FACULTE DES LETTRES,LANGUES ET ARTS DEPARTEMENT DES LANGUES LATINES SECTION DE FRANÇAIS DIDACTIQUE DES TEXTES LITTE RAIRES OU LA LITTERATURE COMME… [600414]
UNIVERSITE D’ORAN ES -SENIA
FACULTE DES LETTRES,LANGUES ET ARTS
DEPARTEMENT DES LANGUES LATINES
SECTION DE FRANÇAIS
DIDACTIQUE DES TEXTES LITTE RAIRES OU LA LITTERATURE
COMME PRETEXTE A L’ENSE IGNEMENT DU F.L.E
THESE DE DOCTORAT DE FRANÇAIS
PRESENTEE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT
PAR
ABDELKADER GHELLAL
Sous la direction de Mme le professeur Sari Fewzia Kara Mostefa
et la co- direction de Mme le professeur Oriol Boyer Claudette
Membres du jury :
Président
M. Miliani HadjProfesseur Université de Mostaganem
Rapporteur Mme Sari Fewzia Professeur Université d’Oran
Co-Rapporteur Mme Claudettte Oriol Boyer Prof esseurUniversité Stendhal-
Grenoble III
Examinateur Mme Ouhibi Ghassoul Bahia Maître de conférencesUniversité
d’Oran
Examinateur Mme Bénamar Aicha Docteur Crasc Oran
JANVIER 2006
DIDACTIQUE
DES TEXTES LITTERAIRES
OU LA LITTERATURE COMME PRETEXTE A
L’ENSEIGNEMENT DU F.L.E.
A la mémoire du grand absent : feu Hadj Boudjellal GHELLAL.
SOMMAIRE
Avant-propos p 19
Introduction générale p 22
INTRODUCTION p 27
PREMIERE PARTIE : LIRE UN TEXTE p 30
CHAPITRE I : PROTOCOLE D’ENQUETE p38 CHAPITRE
II: CRITERES EXTERNES PRESIDANT AU CHOIX DU TEXTE A EXPLOITER
p 52
CHAPITRE III:CRITERES INTERNES ET ANALYSE DE TEXTES p 68
Conclusion p 124
DEUXIEME PARTIE : LIRE – ÉCRIRE p 127
CHAPITRE I : LE TEXTE LITTERAIRE : UN DOCUMENT p 133
D’OBSERVATION ET D’ANALYSE
CHAPITRE II : MISE EN PLACE DES ACTIVITES D’ECRITURE p 187
CHAPITRE III : DE LA CONSIGNE A L’EVALUATION p 214
CHAPITRE IV : L’EVALUATION ET LA CORRECTION
DES TEXTES p 221
CONCLUSION p 243
TROISIEME PARTIE : PROPOSITIONS DE SEQUENCES
DIDACTIQUES p 245
SEQUENCE 1 : JOUER AVEC LE LANGAGE POETIQUE p254
– Objectif de production : p 255
– Savoirs en jeu : p 255
SEQUENCE 2 : ECRIRE POUR FAIRE FAIRE p 287
• Objectif de production : p 288
• Objectifs et compétence : p 288
• Savoirs en jeu : p 288
SEQUENCE 3 : ECRIRE POUR RACONTER LE CONTE p 313
Objectifs et compétences : p 314
Conclusion p347
CONCLUSION GENERALE p 348
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES p 352
I – Bibliographie générale p 353
II – Ouvrages consultés p 356
ANNEXE : Questionnaire d’enquête destiné aux enseignants du cycle secondaire
Avant-propos
Il est très difficile de remercier ceux dont l’aide ou l’influence ont été
déterminantes, cela su pposerait que l’on ait tenu la liste à jour.
Nous tenons cependant à ex primer ici notre reconna issance à ceux qui ont
permis à ce travail d’aboutir : – à Claudette
ORIOL-BOYER qui a su me laisser avancer à mon allure,
m’encourager quand il fallait, demeurer disponible et m’offrir sa compréhension
attentive et amicale q uand c’était nécessaire ;
– à Fewzia SARI KARA MOSTEFA qui a su m’aider avec une qualité d’attention
extraordinaire et une amit ié qui ne l’est pas moins ;
– à Anne Leclaire HALTE et Jean-François HALTE qui n’ont pas hésité à prendre
sur leur sommeil pour relire cette thèse ;
– aux chercheurs dont le travail a fondé le mien, à Charles BONN , Bruno GELAS,
OUHIBI Bahia et Hadj MILIANI dont les encourageme nts comptèrent ;
– à BOUCIF qui réalisa de multiples transferts entre ordinateurs peu compatibles,
assura la mise en page de cette thèse, toujours avec une patience sans limite,
joua l’interface entre mes attentes et les machines ;
– à Khadidja Djenet GHELLAL dont les relectures furent
les bienvenues.
« Ecrire, c’est se fair e aussitôt lecteur, li re, c’est se faire
aussitôt écrivain. Commune à l’écrivain et au lecteur,
la muse, en toute occurrence, c’est le centre du texte
même, ce lieu ob scur qui ne songe interminablement
qu’à se déchiffrer.»(1)
Introduction générale
Aucun apprentissage n’est plus fondamental que celui de la maîtrise du
langage et de la langue française. Pa r cette appellation « maîtrise du langage et
de la langue française », que faut-il entendre ?
C’est l’ensemble des activités qui co nduit chaque apprenant, au fil des jours,
à exprimer par oral ou par écrit ses ém otions, sa pensée, ses rapports aux
autres, à communiquer avec autrui de faço n immédiate dans les conversations,
les échanges, les forums de discussion, par Internet, de fa çon différée par la
lecture ou l’écriture.
Lire, écrire, parler : l’acqu isition des compét ences qui structur ent cette trilogie
est un long parcours, ince ssant ou qui ne cesse qu’a vec la mort. Chaque jour,
nous apprenons à parler mi eux, à exprimer mieux ce que nous ressentons ou
pensons. La découver te d’un mot nouvea u, la révélation dans un livre ou un
article de journal d’une information, la meilleure compréhens ion que nous avons
d’un phénomène, la maîtr ise d’une nouvelle règl e grammaticale ou d’une
tournure pertinente, la formul ation plus juste d’une explic ation, plus précise d’un
sentiment, plus nuancée d’une émotion constituen t autant d’expériences
quotidiennes dont no us n’avons pas toujours conscience.
Ce que les enseignants de vraient faire, c’est construire une progression
réfléchie de cet infini appren tissage vers la maîtrise to ujours renouvelée de la
langue. Naguère, nous appe lions cela le « français », dirions-nous. Oui, c’est
cela, mais c’est plus encore. L’objectif est, à terme, d’amen er les apprenants à
maîtriser le plus possible de situations de communicati ons, le plus grand nombre
d’objets de lecture, l’infi nie galaxie des types de disc ours : savoir lire des texte
littéraires, des contes, des poèmes, des récits d’aventure s, savoir écrire toutes
sortes de discours, savoir déchiffrer et dominer plusieur s situations de
communication pour ex pliquer à autrui, exprimer un point de vue, défendre une
position, manifester une émot ion, faire naître un sentiment.
Toutes les disciplines mobilisent ces compétences, s’en nourrissent et les
alimentent en même temps. Elles utilis ent chacune un vocabul aire spéc ifique qui
enrichit le fonds commun ; elles mettent en jeu des si tuations de communication
orale et écrite que l’ apprenant doit dominer : partout, il faut expliquer, justifier,
dire ce que l’on comprend, tenter de dire où et pourquoi on ne comprend pas,
demander une explication, cher cher à parfaire une information.
Mais cette interaction entre les disciplines serait d’une moindre efficacité si
l’apprentissage de la langue française dans tout es ses composantes ne se
construisait pas quotid iennement par la confrontation avec des textes à lire et à
écrire ; par la mise en œuvre d’activité s orales spécifiques et variées, par la
découverte puis l’approfondi ssement des règles qui ré gissent la constitution
même de cette langue : l’orthographe, la gr ammaire, la syntaxe des phrases, la
cohérence des textes, les réseaux lexicaux…
C’est cette nouvelle in teraction, non plus entre le s disciplines, mais entre les
champs de la discipline désormais nommée : « Maîtri se du langage et de la
langue française », que les enseignants devraient créer.
Chaque séquence devrait être construite po ur fonder l’acquisition de
connaissances et de compétences multiple s qui permettent, à terme, de mieux
comprendre le fonctionnement de la l angue, des objets qu ’elle crée (textes,
discours, communication) et de réinvestir dans des lectures, des écritures et des
activités orales. Par-delà la multiplicité des compétences à construire et des
connaissances à transmettre, chaque séqu ence s’efforce de mett re en œuvre un
apprentissage cohérent ; c’ est la raison pour laquel le les pédagogues devraient
chercher des principes fédérateurs. Un thème ou un type de texte sert de lien à
toutes les activités : la le ttre, le poème, la description, le conte, l’image, etc.
Ces liens ne sont pas gratuits : ils permettent à l’appre nant de nouer les fils entre
les textes lus, d’a ller de l’un à l’autre , guidé par l’enseig nant ou de façon plus
ludique et ainsi de fonder une culture. Les textes devraient être variés et
empruntés à des champs disciplinaires divers.
Notre travail se propose d'exposer les raisons et les modalités d'un
apprentissage du français qui ne dissocie pas les usages ordina ire et artistique
du langage. Son orientation est donc à la fois théorique et didactique. C'est la
place de la littérature dans l'enseignement du FLE qui est, bien entendu, l'enjeu
de notre recherche. Notre objectif est de développer chez l'apprenant des
compétences à utiliser dans son enseignement de la le cture et de l'écriture, sa
compréhension des textes de types narratif et poéti que, de même qu e de types
descriptif et dialogal, et du processus d' apprentissage retenu s par le programme
d'études de français au lycé e. Aussi, lui permettre de se familiariser avec le
matériel didactique disponib le relatif à l'apprentissage de ces textes tout en
exerçant un regard critique. L’apprenant devra donc être ca pable d’étudier des
textes littéraires et le processus d’appr entissage retenus par le programme et
d’analyser le matériel di dactique destiné à l’apprentissage de ces textes.
Dans cette perspective, plus ieurs questions se posent à nous, questi ons qui se
font écho : • Comment un apprenant pourrait-il comprendre des text es littéraires et écrire à
partir de la littérature ?
• Comment amener les apprenant s à maîtriser le plus possible des situations de
communication, le plus grand nombre d’obje ts de lecture, l’i nfinie galaxie des
types de discours ?
• Les enseignants devraient-ils manifester la prééminence des textes littéraires ?
• Quels textes littéraire s faudrait-il proposer ?
• Quelle(s) approche(s) du texte littéraire faudrait-il adopter ?
• Faut-il avoir une méthode ?
• Comment permettre à l’appren ant de nouer les fils entre les textes, d’aller de
l’un à l’autre, guidé par l’enseignant ?
• Comment le choix varié de poèmes et de textes li ttéraires afficherait-il la
volonté d’associer les appr entissages fondamentaux et l’ acquisition d’une culture
?
Notre travail répond à ces questions et essa yera d’y apporter quelques
propositions.
Notre recherche présente des ensembles littéraires organisés selon une «
cohérence thématique » et souhaite offrir un panoram a aussi large que possible
de la littérature française. Elle vise à fa ire réfléchir les apprenants sur le principe
de groupement de textes et voudrait leur don ner la maîtrise de cette nouvelle
façon d’appréhender la littérature.
INTRODUCTION
Le travail que nous présentons essa ie de rendre compte de l’évolution d’une
démarche qui s’est construi te à partir d’interactions multiples entre réflexion
théorique, pratiques de formation, lect ures de textes, pratique d’écriture
personnelle. Le but de ce travail de recher che est de construire les raisons et les
modalités d’un apprentissa ge de l’écriture qui ne dissocie pas les usages
ordinaires et artistiques du langage. Il a donc une double préoccupation
théorique et didactique.
Notre travail se compose de trois parties s’imbriquant progressivement au fur et
à mesure de la démon stration et de l’analyse.
Après un bilan de l’enseignement de la lecture et du texte littéraire en classe de
langue, nous montrons l’échec des instit utions de la lect ure. Cet échec est
corroboré par une enquête réalisée en Oranie aup rès de cent enseignants du
cycle secondaire : notre enquête prouve, qu’e n matière de lecture, la réussite est
faible et/ou peu durable et, ce qui es t vraiment pire, el le ne concerne
pratiquement pas les établissements de milie ux défavorisés. De plus, la lecture
est disjointe de l’écriture : les apprenants ne lisent pa s pour écrire.
Dans un deuxième temps, nous tenterons de mettre en évidence le travail sur
les problèmes spécifiques de l’enseignement de la lecture en liant étroitement
pédagogie de la lecture et pédagogie de l’écriture. N ous essayerons de montrer
qu’il est possible d’enseigner à écrire des textes de mani ère nouvelle, c’est-à-dire
sans s’enfermer dans l’alternative « rédaction ou te xte libre », alternative que
beaucoup ressentent comme une impasse puisqu’el le donne à l’enseignant le
choix entre l’inculcation ac tive des modèles stéréotypés (mais explicites) et la
patience attentive (ou atte ntiste) devant des productions tout aussi stéréotypées
mais réputées « spontanées », donc étrangères à to ut apprentissage collectif.
Dans un troisième temps, nous pr oposons des exem ples de séquences
didactiques au service de l’apprentissage de l’écri ture-lecture-réécriture.
Chaque séquence proposée p oursuit des objectifs d’ apprentissage concernant
la liaison lecture-écriture-l angue ou l’articulation entre le s savoirs linguistiques et
stylistiques. Le travail ef fectué sur les textes que nous avons sé lectionnés est
orienté vers la préparation de pratiques d’écriture et donc d’une compétence
scripturale chez les apprenants. Ces co mpétences cognitives sont le plus
souvent précisées dans les infinitifs qui intitulent chaque séquence (par exemple
: « Ecrire pour faire voir », « Ecrire po ur faire comprendre », « Ecrire pour
informer », « Jouer avec le langage poétique », « Ecri re la suite d’un texte », «
Ecrire un texte à consignes ».
Les objectifs visés par chacun des chap itres sont des objectifs de production :
l’objectif de chaque sé quence est de l’ordre d’un savo ir-faire : savoir écrire et
réécrire. C’est donc en apprenant à réécrire que l’apprenant s’appropriera les
savoirs conceptuels mis en jeu par la démarche. Par ailleurs, les conna issances en matière de langue sont des outils au service
de l’apprentissage visé en tout premier lieu par l’e nseignement de la langue
française : apprendre à c haque élève à rencontrer les textes produits par la
société où il vit et lui donner les moyens : le pouvoir de le s produire lui-même.
Enfin, placés en annexe , sont convoqués un certain nombre de documents :
– Un questionnaire d’enquête destiné aux professeurs de français du cycle
secondaire. – Le questionnaire d’e nquête dûment rempli par quelques en seignants.
– Copies des corpus que nous avons utilisés.
Première partie
LIRE UN TEXTE
L’organisat ion des contenus de s objectifs d’appren tissage de la langue
française dans l’enseigneme nt secondaire se présen te selon le déroulement
suivant :
¦ La première étape met l’apprenant en contact avec des suppo rts variés à partir
desquels il va découv rir l’objet d’étude.
¦ Dans une deuxième étape , c’est la capacité de l’ apprenant à anal yser qui est
sollicitée directement et d’une manière systématique.
¦ Une troisième étape propose des activités susceptibles d’ai der l’apprenant à
vérifier son degré d’ assimilation des notions et sa capacité à les ré investir dans
des situations particulières.
Un moment de récapitulation est prévu à la fin de ce s trois étapes afin d’aider
l’apprenant à faire le bila n de ses connaissances. Une pa rtie « exercice » vise
une pratique de la langue au service de la compréhension et de l’expression.
Un test d’évaluation, axé plus précisément sur l’autoé valuation, constitue la
phase finale de la démarche. L’espace de lecture offr e à l’apprenant l’occasion de donner du sens à ces
activités en se plaçant dans une situation de lecteur « pour le plaisir ». « […]
Une attention particulière a été accordée au choix des supports , des illustrations
et des contenus des espaces réservés à l’apprenant (le coin des proverbes, des
pensées, du sourire…) pour faire réfléchir, parler à la sensibilité, éveiller la
curiosité, en un mot, créer le désir et le be soin d’apprendre. »(1)
Comment offrir la possibilité aux appre nants du cycle secondaire de consolider
les compétences de lecture et d’éc riture acquises au cours des années
précédentes ?
Comment développer de nouvelles compétences ?
Selon l’objectif principal du cycle secondaire exposé dans les programmes officiels, les activités proposées vise nt à faire progresse r l’apprenant d’une
manière efficace vers le statut « d’ut ilisateur autonome » de la langue française.
Dans cette perspective, une question se pose à nous : Pouvons-nous séparer la
séance de lecture de celle de l’écriture ?
La grande révolution de ces dernières années en matière de production d’écrits a
été de comprendre qu’Ecrire, c’est surtou t Réécrire, Retrava iller son brouillon.
Pour que cela soit possible, il faut que la consigne de rédaction intègre la
référence à un écrit soci al connu qui so it un modèle p our l’apprenant.
La production d’écrits doit être en étroite relation av ec le manuel de lecture ou
les textes proposés par l’enseignan t à ses apprenants lors de l’acte
pédagogique. Les ac tivités de production d’écrits doivent être la résultante de
l’observation de textes et documentaires et le lieu de réinvestissement des
activités réflexives (orthographe – gramma ire – vocabulaire) contenues dans les
manuels scolaires ou dans les textes étudiés en classe.
L’enseignant et les apprenants en tirent quelques caractéris tiques textuelles,
c’est-à-dire ce qui en fait un texte original et particulie r, qui deviennent autant de
critères d’écriture (ce qui est nécessaire pour Lire-écrireé crire) et de vérification
pour les appre nants (ce que j’ai retenu et utilisé pour l’écriture).
La démarche pédagogique est conforme à toute dém arche d’appropriation
active, prenant en compte les différents rythmes d’ac quisition des apprenants.
Pour chaque compétence ou acquisition, nous retrouvons la structure suivante :
1-L’apprenant prend connaissance d’un type textuel particulier.
2-L’apprenant propose une pr emière compréhension du texte dans sa structure
et son organisation. 3-L’apprenant réinvest it les premiers éléments perç us dans les activités 1 et 2.
4-L’apprenant recherche dans le texte quelques caract éristiques langagières
propres au type textuel analysé. 5-L’apprenant construit une fiche outil de producti on/ évaluation.
6-L’apprenant produit un texte : l’activité de réécriture est guidée par une grille
d’analyse proposée.
Malheureusement, à l’Ecole al gérienne, cette structure n’est pas totalement prise
en considération : l’apprentiss age conjoint de la lecture et de l’ écriture n’existe
pas.
Quel que soit le niveau cult urel de l’apprenant , cet apprentissage lecture/ écriture
ne peut être mis en place que si transmission culturelle et exercices techniques
sont étroitement associés. La production de textes est une activité qui doit être
apprise, pas seulement évaluée : les consignes et les situations diversifiées
offrent des modèles, im posent des règles, suggèrent des idées.
