attitudes, les
valeurs ou la personnalité (Dodd, 1991). Elle est d’autant plus significative si
elle supporte des croyances, des valeurs ou des attitudes qui sont centrales à
l’identité de l’individu (Byrne et Nelson, 1965 ; Clore, 1977 : voir Duck et
Lea, 1983, p. 60), qui sont difficiles à vérifier objectivement (Byrne, Nelson et
Reeves, 1966 : voir Duck et Lea, 1983, p. 60) et qui sont partagées par un
nombre limité de personnes (Kelley, 1979 : voir Duck et Lea, 1983, p. 60). La
similarité de croyances, de valeurs et d’attitudes tire son attrait du fait qu’elle
valide les représentations de l’individu, lui confirmant sa compétence et son
efficacité à prédire et à expliquer le monde (Clore et Byrne, 1974 : voir Duck
et Lea, 1983, p. 58). Il s’agit d’u ne forme de support qui contribue à sa
sécurité psychologique et qui lui permet d’affronter de nouvelles situations
avec confiance. La similarité est aussi plus attrayante parce qu’elle est moins
exigeante en termes d’efforts à fournir pour communiquer.
Le fait de nier les différences quand on est incapable de trouver des ressem-
blances chez son interlocuteur réduit l’ inconfort et protège du stress qui vient de
la reconnaissance de ces différences ainsi que de la nécessité de s’y adapter : il
est plus rassurant de pouvoir traiter tout le monde de la même façon en partant
de l’idée qu’on est tous pareils que de considérer chaque rencontre comme
une nouvelle aventure. Or, même si elle augmente le sentiment de confiance,
la présomption de similarité ne rend pas la communication plus efficace. Elle
interfère avec le décodage des codes non verbaux dont les significations
diffèrent selon la culture. La présomption de similarité fait en sorte que nous
soyons moins attentifs aux différences; elle diminue les efforts de clarifica-
tion et entraîne des interprétations erronées ou des jugements de valeurs. Elle
soutient une tendance à évaluer l’autre, à approuver ou à désapprouver ses
attitudes et ses comportements avant d’avoir tenté de le comprendre à partir de
ses cadres de référence.
Par exemple, un individu de culture collectiviste qui interprète le comportement
d’un interlocuteur de culture individualiste à partir de son propre système de
référence trouvera sans doute que celui-ci manque d’humilité et de maturité en
cherchant à faire valoir ce qui le rend unique et différent, en parlant de ses
talents et habiletés, en révélant ses goûts et opinions sur divers sujets et en

La communication interculturelle et ses obstacles 147
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005exprimant ouvertement des émotions telles la frustration, la colère, la fierté.
D’un autre côté, cet individu de culture collectiviste, en parlant de sa famille
élargie plutôt que de lui-même et en évitant d’émettre des idées personnelles
ou de confronter son interlocuteur, pourra être perçu par celui-ci comme
dépendant, immature, faible, soumis. Pourtant, le comportement de l’un
et de l’autre est tout à fait approprié si on le situe à l’intérieur de leur culture
respective.
La prise en compte défectueuse de la différence par réduction de la diffé-
rence. La différence culturelle, si elle est reconnue, peut ne pas être comprise
correctement : c’est ce qu’on entend par prise en compte défectueuse de la
différence. On parle de réduction de la différence quand on considère celle-ci
comme totale, absolue, plutôt que relative à une dimension de comparaison
donnée; on se construit alors une représentation de l’Autre (i.e. un stéréotype)
en ne retenant que les différences. Camilleri (1989) nomme ce phénomène
« différence-exclusion ». La différence-exclusion apparaît quand une situation
de communication fait en sorte qu’une dimension d’appartenance (par exem-
ple, l’ethnie) est plus saillante et que les interlocuteurs se définissent et
interagissent exclusivement sur la base de cette dimension. Sur la seule base
de cette dimension, l’autre personne est identifiée comme un membre de
l’endogroupe (« nous ») ou de l’exogroupe (« eux »); tout membre de
l’endogroupe est vu comme totalement semblable à soi, tout étranger à ce
groupe est vu comme totalement différent de soi. Or, nous avons vu qu’un
groupe est composé de sous-groupes qui distinguent les membres d’un même
groupe tout en réunissant, sous d’autres dimensions, les membres de différents
groupes. « De ce fait il peut y avoir, au moins sur divers points, moins de
distance entre tel groupe extérieur (par exemple, les jeunes issus d’immigrés) et
un sous-groupe endogène (tels les jeunes nationaux des classes défavorisées)
qu’entre celui-ci et le reste de la communauté nationale » (Camilleri, 1989 , p.