Dans cette perspective, Lire /Ecrire des textes est un instrument indispensable
pour l’enseignant. Il offr e, dans le cadre d’une pr ogression, une pédagogie de
l’écriture où alternent et se complètent éléments théoriques indispensables et
propositions diversifiées d’exercices. Ni exercice scolaire se réclamant de nouv elles technologies, ni un projet naïf de
communication, Lire /Ecrire des textes est un mode d’entrée dans la culture
écrite .
Le verbe « Lire », nous dit J. Kristéva, avait pour les ancien s une signification qui
mérite d’être rappelée et mise en valeur en vue d’une compréhension de la
pratique littéraire. « Lire » était aussi « rama sser », « cueillir », « ép ier », « reconnaître des
traces», « prendre », « voler ».
Lire dénote donc u ne participation agressive, une active appropriation de l’autre.
Dans cette perspective, nous cit ons Fewzia SARI KARA MOSTEFA :
« […] écrire, c’est savoir sa isir et donner du sens à un texte ; c’est découvrir,
organiser et interpréte r la signification de ce qui est écrit. »
Lire est une activité complexe d’anal yse et de synthèse, conduisant à la
compréhension d’une pensée à partir de la combin aison de certaines unités.
Chez les jeun es apprenants , ces unités sont les signes écrits, chez l’étudiant
universitaire, elles devien nent plus complexes. Dans son acte de lecture, le
lecteur « efficace » reconnaît globalem ent des « traces » et mène en même
temps une activité a nalytique en vue d’u ne synthèse ultérieure de ces traces. Mis
en situation active, le lect eur élabore une interprétation cohérente et riche d’un
ensemble singul ièrement codé.
Ainsi, la lecture est abord ée dans sa vraie fonction qui consiste à donner sens à
un texte…»(1) « A la fin du cycle secondaire, l’apprenant doit avoir une maîtrise de la langue,
suffisante pour lui permettre d’accéde r à une documentati on diversifiée de la
langue française. »(2) L’effort porte d’abord sur la lecture. Entre les instructio ns ministériell es prudentes
et les innovations audacieuses, l’Ecole algérienne apprend à travailler avec le
livre et l’information écri te, faisant de la compréhen sion des textes lus son
véritable objectif. Inventer une pédagogie de la compréhension ne va pas de soi.
Véritable point aveugle de l’ac te même de lire, la comp réhension est ce dont les
enseignants les plus vi gilants vérifient ou non la présence. P eut-elle faire l’objet
d’un apprentissage ? A l’Ecole algérienne, c’est bien là que s’arrête le pouvoir
de l’enseignant, confro nté à des aptitudes « naturelles » que l’o n constate, et que
l’on constate, hélas, inégal es ! Pour passer outre, il faut se donner les moyens
«d’enseigner comment on comprend », in ventant des situati ons permettant aux
apprenants de prendre c onscience de leur capaci té de comprendre, de
construire une app ropriation véritable de l’écrit.
Nous constatons, malheureusement, qu’à l’Ecole algérienne, tous cycles
confondus, la lecture est tota lement dissociée de l’écriture.
L’apprentissage de l’écriture pose be aucoup de problèmes non seulement au
collège et au lycée, mais aussi au ni veau de l’université. Les enseignants,
malgré leur bonne volonté, déplorent le fait que la plupart des apprenants du
secondaire, quand ils lisent correctement, n’arrivent pas à écrire. A défaut de
pouvoir rendre l’enseignement du frança is langue étrangère (FLE) facile et
agréable, nous pouvons au moins exiger qu’il soit justifié et suffisant. Si nous
voulons que les appr enants obtiennent des résultats, nous ne devons pas leur
cacher que l’écrit du français est bien di fficile. Ce serait une erreur psychologique
de laisser croire le contraire : un cert ain nombre d’apprenant s n’arrive jamais à
prendre conscience des exigences de l’écrit.
Récemment, un étudiant qui pr éparait l’examen du DALF (1) a quitté ses cours
en protestant parce qu’il n’avait pas obtenu les unit és B1(2) et B3(3) qu’il
espérait avoir. « Je lis très bien », disait -il, « je comprends tout ce qu’on me dit,
tout le monde me comprend lo rsque je parle ; la preuve, j’ai eu les unités B2(4)
et B4(5) avec de tr ès bonnes notes ».
C’était juste, malheureusement, sa langue écrite était nulle ; du n’importe quoi.
En revanche, l’apprenant du français langue maternelle (FLM) peut témoigner
que l’apprentissage de l’écrit, à l’école primaire , au collège et au secondaire,
quelles que soient les méthodes employées, es t long et rude. A l’Ecole
algérienne, les manuel s scolaires proposés par l’I nstitut pédagogi que national
(IPN) accordent un in térêt particulier au fonctionnem ent de la langue : grammaire
– vocabulaire – orthographe , et à la compréhension de l’écrit. Quant à la
production d’écrits, elle est peu ou pas prise en considératio n. Mais il n’en
demeure pas moins qu’un appr enant est censé lire, do nner du sens à son texte
et produire son propre texte. Or, le système scolaire dans lequel il évolue le
confine dans une structure cl oisonnée : une « conduite de réflexion » lui est
imposée. Les difficultés des élèves de niveau secondaire (15 ans à 17 ans ), en
français, se manifestent autant à l’écrit qu’à l’oral et sont dues non seulement à
des facteurs linguistiques, ma is aussi au choix des text es, des œuvres littéraires
et à un manque de motivation.
CHAPITRE I
PROTOCOLE D’ENQUETE
Nous avons mené une enquête auprès de cent enseignants du cycle
secondaire en Oranie en ce qui concerne l’utilisation du texte littéraire en classe
de langue et l’enseignement/ apprentissage conjoint de la lecture et de l’écriture.
Ce choix a été établi suiv ant des critères donnés par le département de
Sociologie, critères conf irmés par le département de Mathématiques pour
l’aspect statistique.
I-1. QUESTIONNAIRE D’ENQUETE
Notre enquête a été menée au moyen d’un questionnaire particulièrement
indiqué pour localiser les attitudes des enseignants du cycle secondaire face aux
problèmes de la lecture des textes en classe de langue, de l’adaptation des
manuels proposés par l’Ins titut pédagogique national (I PN) à l’apprentissage de
la lecture et des objectifs des unités didactiques. Notre questionnaire (cf.
annexe) est composé de vingt (20) it ems se rapportant essentiellement à
l’enseignement/apprenti ssage de la lecture-écriture et de l’utilisation des textes
littéraires en classe de français langu e étrangère.
I-2. ANALYSE DES RESULTATS DE L’ENQUETE
• Item n°1 : Suivez-vous à la le ttre le programme de français proposé par
l’Institut pédagogique national (IPN) ?
Les résultats obtenus m ontrent que quatre-vingt-d ix pour cent (90%) des
enseignants interrogés suivent le programme propos é par l’IPN sans y apporter
aucun changement.
Les raisons évoquées sont : c’est le programme of ficiel provenant d’une
institution étatique, pour ne pas être en défaut.
Quatre pour cent (4%) de s enseignants ne répondent pas à cette question. Les
six pour cent (6%) qui re stent répondent par la négative car ils estiment que
l’enseignant du seco ndaire est souverain : c’est le s eul maître à bord en classe. Il
doit élaborer lui-même so n programme. Celui-ci doit ré pondre aux attentes de
ses apprenants et est élaboré à partir du programme proposé par l’IPN.
• Item n°2 : Parmi les textes proposés dans le (s) manuel(s) scolaire(s), lesquels
préférez-vous ? Pourquoi ?
Soixante pour cent (60%) des enseignants préfèrent les textes qui renferment les
points de langue parce qu’ils sont courts et abordables , ajoutent-ils. Trente pour
cent (30%) privilégient le s textes expositifs. Ces derniers intéressent les
apprenants parce qu’ils sont d’actualit é. Les apprenant s se sentent interpellés.
Dix pour cent (10%) des enseignants n’ont pas de préférence : ils suivent à la
lettre le programme et le manuel proposés par l’IPN. « Nous n’av ons pas le droit
de prendre des initiatives personnelles, faute de quoi nous serons sanctionnés
par l’inspecteur généra l de français ».
Nous remarquons q ue parmi les cent enseignants interrogés, personne n’a
évoqué le texte littéraire.
• Item n°3 : Ces textes sont-ils tous à la portée de vos appr enants ? Pourquoi ?
Quatre-vingt-dix pour cent (90%) des ense ignants estiment que « tous les textes
proposés dans les m anuels scolaires ne sont pas à la port ée de leurs apprenants
parce qu’ils sont longs et difficiles ». « Ce sont les mêmes textes que
l’enseignant utilisai t quand la langue française av ait un autre statut, celui de
français, langue matern elle (FLM). Nos apprenants ne maîtrisent pas aussi bien
la langue française que leurs aînés de vingt ans que nous av ions comme élèves
», ajoutent-ils.
Les dix pour cent (10%) qu i restent partagent le même avis et pensent que les
niveaux hétéroclites des classes font q ue les textes proposés par l’IPN sont
difficiles d’accès pour la majorité de leur s apprenants. Peu d’a pprenants arrivent
à comprendre ce qu’ils lisent.
• Item n°4 : Les textes proposés dans le(s) manuel(s) sco laire(s) poussent-ils
vos apprenants à aller vers d’autres textes ?
1) OUI…, Donnez un exem ple de textes qui va inspirer et orienter vos
apprenants vers d’autres textes.
2) Non…, Pourquoi ?
Tous les enseignants (100%) trouven t que les textes proposés dans le(s)
manuel(s) scolaire(s) ne p oussent pas leurs apprenants à aller vers d’autres
textes parce qu’ils sont désuets, dé nués de tout inté rêt et lassants.
• Item n°5 : Quels sont les textes que vous pr ivilégiez le plus ? Pourquoi ?
Soixante-dix pour cent (7 0%) des enseignant s interrogés préfèrent les textes
narratifs et les textes expo sitifs parce qu’ils sont les seuls à êt re intéressants et
complets. Par contre, vingt pour cent (20%) privil égient seulement les textes expositifs
parce qu’ils incitent les app renants à faire des recherch es sur les auteurs de ces
mêmes textes.
Quant aux dix pour cent restan ts (10%), ils respectent le programme et travaillent
par unité didactique conformément aux in structions de l’insp ecteur général de
français.
• Item n°6 : Utilisez-vous les mêmes textes pour toutes le s filières ? Pourquoi ?
Quatre-vingts pour cent (80%) des enseignants interrogé s répondent par
l’affirmative car ils estime nt qu’ils n’ont pas le choix puisque le niveau des
apprenants est à peu près le mê me dans toutes les filières.
Dix pour cent (10%) réponden t par la négative pour la simple raison que les
attentes diffèrent d’une filière à l’autre.
Les dix pour cent (10%) restants utilisent plutôt des textes sci entifiques pour les
classes scientifiques et des textes littéraires pour les classes littéraires sans
donner de raisons.
• Item n°7 : Les textes proposés dans les man uels de lecture sont-ils, selon
vous, adaptés à l’apprent issage de la lecture ?
Oui, Non… Pourquoi ?
Cent pour cent (100%) des enseignants interrogés ne pens ent pas que les textes
proposés dans les manuels de lecture so ient adaptés à l’app rentissage de la
lecture parce qu’ils sont long s, difficiles d’accès, ne s ont pas d’act ualité, donc
non motivants.
• Item n°8 : Vous arrive-t-il d’exploiter ces textes d’une autre manière
(personnelle) ?
Parfois – Souvent – Toujours – Jamais. Vingt pour cent (20%) des enseignants exploitent souv ent les text es proposés
par l’IPN d’une manière autre que celle qu i figure dans le livre du professeur.
Soixante-dix pour cent (70% ) suivent à la lett re le livre du professeur. Les dix
pour cent (10%) restants ne répondent pas à ce tte question.
• Item n°9 : Les textes proposés dans les man uels scolaires permettent-ils à vos
apprenants de devenir de bons lecteurs ?
Oui – Non. Pourquoi ?
La majorité des enseignant s interrogés (quatre-ving t-douze pour cent, 92%)
répondent négativement car ils estiment que, d’une pa rt, l’horaire consacré à la
lecture est insuffisant. D’une autre part, les a pprenants déchiffrent très mal, ce
qui pose énormément de problèmes.
Les huit pour cent (8%) restants ne répondent pas à cette question.
• Item n°10 : Quelle définition donneriez-v ous à un texte littéraire ?
Pour cinquante-deux po ur cent (52%) des enseignants, un texte littéraire est un
texte qui permet aux lecteurs de s’évader et d’oublier les soucis quotidiens.
Cette définition nous semble trop vague et trop simpliste.
Vingt pour cent (20%) associent le text e littéraire à la r hétorique et à la
stylistique.
Les dix-huit pour cent restants (18%) défini ssent le texte littéraire comme étant
un texte authentique, original, adapt é à une certaine sphère culturelle.
• Item n°11 : Quelle est l’utilité d’un text e littéraire en cl asse de langue ?
Aussi étonnant que ce la puisse paraître, quatre-vi ngt-dix pour cent (90%) des
enseignants interrogés ne trouv ent aucune utilité à intro duire un texte littéraire en
classe de langue puisque l’o bjectif actuel est d’appr endre aux apprenants à
communiquer. Huit pour cent (8%) pensen t que le texte littéraire apporte des informations sur
une époque donnée, su r une société, sur un courant littéraire, su r le style et la
forme du texte.
Les deux pour cent (2%) restants estiment qu’un text e littéraire est un texte
ordinaire, comme n’importe quel autre te xte : tous les textes utilisés par
l’enseignant servent à travai ller des points de langue.
• Item n°12 : Qu’entendez-vous par lire un texte ?
Quatre-vingt seize pour ce nt (96%) des ensei gnants pensen t que lire un texte,
c’est d’abord le déchiffrer puis le compre ndre et l’interpréter.
Trois pour cent (3%) évoquent la lecture plaisir et la lecture « travail ». Le un
pour cent (1%) restant ne répond pas à la question.
• Item n°13 : Combien de séances consacrez-vo us à la lecture lors de chaque
unité didactique ?
Vingt pour cent des ensei gnants (20%) consacrent deu x séances, soit deux
heures à la lecture lors de chaque unité didactique. Quarante pour cent (40%)
consacrent une séan ce, soit une heure à la lecture. Les quarante pour cent
restants (40%) prévoient qu inze minutes à une demi-heu re lors de chaque unité
didactique. Tous ces ensei gnants pensent q ue les séances prévues pour la
lecture ne sont pas suffisant es : ils ne consacrent pas beaucoup de séances à la
lecture car le programme est trop chargé et doit être achevé avant le mois de
mai.
• Item n°14 : Quelles sont les difficultés q ue rencontrent vos apprenants pendant
la séance de lecture ? Pourquoi ?
Tous les enseignants inte rrogés (cent pour cent, 100% ) pensent que, pendant la
séance de lecture, les appr enants n’arrivent pas à dé chiffrer, rencontrent des
mots pour la première fois, manquent d’aisance (articulat ion, prononciation,
rythme, prosodie, etc.) pa rce que, d’un côté, ils ne lisent pas en dehors de
l’école, d’un autre côté, les séances cons acrées à la lecture en classe sont
insignifiantes.
• Item n°15 : Quel est votre principal objectif lors de la séance de lecture ?
Pourquoi ?
Cinq pour cent des enseignants (5%) estiment que l’ objectif principal lors de la
séance lecture est de donner aux apprenants le goût de la lect ure (le plaisir de
lire) parce qu’un apprenant qui ne sait pas lire ne peut pas réussir : un apprenant
qui lit est un apprenant qu i a beaucoup plus de possibilités de réussir dans ses
études qu’un apprenant qui ne sait pas lire ou qui ne lit pas.
Trente-cinq pour cent (35%) pensent que l’objectif princi pal lors de la séance de
lecture est d’abord d’enric hir le vocabulaire de l’apprenant puis l’amener à
apprendre à lire pour qu’il puisse enfin s’informer.
Soixante pour cent (60%) des enseignants trouven t que l’objectif principal lors de
la séance de lecture est la compréhensi on du texte : c’est la communication qui
est mise en évidenc e en français langu e étrangère (FLE).
• Item n°16 : La séance de lecture doit-elle seulement am ener vos apprenants à
la maîtrise de la langue et du langage ou bien vise-t-elle autre chose ?
Cinquante trois pour cent (53%) des en seignants estiment que la séance de
lecture doit amener l’apprenant à la maîtris e de la langue et du langage : elle ne
vise pas autre chose et per met seulement à l’élève d’ap prendre à bien lire pour
comprendre.
Vingt-huit pour cent (28%) pensent qu e la séance de lecture ne permet pas
seulement aux apprenants la maîtrise de la langue et du langage mais vise bien
d’autres choses : l’amour du livre et de la lecture, l’informati on et l’ouverture sur
d’autres cultures, d’au tres civilisations.
Dix pour cent (10%) affirment que la séance de lecture vi se seulement la
compréhension du texte. L’apprenant doit compre ndre ce qu’il lit.
Neuf pour cent (9%) ne répondent pa s à cette question.
• Item n°17 : Si vous devez choi sir des textes, quels aut eurs français et /ou
d’expression française proposeriez- vous à vos apprenan ts ? Pourquoi ?
Auteur Electa (Pourcentage)Moham ed Dib90%Jules Verne1%Alphonse
Daudet1%Emile Zola47 %Victor Hugo19%Albert Camus 17%Mouloud
Feraoun20%Guy de Ma upassant15%Rachid Mi mouni12%Gustave
Flaubert1%Marcel Pagno l30%Yasmina Khadra2%Rachid Boudjedra1%
D’après les réponses des enseignan ts, nous remarquons que, d’une part, des
auteurs comme Sartre, Duras, Prou st, Molière, Pennac , Stendhal, Vian,
Bendjelloun, Kateb Yacine, A ssia Djebar n’ont pas été cités. D’une autre part,
aucun enseignant ne ju stifie son choix.
Quelques enseignants citent des écrivains français et/ou d’expression française
mais sont incapable s de donner un titre de leurs œuvres.
• Item n° 18 : Selon vous, qu’est-ce qu’une uni té didactique réu ssie ? Pourquoi ?
Quatre-vingt-deux pour cent (82%) des enseignants interrogés pensent qu’une
unité didactique réussie est celle qui amène l’ apprenant à maîtris er les points de
langue pour pouvoir comm uniquer. Le français langue étrangère privilégie la
communication.
Dix-huit pour cent (18%) se ulement estiment qu’une uni té didactique réussie doit
amener l’apprenant à pro duire un écrit alla nt dans le sens de cette même unité
didactique et où il applique ce qu’on lui a appris : l’apprenant doi t réinvestir le
modèle proposé.
• Item n°19 : Que manque-t-il aux unités di dactiques prop osées dans le
programme ?
Tous les enseignants que nous avons interrogés pe nsent que les unités
didactiques proposée s dans le programme ne répondent pas aux attentes des
apprenants et des enseign ants : ce sont des unités plates, dénuées de tout
intérêt, manquent de n ouveautés et ne tie nnent compte ni de la communication
ni de l’écriture. Une fois arrivé en terminale, voire en 1ère année universitaire et
après neuf ou dix ans d’apprentissage de la langue franç aise, l’apprenant
algérien ne sait ni parle r, ni lire, ni écrire.
• Item n° 20 : Qu’entendez-vous par lectur e, écriture, réécriture ?
Huit pour cent (8%) des enseignants interrogés enten dent par lecture, écriture,
réécriture, l’appropriation des règles lexicales, mo rphologiques et syntaxiques
après la séance de lecture. L’apprenant devra être capable de produire un texte
similaire, du même type que celui qu’il étudie.
Un pour cent (1%) des en seignants définit la notio n de lecture, écriture,
réécriture comme u ne réécriture en soi : aucune autre précisio n n’est donnée.
Les autres enseignants, à savo ir quatre-vingt onze pou r cent (91%) ne répondent
pas à cette question. Nous supposons que ces enseignants n’ ont jamais entendu
parler de la notion de le cture-écriture-réécriture.
I-3. DE LA DIFFICULTE D’ECRIRE
Selon les cent ensei gnants interrogés lors de l’ enquête, un nombre important
d’élèves montre une désaff ection pour les œuvres litt éraires françaises et/ou
d’expression française.
Ces apprenants « ara bophones » lisent mal et sont incapables de restituer le
sens d’un texte qu’ils ont lu pendant plusieurs séances : ils ne dépassent pas le
stade du décodage mot à mot, ne possèdent pas les st ratégies techniques de la
lecture qui leur permettent de repére r certains indices et d’émettre des
hypothèses de sens sur un texte, ce qui entrave la compré hension globale du
texte et rend leur tâche difficile. Pour ces apprenants, la lecture en français
passe par la traduction : le recours au dictionnaire bilingue (arabe/français,
français /arabe) est un e nécessité dont ils ne peuvent pas se passer.
De plus, l’écriture, selon eux, n’est pas moins difficile que la lecture.
Ecrire en français nécessite la gestion de plusieurs codes : ponctuation, syntaxe,
orthographe, morphologie, vo cabulaire, etc. Placé en situation d’écriture,
l’apprenant algérien éprouve des difficultés à maîtriser simultanément tous ces
codes. Les mêmes ense ignants soutiennent que la majorité de leurs apprenants
sont de faibles scripteurs : ils écrivent, mais n’utilisent pas le texte lu pour
produire, n’investissent pas et ne s’investissent pas dan s leurs textes. Ils ne se
relisent pas non plus pou r percevoir leurs erreurs et les corriger.
Selon ces enseignants, la tâche de relecture est pratiquement incomprise des
apprenants : réviser, po ur ces apprenants, c’est effacer une lettre ou la
remplacer par une autre, n on replacer ou ajouter une phrase. Ils ne pensent pas
qu’on puisse restructurer les phrases dan s une tâche de rele cture. Toute leur
attention est focalisée, quand c’est le cas, sur les problèmes de transcription
graphique et sur les erreurs orthographi ques et morphologique s. Réorganiser un
paragraphe, déplacer une phrase, rempla cer un connecteur mal employé par un
connecteur pertinent pour assurer un lien logique ent re deux paragraphes par
exemple sont des tâches très difficiles : elles dép assent leurs capacités.
Ces apprenants se limitent le plus souv ent à une révision de surface. L’enquête
menée auprès de ce s mêmes enseignants montre q ue les apprenants algériens
du secondaire sont incapab les d’exprimer leurs idée s ou leurs connaissances
lors d’une discussion. A cet âge (ce sont pratiquement to us des adolescents), ils
évitent de s’exprimer en français par crainte d’êt re ridiculisés par leurs
camarades. Ces mêmes apprenants commu niquent très peu entre eux et se
posent des questions ayant recours à une langue métissée : «le francarabe ».
L’arabe dialectal et le fr ançais se côtoient à l’in térieur d’une même phrase.
Parler français nécessite donc beaucoup d’i nquiétude chez les enseignants
algériens de langue françai se et beaucoup d’anxiété chez les appr enants. Par
ailleurs, les difficultés auxqu elles fait face l’apprenant al gérien qui suit des cours
de français (FLE) ne s ont pas seulement linguistiq ues, le choix des textes
influence aussi la motiva tion des apprenants et pousse les ap prenants à ne pas
s’engager cogniti vement dans les tâ ches de lecture.
I-4. LES ŒUVRES FRANÇAISES
ENCORE IGNOREES
Selon les enseignan ts, les romans français et francophones d’auteurs
algériens et /ou ma ghrébins sont ignorés des appr enants algériens. Ces derniers
ne voient pas l’utilité de ces textes littéraires en langue étrangère qu’on leur
propose de lire, textes qui ne se rattachen t pas à leur culture et dans lesquels ils
ne se reconnaissent pas. Co mme tout lecteur en lan gue étrangère, ils n’ont pas
de représentations préalables de ce qu’il s vont lire parce qu’ ils disposent de peu
d’informations sur la culture française. Dépourvus d’horizon d’attente qui dépend
du bagage socioculturel du lecteur, le s apprenants entrent dans le texte à
l’aveuglette, ce qui prov oque un décrochage par rapp ort au texte et à ses
ressources extérieures.
Malgré l’insistance de s programmes sur la formatio n d’un citoyen fier de son
identité, de son pays et de son histoire, on ne fa it pas lire aux apprenants
algériens des textes franco phones algériens ou maghrébi ns, tels que ceux de
Mohammed DIB, Rachid BO UDJEDRA, Rachid MIMOUNI, Yasmina KHADRA,
Tahar BENDJELLOUN, à côté des œuvres fr ançaises. Ces œuvres-là auraient le
mérite de les alimenter dans le travail de construction de le ur identité arabe et de
leur appartenance nationale. Au contact des œuvres littéraires maghrébines
d’expression française, les apprenants s’initieraient au x richesses culturelles du
patrimoine culturel de leur pays.
CHAPITRE II
CRITERES EXTERNES PRESIDANT
AU CHOIX DU TEXTE A EXPLOITER
II-1. RECIT OU DIALOGUE ?
II-1-1. Récit
On entend par récit, dans ce contexte, un texte rappo rté à la troisième personne
du singulier et dans leq uel les personnages n’interv iennent pas di rectement.
En voici un exemple :
Jean-Baptiste Grenouill e est le personnage principal du roman Le parfum de
Patrick SUSKIND.
« Après avoir passé plusieur s années de sa vie à vivre seul dans une caverne,
Grenouille, revenu parmi les hommes, se regarde pou r la première fois dans un
miroir. C’était la première fois que quelqu’un di sait monsieur à Gre nouille. Il s’avança
vers le miroir et regarda . Jusqu’à présent, jamais il ne s’était regardé dans un
miroir. Il vit en face de lui un monsieur dans un bel habit bl eu, avec une chemise
blanche et des bas de soie, et il se tassa instinct ivement sur lui-même, comme il
l’avait toujours fait dev ant de beaux messieurs co mme cela. Mais le beau
monsieur se tassa lu i aussi, et quand Gre nouille se redressa, le monsieur en fit
autant. Alors ils se figèrent tous les deux et se rega rdèrent fixement.
Ce qui sidérait le plus Grenou ille, c’était d’avoir l’air si incroyablement normal. Le
maquis avait raison : il n’avait rien de particulier, il n’était pas beau, mais pas
particulièrement laid non plus. Il était un peu court sur pattes, il se tenait de façon
un peu gauche, le visage était un peu inexpressif, bref, il ressemblait à des
milliers d’autres gens . S’il descendait dans la rue, person ne ne se retournerait
sur son passage. Lui-mêm e, s’il se rencontrait, ne se remarquerait pas […]
Et pourtant, voilà dix jours à peine, les paysans s’enfuyai ent à sa vue en
poussant des cris. Il ne se sentait pas al ors autrement qu’à prés ent, et à présent,
lorsqu’il fermait les yeux, il ne se sentai t pas le moins du mo nde différent de ce
qu’il était alors […]
Il ouvrit les yeux en plissant les paupières et vi t le monsieur du miroir lui rendre
son clin d’œil : un petit sourire flottait sur ses lèvres carminées, comme pour lui
manifester qu’il ne le trouvait pas anti pathique. Et Grenouille lui-même trouva
que ce monsieur dans le miroir, cette silhoue tte sans odeur, déguisée et
maquillée en homme, av ait quelque chose ; elle lui sembla en tout cas – pourvu
qu’on perfectionne le maqui llage – qu’elle pourrait fair e quelque effet sur le
monde extérieur, un effet dont Gr enouille n’aurait jamais rê vé pour lui-même. Il fit
un petit signe de tête à la silhouette et vit qu’en le lui re ndant, elle dilatait
discrètement les narines. »
Patrick SUSKIND, Le Parfum ,
Editions le Livre de poche.
II-1-2. Dialogue
On entend ici par « dialogue » un text e dans lequel les personnages sont mis
en scène, ils intervie nnent directement et leurs propos sont rapportés tels quels.
En voici un exemple :
– Bonjour ! dit le renard.
– Bonjour ! répondit polimen t le petit prince…Qui es-tu ? Tu es bien joli.
– Je suis un renard. – Viens jouer avec moi, lui proposa le petit prince. Je suis tellement triste…
– Je ne puis pas jouer av ec toi, dit le renard. Je ne suis pas apprivoisé.
– Ah ! Pardon, fit le petit prince. Mais après réfl exion, il ajouta :
– Qu’est-ce que signif ie « apprivoiser » ?
– Tu n’es pas d’ici, dit le renard. Que cherches-tu ?
– Je cherche les hommes, dit le petit prin ce. Qu’est-ce que sign ifie « apprivoiser
» ? […]
– C’est une chose trop oubliée, dit le renard. Ça sign ifie «créer des liens … »
SAINT- EXUPERY, Le Petit Prince .
En principe, le « récit » est utilis é comme support pou r travailler sur l’écrit,
parce qu’il est justement ca ractéristique de l’expressi on écrite, tandis que le
dialogue sera utilisé de préférence pour travailler sur l’expression orale parce
qu’il présente différent s types d’intonation.
On notera cependant que le dialo gue ne respecte pas toujours les
caractéristiques de l’oral da ns la mesure où il n’est souvent que la transcription
de l’écrit (écrit oralisé).
II-2. TEXTE LONG OU TEXTE COURT ?
II-2-1. Texte long
Voici un texte extrait des Caractères de La Bruyère :
«Giton a le teint frais, le visage plein et les joues pendantes, l’œil fixe et assuré,
les épaules larges, l’e stomac haut, la démarche ferme et délibérée. Il parle avec
confiance : il fait répéter celui qui l’entr etient, et il ne goûte que médiocrement
tout ce qu’il lui dit. Il déploie un ample mo uchoir et il se mouc he avec grand bruit
; il crache fort et loin, et il éternue fort haut. Il dort le jour, il dort la nuit, et
profondément ; il ronfle en compagnie ; il occupe à tabl e et en promenade plus
de place qu’un autre. Il tient le mi lieu en se promenant avec ses égaux ; il
s’arrête et l’on s’arrête ; il continue de marcher, et l’o n marche : tous se règlent
sur lui. Il interrompt, il r edresse ceux qui ont la parole : on ne l’interrompt pas, on
l’écoute aussi longtemps qu’il veut pa rler ; on est de son avis, on croit les
nouvelles qu’il débite. S’il s’assied, vous le voyez s’ enfoncer dans un fauteuil,
croiser les jambes l’une sur l’autre, froncer le sourcil, abaisser son chapeau sur
ses yeux pour ne voir perso nne, ou le relever ensuite, et découvrir son front par
fierté et par audace. Il est enjoué, grand rieur, impa tient, présomptueux, colère,
libertin, politique, mystérieux sur les affaires du temps ; il se croit des talents et
de l’esprit. Il est riche.
Phédon a les […], il sourit à ce que les autres lui disent, il est de leur avis ; il
a les yeux creux, le teint échauffé, le corps sec et le visage maigre ; il dort peu,
et d’un sommeil fort léger ; il est abstrait, rêveur, et il a avec de l’esprit l’air d’un
stupide, il oublie de dire ce qu’il sait, ou de parler d’événements qui lui sont
connus ; et s’il le fa it quelquefois, il s’en t i r e m a l , i l c r o i t peser à ceux à qui il
parle, il conte brièvement, mais froidement ; il ne se fait pas éc outer, il ne fait
point rire. Il applaudit court, il vole pour leur rendre de petits services. Il est
complaisant, flatteur, empr essé ; il est mystérieux su r ses affaires , quelquefois
menteur, il est superstiti eux, scrupuleux, timide. Il marche doucement et
légèrement, il semble craindre de fouler la terre ; il marche les y eux baissés, et il
n’ose les lever sur ceux qu i passent. Il n’est jamais du nombre de ceux qui
forment un cercle pour discourir ; il se met derrière celui qu i parle, recueille
furtivement ce qui se dit, et il se retire si on le regarde. Il n’occupe point de lieu, il
ne tient point de place ; il va les épaules serrées, le chapeau abaissé sur les
yeux pour n’être point vu ; il se replie et se renfer me dans son mant eau ; il n’y a
point de rues ni de galeries si embarrassées et si remplies de monde, où il ne
trouve moyen de passer sans effort et de se couler sans être aperçu. Si on le
prie de s’asseoir, il se me t à peine sur le bor d d’un siège ; il parle bas dans la
conversation, et il articu le mal ; libre néan moins sur les affa ires publiques,
chagrin contre le siècle, médiocrement pr évenu des ministres et du ministère. Il
n’ouvre la bouche que pour répondre ; il to usse, il se mouche sous son chapeau,
il crache presque sur soi, et il attend qu’il soit seul pour éternuer, ou, si cela lui
arrive, c’est à l’insu de la compagnie : il n’en coûte à perso nne ni salut ni
compliments. Il est pauvre.
LA BRUYERE, Les Caractères .
Ce texte présente deux portraits en par allèle. Nous n’insisterons pas sur les
difficultés d’ordre lingu istique qu’il présente.
• Sens des termes : estomac (= poitrine), libertin (= libre penseur), abstrait (=
rêveur),
politique (= qui aime discute r des événements politiques).
• Catégories grammaticales : colère (employé comme adjectif) et stupide
(employé comme nom).
Ce qui retiendra surt out notre attention, c’est que le texte est trop long. En
effet, si l’on veut tr availler sur la descr iption des personnes,
et c’est justement dans cette perspec tive que le texte es t proposé, l’un des
deux portraits suffit : on aura ainsi le temps d’exploiter d’une manière complète
toute cette accumulation de tr aits physiques et moraux.
Travailler sur les deux textes ne peut se justifier que si l’on veut s’intéresser au
style de l’auteur : on pourra alors, par comparaison, étudier les effets obtenus
par convergence ou par diverg ence des deux portraits.
II-2-2. Texte court
Voici un texte proposé dans le cadre de l’unité sur le récit dans
Le français au lycée, 1ère année secondaire , Editions Libris, Alger, 1999 :
« Les énigmes »
« Il était une fois un homme qui vivait à l’entrée d’un village bâti au sommet
d’une colline. Il s’était rendu célèbre par sa vive intel ligence et la fa cilité avec
laquelle il résolvai t les énigmes. C’est ainsi qu’il parvint à in culquer à son fils,
alors âgé de dix ans, le goût des devinettes.
Ce dernier promettait beaucoup, car il donnait l’impr ession de ma rcher sur les
traces de son père. Le br ave homme étalait partout sa fierté […] La mère,
fatiguée d’entendre sa ns cesse les mê mes réflexions, lui répl iqua un jour : « Mes
frères sont plus intelligents que notre peti t, et pourtant je n’en fais pas cas. »
D’après Tahar OUSSEDIK
Contes populaires , SNED (1985).
Ce texte est court mais cela consti tue, ici, un aspect n égatif et non pas une
qualité : le texte est en fait tronqué, il est in complet aussi bien en ce qui concerne
le sens (l’histoire n’ est pas finie, on n’en connaît pas la suite ; on ne sait même
pas pourquoi on a donné ce titre – « Les énigmes » – au te xte) qu’en ce qui
concerne la structure (on n’a pas un schéma na rratif complet).
II-2-3. Conclusion
Pour une séance de compréhension de l’é crit, il faut opter pour un texte court
pour pouvoir l’exploiter co rrectement dans le temps impar ti à la séance. Mais il
faut veiller à ce que ce texte présente une certaine unité, pour que les
apprenants aient une idée complète de la structure du modèle textuel et qu’ils
découvrent une histoire complè te, ce qui sera plus motiva nt et plus incitant pour
eux.
II-3. TEXTE LITTERAIRE OU DOCUMENT
AUTHENTIQUE ?
On peut utiliser trois sortes de sup ports dans le cadre de la compréhension de
l’écrit.
II-3-1. Texte littéraire
Le texte littéraire est une notion vivante. Elle pr end de la réalité pour revenir
sur son espace fermé.
Il peut être d’un autre français (c omme BALZAC, MOLIERE, STENDHAL,
FLAUBERT, MALRAUX, CAMUS, Anatole FRANCE) ou d’expression française
(Mohammed DIB, KATEB Yacine, Taha r BENDJELLOUN, Assia DJEBAR) et
consiste en un extrait de ro man, un conte, un poème ou un extrait d’ une pièce de
théâtre. Le texte littéraire n’est pas seulement un phénomène de langage, il est aussi un
phénomène de voyages, de r encontres, de découvertes, d’évasion, d’exotisme.
« C’est beaucoup plus une aventure qu’une af faire de lecture ».
« Par opposition aux autres textes, le te xte littéraire prés ente une certaine
spécificité, qui, selon P. MACHERY, réside dans son autonomi e qui est à elle
seule sa propre règle dan s la mesure où elle se donne ses limites en les
construisant. Ouvert à toutes les possibilités, il offre des lectures plurielles et se
prête à plusieurs interprétati ons alors que le texte non littéraire présente un seul
sens, et avant d’être lu par personne, il a toujours été lu par tous. »(1)
Nous ajouterons que c’est dans la pers pective du beau q ue se situera la
définition fonctionnelle du texte littérai re : un langage systématique qui devient
autotélique (qui ne trouv e pas sa justification en dehors de lui-même).
La notion du beau renvoie à l’accomplissement en soi (a vant, elle renvoyait à
l’utilité puis cette dern ière fut remplacée par l’esthéti que, la forme, la structure).
Cette définition permet de rendre compte de plusie urs œuvres qualifiées
habituellement de littéraires : elles se trouvent en rapport d’affini té mutuelle mais
non d’implication. Nous restons dans l’à-peu-près.
L’opposition entre littéraire et non littéraire cède la place à une typologie des
discours. Ce dernier, par sa multiplic ité, permet l’appa rition des genres
littéraires.
L’usage littéraire est donc autotélique, opaque, conno tatif, ambigu. Quant à
l’usage scientifique, il est tr ansparent, univoque, dénotatif.