371).
On peut aussi réduire la différence par l’utilisation de stéréotypes. Samovar
(1991, p. 280 ) définit les stéréotypes comme des « croyances, des préconceptions
basées sur des expériences antérieures et appliquées à tous les membres d’un
groupe ou à un individu sur une longue période de temps donné, malgré des
variations observables ». Les stéréotypes sont nécessaires au fonctionnement
psychologique de l’être humain (Barna, 1997; Barrette et coll., 1996) : ils
répondent à un besoin de catégoriser les choses et les gens pour rendre le
monde plus facile à contrôler. Devant l’inconnu, on utilise les stéréotypes
pour se faire une idée rapide des gens qu’on rencontre et pour décider des
comportements à adopter , ce qui permet d’éviter les pertes de temps que
représenterait l’analyse minutieuse de chaque nouvelle expérience.

148 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005Par contre, les stéréotypes empêchent les individus de considérer leurs interlo-
cuteurs dans leur globalité et dan s leur complexité. Ils alimentent le phénomène
de perception sélective : on perçoit ce qui correspond à nos attentes, à nos
stéréotypes. Ils interfèrent avec la recherche d’éléments nouveaux d’informa-
tion et avec une compréhension objective des personnes. Alors qu’avec la
présomption de ressemblance, on ne tient tout simplement pas compte de la
différence, les stéréotypes permettent de « réduire » celle-ci et d’en simplifier
le traitement. Le résultat sur la communication est le même : même s’ils
répondent à un besoin de l’individu, ces mécanismes cognitifs nuisent à une
compréhension réelle de l’autre parce qu’ils ignorent ou réduisent la réalité de
celui-ci et entraînent des interprétations erronées.
La prise en compte défectueuse de la différence par péjoration de la diffé-
rence. La prise en compte défectueuse de la différence peut aussi être liée à la
projection d’un contenu illégitime dans la différence : on crée alors de toutes
pièces une catégorie qu’on projette sur un groupe d’individus mais qui
renvoie « à des sujets plus imaginaires que réels » (Camilleri, 1989, p. 373).
Par exemple, « on se dresse un portrait-type de l’immigré qui évacue les
caractéristiques particulières des divers groupes d’immigrés et, à plus forte
raison, de leurs membres » (Camilleri, 1989, p. 373). Le contenu projeté dans
la différence est, le plus souvent, dévalorisant pour la personne ou pour le
groupe visé; c’est pourquoi on parle de « péjoration » de la différence. Ce
processus est à l’origine des préjugés, définis comme des attitudes biaisées,
injustes ou intolérantes à l’endroit d’un groupe ou d’une personne (Samovar,
1991). Comme les stéréotypes, les préjugés prennent racine dans une orienta-
tion basée sur une distinction rigide entre l’endogroupe et l’exogroupe. Les
stéréotypes tiennent lieu, en quelque sorte, de « support cognitif »  aux préju-
gés; souvent, le contenu d’un stéréotype sert à justifier ou à rationaliser une
attitude négative envers un groupe ou un individu.
La péjoration de la différence peut avoir pour fonction de valoriser, de sécuri-
ser, de déculpabiliser un groupe ou un individu. Ainsi, en prenant conscience
des inégalités perpétuées par son groupe au sein de la société, un individu
pourra éprouver un sentiment d’impuissance ou de culpabilité face à une
personne défavorisée et réagir par des relations de surcompensation (en cher-
chant à « aider » l’autre) ou en projetant la responsabilité de son malaise sur
cette personne. « De là à transposer cet inconfort à tous ceux qui lui rappellent
cet interlocuteur, il n’y a qu’un pas à franchir » (Delorme, 1996b, p. 10). Une
situation de crise ou d’insécurité économique pourra avoir un effet semblable,
même chez celui qui n’est pas raciste (Guitouni, 1998); pour un membre de la
société d’accueil, l’immigrant devient alors le « voleur de job ».

La communication interculturelle et ses obstacles 149
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005La péjoration de la différence répond à un besoin : besoin de sécurité, besoin
d’estime de soi, etc. Ce besoin, né de tensions qui prennent racine dans la
dynamique sociale, est satisfait par le recours à une identité fusionnelle
(« nous ») en contraste avec celle de l’autre (« eux ») : les tensions ou la res-
ponsabilité de ces tensions sont déplacées ou projetées sur l’exogroupe et
l’endogroupe est défini ou redéfini positivement (Camilleri, 1989; Camilleri
et Vinsonneau, 1996). La différence culturelle n’est pas la cause du rejet mais
l’occasion d’un rejet : elle permet à l’ individu de projeter hors de lui le
malaise ou le sentiment de menace qu’il portait déjà en lui. On « utilise » la
différence (biologique, sociale ou culturelle) de son interlocuteur à son propre
avantage ou à l’avantage de son groupe pour construire, maintenir ou restaurer
son image ou celle de son groupe, ou pour élever celui-ci et justifier l’oppres-
sion et l’exploitation de certains groupes supposément inférieurs (Barrette et
coll., 1996; Thompson et Carter, 1997).
Comparativement à l’absence de prise en compte de la différence ou à la ré-
duction de la différence, la péjoration de la différence est particulièrement
lourde de conséquences . En effet, non seulement les préjugés « filtrent »
la réalité et nuisent à la compréhension mutuelle, mais ils peuvent aussi
conduire un individu à traiter son interlocuteur de façon discriminatoire ou
raciste sur la base de préjugés. Or, la discrimination est un comportement qui
restreint ou empêche l’accès des membres d’un groupe à certaines ressources
sur la base de leur appartenance (Samovar, 1991); elle a pour effet la perte de
droits pour la ou les victimes (Barrette et coll., 1996). Dans une démocratie
pluraliste qui valorise l’intégration, les mécanismes de péjoration de la
différence nuisent non seulement à la compréhension interculturelle entre les
citoyens mais également à la satisfaction des besoins des minorités.
Les causes cachées de l’ethnocentrisme et de ses manifestations
Incertitude et anxiété. L’ethnocentrisme peut aussi être compris, non pas
comme une réaction potentielle à la différence, mais comme une manière de
répondre à un besoin de réduire l’incertitude et/ou l’anxiété, celles-ci ayant été
identifiées parmi les principaux obstacles à la communication interculturelle
par Samovar (1991) et Barna (1997) respectivement. Ces derniers ont sans
doute été inspirés des nombreuses recherches effectuées à ce sujet depuis que
Berger et Calabrese ont émis la théorie de la réduction de l’incertitude en
1975. Au centre de cette théorie se trouve la proposition selon laquelle deux
individus qui se rencontrent pour la première fois éprouvent de l’incertitude
en raison du peu d’information dont ils disposent l’un sur l’autre. L’incertitude
est de nature prédictive ( « predictive uncertainty ») quand elle désigne la
difficulté à prévoir le comportement d’une autre personne; elle est de nature

150 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005explicative (« explanatory uncertainty ») quand elle désigne la difficulté à
expliquer la conduite de celle-ci (Berger et Calabrese, 1975 : voir Gudykunst,
1994, p. 10).
Gudykunst (1985, 1988 : voir Gudykunst, 1994 ) a repris la théorie de la
réduction de l’incertitude en y incorporant le concept d’anxiété. L’anxiété
désigne un sentiment de déséquilibre généralisé qui se manifeste par de l’agi-
tation, de la tension, de l’appréhension face à ce qui pourrait arriver
(Gudykunst, 1994, p. 12); on lui donne aussi le nom de « stress » (Barna,
1997, p. 375). La théorie de Gudykunst étant distincte de celle de Berger et
Calabrese, il la dénomma la théorie de la gestion de l’anxiété et de l’incerti-
tude (1993 : voir Gudykunst, 1994). Cette théorie repose sur la métaphore de
l’étranger : tout interlocuteur est un étranger potentiel car personne ne partage
exactement le même profil d’appartenances sociales. La culture du groupe
dans lequel on catégorise l’autre n’étant pas ou étant peu connue, on ne sait
comment se comporter et on éprouve un malaise, d’où l’expérience de l’incer-
titude au niveau cognitif et de l’anxiété au niveau affectif.