Voici un exemple :
« La rentrée »
(Souvenirs d’enfance)
«Je vais vous dire ce que me rappellent , tous les ans, le ciel agité de
l’automne et les feui lles qui jaunissent dan s les arbres qui fri ssonnent ; je vais
vous dire ce q ue je vois quand je trav erse le Luxembourg dans les premiers jours
d’octobre, alors qu’il est un peu triste et plus beau q ue jamais, car c’est le temps
où les feuilles tomb ent une à une sur les blanch es épaules des statues.
Ce que je vois alors dans ce jardin, c’ est un petit bonhomme qui, les ma ins dans
ses poches et sa gibecière au dos, s’en va au collège en sautillant comme un
moineau. Ma pensée seule le voit, car ce petit bonhomme es t une ombre, c’est
l’ombre du moi que j’étais il y a vingt-cinq ans. Vraiment , il m’intéresse ce petit,
quand il existait, je ne me souciais guère de lui ; mais mainten ant qu’il n’est plus,
je l’aime bien. Il était bien étourdi, mais il n’était pas méchant ; et je dois lui
rendre cette justice, qu’il ne m’a pas laissé un seul mauvais souvenir : il est bien
naturel que je le regrette ; il est bien naturel que je le voie en pens ée, et que mon
esprit s’amuse à rani mer son souvenir.
Il y a vingt-cinq ans à par eille époque, il tr aversait, avant hui t heures, ce beau
jardin pour aller en classe. Il avait le cœur un peu se rré : c’était la rentrée.
Pourtant il trottait, ses li vres sur son dos et sa toup ie dans sa poche. L’idée de
revoir ses camarades lui remettait de la joie au cœ ur : il avait ta nt de choses à
dire et à entendre. Et puis c’est si bon de retrouver des camarades … c’est ainsi
qu’il traversait le Luxembourg dans l’air fr ais du matin. Tout ce qu’il voyait alors,
je le vois aujourd’hui. C’est le même ciel et la même terre, lui seul n’est plus.
C’est pourquoi, à mesure q ue je vieillis, je m’intére sse de plus en plus à la
rentrée des classes. »
Anatole FRANCE (Œuvres, Calmann-Levy, Edit. )
II-3-2. Document authentique
C’est un texte que l’on peut trouver dans l’environnement de l’apprenant, qui n’a
pas été conçu pour être ex ploité en classe et dont l’utilisation à des fins
didactiques est assez récente. Entrent dans cette catégorie : les articles de
journaux, les lettres, les textes publicitaire s, les affiches, les tracts, les recettes
de cuisine, les règlements de toutes sortes, les prospec tus divers (médicaments,
produits d’usage courant divers ), les modes d’emploi, etc.
En voici un exemple : Pros pectus distribué par les a ssurances pour sensibiliser
les conducteurs de deux-roues aux risques d’accident (document extrait de
pratique de la communicati on, Editions Larousse).
« Votre voiture est puissante mais vous êtes fragile. »
«Le conducteur d’un deu x-roues est très vulnérable :
Aucune carrosserie ne le protège.
Il est toujours – et surtout en cas de m anœuvre brusque – conf ronté aux lois de
l’équilibre.
Il éprouve une dangereuse sensation de facilité qui le pousse à « couper » les
virages en rase cam pagne et à se faufil er au travers des encombrements dans
les villes.
Que faire ?
Indépendamment des me sures que les pouv oirs publics deva ient mettre en
œuvre (multiplication des pi stes réservées aux deux-roue s, législation très ferme
quant aux normes de construc tion, priorité accordée à une véritable formation
préalable…), l’examen des causes principales d’a ccident montre que les
conducteurs de deux roues doivent veille r particulièrement à l’observation des
règles suivantes :
•respecter les stops, les feux , les règles de priorité ;
•modérer la vitesse ;
•ne jamais doubler à droite ;
•mettre toujours le ca sque (même si le port n’en est pas obligatoire pour les
cyclomotoristes). – se méfier de la proximité latérale d’autres véhicules ;
– rouler feux allumés pour être toujours vus. »
Nous notons les caractères de dimensions différent es, l’emploi du gras et les «
puces », choses que l’on ne trouve généralement pas dans le texte littéraire.
II-3-3.Texte didactique
C’est un texte qui a été « fabriqué » par un enseignant ou l’auteur d’un manuel
pour répondre à un besoin précis dans la mesure où l’on ne trouve pas toujours
un texte bien adapté pour trava iller sur une no tion donnée.
II-3-4. Conclusion
Dans les manuels de français actuels, on ne trouve que des textes
authentiques ou des textes litté raires. En effet, les textes littér aires conviennent
bien pour travailler sur le récit ou la description, tandis que les documents
authentiques sont plus indiqués pour travailler su r d’autres types textuels comme
la prescription ou l’injoncti on. Les textes didactiques pa r contre ne se retrouvent
pratiquement que dans les ma nuels destinés aux débutants.
C’est donc en foncti on du type de support dont on a besoin que l’on choisira le
type de texte à exploiter. L’ enseignant aura donc à combiner textes littéraires et
documents authentiques pour répondre aux différent es situations impliquées
pour les programmes et pour donner l’occasion aux apprenants de fréquenter les
différents types de supports.
II-4. TEXTE DE LITTERATURE FRANÇAISE
(OU D’EXPRESSION FRANÇAISE) OU TEXTE TRADUIT ?
II-4-1. Texte originel en français
Un auteur français ou d’expression fran çaise est le plus i ndiqué pour donner un
modèle de langue à des apprenants qui étudient le français. En effet, son
sentiment linguistique de locuteur natif (ou assimilé , pour un auteur d’expression
française qui manipule le français depuis sa plus tendre enfance et qui a été
nourri de culture française) lui permet de trouver spontaném ent les tournures
adéquates et d’éviter toutes les constructions, tous les emplois qu’il ne « sentirait
» pas comme typiquemen t français.
II-4-2. Texte traduit
Un texte traduit présen te un double in convénient :
• Le traducteur n’ a peut-être pas tradu it exactement la pensée de l’auteur. En
effet, le texte originel peut prêter à ambi guïté et le traducteu r pourra opter pour
un sens autre que celu i voulu par l’auteur.
• Le traducteur peut être amené à utiliser des structures grammaticales pas tout
à fait françaises parce qu’il aura eu des difficultés à rend re un passage et qu’il se
sera laissé, malgré lui, à traduire mot à mot, ce qui ne correspond pas
nécessairement aux normes de la langue française.
En ce qui nous concerne plus directement, vaut-il mieu x utiliser un texte d’auteur
algérien ou un texte d’auteur français ?
Pour répondre à cette ques tion, on en posera une au tre : en quoi un auteur
algérien est-il plus acce ssible qu’un auteu r français ?
En quoi des auteurs tels que Mohammed Dib ou Ya smina Khadra par exemple
sont-ils d’un abord pl us facile qu’Albert Camus ou André Gide ?
Il faut en effet tenir compte d’un facteur psychologique important : si l’écrivain
français écrit dans sa langue maternelle (et donc d’une manièr e plus spontanée),
l’écrivain algérien d’expre ssion française écrit dans une langue d’emprunt et voilà
ce qui se produit :
• Ou bien il se croit obligé de montrer qu‘ il possède le français et sera amené à
se guider un peu, ce qui aura pour conséquence de rendre son discours un peu
artificiel parce que ce sera plus un exercice de styl e qu’un véritable travail de
création littéraire.
• Ou bien il introduira da ns son discours des « calq ues », c’est-à-dire des
expressions traduites telles que de l’arabe ou du berbèr e. L’écrivain le fera en
toute conscience, pour donner un certain « cachet » à son styl e, mais l’apprenant
ne le saura pas et il risq uera de reprendre à son compte ces expressions ou ces
structures, ce qui se tradu ira par des « interférences » qui seront sanctionnées
par l’enseignant.
Le seul aspect positif dans l’utilisati on des textes maghrébins et, partant,
algériens, c’est qu ’ils ne poseront pas de problèmes au niveau culturel, dans la
mesure où ils traiteront des problèmes plus ou moins connus des apprenants.
Du coup : « […], dès les années 1950-1960, les gr ands écrivains al gériens ont été
confrontés au problèmes de l’écriture. Fo rcés d’utiliser une langue que l’histoire
leur a imposée, ils ont pris conscience que celle-ci ét ait dérimante à leur projet
de signifier le monde. Aussi, vont-ils la « violenter » et la stigmatiser, laissant en
elle des traces propr es à leur culture. En s’app ropriant la la ngue française,
l’écrivain algérien la transform era, en effet, par la viol ence, la subvertira. Et, de
fait, il prendra du cham p, en introduisant dans ce tte langue de nouvelles
structures et des musiques inédites, à tel point qu’u n « lecteur français serait
étranger dans sa prop re langue ». »(2)
Mais on peut aussi consi dérer cet aspect comme négatif puisque cela ne
permet pas d’élargir les ho rizons des appre nants, alors que no us avons signalé
précédemment que c’était un objectif important de la compréhension de l’écrit.
Après avoir examiné les critères externes présidant au choix du texte à exploiter,
nous allons étudier dans ce chapitre les critères in ternes qui nécessitent une
analyse approfondie du texte.
CHAPITRE III
CRITERES INTERNES ET ANALYSE
DE TEXTES
III-1. TEXTE-PRETEXTE OU TEXTE-MODELE ?
III-1-1. Texte-prétexte
C’est un support que l’enseignant utilisait d ans les années 1960-1970,
jusqu’aux années 1980, lors que l’on parlait encore de « lecture expliquée ». A
l’époque, la séance de compréhension de l’écrit ne s’inscriv ait pas dans une
perspective donnée, comme c’est le cas act uellement. L’objectif était de
développer l’aptitude des élèves à la comp réhension des textes ; le professeur
pouvait donc choisir n’importe quel texte pour en ex ploiter le cont enu sémantique
; il n’était soumis à aucune contrainte.
En voici un exemple, pris du Recueil de textes et tech niques d’expression d’un
manuel de français conçu pour la deuxième année se condaire (2.AS), I.P.N.,
Alger 1985.
« La grand-mère »
« Elle se disait que ses enfants et petits-enfants l’aimaient bien, mais qu’elle
leur semblait d’un autre âge, dépassée, ne compre nant au fond pas grand-
chose, et que tout ce qu’ell e pourrait dire et faire ma intenant ne servirait à rien.
Elle avait été jeune elle au ssi et se le rappe lait ; mais elle avait l’impression
qu’autour d’elle on ne parvenai t pas à le croire : elle ét ait pour tout le monde une
vieille de toujours. Or, e lle avait dansé, rêvé, dé siré, attendu beaucoup de
choses, et pourvu qu’elle ne se regardât pas dans une glace, il ne lui semblait
pas qu’elle eût tellement c hangé. On ne voyait d’elle que ce vis age ridé, ces
lunettes toujours de traver s qu’elle retenait par un él astique, cette démarche un
peu cahotante, toute la laideur de la viei llesse. Bien mieux, elle avait l’impression
que sa présence gênait. Elle remarquait qu’on la recevait volontiers chez l’un de
ses enfants, mais per sonne ne la retenait au bout d’une se maine si elle parlait de
repartir. En effet, quel plai sir à recevoir une vieille ?
Sans doute, se disait-elle, est-ce une bonne préparati on au départ déf initif, et
même une grâce de Dieu : se sentir de trop partout. Elle n’aurait donc presque
plus rien à quitter mais elle ne pouvait se défendre d’être triste en songeant à
cela. »
José CABABANIS, Les cartes du temps .
III-1-1-1. Compréhension globale
1) Comment ses enfants et pet its-enfants la voient-ils ?
2) Accepte-t-elle facilement l’image qu’ils lu i renvoient ?
3) A-t-elle de tout te mps été telle qu’ils la voient actuellement ?
4) Comment sa présence est-elle ressentie ? Pourquoi ?
5) Quelle conclusion en tire-t-elle ?
III-1-1-2. Comp réhension approfondie
1) Comment la grand-mère est-elle actuellement ?
2) Comment était-elle dans le passé ?
3) Quelles sont ses relations avec les siens ?
4) Comment se console-t- elle ? Mais est-ce vrai ment une consolation ?
Pourquoi ? 5) Que pensez-vous de la si tuation des vieux dans le monde urbain d’aujourd’hui
?
III-1-1-3. Exploitation linguistique
1) Morphosyntaxe : ét ude de la co mplétive.
2) Lexique : étude du champ lexica l en rapport avec la vieillesse.
3) Prolongement écrit :
– Quelle place occupe votre grand-père ou votre grand- mère dan s votre famille ?
– Quel est votre comportement avec eux ? Etes-vous heureu x de les avoir à la
maison ? Po urquoi ?
On aura noté que l’exploitation pr oposée pour ce text e ne s’inscrit dans
aucune approche méthodologique préala blement définie : les autres affirment
seulement qu’ils ont « e ssayé de prendre en ch arge les préoccupations
linguistiques d’une pa rt, et, d’autre part, le problème de la motivation, facteur
psychologique d’une rée lle importance». Plus loin, ils ajoutent que « l’élève et le
professeur trouver ont dans ce livre :
– des textes dont la t hématique essaie de répondr e aux préoccupations de
l’adolescent ; – des questionnai res d’étude et de compréhension proposés à titre indicatif ;
– des exercices de langue susceptibles d’enrichir ou de consolider les
mécanismes fondamentaux de la langue.
On l’aura constaté : il n’y a auc une stratégie dans cette démarche ; peu
importe le texte, pourvu qu’il donne l’occasion aux élèves de se livrer à des
activités de compréhensi on et d’expression.
Actuellement, le texte-prétexte est ut ilisé uniquement comme cadre intégrateur
de notions linguistique s que l’on veut faire fonctionner en contex te, pour éviter de
revenir aux pratiques traditi onnelles qui consis taient à travaille r sur des phrases
isolées.
Ce faisant, on se place dans une double perspec tive : celle de la « grammaire de
texte » et celle de l’ approche communicative.
III-1-2. Texte modèle
C’est un texte qu i illustre bien les caractéristi ques d’un modèle textuel parmi
ceux qui figurent au programme (narratif, descriptif, explicatif, argumentatif,
etc.).
En voici un exemple : « Pour la première fois la vieille Ra hma découvrait une femme bien différente
de celles du village. Elle voyait se dre sser devant elle une personnalité mûrie par
les épreuves sous les apparences de la jeune fille naïve. Rahma était comme fascinée. Sur les lèvres flottait un mystèr e qui attirait. La bouche séduisante, les
dents régulièrement plantées , éclatantes, exprimaient la joie de vivre. De longs
cils, des sourcils bien fournis aux arcs pa rfaits, accentuaient le charme du regard
: ils rehaussaient la beauté du visage autant qu’ ils décelaient la vigueur du
caractère.
Le mouvement des mains s’harmonisait avec les paroles et le ur donnait plus de
chaleur. La tresse, abondant e, souple, dans une courbe gracieuse, retombait sur
la ceinture blanche .Et les fleurs d’ amandiers sur la robe apportaient une note
de printemps. »
Abdelhamid BENHADOUGA, La fin d’hier.
Ce texte peut être utilisé pour trav ailler sur la descripti on des personnages (le
portrait). En cela, il constitue « un modèle » que l’on pe ut imiter dans son
organisation.
III-1-3. Conclusion
Le choix sera donc en fonction de l’objectif visé :
– si l’on doit travaill er dans une perspective méthodologique, dans une
perspective déterminée, on opte ra pour un texte-modèle ;
– si l’on doit travailler dan s une perspective purement li nguistique, sans axe ni
critères préalablement définis, on optera pour un texte-prétexte.
III-2.TEXTE CLASSIQUE OU TEXTE MODERNE ?
III-2-1.Texte classique
Nous entendons par là un texte de littérature française des XVIe, XVIIe et
XVIIIe siècles, qui n’a pas été « moderni sé », c’est-à-dire qu’il n’a pas été
réécrit en français contem porain ou standardisé.
En voici un exemple : « Ce discours me surprend, il faut avouer
.
Je ne vous cherchais pa s pour l’entendre louer.
Quoi ? Pour vous confier la douleur qui m’accable,
A peine, je dérobe un moment favorable,
Et ce moment si cher , Madame, est consumé.
A louer l’ennemi don t je suis opprimé .
Qui vous rend à vous-même, en un jour, si contraire ?
Quoi ! Même vos regards ont appris à se taire ?
Que vois-je ? Vous craignez de rencontrer mes yeux ?
Néron vous plairait-il ? Vous serais-je odieux ? »
RACINE, Britannicus , acte II, sc ène 6 (1669).
Que remarque-t-on à la lecture de ce texte ?
La langue utilisée présente certaines différences par ra pport à la langue
d’aujourd’hui.
? Au plan du vocabulaire :
– à peine (ligne 4) : avec peine… ;
– opprimé (ligne 6): dont on subit les méfaits ;
– qui (ligne 7) : qui est-ce qui… ;
– contraire (ligne 7) : différente ; – odieux (ligne 10) : haïssable.
? Au plan de la syntaxe :
– Il faut avouer (ligne 1) : il faut l’avouer ;
– dont (ligne 6) : par qui, vous rend à vous-même… ;
– si contraire (ligne 7) : vous r end si contraire à vous-même.
III-2-2. Texte moderne
Nous entendons par là un texte des années 1950, écrit au XIXe ou au XXe
siècle.
En voici un exemple :
« Eugène se trouva seul fa ce à face avec Vautrin ».
« Je suis bien que vous y a rriviez, lui dit cet homme en gardant un
imperturbable sang-froid. Mais écoutez ! J’ai de la dé licatesse tout comme un
autre. Ne vous décidez pas dans ce moment, vous n’êtes pas dans votre assiette
ordinaire. Vous avez des dettes. Je ne veux pas que ce so it la passion, le
désespoir, mais la raison qui vous déterm ine à venir à moi. Peut-être vous faut-il
un millier d’écus. Tenez, le voulez vous ?
Ce démon prit dans sa poche un port efeuille et en tira trois billets de banque
qu’il fit papilloter aux yeux de l’étudiant. Eugène était dans la plus cruelle des
situations. Il devait au marquis de Juda et au comt e de Trailles cent louis perdus
sur parole. Il ne les av ait pas et n’osait aller pa sser la soirée chez Mme de
Restau-u, où il étai t attendu. C’était u ne de ces soirées sans cérémonie où l’on
mange des petits gâteaux, où l’on boit du thé, mais où l’on peut perdre six mille
francs au whist. »
Honoré de BALZAC, Le Père Goriot
Quand on lit ce texte, on remarque que, bien qu’il ait été écrit en 1834, le
vocabulaire et la syntaxe n’en sont pas tellem ent différents de ce que l’on peut
voir dans la la ngue actuelle.
III-2-3. Conclusion
Pour l’enseignement du fr ançais langue étrangère (FLE), le texte classique est
à éviter pour deux ra isons essentielles :
1) Il présente des part icularités linguisti ques qui peuvent gêner les apprenants
dans la mesure où il s’agit d’acceptions ou de tournur es qui ne s ont plus en
usage aujourd’hui. On va donc prés enter à l’apprenant des mots et des
structures qu’il ne pourra pas réutiliser da ns ses productions, ce la reviendrait en
fait à encombrer son esprit inutilement ;
2) il traite des thèmes qui ne sont plus d’actualité et qui ne sont donc pas
susceptibles d’intére sser les apprenants.