Selon Gudykunst (1994), il existe des seuils , maximal et minimal, d’incertitude
et d’anxiété entre lesquels chaque individu communique plus efficacement. Si
l’incertitude se situe entre les seuils maximal et minimal d’efficacité , la
personne aborde son interlocuteur avec confiance car elle se sent capable,
jusqu’à un certain point, de prévoir et d’expliquer les pensées, les sentiments
et le comportement de celui-ci; par contre, le niveau d’incertitude est suffisant
pour qu’elle demeure attentive à la communication et pour qu’elle traite l’in-
formation adéquatement. Un minimum d’anxiété est également nécessaire pour
garder l’individu en état d’alerte, pour éveiller son intérêt et sa curiosité et
pour le motiver à communiquer. Autrement, il pourrait ne pas porter attention
à l’interaction et omettre des indices signalant des incompréhensions potentielles.
En contexte interculturel, les niveaux d’incertitude et d’anxiété sont souvent
supérieurs aux seuils d’efficacité. L’attention des interlocuteurs se porte alors
sur leur besoin de réduire l’incertitude et l’anxiété, ce qui les empêche de se
concentrer sur la communication et rend les erreurs de perception ou d’inter-
prétation plus probables. Ils auront tendance à effectuer le traitement de
l’information de façon simpliste, par exemple en utilisant des stéréotypes ou
des préjugés pour expliquer le comportement de leurs interlocuteurs.
La menace de besoins fondamentaux. L’anxiété peut être définie comme
l’équivalent affectif de l’incertitude mais également comme une réaction
affective qui peut accompagner la menace de tout besoin fondamental. L’ex-
périence de l’incertitude découle de la présence de différences culturelles,

La communication interculturelle et ses obstacles 151
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005alors que l’anxiété est reliée à une plus grande variété de situations : elle peut
être activée par la différence culturelle mais aussi par la concurrence inter-
groupe.
Nous avons vu qu’en situation de communication interculturelle, la différence
culturelle d’une autre personne peut remettre en question les croyances et les
normes culturelles d’un individu, portant atteinte à ses besoins de cohérence
(besoin de prévoir et d’expliquer les événements, ou tout autre besoin lié au
domaine de la connaissance; St-Arnaud, 1996) et de compétence (besoin de
contrôle sur les événements par une conduite appropriée et efficace, ou tout
autre besoin lié au domaine de l’action; St-Arnaud, 1996); l’individu ne sait
plus ni comment expliquer les choses, ni comment se comporter adéquatement.
La différence culturelle et les normes établies par les groupes sociaux qui
détiennent le plus de pouvoir peuvent aussi faire en sorte qu’un individu ne
reconnaisse pas ou dénigre les aspects centraux du concept de soi de son inter-
locuteur ( appartenances sociales ou attributs personnels) , ce qui portera
atteinte au besoin de considération de celui-ci (besoin de respect, d’estime, de
valorisation ou tout autre besoin lié au domaine de l’affection; St-Arnaud,
1996). D’un autre côté, dans la mesure où les différents groupes sociaux qui
composent une collectivité doivent se partager le pouvoir et les ressources
disponibles pour satisfaire leurs besoins respectifs, la concurrence intergroupe
peut être perçue par certains groupes ou individus comme une menace à leurs
besoins de bien-être (besoins liés à la santé et au plaisir; St-Arnaud, 1996)
ou de sécurité (besoins liés à l’argent et à la sécurité matérielle; St-Arnaud,
1996).