Le texte moderne, par contre, fait usage d’une langue que l’apprenant peut
réutiliser telle quelle et traite des thèmes beaucoup plus en rapport avec ses
préoccupations (les préocc upations de l’apprenant) : no tion d’ident ification.
Nous noterons cependan t que le texte cla ssique présente un aspect positif qui
est d’enrichir la « culture littéraire » de l’apprenant et de lui permettre de prendre
connaissance d’œuvres marquantes de la littérature française.
A ce titre, et sans en fa ire un usage trop fréquent, nous pouvons pr ésenter aux
apprenants quelques textes classiques au cours de l’année, en pre nant soin de
choisir les mo ins marqués c’est-à-dire ceux dont la langue se rapproche le plus
de celle d’aujourd’hui.
En voici un exemple :
Le narrateur évoque ses souvenirs d’enfance.
« Après le dîner, hélas, j’étais bientôt obligé de quitter maman qui restait à
causer avec les autres au jardin s’il fais ait beau, dans le peti t salon où tout le
monde se retirait s’il fais ait mauvais. Tout le monde, sauf ma grand-mère qui
trouvait que « c’es t une pitié de rester enfermé à la campagne » et qui avait
d’incessantes discussi ons avec mon père, les jours de trop grande pluie, parce
qu’il m’envoyait lire dans ma chambre au lieu de rester dehors. « Ce n’est pas
comme cela que vous le r endrez robuste et énergique, disait-elle tristement,
surtout ce petit qui a tant besoin de prendre des forces et de la volonté. »
Mon père haussait les épaules et il examinait le baromètre, car il aimait la
météorologie, pendant que ma mère, évit ant de faire du br uit pour ne pas le
troubler, le regardait avec un respect attendri, mais pas trop fixement pour ne
pas chercher à percer le mystère de ses supériorités. Mais ma grand-mère, elle,
par tous les temps, même quand la pluie faisait rage et que Françoise avait
précipitamment rentré les précieux fauteuils d’osier de peur qu’ils ne fussent
mouillés, on la voyait dans le jardin vi de et fouetté par l’a verse, relevant ses
mèches désordo nnées et grises pour que son front s’im bibât mieux de la
salubrité du vent et de la pluie. Elle disait : « Enfin, on respire !»
Marcel PROUST (1872-1922) :
A la recherche du temps perdu,
Du côté de chez Swann » (1913).
III-3.TEXTE ORIGINEL OU ADAPTE ?
III-3-1. Texte originel
Un texte originel est un texte que l’on reprend tel qu ’il a été écrit par son auteur,
sans y apporter au cune modification, ni dans le fond dans la forme.
En voici un exemple :
« Le fil de l’aurore ne faisait qu’ apparaître qu’Omar apportait déjà la laine
achetée à Socq El-G. [… ] Le bonheur de ces aubes tendres, ra yonnantes, à la
fraîcheur éblouie, le déch irait comme une écharde.
Il commençait tout de suite à dévider les écheveaux. Puis il allait aux
commissions pour les ouvriers. Il se s entait moins sombre et triste ; les
conversations désabus ées des tisserands, il les écout ait de loin, dans un demi
engourdissement. Il co urait ensuite jusqu’à Bab Zir, chez Mahi Bouanane, pour y
prendre un couffin et des consignes. Il avait la charge de fa ire le marché du
patron. Mais sa mission n’était jamais remplie selon les désirs de dame
Bouanane ; il écouta it religieusement les remontrances de celle-ci.
Pour aider le vieux Skali qu e la sénilité rendait, certai ns jours, impropre à tout
travail, il embobinait de la chaîne des Trara, ténu e comme des ch eveux d’ange.
Un peu plus tard, il portai t de la laine au tein turier et l’en rapportait sitôt que
l’homme la retirait de son chau dron noir.
S’acquittant tant bien que ma l des mille et une corvées que l’on requé rait de lui, il
n’arrivait à satisfaire personne. Toujours quelqu’un le poursuiv ait de ses insultes,
le tançait.
Qu’on l’injurie ! Bah, il s’ y est habitué ; ce dont il ne veut pas, ce sont les coups
de poing, les navettes qu’on lui envoie à la tête. Si, d’aventure, il lui arrivait d’embrouiller un échev eau, tous les tisserands de le urs métiers lui envoyaient
des jets de salive. »
Mohammed DIB, Le métier à tisser.
III-3-2. Texte adapté
C’est un texte qui a été retouc hé par l’enseignant pour des raisons
pédagogiques C’est un text e qui a subi des transform ations. Ces modifications
portent sur le vocabulaire ( des mots sont remp lacés par d’autres), sur la syntaxe
(des phrases sont re construites) et même sur la structure du texte (des passages
entiers sont supprimés ou ajou tés), et elles sont justifié es par le désir de « rendre
le texte plus abordable ». Quand le texte est adapté, c’ est signalé par la mention suivante : « D’après … »,
qui précède l’indication du nom de l’auteur.
En voici un exemple, c’est en fait le text e originel précédent qui a été adapté (cf.
III-3-1) :
«Le soleil se le vait à peine ; déjà Omar apportait la laine
qu’il avait achetée la
veille au souk. Il commençait tout de suite à dévider les écheveaux puis il faisait
les commissions pour les ouvriers .
Il courait ensuite ju squ’à Bab Zir chez Mahi Bouanane, pour y prendr e un couffin
; en effet, c’était lui qu i était chargé de fair e le marché du patron mais dame
Bouanane n’était jamais conten te : les légumes n’étaient pas frais, la viande était
trop grasse, il avait oublié de porter le pain au boulange r […] Il écoutait sans
répondre, en baissant la tête, les sévères reproc hes de dame Bouanane.
Il y avait dans l’atelier un vieil ouvrier, que l’âg e rendait, certains jours , incapable
de travailler. Pour l’aider , Omar embobinait des fils fins comme les cheveux ; les
faibles yeux du vieillard n’ arrivaient pas à les distingu er. Un peu plus tard, il
portait de la laine au teinturier et l’en rapportait dès que l’homme la retirait de son
chaudron noir .
Chacun lui donna it des ordres ; il essa yait de rendre servic e à tout le monde ;
mais il n’arrivait à satisfaire personne.
Il y avait toujours quelqu’un pour lui lancer des r eproches. Bah ! Il s’y était
habitué ; ce dont il ne voulait pas, c’étaient les coups de poing, les navettes
qu’on lui envoyait à la tête .
Si par hasard, il embrouillait un écheveau , tous les tisserands, de leurs métiers ,
le grondaient viveme nt.
(Texte extrait du manuel de français, 5e et 6e AF, IPN, Alger)
Nous noterons qu’il s’agit là pratiquement d’un autre texte, puisqu’il ne
subsiste de l’originel que les passages souligné s. En effet, certains mots ont été
remplacés par d’autres, certains passage s ont été supprimés et d’autres ont été
rajoutés ; si les deux premières opérations peuvent se concevoi r (mots difficiles,
passages non nécessaires à la compréh ension du texte), nous pouvons, par
contre, nous inte rroger sur l’opportunité de l’addition de passages.
Le résultat de cette adapt ation, c’est que l’on a comp lètement dénaturé le texte
de l’auteur : le texte obtenu n’es t plus un texte de Mohammed Dib.
Nous pouvons donc no us demander quel p eut être l’intérêt de telles pratiques,
que rien ne peut justifier sur le plan pédagogique, car ou bien le texte originel
correspond à l’usage que l’on veut en faire (d’ailleur s, rien n’empêche d’expliquer
les mots difficiles en notes) ou bien on en ch erche un autre, et l’on a toujours les
ressources de « fabrique r » un texte pour la circonst ance ; c’est ce que font de
nombreux enseignants, surtout p endant les premières années de
l’apprentissage.
Voici un exemple de texte fabriqué (nous dir ons aussi, « texte didactique ») :
« Monsieur le chef de personnel »,
Comme vous me le demandez par votre lettre du 20 mars, je m’empresse de
vous donner les renseig nements me concernant.
Je travaille actuellement da ns l’unité de production Bati métal où j’occupe le poste
de secrétaire de direction du service co mmercial, en relation constante avec les
clients et les fournisseurs. Je m’intére sse beaucoup aux prob lèmes du bâtiment ;
je me permets de vous préciser que je suis secondée par une dactylographe et
que j’ai l’entière respon sabilité du secrétariat.
Du fait de la récente no mination de mon mari à Most aganem, je dois envisager
de quitter Alger ; j’aimerais néanmoins que mon expéri ence me soit utile dans
mon nouvel emploi.
C’est pourquoi je souhaite vivement qu’il vous soit possible de retenir ma
candidature.
Malika MOKHTAR
Texte extrait de Le français au lycée ,
1ère A.S, Editions Libris, ALGER, 1999.
Ce texte a été fabriqué pour donner aux apprenants un mo dèle de lettre.
III-3-3. Conclusion
• Le texte originel est g énéralement un texte riche, que l’on peut exploiter sur
différents plans ; il donne une idée exacte du style de l’auteur, de sa sensibilité,
de la langue qu’il utilise. • Le texte adapté trahit la pe nsée et le style de l’au teur, son utili sation ne se
justifie en aucune façon.
Si, pour un raison ou pour une autre, on ne peut pas utiliser un texte originel, il
vaut encore mieux fabr iquer un texte qui convie nne à la situation.
III-4. TEXTE «TYPE» OU «VARIANTE » ?
III-4-1. Texte « type »
Nous entendons par là un texte qui comporte les prin cipales caractéristiques du
modèle textuel étudié. Ce texte donnera au x apprenants un aper çu complet de la
structure de ce modèle. En voici un exemple :
« La fleur aux mille couleurs »
«Il y a bien longtemps, un prince nommé David, char mant et valeureux, était
amoureux d’une belle princesse. Le roi, père de la prin cesse désirait pour gendre
et successeur un prince parfai t. Il fit savoir que les pr étendants à la main de sa
fille devraient, pour l’obteni r, rapporter la fleur aux mill e couleurs de l’arc-en-ciel.
Un beau matin, le prince décida alors de partir à la recherche de la fleur
merveilleuse.
Deux autres princes prirent la mê me résolution. Le s trois prétendants
empruntèrent trois chemins différents. Le premier se noya en traversant un
fleuve. Le second fut dé voré par un tigre.
Sur son chemin, David rencontra un vieil ho mme luttant contre la férocité d’un
loup. Rapide comme l’éclair, David bondit sur la bête sauvage et, d’un coup de
sabre, la tua.
Il aida le vieux à se relever ; ce dernier le remercia et lui dit : «Va, mon fils, mon
ombre te suivra partout et te sauvera des dangers.»
Effectivement, David, suiv i d’une ombre, surmonta tous les obstacles : il
escalada des pics, pa rcourut des déserts, étouffa des boas.
Un soir, il aperçut, au fond d’une épaisse forêt, un ét range scintillement. Il se
fraya un chemin à grands co ups de sabre et se trouva devant la fleur aux mille
couleurs de l’arc-en-ciel. Il l’arracha fièrement et la cacha aussitôt, parce que
certains ambitieux cherchai ent à acquérir la fleur sa ns se donner de mal.
Déguisé en mendiant (l’ombre lui ayant suggéré cela), il se présenta chez le roi
et lui remit la fleur. Le père de la pr incesse ne pu t s’empêcher de balbutier : «
Quoi ? … Ma fille avec ce mendiant !… Non ! »
A ce moment-là, David se démasqua, et le roi, conf us, s’excusa en proclamant
haut : « Tu seras mon su ccesseur, brave garçon. »
David épousa enfin celle qu’il aimait. La noce dura sept jours. »
Charles PERRAULT
exte extrait de Le français au lycé e, 1ère A.S ,Edit. Libris.
Ce texte qui est un récit (du genre conte) présente un schéma narratif complet
:
1 – Une situation initiale pr ésentant un état d’équilibre : un prince amoureux d’une
princesse ; 2 – Une situation événe mentielle se co mposant de tr ois étapes :
• l’intervention d’un élément modificate ur qui bouleverse l’équilibre
précédent et provo que un état de déséquilibre : l’annonce du roi, qui promet
d’accorder la main de sa f ille à celui qui rap portera la fleur aux mille couleurs ;
• le déroulement des actions corres pondant aux différent s événements qui
surviennent pendan t que David est à la re cherche de la fleur ;
• le dénouement, avec la découverte de la fleur ;
3 – une situation finale, qui est le résultat de la transfor mation et qui voit l’état
d’équilibre rétabli.
III-4-2. Variante
Il s’agit d’un texte qui correspond exactement à la situation classique du modèle
textuel ; il présente, par exempl e, un schéma narratif incomplet.
? Exemple 1 : (Texte extrait du livre de Français 1ère A.S, IPN).
« Une locomotive pris onnière de la neige »
« Depuis près d’ une heure, le train était en détresse, et l’angoisse des
voyageurs avait gra ndi. A chaque minute , une glace se ba issait, une voix
demandait pourquoi l’on ne parla it pas. C’était la paniq ue, des cris, des larmes
dans une crise mont ante d’affolement.
Non, non, c’est assez débl ayé, déclara Jacques. Mo ntez, je me charge du
reste.
Il était de nouveau à son poste, avec Pecqueux, et lorsque les deux
conducteurs eurent regagné leurs fourgons, il trouva lui-même le robinet du
purgeur. Le jet de vapeur brûlante, assourdi, acheva de fondre les paquets qui
adhéraient encore aux rails. Puis la ma in au volant, il fit machine arrière.
Lentement, il recula d’en viron trois cents mètres, po ur prendre du champ. Et,
ayant poussé au feu, dépassant même la pression perm ise, il vint contre le mur
qui barrait la voie ; il y jeta la Lison, de toute sa masse, de tout le poids du train
qu’elle traînait. Elle eut un han ! terribl e de bûcheron qui en fonce la cognée, sa
forte charpente de fer et de fonte en craqua . Mais elle ne put passer encore, elle
s’était arrêtée fumante, tout e vibrante du choc. Alors, à deux autres reprises, il
dut recommencer la manœuvre , recula, fonça sur la ne ige, pour l’emporter ; et,
chaque fois, la Lison, raid issant les reins, buta du po itrail, avec son souffle
enragé de géante. Enfin, el le parut reprendre haleine, elle banda ses muscles de
métal en un suprême effort, et elle passa, et lourdement le train la suivit, entre
les deux murs de la neige éventrée. Elle était libre. »
Emile ZOLA, La bête humaine
Ce texte ne comporte pas de phrase initiale ; il commenc e directement par la
phrase de transformation, puisque nous sommes tout de suite plongés dans un
état de déséquilibre : le train est en détresse.
? Exemple 2 : (Texte extrait du livre de françai s, 1ère A.S, I P N).
« Une course cycliste »
« Aux abords du Clusot, la foule était nombreuse sur le s deux côtés de la
route. On applaudissa it Busard parce qu’il était le premier, puis on cherchait
dans le journal local à quel nom corre spondait son numéro. Le pavé commençait
avec la première maison. Busard serrait sur la droi te pour suivre une bande gou dronnée qui recouvrait les
rails d’un ancien ch emin de fer.
Une gosse s’avança pour voir le coureur. Une femme se précipita pour la tirer en
arrière. Busard arriva sur eux à quarante-cinq à l’h eure. Il fit un écart pour les éviter, les
deux roues glissèrent sur le pavé mo uillé en bordure du goudron. Le vélo se
coucha. Busard passa par-de ssus le guidon et plongea sur le pavé, les bras en
avant.
D’après Roger VAILLANT, 325 000 francs.
Ce texte ne comporte pas de situation fi nale, on n’y trouve en effet que la phase
initiale (l’état d’équilibre : la foule qui applaudit les coureurs) et la phase de
transformation (l’élément modificateur et la succe ssion des événements).
III-4-3. Conclusion
Si on présente un texte « type » aux apprenants, ils pourront déc ouvrir toutes
les caractéristiques d’un modèle textuel mais ils seront am enés à penser que,
par exemple, tout récit comporte néce ssairement trois phas es qu’il s’agit de
retrouver à chaque fois.
Par contre, si on leur prés ente des variantes, ils pourro nt constater que, selon le
cas, il peut m anquer telle ou telle partie de la structure de bas e du modèle.
L’idéal serait donc de pr ésenter plusieurs textes au x apprenants, les uns faisant
appel à une structure de base complète et les autres à des variantes. C’est
d’ailleurs ce qui était prév u au départ, quand la typologie textuelle a été introduite
dans l’enseignement du français au secondaire ; puis, pour des raisons de
contraintes de temps, on s’est progressive ment contenté d’étudier un seul texte;
ce qui est antip édagogique car, ce fais ant, on ne permet pas aux apprenants de
découvrir par eux- mêmes les caractéristiques d’un modèl e textuel, on les leur
impose. Et l’organisation de l’enseignement permet de varier les supports : en
effet, on peut utiliser des supports différents pour travailler sur la syntaxe et le
lexique, et profiter de l’occasion pour fa ire remarquer que la structure du texte
présente telle ou telle particularité.
III-5. ETUDE DES TEXTES
III-5-1. Choix des textes
L’ enseignant, souci eux de donner à chacun les moyens de stimuler sa
réflexion critique, d’en richir et d’affiner sa sensibi lité, de nourrir son imagination
et de développer sa personnal ité, donne aux textes littéraires, sans exclure les
autres textes, toute la place qui leur est due.
Des textes non littéraires, à condition qu’ils soient su bstantiels, bien composés et
bien rédigés, fournissent aux appre nants l’occasion de réfléchir sur le
mouvement d’une pens ée, sur les arguments et le ur enchaînement logique. Les
apprenants s’initient de ce tte manière aux techniques, aux règles, à la pratique
de la communication et de l’expression et apprennent à aborder les textes en les
considérant comme de s formes signifiantes. Le text e littéraire, plus que tout
autre, se prête, par le tr avail d’écriture qu’il impli que, à l’observation des pouvoirs
du langage et à l’exploratio n des effets de sens. En s’exerçant à déchiffrer les
textes littéraires, les apprenants apprennent à lire tous les textes.
C’est au niveau des lycées, et plus exactement en classe de première année
secondaire (1ère A.S) que se joue l’accès décisif à la littérature : le rôle de
l’enseignant est à cet égard déterminant. Il a la responsabilité de susciter chez
tous les apprenants le goût pour les textes littéraire s et de leur mé nager ainsi les
meilleures chances d’une curiosité et d’un intérêt du rable pour la littérature.
L’enseignant s’attache tout naturellement à faciliter la rencontre de ses
apprenants avec les œuvres ou les pages les plus mar quantes des siècles (XVIe
et XVIIe, par exemple). Il leur fait lire également, aux moments qu’il juge opportuns, des œuvres d’autres
époques, notamment du XXe si ècle : ce dialogue entre le passé et le présent
peut nourrir efficacement la sensibilité et la réflexion des apprenants.
L’enseignant favorise la rencontre et le dialogue en tre des cultures différentes,
en proposant, éventuellement, des textes écrits en français par des auteurs
maghrébins et étrangers. Il donne une place aux œuvres étrangères passées ou
contemporaines : le détour par d’autres littératures permet de mieux situer la
littérature française et /ou d’expression française et o ffre à chacun la possibilité
d’enrichir sa culture. Le s textes offrent aux appre nants la possibilité de se
découvrir eux-mêmes, de comprendre les aut res et d’étendre leur curiosité à des
cultures et à des réalités qu i leur sont étrangèr es ou qu’ils conn aissent mal. Pour
l’équilibre et la c ohérence du projet pédagogique, le s textes sont variés : les
différentes époques, les genre s littéraires divers, les divers types de discours
sont représentés. L’enseignant fait alterner la lecture d’œuvres intégrales et celle d’extraits. Il
gagne à regrouper le s textes de manière cohérent e, par exemple, autour de
thèmes qui font apparaître des rapproch ements significatifs. Les regroupements
peuvent aussi se rapproch er autour d’un genre.
L’enseignant vise à former les esprits à la rigueur, en ramenant toujours
l’attention sur le texte, en situant exac tement les auteurs et les œuvres dans
l’histoire et dans l’histoi re littéraire, en initiant pr ogressivement ses apprenants
aux moyens rhétoriques, stylistiques, poétiques et au vocabul aire qui permet de
nommer ces moyens.
L’enseignant considèr era que ses apprenant s sont appelés à entr er à l’université.
Il les y prépare en leur pr ocurant les connaissances et les capacités nécessaires
: bases grammaticales, souci d’un emploi exact des mots, lecture de textes
variés et replacés dans leur temps, aptitude à saisir et à construire un
raisonnement, à formuler un jugement. Apprendre à résumer un texte, à le lire méthodiquement, à composer un exposé
oral ou écrit, à situer dans l’histoire les auteurs et le s œuvres que l’on étudie est
nécessaire à tous. De tels apprentissages permettent d’étab lir la continuité entre le lycée et
l’université, contribu ent à la formation personnelle, professionnelle et sociale de
tous les apprenants.
III-5-2. Perspectives de lecture
III-5-2-1. L’éclairage historique
La réflexion critique des apprenants ne saurait s’ex ercer efficacement si l’on
ne développe pas simultanément leur conscience histori que. Une mise en
perspective historique donne une assise plus ferme à leurs connai ssances, une
cohérence plus forte à leur culture et leur permet de mieux se situer dans le
monde actuel. En insistant, par exemple, su r les auteurs et les textes des XVIe et
XVIIe siècles, tout en ne retenant que les œuvres ou les pages les plus
significatives et les plus accessibles, l’on redonne aux apprenants le sens de la
continuité historique faite de crises, de ruptures, ma is aussi de transitions, de
constantes. A cet effet, l’enseignant propose un e histoire littéraire
chronologiquement organis ée, sans simplification abusive des découpages.
Outre les repères historiques précis, il convient d’évoqu er l’environnement
humain et culturel, voire la vie quoti dienne, autant que les circonstances
économiques et politiq ues, sans négliger les codes et les conventions littéraires
de l’époque. L’éclair age historique situe l’œuvre ou le texte, à quelque époque
qu’ils appartiennent, dans leur temps et leur espace pr opres et fait comprendre
dans quelles cond itions ils ont été produits et re çus. C’est surtout dans le tissu
du texte que l’on trouve les marques et les signes de l’Histoire. En interrogeant la
représentation et l’interpréta tion explicites et implicit es que l’écrivain donne de la
réalité historique et sociale, l’on peut mettre en évidence une signification de
l’œuvre, dont l’écrivain lui-même pouvait ne pas avoir conscience.
III-5-2-2. La référence aux formes et aux genres
littéraires
Il existe de nombreux principes de cl assifications de textes . Mais dans l’étude
des œuvres, la référence aux formes, spéc ialement aux genres littéraires (roman
– théâtre – poésie – essai – nouvelle, etc.) est esse ntielle. Elle permet aux
apprenants de réfléchir sur des aspects particuliers de la création littéraire
(structures, techniques, langages), de mieux identi fier un type d’écriture,
d’apprécier les choix que fait un écrivain, en fonction des contra intes qui, à une
époque donnée, s’atta chent à un genre pour s’y soumettre ou pour s’en libérer,
enfin, de percevoir l’évol ution d’un genre littéraire, ses moments de gloire, ses
constantes, ses modifications de forme et de contenu.
III-6. METHODE
III-6-1. Œuvres intégrales et groupements
de textes
III-6-1-1. Œuvres intégrales
L’enseignant choisit les textes qu’il considère les mieux adaptés aux capacités
et aux intérêts de ses appr enants. L’activité de lectur e ne prend tout son sens
que devant des œuvres inté grales : l’enseignan t s’applique à le s faire découvrir
sous des angles va riés et par des travaux dive rs (lectures suivies, étude
méthodique d’un passage , exposés, aspects majeurs, la cohérence et la portée.
Cependant, les extraits ont une utilité pé dagogique comme incitation à la lecture
des œuvres intégrales, comme suppor ts d’analyse d’une question d’ordre
littéraire, d’un thème, d’une modalité d’ expression, comme ja lons d’un aperçu
historique. L’enseignant s’at tache à les rassembler et à les mettre en relation
dans des groupements à cohé rence thématique, esthéti que (par exemple, étude
de la métaphore chez q uelques écrivains maghrébi ns) ou problématique, qui ne
sont ni factices ni arbitr aires. Il ne propose qu’ex ceptionnellement un texte à
l’état de fragment isolé.
L’étude d’une œuvre intégrale, ch oisie pour sa q ualité littéraire, doit en
permettre la lecture complète par tous le s apprenants. L’enseig nant diversifie les
approches, soit d’une même œuvr e, soit d’une œuvre à l’autre.
L’étude d’une œuvre intégrale prend des formes variées en rapport avec la
nature même de l’œuvre et av ec le niveau de la classe : elle peut faire alterner la
lecture méthodique de passages limités et l’analyse d’ensemb les plus vastes
(jusqu’à un acte ou un c hapitre) ; elle fait appel à la lecture personnelle des
apprenants hors de la cl asse, elle peut d onner lieu à l’é laboration de fiches
individuelles ou collectives, suscite r des recherches thématiques ou
problématiques, fournir le su jet de comptes-rendus écrits ou oraux, d’exposés et
de production d’écrits. Cette étude ne s’attache pa s moins aux aspects techniq ues de la création qu’aux
interrogations que pose l’œuvre sur l’homme et la société ; elle considère comme
essentiels les modalités de l’écriture et le style de l’écrivain. Par exemple, en
étudiant une œuvre romanesque, on peut s’intéresser, notamment, à
l’organisation temporelle (o rdre, durée et rythme de la narration), à l’univers
imaginaire (lieux, objets, mythes, archétyp es), au rôle et à la fonction des
personnages, aux choix d’écriture (registres de langue , types de phrases, etc.).
Nous ne négligeons pas pour autant ce qui peut retenir plus immédiatement
l’attention des apprenants, par exemple l’analyse des sentimen ts amoureux, la
représentation de la vie quo tidienne, etc., c’est-à-dire tout ce qui ressort à la
vision de l’auteur, plus ou moins marqué par son milieu et pa r son époque.
L’enseignant ne devra pas perdre de vue qu’il s’agit de faire comprendre les
conditions de production et de réception de l’œuvre, de la faire apprécier dans
son temps et pour le nôtre, dans sa spécif icité et dans sa re lation avec d’autres
œuvres (antérieures ou postérieures, françaises, maghrébin es ou étrangères).
Par-delà, l’enseignant vise, pour ses appre nants, l’acquisition d’ une culture et de
l’affinement de la réflexion critique.
Il va de soi qu’une signifi cation n’est pas donnée ni à donner d’avance, qu’une
interprétation se cherche et se construit dans le contact permanent avec le texte,
que les acquis dem andent à être récapitulés à différents moments.
L’enseignant ne réduit l’étude d’une œuvre intégrale ni à une lecture suivie, ni à
l’explication de quelques extr aits, ni à une simple fiche de lecture, ni à une série
d’exposés.
Cette étude ne saurait excéder une diza ine de séances. Il convient, pour
maintenir l’unité de l’œuvre et pour éviter toute lassitu de, de concentrer, et non
de diluer dans le temps, l’effort de lecture.
L’étude d’une œuvre intégral e est l’occasion de mettre les apprenant s dans une
situation authentique de lecture, en pr ésence d’une œuvre complète et au
contact de l’objet- livre. El le vise à leur donner le go ût, les instruments et les
compétences d’une pratique autonome de la lecture.
La lecture méthodique
C’est une lecture réfléchie qui per met aux apprenant s d’élucider,
de confirmer ou de corriger leurs pr emières réactions de lecteurs.
Les différents types de textes littér aires ou non appelle nt des méthodes
différentes de lecture, qui s’élaborent au cours du travail même. Les
exigences d’une lecture méthodique permettent de donner plus de
rigueur et plus de force à ce que l’o n nomme habituelleme nt explication.
¦ Ce qu’elle refuse :
elle rejette la paraphrase ;
elle ne mime pas passivement le développement linéaire du texte ;
elle n’attribue pas à l’auteur, a priori, une intention ;
elle ne suppose pas que le contenu et la form e puissent être dissociés ;
elle ne s’enferm e pas dans des préj ugés esthétiques.
¦ Ce qu’elle tend à mettre en œuvre :
– l’observation objective, précise, nua ncée des formes ou des systèmes de
formes (grammaire, morphologie et syntaxe, lexique, champ lexical, champ
sémantique, énoncé et én onciation, images, métaph ores et métonymies,
modalités d’expression, effe ts stylistiques, st ructures apparentes et structures
profondes) ; – l’analyse de l’org anisation de ces formes et la per ception de leur dynamisme au
sein du texte (convergen ces et divergences) ;
– l’exploration prudente et rigoureuse de ce que ne di t pas le texte ;
– la construction progressive d’une signifi cation du texte à part ir d’hypothèses de
lecture dont la validité es t soigneusement vérifiée ;
– la constatation, d ans une synthèse, de ce qui fait l’unité complexe et profonde
du texte ou de l’œuvre en question.
L’enseignant appre nd à ses apprenants à moti ver et à nuancer leurs
jugements. A chacune de ces étapes, il veillera à ce q ue ses apprenants ti ennent le plus
grand compte de la situation du texte dans son temps et dans son espace
propres. La lecture méthodique tend à mettre en évidence le travail constant et indissociable de la forme et du fond dans le tissu du texte. Si elle doit éviter les
excès du formalisme, elle doit aussi se ga rder de toute impréc ision : l’enseignant
devra veiller à faire acquérir progressive ment à ses apprenan ts un vocabulaire
exact et pertinent, out il nécessaire de l’analyse.
Cet exercice demande du temps et suppose un trava il de longue haleine. Il
entraîne les apprenants à une plus grande autono mie devant un texte.
L’enseignant peut, à l’occasion, demander à ses a pprenants d’examiner plus
librement et plus rapidement un texte court. Il les incite à se poser les questions
suivantes : « De quoi s’agit-il ? Qui voit ? Qui parl e ? A qui ? Où ? Quand ?
Comment ? »
Ces questions appe llent des réponses préc ises qui s’appuient sur le texte et qui
s’organisent peu à peu en vue d’une le cture cohérente.
Cette lecture cohérente, en dépit de ses contraintes (temps imparti, examen d’un
texte court), n’est pas différente par nature de la lecture méthodique.
Les exigences d’une lectur e méthodique ne doivent pas faire oublier que la
rencontre avec les textes li ttéraires a pour but d’aiguise r le plaisir de la lecture
individuelle et de su sciter chez l’appr enant non seulement une réflexion
personnelle, mais l’env ie même d’écrire.
III-6-1-2. Le grou pement de textes
L’intérêt des groupements de text es, selon une cohérence thématique,
esthétique ou problématique, est qu’ils permettent de rassembler et de mettre en
relation des textes et d’év iter l’étude de fragments is olés. Il est raisonnable de
grouper, en moyenne, de quatre à six textes pour éviter les risques
d’inconsistance ou d’émiettement. Les groupements de textes offrent, entre autres possibilités, celle de fixer la
réflexion sur une ques tion d’ordre littéraire, comme une modalité d’écriture (par
exemple : le monologue dans la dramaturgie classique, la métaphore dans le
roman algérien, la descrip tion dans le roman balzaci en, le symbole dans la
poésie du XIXe siècle), les lois d’un genre ou d’une forme (par ex emple : la fable,
le sonnet, la nouvelle, le poème en prose), l’ évolution d’un auteur (par exemple :
l’itinéraire poétique de Verlai ne, l’itinéraire scriptural d’ Assia Djebar), les rapports
entre la littérature, les ar ts, la civilisati on pour une é poque donnée ou pour un
mouvement artistique.
Les groupements de textes autour de thèmes ou de problèmes d’une
généralité indéfinie so nt à éviter. L’enseignant peut pr éciser le libellé en jouant,
par exemple, sur l’extension de la notion (« la guerre : héros et an ti-héros »), sur
la perspective historique (« témoignages sur la Gue rre de 1914-1918 ») ou
littéraire (« la guerre : de l’ironie à l’humour noir. »)
Quel que soit le principe de regroupemen t, ce sont les textes qu’il s’agit
d’étudier et de confronter.
Nous ne saurions donc les réduire à la fonction de documents illustrant un
exposé théorique ni se bor ner à une pure et simple juxtaposition. Les textes
fournissent l’occasion d’ex ercer les apprenants à une lecture méthodique. Les
rapprochements entre les te xtes font apparaître les ressemblances et les
différences, les continuités et les ruptures, tout en prés ervant la s pécificité de
chaque texte dans l’histoire des formes et des idées.
Comment est-il donc possible de proposer une dém arche qui soit à la fois
historique et thématique ?
Une telle ambition suppos e que l’on rapproche des te xtes s’inscrivant dans la
durée de l’histoire, et illustrant l’évolut ion des idées et des formes littéraires.
Il ne s’agit pas de présenter des réalit és monolithiques, existant de toute
éternité, mais des thèmes ou des idées qui s’articulent en motifs, se modifient
selon les époques et les contextes, so nt susceptibles de variations et de
nuances. Il n’est pa s question non plus de s’enf ermer dans la s eule cohérence
du groupement thématique, car plusieurs types de grou pements sont possibles :
en fonction des structures ou des g enres littéraires, en fonction des œuvres
elles-mêmes. L’enseign ant se trouve ainsi devan t une grande variété de
combinaisons formelles.
Il efforcera ses appr enants d’en explorer un certai n nombre et les invite à
continuer dans cette voie. Il doit leur proposer, par ex emple, plusieurs types de
groupements :
Le groupement de nature t hématique ou idéologique : Thèmes et concepts.
Le groupement structurel : Genres et structures.
Le groupement lié à l’œuvre de tel ou tel écrivain : Univers imaginaires.
? La première partie, qui est la plus importante, concerne un champ illimité. Il
faut faire un choix, forcément arbitraire . Nous pouvons reteni r trois thèmes de
nature lyrique ou poétique (La passion amoureuse, Les espaces humains, Les
figures de mouvement) et deux thèmes de nature idéologique (Barbares ou Bons
sauvages, Liberté et égalité au Siècle des Lumières).
? La deuxième partie, formée de trois gr oupements (Arts poéti ques, La figure du
roi au théâtre, Le souvenir autobiographique), concerne le domaine de la poésie,
du théâtre et du genre autobiographique.
? La troisième partie, enfin, rasse mble des textes choisis chez un auteur de
théâtre (Molière : la maîtr ise du dialogue), chez un poète (Charles Baudelaire :
un regard sur l’art) et ch ez un romancier (Emile Zola : le langage du corps).
Chaque groupement est divisé en sous-ensembles qui définissent des étapes à
l’intérieur de la ques tion qui est étudiée, et permette nt une meilleur e approche de
son évolution historique et de ses variat ions internes. D’autr es groupements sont
réalisables. Nous avons surt out voulu présenter dans not re recherche un éventail
de textes et donner l’idée d’une méthode. Ce s ensembles ne sont pas figés,
mais transformables et recomposables.
A – Thèmes et concepts
A-1. La passion amoureuse
1) La femme paysage
– RONSARD, L es Amours, I (1552).
– HUGO, Les Contemplations (1856).
– ELUARD, Capitale de la douleur (1926).
– ARAGON, Les yeux d’Elsa (1942).
2) La passion destructrice
– RACINE, Phèdre (1677).
– MME De LAFAYETTE, La princesse de Clèves (1678).
– PREVOST, Manon Lescaut (1731).
– LACLOS, Les liaisons dangereuses (1782).
3) La naissance de l’amour
– MARIVAUX, La vie de Marianne (1731-1741).
– STENDHAL, Le Rouge et le Noir (1830).
– FLAUBERT, L’éducation sentimentale (1869).
– Alain FOURNIER, Le grand Meaulnes (1913).
A-2. Espaces humains
1) Intérieurs
– RABELAIS, Gargantua (1534).
– BALZAC, Le père Goriot (1834).
– PROUST, Le côté de Guermantes (1920).
– PEREC, La vie mode d’emploi (1978).
2) Jardins
– ROUSSEAU, La nouvelle Héloïse (1761).
– E. ZOLA, La faute de l’Abbé Mouret (1875).
– ARAGON, Le paysan de Paris (1926).
A-3. Images de la ville
– CELINE, Voyage au bout de la nuit (1930).
– SARTRE, Situations III (1949).
– CAMUS, Essais (1965).
A-4. Figures de mouvements
1) Imaginer le mouvement
– A. RODIN (P. Gsell), L’Art (1911).
– P. VALÉRY, Degas. Danse, Dessin (1936).
2) Images de la danse
– NERVAL, Les filles du feu (1854).
– FLAUBERT, Trois contes (1877).
– HUGO, L’Art d’être grand-père (1877).
– APOLLINAIRE, Alcools (1913).
– VALERY, Album de vers anciens (1920).
3) Images de la course
– HEREDIA, Les Trophées (1893).
– MONTHERLANT, Les Olympiques (1924).
– J.-P. MORAND, Ouvert la nuit (1922).
A-5. Barbares ou bons sauvages
1) Le mythe du « bon sauvage »
– HERODOTE, Histoires (vers 440- 4 30 av. J.-C.).
– MONTAIGNE, Essais (1595).
– MONTESQUIEU, De l’esprit des lois (174).
– ROUSSEAU, Discours sur l’origine et les fo ndements de l’inégalité parmi
les hommes (1755).
– DIDEROT, supplément au voyage de Bougainville (1772).
2) L’exotisme : rêve et réalité
– CHATEAUBRIAND, Itinéraire de Paris à Jérusalem (1811).
– T. GAUTIER, Constantinople (1853).
– P. LOTI, La Mort de Philae (1908).
– L. F. CELINE, Voyage au b out de la nuit (1932).
– C. LEVI-STRAUSS, Tristes Tropiques (1955).
B – Genres et structures
B-1. Dire le monde
– RONSARD, Réponse aux injure s et calomnies (1563).
– VIGNY, Les Destinées (1864).