Conclusion  : une question d’équilibre
Le contexte social et culturel dans lequel s’inscrit la pratique du psychologue
en relations humaines se caractérise par une diversité croissante. Le psycholo-
gue en relations humaines est amené à intervenir auprès d’individus différents
de par leur personnalité, leurs appartenances sociales ou leur culture mais aussi
auprès de groupes qui doivent apprendre à vivre, à cohabiter et à travailler
avec ces différences en vertu des pratiques québécoises d’intégration et dans le
respect des valeurs fondatrices de notre société. Les groupes ou les individus
qui font appel à ses services peuvent être aux prises avec des difficultés de
communication auxquelles le psychologue n’est pas imperméable. Les rencon-
tres qu’il fait dans le cadre de sa pratique professionnelle peuvent susciter des
remises en question de sa culture, de ses identités socioculturelles ou
de son concept de soi; il peut lui-même traverser des périodes de stress et

152 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005d’anxiété. Par cet essai, nous avons tenté de dégager les éléments qui peuvent
transformer le climat de communication en méfiance et nuire à la relation
de coopération que le psychologue cherche à établir.
Pour demeurer efficace et favoriser la compréhension interculturelle et la
satisfaction des besoins des individus et des groupes auprès desquels il inter-
vient, le p sychologue en relations humaines peut s’inspirer de certaines
recommandations, dont le développement de l’empathie, la recherche active
de ressemblances, la connaissance de soi ainsi que l’ouverture au feed-back et
son utilisation (Samovar, 1987). Ces moyens sont adéquats à condition qu’ils
soient utilisés dans la recherche constante d’un équilibre entre des
polarités diverses: compréhension de l’autre versus connaissance de soi; prise
en compte des différences versus recherche de ressemblances; écoute de l’autre
versus affirmation de soi. Pour conclure cet essai, examinons ces quelques
moyens de réduire ou de surmonter les obstacles à la communication
interculturelle.
Comprendre l’autre dans ses différences…
Dans le développement de l’empathie, il est probable que le psychologue en
relations humaines soit porté à chercher de l’information sur la culture de l’autre
pour mieux comprendre ses cadres de références. Cette stratégie répond non
seulement à ses propres besoins de cohérence et de compétence, mais elle
permet également d’augmenter l’efficacité de son intervention, celle-ci se
basant sur une compréhension de l’autre qui tienne compte de sa culture. Pour
en savoir plus sur la culture de son interlocuteur, certaines « clés » de compré-
hension culturelle peuvent être utiles. Ces clés ont l’avantage de s’intéresser
aux valeurs et aux croyances implicites qui motivent le comportement d’un
individu et sur lesquelles reposent les éléments observables de sa culture; elles
peuvent permettre de mettre en lumière les différences culturelles possibles
dans la satisfaction de ses besoins. Citons, parmi ces clés, les dimensions de
comparaison culturelle définies par Hofstede (1994) : degré d’individualisme
ou de collectivisme, distance hiérarchique, degré de masculinité ou de
féminité, degré de tolérance à l’incertitude; ainsi que les construits de soi
indépendant et interdépendant tel que définis par Markus et Kitayama (1991).
La connaissance des clés de compréhension culturelle peut toutefois s’accom-
pagner d’effets indésirables et nuire à la communication. En mettant l’accent
sur les différences culturelles entre les êtres humains, ces clés durcissent les
frontières entre les groupes ( Steele, 1990 et Pagé, 1992 : voir Ouellet, 1999 , p. 3)
et renforcent la tendance à catégoriser les gens. Or, nous avons vu que la caté-
gorisation est à la base des processus mentaux qui mènent à la formation des

La communication interculturelle et ses obstacles 153
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005stéréotypes; bien que ceux-ci soient utiles, ils peuvent soutenir une vision
réductrice de l’autre et l’enferme r dans une identité qui peut ne pas correspondre
à sa réalité vécue (Camilleri, 1988, 1990 : voir Ouellet, 1999, p. 3). Par ailleurs,
comme la catégorisation s’accompagne souvent d’un biais positif envers les
membres de l’endogroupe et d’un biais négatif envers les membres de
l’exogroupe, ces biais peuvent soutenir des jugements négatifs, ou préjugés,
sur la culture de l’autre.
… Versus rechercher les ressemblances
Pour éviter les dangers de la catégorisation sociale, il importe d’identifier et
de faire connaître les ressemblances autant que les différences qui existent
entre les cultures. Si un individu a tendance à exclure un étranger de son groupe
d’appartenance sur la base de différences, la découverte de ressemblances
pourra lui permettre d’élaborer de nouvelles catégories mentales où il pourra
en même temps inclure l’étranger et s’inclure lui-même. Une manière d’intro-
duire les ressemblances entre les cultures est de considérer les problématiques
et les besoins fondamentaux qui réunissent mentalement tous les êtres
humains (Demorgon, 1996,). Le concept de besoin peut être très utile à des
interlocuteurs de cultures différentes, surtout dans un contexte d’intégration
qui vise le respect et la satisfaction des besoins de tous les citoyens.
L’existence de besoins communs à tous les êtres humains permet à ceux-ci
d’établir les bases d’une compréhension mutuelle; par contre, ils doivent
rester conscients que la culture les différencie dans l’importance relative de
ces besoins et dans la manière de satisfaire ceux-ci. Le danger est de resté
« accroché » aux pratiques différentes utilisées par l’autre pour répondre à
ses besoins et d’oublier les besoins qui sont à l’origine de ces pratiques. Cer-
taines pratiques culturelles semblent si différentes les unes des autres qu’il
est difficile de voir en quoi elles répondent à des besoins communs. On
peut en venir à se demander pourquoi il existe une telle diversité de pratiques
si celles-ci ont pour but de répondre aux mêmes besoins. Dans ce cas, il peut
être tentant de considérer son propre système culturel comme le plus adéquat
de tous.
Pour contourner ce problème et comprendre comment la diversité des prati-
ques culturelles est apparue, Demorgon (1996) et Ouellet (1999) suggèrent de
s’intéresser non pas aux cultures dans leur forme actuelle mais au processus
ayant mené à leur naissance et à leur évolution. Selon Ouellet (1999, p. 23),
cette démarche peut permettre de se distancier des tensions et des frustrations
vécues dans l’exercice de fonctions professionnelles et qui rendent parfois
difficile l’évaluation objective des défis rencontrés. Elle aide aussi à situer les

154 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005particularismes culturels dans un contexte très large et à éviter les dangers liés
à la connaissance des cultures spécifiques. En outre, il s’agit d’une excellente
occasion de tester la validité de plusieurs concepts théoriques et d’acquérir
des points de comparaison pour mieux comprendre comment les mécanismes
de formation et d’évolution des cultures sont à l’oeuvre dans son propre uni-
vers culturel. Chez Demorgon, cette démarche a aussi l’avantage de nous faire
prendre conscience de la créativité de l’humain dans la réponse à ses besoins,
et du nombre infini de réponses possibles.
… Et se connaître soi-même
Pour le psychologue en relations humaines, il importe autant de comprendre
l’autre que de se connaître lui-même. Mieux l’on se connaît, mieux l’on
communique. Or, on se connaît souvent moins bien qu’on le croit. Le compor-
tement humain est souvent le fruit de croyances ou de motivations inconscientes,
en partie ou totalement. Ce qui est inconscient (motivations, croyances,
valeurs) agit à notre insu, influence nos perceptions et nos comportements et
rend plus difficile le contrôle des automatismes (stéréotypes, préjugés) aux-
quels nous pouvons avoir recours en situation de stress. En prenant conscience
de son propre style de communication, de ses valeurs, de ses réactions à la
différence ou à l’inconnu, on devient plus libre de développer de nouvelles
façons de voir les choses et de réagir aux événements, et on fait face à la
différence avec plus de flexibilité. Par ailleurs, la découverte et la prise en
charge de ses propres besoins permettent d’éviter que ceux-ci n’orientent, voire
même ne dominent le comportement de l’individu et nuisent à sa capacité de se
mettre à l’écoute de l’autre, capacité essentielle à une communication efficace.
Écoute et affirmation de soi
L’encodage et le décodage sont deux étapes cruciales de la communication.
Le psychologue en relations humaines , comme toute personne qui communique,
doit s’assurer qu’il interprète bien les messages de l’autre et que ses propres
messages sont bien interprétés. Cela s’avère encore plus important en situa-
tion de communication interculturelle, des significations différentes pouvant
être attribuées à une même réalité (Barrette et coll., 1996). Après avoir établi
une compréhension mutuelle entre son interlocuteur et lui-même, le psycho-
logue pourra aider celui-ci à déterminer la manière la plus appropriée et la
plus satisfaisante de répondre à ses besoins dans le respect de sa culture et des
valeurs fondatrices de la société québécoise.