– BAUDELAIRE, Petits poèmes en prose (1869).
– RIMBAUD, Lettre à Paul Démeney (15 mai 1871).
– ELUARD, Pouvoir tout dire (1951).
B-2. L’art d’écrire
– Peletier DU MANS, Art poétique (1555).
– BOILEAU, Art poétique (1674).
– PONGE, Proêmes (1948).
B-3. La magie des mots
– VERLAINE, Jadis et Naguère (1884).
– BRETON, Manifeste du surréalisme (1924).
– ARAGON, Le Roman inachevé (1956).
B-4. La figure du roi au théâtre
1) La grandeur d’un destin
– SOPHOCLE, Œdipe roi (vers 420 av. J.-C.).
– CORNEILLE, Cinna , IV, 2 (1642).
– RACINE, Bérénice IV, 4 (1670).
– HUGO, Hernani , IV, 2 (1830).
– CLAUDEL, Tête d’or (deuxième version, 1894).
2) La fin d’un mythe
– JARRY, Ubu roi , I, 1 (1896).
– MONTHERLANT, La reine morte , II, 3 (1942).
– ANOUILH, Antigone (1944).
– IONESCO, Le roi se meurt (1962).
B-5. Le souvenir autobiographique
1) Commencement
– MONTAIGNE, Essais (580).
– ROUSSEAU, Les Confessions (1782).
– VALLES, L’Enfant (1789).
– Simone DE BEAUVOIR, Mémoires d’une jeune fille rangée (1958).
– Ma rguerite YOURCENAR, Souvenirs pieux (1974).
2) Les jeux de l’enfance
– GIDE, Si le grain ne meurt (1926).
– SARTRE, Les Mots (1964).
– Nathalie SARRAUTE, Enfance (1983).
3) Les retours du passé
– ROUSSEAU, Les confessions (1782).
– CHATEAUBRIAND, Mémoires d’outre-tombe (1848-1850).
– PROUST, Du côté de chez Swann (1913).
C – Univers imaginaires
C-1. Molière : la maîtrise du dialogue
1) Maît res et Valets
– Don Juan , I, 2 (1665).
– L’Avare , I, 3 (1668).
– Le malade imaginaire , I, 5 (1673).
2) Parents et enfants
– Les Précieuses ridicules ,4 (1659).
– Don Juan , IV,4 (1665).
– L’avare , I, 4 (1668).
3) Les jeux de l’amour
– L’école des femmes, V, 4 (1662).
– Tartuffe , III, 3 (1664).
– Don Juan , II, 2 (1665).
C-2. Charles Baudelaire: un regard sur l’art
1) L’harmonie unive rselle : les correspondances
– Les Fleurs du mal (1857).
– Correspondances.
– Les phares .
– La vie harmonieuse.
– La musique.
2) Un motif symboliq ue : le navire ( Les fleurs du mal (1857).
– La chevelure.
– L’invitation au voyage.
– Le port , Petits poèmes en prose (1869).
3) Un motif idéologique : la modernité
– «Les petites vieilles », Les fleurs du mal (1857).
– «Les foules» », Petits poèmes en prose (1869).
– «Eloge du ma quillage», Le peintre de la vie moderne (1863).
C-3. Emile Zola : le langage du corps
1) Le modèle biologique
– Le roman expérimental (1880).
– Le Docteur Pascal (1893).
2) De la passion à la folie
– T hérèse Raquin (1867).
– La Curée (1872).
– La Bête humaine (1890).
Nourritures :
– Le ventre de Paris .
– L’assommoir (1877).
– Son excellence.
– Eugène Rougon (1876).
– L’odeur du peuple .
– Germinal (1885).
III-6-2. Œuvre entière ou extraits ?
Faut-il opter pour une œuvre entiè re que l’on étudiera pendant un certain
temps (un trimestre par exemple) ou pou r des extraits choisis d’une manière
éclectique dans des œu vres différentes ?
La réponse à la question dépend de l’objec tif visé :
• Si l’on fait de la lectur e suivie et dirigée, une œuvre entière s’impose.
• Si l’on travaille sur un genre littéraire (le roman, le conte, la nouvelle, l’essai…),
on aura là aussi besoin de parcour ir toute une œuvr e pour cerner les
caractéristiques de ce gen re, qui ne peuvent pas tout es apparaître dans une
seule page.
• Si l’on travaille sur des notions linguistiques, un c ourt extrait peut suffire.
• Si l’on fait de la compr éhension de l’écrit, un extrai t sera plus indiqué parce
que, d’une séance à l’autre, le type de texte ou le thème de la leçon change et il
n’est pas évident que l’on puisse trouver dans une seule œuvre toutes les
notions que l’on v eut exploiter.
Par exemple, si l’objectif de la leçon es t d’amener l’apprenant à savoir classer
des textes selon leur discours, nous pr océderons de la manière suivante quant à
la conduite de la leçon.
A- Révision du schéma de la communication
Observons le schém a ci-dessous :
Code : Langage Message
A-1. Explication du schéma
Imaginons que A communi que avec B :
On appelle A l’émetteur, B le récepteur. Le contenu de la communication
constitue le message. Celui-ci est véhiculé par un canal qui est soit oral : A et B
se parlent ; soit écrit : A et B s’écrivent.
Quand A et B se parl ent, on les nomme res pectivement locuteur et interlocuteur.
Quand A et B s’écriven t, on les nomme re spectivement auteur et lecteur.
Toute langue est un code, c’est-à-dire un ensemble or ganisé de signes et de
règles de combinaisons de ces signes communs à un groupe d’hommes.
A-2. Enoncé et énonciation
L’énoncé est un message qui n’a de sens que da ns une situation
d’énonciation. Celle-ci corre spond à une situation conc rète de communication
(Qui parle ? Quand ? Comment ? Pourquoi et de quoi ?).
A-3. Applications
¦ Application 1 : Lis cet extrait de Tintin au Tibet.
1) Retrouve dans les vignettes 1 et 2 de la bande dessinée suivante qui sont,
tour à tour, les locuteurs et les interl ocuteurs ainsi que le canal utilisé pour
véhiculer le message.
2) Comment ce canal est-il représenté ?
3) Quel autre canal est utilisé (vignette 3) ?
Réponses attendues :
1) – Vignette 1 : Locut eur : le capitaine Haddock.
Interlocut eurs : Tintin et le guide.
– Vignette 2 : Locuteur 1 : le guide.
Locuteur 2 : Tintin.
Interlocuteurs : tour à tour Tintin et le guide, et le
capitaine Haddock.
2) Vignette 2 : Cana l utilisé : la parole.
C’est la bulle qui représente la parol e, c’est-à-dire le
canal sonore.
3) Vignette 3 : L’autre canal utilisé (dans la vignette 3) est le geste qui vient
soutenir et accompagner la par ole : le guide fait un geste qui montre à quel point
le yéti est grand, ce qui lui permet d’insister sur ce qu’il dit.
¦ Application 2 : Lis le texte suivant : Le proverbe de Marcel Aymé (Edit.
Gallimard).
« Lucien n’arrive pas à faire une réda ction dont le sujet c onsiste à expliquer le
proverbe : « Rien ne sert de courir, il faut partir à point. » C’est alors que son
père s’en mêle…
– Allons, commanda monsi eur Jacotin, écris.
A moitié endormi, Lucien surs auta et prit son porte-plume.
– Ma parole, tu dormais ?
– Oh ! non, je réfléchissais, je réfléchissa is au proverbe. Mais je n’ai rien trouvé.
Le père eut un petit rire indulgent, puis son r egard devint fixe et, lentement, il
se met à dicter : – Par ce splendide après-midi d’un dimanche d’été, midi, virgule, quels sont donc
ces jolis objets verts à la forme allongée, virgule, qui frappent nos regards ? On
dirait de loin qu’ils sont munis de long s bras, mais ces bras ne sont autre chose
que des rames et les objets verts sont en réalité deux canots de course qui se
balancent mollement au gr é des flots de la Marne.
Lucien, pris d’une vag ue anxiété, osa lever la tê te et eut un regard un peu
effaré. Mais son père ne le voyait pas […] La bouche entrouverte, les yeux mi-
clos, il surveillait ces rameurs et les rasse mblait dans le cham p de sa pensée. A
tâtons, il avançait la main ve rs le porte-pl ume de son fils.
– Donne. Je vais écrire moi-même. C’est plus commode que de dicter.
Fiévreux, il se mit à écrire d’une plume abondante. Les i dées et les mots lui
venaient facilement, dans un ordre commode et pourtant exaltant, qui l’inclinait
au lyrisme. Il se sentait riche, maître d’un domaine m agnifique et fleuri. Lucien
regarda un moment, non sans un reste d’ appréhension, courir sur son cahier de
brouillon la plume inspirée et finit par s’end ormir sur la table. A onze heures, son
père le réveilla et lui tendit le cahier.
– Et maintenant, tu vas me recopier ça, pos ément. J’attends que tu aies fini pour
relire. Tâche de mettre de la ponctuation, surtout.
– Il est tard, fit observer Lucien. Je ferai peut-être mieux de me lever demain
matin de bonne heure ? – Non, non, « il faut battre le fer pendant qu’il est chaud ».
Encore un prov erbe, tiens !
M. Jacotin eut un so urire gourmand et ajouta :
– Ce proverbe-là, je ne serais pas en peine de l’expliquer non plus. Si j’avais le
temps, il ne faudrait pas me pousser beaucoup. C’est un sujet de toute beauté.
Un sujet sur lequel je me fais fort d’éc rire mes douze pages. Au moins, est-ce
que tu le comprends bien ? – Qui donc ? – Je te demande si tu comprend s le proverbe : « Il faut battre le fer pendant qu’il
est chaud. »
Lucien, accablé, faillit céder au découragement. Il se ressaisit et répondit avec
une grande douceur :
– Oui papa, je comprends bien. Mais il faut que je re copie mon devoir.
– C’est ça, recopie, dit M. Jacotin d’un ton qu i trahissait son mépris pour
certaines activités d’ un ordre subalterne.
Marcel AYME, Le Proverbe, Edit. Gallimard
1) Qui est l’émetteur de la phrase : «Allons , écris. » ?
2) Qui en est le récepteur ?
3) Quel canal utilise-t-il ? 4) Comment appelle-t-on alors l’émetteur et le récepteur ?
5) Quel autre canal, Lucien aura-t-il à utiliser ?
Réponses attendues :
1) L’émetteur de cette phras e est M. Jacotin dont on dé duit qu’il est le père de
Lucien. 2) Le récepteur est Lucien, son fils. 3) Il utilise le canal sonore.
4) On appelle alors l’émetteur le locu teur et le récepteur l’interlocuteur.
5) Lucien aura aussi à utili ser le canal écrit et il dev iendra alors l’émetteur qui
s’appelle le narrateur dans ce cas-là et son père sera le récepteur, c’est-à-dire le
lecteur.
B – Classer les différents discours
Rappel des différents critères susceptibles de permettre de classer des textes
:
? La provenance : Roman, re cueil de poésie, pièc e de théâtre mais aussi journal,
dictionnaire, etc. ? La visée, c’est-à-dire le but : donner une information, faire une description,
susciter une émotion, convaincre, démontrer, etc. (un texte p eut avoir plusieurs
visées). ? Le statut de l’ émetteur qui est :
– soit présent : le narrateur dit « je » ou « nous ».
– soit absent : le narrateur dit « il(s) ou elle(s) ».
? Les temps verbaux dominants : exempl e : présent, passé simple ou passé
composé, futur simple, etc.
? Le discours dominant qui peut être :
– poétique : sous forme de p oème ou proche d’un poème,
– narratif : sous forme de ré cit,
– descriptif : sous fo rme de description,
– rapportant des paroles, – argumentatif : avec des argum ents pour convaincre le lecteur,
– informatif : sous forme d’informations.
¦ Application 1 : Lis les textes suivants :
? Texte 1 : Une publicit é d’agence de voyage.
? Texte 2 : Une description de Balzac : un extrait d’ Eugénie Grandet.
? Texte 3 : Un extrait des Misérables de V. Hugo.
? Texte 4 : Un extrait de Poil de Carotte de J. Renard.
? Texte 5 : un poème de Paul Verlaine.
? Texte 6 : Un article du journa l «Rouen Magazine» sur le sport.
Texte1 : Une publicité d’agence de voyage
? Texte 2 : une description de BALZAC : extrait d’ Eugénie Grandet .
« Ces principes de mélancolie existent dans la physionomie d’un logis situé à
Saumur, au bout de la rue montueuse qui mène au chât eau, par le haut de la
ville. Cette rue, ma intenant peu fréquent ée, chaude en été, froide en hiver,
obscure en quelques endroits, est rema rquable par la so norité de son pavé
caillouteux, toujours propre et sec, par l’étroitesse de sa voie tortueuse, par la
paix de ses maisons qui appa rtiennent à la vieille vi lle, et que dominent les
remparts. Des habitations trois fois sé culaires y sont enc ore solides, quoique
construites en bois, et le urs divers aspects contri buent à l’originalité qui
recommande cette partie de Saumur à l’attention des antiq uaires et des artistes.
Il est difficile de passer dev ant ces maisons, sans admi rer les énormes madriers
dont les bouts sont taillés en figures bizarres et qu i couronnent d’un bas-relief le
rez-de-chaussée de la plupart d’entre elles. Ici, des pi èces de bois transversales
sont couvertes en ar doises et dessinent des lignes bleues sur le s frêles murailles
d’un logis terminé par un to it en colombage que les ans ont fait plier, dont les
bardeaux pourris ont été tor dus par l’action alternative de la pluie et du soleil. Là
se présentent des appu is de fenêtre usés, noircis, dont les délicates sculptures
se voient à peine, et qui semblent trop légers pour le pot d’argile brune d’où
s’élancent les œillets ou les rosiers d’une pauvre ouvrière. »
Eugénie Grandet , BALZAC.
…..
? Texte 3 : un extrait des Misérables de V. HUGO.
« Le 5 juin 1832, une émeute républicaine a lieu. De s barricades se dressent
dans Paris. Gavroche, fils des Thénardier, ré cupère des munitions… »
« Il rampait à plat ventre, galopait à quatre pa ttes, prenait son panier aux
dents, se tordait, gl issait, ondulait, ser pentait d’un mort à l’autre, et vidait la
giberne ou la cartouchière co mme un singe ou vre une noix.
De la barricade, dont il était encore assez près, on n’osai t lui crier de revenir, de
peur d’appeler l’at tention sur lui.
Sur un cadavre, qui était un capora l, il trouva une poire à poudre.
« Pour la soif, dit-il, en la mettant dans sa poche ».
A force d’aller en avant, il pa rvint au point où le brouillar d de la fus illade devenait
transparent ; si bien que les tirailleur s de la ligne, rangés et à l’affût derrière leur
levée de pavés, et les ti railleurs de la banlie ue, massés à l’angle de la rue, se
montrèrent soudainement quelque c hose qui remuait d ans la fumée.
Au moment où Gavroche débarrassait de ses cartouches un sergent gisant près
d’une borne, une balle frappa le cadavre. »
Les Misérables, Victor HUGO
…..
? Texte 4 : Un extrait de Poil de Carotte de J. RENARD.
– Madame Lepic : Mon petit Poil de Carotte chéri, je t’en prie, tu serais bien
mignon d’aller me chercher une livre de beurre au moulin. Cours vite, on
t’attendra pour se mettre à table. – Poil de Carott e : Non, maman.
– Madame Lepic : Pourquoi réponds-tu : non, maman ? Si, nous t’attendrons.
– Poil de Carotte : Non, mam an, je n’irai pas au moulin.
– Madame Lepic : Comment ! Tu n’iras pas au m oulin ? Que dis-tu ?
Qui te demande… Est-ce que tu rêves ?
– Poil de Carott e : Non, maman.
– Madame Lepic : Voy ons, Poil de Carotte, je n’y suis plus. Je t’ordonne d’aller
tout de suite chercher u ne livre de beurre au moulin.
– Poil de Carotte : J’ai entendu. Je n’ irai pas.
– Madame Lepic : C’es t donc moi qui rêve ? Que se passe-t-il ?
Pour la première fois de ta vie, tu refuses de m’obéir.
– Poil de Carotte : Oui, maman. – Madame Lepic : Tu refu ses d’obéir à ta mère.
– Poil de Carotte : A ma mère, oui, maman.
Poil de Carotte Jules RENARD,
(1894) Editions Ga rnier Flammarion.
…..
? Texte 5 : Un poème de Paul Verlaine.
(Ce texte a été écrit pa r Verlaine suite à un séjour en prison…)
« Le ciel est par-dessus le toit, Si bleu, si calme !
Un arbre, par-dessus le toit,
Berce sa palme.
La cloche, dans le ciel qu’on voit,
Doucement tinte, Un oiseau sur l’ar bre qu’on voit
Chante sa plainte.
Mon Dieu, mon Dieu, La vie est là,
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là
Vient de la ville.
Qu’as-tu fait, ô toi que voilà Pleurant sans cesse,
Dis, qu’as-tu fait, toi que voilà ».
De Paul Verlaine, Sagesse.
…..
? Texte 6 : Un article du journal sur le sport, extrait de « Rouen Magazine».
« La Fête du sport »
« Le 29 avril, le complexe sportif de la fac sera en ébullition. Au programme de
la Fête du sport organisée par des étudiants de DEUST, 2ème année de l’UFR
STAPS : foot en salle, volley et dé monstrations de sports qui montent.
Nous n’atteindrions sans doute pas la parité hommes-femmes cette fois,
néanmoins, cha que équipe devra comporte r au moins deux filles.
Avis aux 28 000 étudiants du campus : vous pouvez t ous participer à
l’événement, que ce soit sur le terrain ou dans les gradins. A part ir de 10 heures
du matin, plus de 300 sporti fs vont se mesurer : 32 équi pes pour le foot en salle
le matin et 120 volleyeur s l’après-midi. Les matc hes seront entrecoupés
d’exhibitions qui viendront illustrer les tendances actuel les du sport avec,
notamment, la danse hip-hop (plutôt acrobatique) et le Tae kwon do (qui pointe
de plus en plus son nez au cô té du karaté). Tout à la gl oire du sport dans la joie
et la bonne humeur. Vers 18 heures se dérouler ont les finales avec remise de
prix et de nombreux cadea ux et les étudiants finir ont de se détendre en boîte
(entrée gratuite pour les participant s). Un sport en vogue également…
La Fête du sp ort, jeudi 29 avril, dès 10 h, CSU de Mont -Saint-Aignan.
Rens. 06 68 40 19 66. »
Extrait de « Rouen Maga zine », Avril 1999.