Cependant, le psychologue en relations humaines ne peut suppléer en tout temps
à des habiletés de communication qui prennent de plus en plus d’importance

La communication interculturelle et ses obstacles 155
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005dans la vie publique des citoyens québécois et qui pourraient être déficientes
chez certains individus. Dans un contexte d’intégration des différences,
chaque citoyen a la responsabilité d’établir clairement ses désirs et ses attentes,
de faire connaître ses besoins et d’orienter ses efforts afin de les satisfaire dans
le respect de ceux des autres. La citation suivante met en lumière l’importance
d’un j uste équilibre entre l’affirmation de ses propres besoins et la néces-
sité d’être à l’écoute de ceux des autres :
Cet équilibre suppose que de chaque côté, sans perdre de
vue ses propres besoins, on soit capable de comprendre ceux
de l’autre. En effet, nier ses propres ambitions, c’est mener,
à plus ou moins long terme, à la frustration qui finira
par éclater contre l’autre perçu comme le responsable de
celle-ci. Par contre, ne pas comprendre les aspirations de
l’autre, c’est empiéter sur celles-ci, déclenchant ainsi une
réaction de défense tout à fait naturelle
(Delorme, 1996b, p. 9).
Or, les habiletés d’écoute et d’ affirmation de soi ou tout autre habileté de
communication interculturelle répertoriée en littérature (empathie, franchise,
conscience culturelle, dévoilement de soi, etc. : voir Spitzberg, 2000, p. 376)
ne sont pas également valorisées et maîtrisées par les membres de différents
groupes sociaux ou culturels. Ainsi, à l’exception des intervenants en relation
d’aide, rare sont les personnes ayant reçu une formation aux habiletés d’écoute.
Par ailleurs, l’affirmation de soi, même si elle est très en vogue dans les sociétés
nord-américaines, est sans doute perçue différemment selon qu’on s’identifie
à une culture individualiste ou collectiviste. Certains peuvent trouver cette
pratique incompatible avec l’ouverture à l’autre. Pourtant, l’affirmation de soi
et de sa culture est essentielle à une communication efficace, entre autres quand
vient le temps d’expliciter ses codes afin de clarifier une situation ; d’où
l’importance de se connaître soi-même et sa propre culture. Par contre, l’affir-
mation de soi doit être pratiquée dans le respect des opinions et des droits
d’autrui, ce qui n’est peut-être pas toujours le cas.
Protection des minorités et responsabilisation
Le problème qui se pose avec les habiletés de communication est que certaines
personnes peuvent être désavantagées en raison de leurs appartenances
socioculturelles, en particulier si elles sont victimes de préjugés et de discri-
mination ou si elles sont désavantagées sur les plans matériel et financier. En
effet, il est possible qu’elles intériorisent les attitudes négatives entretenues à
leur égard et qu’elles développent une « culture de la pauvreté », culture qui se

156 La communication interculturelle et ses obstacles
Interactions Vol. 9, no 1, printemps 2005caractérise par une attitude fataliste, un faible esprit d’innovation et une faible
capacité d’empathie (Dodd, 1991, p. 21). Ces caractéristiques ne sont guère
favorables à la compréhension interculturelle et à la responsabilisation des
groupes et des individus dans la satisfaction de leurs besoins et s’ajoutent aux
obstacles à la communication et à l’intégration des minorités culturelles.
Dans l’établissement des attentes et des objectifs d’intervention, le psycholo-
gue en relations humaines doit tenir compte des difficultés supplémentaires
que certains individus peuvent avoir à surmonter en raison de leur apparte-
nance à une minorité culturelle. Il doit soutenir la protection des droits de ces
minorités pour éviter les excès dans les inégalités tout en demeurant conscient
des dangers de « victimiser » les uns et de culpabiliser les autres. La voie de la
responsabilisation, est sans doute plus prometteuse : en aidant les individus et
les groupes à identifier adéquatement leurs besoins et les moyens possibles
d’y répondre compte tenu de leur situation et des ressources disponibles
ainsi qu’en les soutenant dans leurs choix et leurs actions, le psychologue en
relations humaines pourra leur permettre de découvrir ou de retrouver un sen-
timent de contrôle sur leur vie et sur leur environnement.
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