? Inscris ces textes dans le tableau suivant en cochant la bonne réponse et en
t’aidant du paratexte :
Genre du Texte (T):T1 T2T3T4T5T6 RomanThéâtrePoèmePublicitéArticle Visée
du texte : InformerArgumenter Emouvo ir Statut de l’émetteur
:AbsentPrésent Temps principauxDominante du discours : Rapportant des
parolesPoétiqueNarrati veDescriptive Argumen tativeInformative
Réponses attendues :
Genre du Texte (T)T1T2T3T4T5T6 Roman++
Théâtre+Poème+Publicité+Article + Visée du texte : Informer+Argumenter
++Emouvoir +++ Statut de l’émetteur : Absent+++Présent+++ Temps
principauxDominante du discours : PrésentprésentImparfait. Passé
simplePrésent. FuturPrése nt.Futur.Rapportant des
paroles+Poétique+Narrative+Descrip tive +Argumentative+Informative+
? Texte 1 :
C’est un texte qui cherche à faire acheter un produit (à savoir un voyage en
Espagne). Pour convaincre ses clients, l’agence de voyage utilise des
arguments : ex. «Cet hôtel offre un bon confort pour un excellent rapport qualité
/ prix ».
C’est donc un texte argumentatif.
Les pronoms je/nous sont absents, don c l’émetteur est absent du texte.
? Texte 2 :
C’est un texte ra conté essentiellement au présent qui décrit une rue de
Samur servant de cadre au roman Eugénie Grandet de BALZAC. ex. : «Cette
rue…endroit ».
C’est donc un texte descriptif.
? Texte 3 :
Ce texte est tiré d’un roman Les Misérables de Victor Hugo. Il est raconté au
passé simple et à l’imparfait, il raconte une histoire , celle de Gavroche.
C’est donc un texte narratif.
? Texte 4 :
Dans ce texte, Mme Le pic parle à Poil de Carotte. Les deux interlocuteurs sont
présents car ils utilisent le pronom « je ». Ce dialogue se tr ouve dans une pièce
de théâtre intitulée « Poil de Carotte » de Jules Renard.
? Texte 5 :
Ce texte se présente sous forme de st rophes, elles-même s constituées de
vers qui riment. C’est donc un texte poétique . A la fin de ce dernier, le poète
s’interroge lui-même en se désignant par le pronom « tu ». Il est donc présent
dans le texte.
? Texte 6 :
Ce texte présente tout es les caractéristiques de l’ article de journal : il
comporte un titre : « La fête du sport », un ch apeau en italique, avant l’article
proprement dit. On apprend qu ’il est tiré du journal «R ouen Magazine» et il est
daté du 19 avril 1999.
Application 2 :
Classe dans ce table au les textes suivants.
Genre du texte (T)T1T2T3T4T5 RomanThéâtrePoèmeP ublicitéArticle Visée du
texte : InformerArgumenter Emouvoir Statut de l’émetteur :AbsentPrésent Temps
principauxDominante du discours : Rapportant des
parolesPoétiqueNarrati veDescriptive Argumen tativeInformative
? Texte 1 :
– Mme Smith : On ne peut compar er un malade à un bateau.
– M. Smith : Pourquoi pas ? Le bateau aussi à ses ma ladies ; d’ailleurs, ton
docteur est aussi sain qu’ un vaisseau ; voilà pourquoi encore il devait périr en
même temps que le malade comme le docteur et son bateau.
Mme Smith : Ah ! Je n’y avais pas pensé… C’est peut-être juste… et
Alors, quelle conclusion en tires-tu ?
– M. Smith : C’est que tous les docteurs ne sont que des charlatans. Et tous les
malades aussi. Seule la mari ne est honnête en Angleterre.
La Cantatrice chauve (Sc. 1) , IONESCO.
…..
? Texte 2 :
« Les nouveaux ch angements de vitesse assurent non seulement une plus
grande puissance et une pl us longue durée, mais il s augmentent encore la
souplesse.
La Grosse Galette , DOS PASSOS.
…..
? Texte 3 :
« A Colorado Sp rings, ils logèrent d’abord dans une pension de famille puis,
quand leurs meubles furent arrivés, ils emménagèrent d ans le vert bungalow de
bois qui allait être leur de meure. Il était situé à l’éc art de la route de pierres
rouges, au mi lieu d’une maigre pelouse, parmi de hauts peupliers.
Dans les herbes folles, Mary découvrit les débris d’un jeu de croquet. Tandis que
l e P è r e e t l a M è r e s e d é b a t t a i e n t avec le mobilier, que les hommes
déchargeaient de la voiture, elle s’amus a à courir au hasard , un maillet cassé à
la main […]
La Grosse Galette, DOS PASSOS.
…..
? Texte 4 :
« Le chat » « Je souhaite dans ma maison :
Une femme ayant sa raison,
Un chat passant parmi les livres,
Des amis en toute saison, Sans lesquels je ne peux pas vivre.
Le Bestiaire, Guillaume APOLLINAIRE.
…..
? Texte 5 :
« Poubelle ma belle »
« A voir l’a moncellement de dépôts, enveloppes, papiers, pochettes et autres
traces plus amicales qui s’accumulent tous les so irs dans les sa cs de plastique
noir garnissant les corbeilles des burea ux, on déduit facilement que la poubelle
constitue un accessoire majeur de la vie, professionnel le ou non. Ce récipient,
destiné aux ordures ménagères, a vu sa fonction élargie à la mesure de
l’environnement huma in, la « gestion » des déchets… constituant, avec la
protection «contre » la nat ure ou ses effets, le harna is de la vie humaine […]
Elisabeth LEBOVIC,
Extrait de « Libérat ion », jeudi 27 août 1998.
Réponses attendues :
Genre du Texte (T )T 1T 2T 3T 4T 5 Roman +Théâtre +Poème +Publicité +Article
+Visée du texte : Informer ++++ Argumenter +Statut de l’émetteur
:Absent ++++ Présent +Temps
principaux PrésentPrésentp.si mplePrésentPrésent Dominante du discours
:Rapportant Des paroles +Poétique +Narrative +Descriptive
Argumentative +Informative +Conclusion :
Les appre nants ont à savoir que chaque texte a ses parti cularités : on ne lit
pas par exemple (on n’écrit pas ) un énoncé poétique comme un énoncé de
communication ordinaire. Dans ce dernier, ce qui compte avant tout est la teneur
du message et sa bonne transmission. Ma is, dès que ce message prend une
certaine ampleur, dès qu’il porte la marque d’une subjectivité, ce lle de l’auteur,
celle des perso nnages mis en scène, il exige un tr aitement par leque l, s’éloignant
d’une simple situation d’enr egistrement, le lect eur devient produc teur du langage.
Dans cette perspective , le travail didactique consiste sans doute à ré gler avec les
apprenants la distance de l’illu sion, à construire la règle du jeu, ce qui implique
une tout autre attitude. Le texte littérair e s’inscrit ainsi da ns un univers avec
lequel il entretient des re lations qui composent son champ de ré férences propre.
La lecture des textes littéraires en cla sse de langue a ses qualit és et permet des
activités et des exercices impossibles à fa ire individuellement. Mais il est évident
que la lecture d’un texte littéraire, sa « compréhension » ai nsi que la déduction
de son « sens » s ont toujours et avant tout des actes individuels et personnels.
Ils impliquent des interprétations nécessa irement diverses (que l’on peut ou pas
partager). Sinon, on enlève au texte artistique sa cara ctéristique fondamentale :
la richesse, la multiplicité de sens, sans lesquelles on ne saurai t plus parler d’art
et de littérature.
La nécessité et l’utilité de l’exploitation didactique des textes littéraires dans
l’enseignement du français langue ét rangère sont rec onnues depuis la
formulation et la mise en pratique des principes de l’appr oche communicative.
Actuellement, personn e ne met en doute la pertinence didactique de la littérature.
Dans cette perspective, on doit toujours indiquer le s démarches pratiques de
l’exploitation des textes littéraires, à des niveaux différents, pour des publics
différents et de tendre à ce que la li ttérature française ou /et d’expression
française trouve une plac e raisonnable et réfléchi e dans chaque méthode du
français langue étrangè re. De ce fait, toutes les ac tivités proposées sur ce thème
doivent faire ressortir le caractère artistique des textes étudiés et de convaincre
ainsi les enseignants et le s apprenants qui ne croien t pas encore aux valeurs
didactiques exce ptionnelles de la littérature.
Deuxième partie
LIRE ÉCRIRE
« On rêvera, cela pour commencer…
d’un monde où lire et écrire ne s’opposeraie nt plus ;
d’un mo nde, qui, s’ouvrant des fictions qu’il absorbe,
se co nstituerait comme leur jardin. »
Jean-Noël VUARNET, Le discours impur
Editions Galilé e, 1973, p.11(1)
PRELIMINAIRES
Les enseignants de fran çais langue étrangère portent d’abord leurs efforts sur
la lecture. Ils apprennent à leurs élèves à travailler avec le livr e de l’IPN (Institut
pédagogique natio nal) et l’information écrite, fa isant de la compréhension des
textes lus leur seul véritable objectif.
Inventer une pédagogie de la compréhensio n ne va pas de soi. Véritable point
aveugle de l’acte même de li re, la compréhension est, au mieux, ce dont les
enseignants les plus vigilants vérifient ou non la présence.
Peut-elle faire l’objet d’un apprentissage ? C’est bien là que s’arrête le pouvoir de
l’enseignant. Pour passer outre, il f aut se donner les moyens d’enseigner
comment on comprend, inventer des situ ations permettant aux apprenants de
prendre conscience de leurs capacité s de comprendre, de construire une
appropriation véritable de l’é crit. Une conclusion s’impo se rapidement à tous les
enseignants et chercheurs . La pédagogie de la compréhe nsion des textes passe
inévitablement par celle de la production d’écrits.
C’est dans ce contexte que de nouvelles pédago gies de la production de textes
écrits à l’école se sont développées en prenan t appui sur deux domaines
distincts, voire disjoints : la recherche et l’innovation.
En ce qui concerne la recherche, les lin guistes ont déplacé le urs investigations
de la grammaire de la phrase à celle de s textes. Les psycholinguistes, eux, sont
passés de la compréhens ion des phénomènes syntaxi ques à celle des macro-
unités syntaxiques. Le récit, particulièrement le récit écrit, est rapidement devenu
un domaine privilégié pour ces chercheurs. Cette accumulation de
connaissances sur les structures des text es, sur leur compréhension et sur les
modalités de leur producti on est actuellement un point d’appui e ssentiel pour le
développement d’une pédagogi e de l’écrit. Inno vation aussi : nous avons vu la
naissance, le plus fréque mment hors de l’institutio n scolaire, des ateliers
d’écriture dont la finalité avouée est de permettre aux apprenants- participants,
plus souvent adultes et ado lescents qu’enfants, d’éprouv er, le temps d’un stage,
le plaisir d’écrire. Il s’agit d’un certain cas « d’éprouver » l’écr iture avec tout ce
que cela peut impliquer de vécu émotionnel et de mi se à nu de soi. Mais il peut
aussi s’agir de se confronter à l’écriture dans une conception tr ès professionnelle
du travail d’écrivain, fondée sur l’explor ation systématique des potentialités de la
langue et du texte. L’initiation à la lecture-écriture et sa pratique à tous les niveaux, tous cycles
confondus, ne doivent en aucun cas occulter la pl us importante : la lecture-
écriture du texte littéraire.
En effet la lecture-écriture est en même temps un moy en et une fin. Il ne s’agit
pas de lire pour faire, utiliser, appliquer (textes pragmatiques) ni pour s’informer
(textes scientifiques et théori ques), mais de lire, comme on dit, d’abord pour le
plaisir et surtou t pour écrire.
C’est la lecture-écriture de fiction, hist oires, poésie, pr ocessus individuel
constitutif de la culture de tout un chac un, qui contribue au développement de la
personnalité.
Nous estimons qu’apprendre à lire, ce n’est pas deveni r lecteur. C’est plutôt
posséder des compétences litt éraires qui ne peuvent être acquises qu’à partir
des textes et des auteurs. En effet, l’ex périence de ce que c’est que la lecture et
donc de l’écriture vient au x apprenants de l’interacti on avec des textes de la
littérature : des récits (narrations, cont es), des histoires qui créent un contexte,
une rencontre entre le s sensibilités de celui qui raco nte et le lecteur. Le texte
littéraire doit être perçu comme un document d’observ ation et d’analyse.
CHAPITRE I
LE TEXTE LITTERAIRE :
UN DOCUMENT D’OBSERVATION
ET D’ANALYSE
I-1. LECTURES INTERACTIVES EN CLASSE DE FLE
On parle de stra tégies de lecture pour désigner la manière dont on lit un texte.
Il est à noter qu’à un texte ne correspond pas une stratégie de lecture. On peut
fort bien commencer par une lecture – survol et s’arrê ter sur un passage qui
intéresse pour le li re avec attention.
I-1-1. La lecture studieuse
C’est une lecture attentiv e pendant laquelle le lecteur veut tirer le maximum
d’informations. Il veut mé moriser des éléments du texte. Cette lecture est souvent
faite un crayon à la main pour pouvoir prendre des note s ou souligner. Il y a
fréquemment relectures de certains passages, parfoi s oralisation du texte à
retenir (comme les petits a pprenants qui lisent leur s leçons à voix haute).
I-1-2. La lecture balayage
Elle intervient lorsq ue le lecteur veut simpleme nt prendre connaissance du
texte. Il ne désire pas connaî tre le détail, il veut capter l’essentiel. C’ est ainsi que
se présente le parcours des yeux sur la page d’un journal, sur un tract distribué
dans la rue, sur une publicité, etc.
Cette lecture est le fait d’un lecteur exer cé car elle exige de lui des stratégies
d’élimination. Le lecteur doit avoir une compétence su ffisante pour être à même d’éliminer à
grande vitesse ce qui est inut ile à sa présente lecture.
Or l’absence d’une bonn e maîtrise linguist ique et textuelle bl oque la possibilité
d’opérer cette recherche rapide des él éments « à lire/à ne pas lire ».
Une stratégie de sélection est mise en œuvre lorsqu’il y a nécessité de
recherche. Celui qui cons ulte un annuaire téléphonique, un di ctionnaire, une
grammaire, un journal de spectacles, sa it au préalable ce qu ’il veut trouver.
Il y a dans la tête du lecteur comme un modèle vide qui condui t vers l’information
recherchée : orthograp he d’un mot, horaire d’un avion, numéro de téléphone, etc.
La lecture sélective est un comportement que nous avons à chaque moment de
notre vie quotidienne : cher cher un lieu sur un plan, re garder un sommaire ou un
index.
Mais fréquence ne signifie pa s aisance car là aussi est mise en œuvre une
lecture-élimination qui interv ient jusqu’à ce que l’élém ent recherché soit trouvé.
I-1-3. La lecture – action
C’est celle qu’adopte la personne o ccupée à réaliser une ac tion à partir d’un
texte contenant des consignes, des recettes, des modes d’emploi, etc.
Cette lecture discontinue se caractérise par des mouvements de va-et-vient entre
le texte et l’objet à réalis er. C’est une procédure qui se retrouve également lors
de l’écriture d’une lettre lorsqu’on répond point par point à une autre.
I-1-4. La lecture oralisée
C’est celle qui consiste à lire un texte à voix haute. Elle peut avoir deux formes :
soit le lecteur oralise la totalité des graphèmes – c’est la lecture d’ une histoire
racontée à un enfant – soit le lecteur jette simplement un regard de temps à autre
sur son texte écrit qui f onctionne comme un aide-mé moire – c’est le cas de
l’orateur qui ne lit pas intégralement se s notes mais adopte une lecture avec «
levers d’yeux ».
Cette lecture – oralisation ne peut se faire que parc e qu’il y a anticipation des
séquences écrites. Pendant que l’orateur parle, il jette un coup d’œil sur ce qui va
suivre, il exécute ainsi simu ltanément deux activités : l’ oralisation de son texte et
la lecture partielle de se s notes qui lui permet de poursuivre ses cours ou sa
conférence par exemple. Que se passe t-il en classe de langue ?
I-2. LES DIVERSES STRATEGIES
Les stratégies qu’u tilisent les apprenants manq uent de diversité. Le plus
souvent, c’est la lecture st udieuse qui est mise en plac e, une lectur e en continu
avec arrêts sur les passages difficiles ou sur ce que l’enseignant a demandé de
repérer. Il faut donc songer à proposer des activités qui permettent de travailler
les diverses stratégies qu e nous venons de décrire.
Ainsi, nous pouvons dév elopper une lecture séle ctive en demandant aux
apprenants de trouver une in formation précise dans un texte ou de sélectionner
des informations en vue d’ une discussion ultérieure. N ous pourrons, même à des
apprenants débutants, di stribuer des journaux ou des magazines et leur
demander de les parcourir po ur dire, à l’issue de cette écriture-balayage, quel est
l’article qu’ils auraie nt choisi de lire.
Nous pouvons entraîner un groupe d’ap prenants à la prise de parole en les
ayant engagés au préa lable à faire une sélection de s données qui le ur serviront
d’aide-mémoire lors de leur exposé.
Ces différentes activités doivent mener l’ apprenant – lecteur à aborder les textes
de façon plus active, à décider lui- même de l’ordre des éléments à lire.
Mais surtout, l’ense ignant veillera à faire coïncider stratégies de lecture et type de
textes.
I-3. ENSEIGNEMENT/APPRENTISSAGE
DE LA LECTURE
Apprendre à lire, c’est choisir soi-mê me sa stratégie selon la situation où l’on
se trouve, les raisons pour lesquelle s on a entrepris cette le cture et le type de
texte que l’apprenant a sous le s yeux : la lecture d’un texte littéraire diffère
totalement de celle d’une réclame ou d’une petite annonce. L’apprenant devra
être capable de réécrire le texte qu’il vient de lire et y ado pter la stratégie
judicieuse. Si le lecteur est un constructeur de se ns, de n’importe quel sens, le rôle de
l’enseignant est de faire en sorte que l’apprenant-le cteur apprenne à prendre
conscience de l’ad équation de sa pensée avec ce lle de l’auteur, et que, pour
cela, on le sollicite de parler de sa lect ure, de mener l’analyse de l’expérience de
lecture qu’il a faite à propos de tel text e, de tel roman. Il s’agit pour chaque
apprenant de co nnaître sa manière de lire.
Dans cette perspecti ve, P. Chamberland(1) nous parle de l’objectivation en
lecture :
«L’objectivation, bien plus qu’un simple bila n d’une lecture, es t un processus
privilégié d’apprentissage qui vise à développer un ensemble de stratégies
mentales concernant la ma nière de comprendre, juger, choisir un texte ou
l’information qu’il contient. »
L’analyse des rapports entre le texte et le lecteu r est beaucoup plus utile que
toute forme de résumé ou de compte-rendu car elle permet les développements
des capacités de recul et de théorisati on indispensable à la perception du fait
littéraire.
I-4. PLACE DE LA LITTERATURE DANS L’ENSEIGNEMENT
DU F.L.E
Claudette ORIOL-BOYER (2) nous dit que, dans les manu els utilisés en France
ou dans ceux en usa ge aux Etats-Unis (le même pr oblème se pose en Algérie), «
la lecture des textes littéraires, à des fins de culture généra le, apparaît seulement
quand l’apprentissage de la la ngue, dans ses usages ordi naires, est déjà assuré.
Du collège au lycée, le texte littéraire n’est qu’un prétexte pour accroître le
lexique, la syntaxe de l’appr enant et surtout la lecture sans que la question de la
spécificité ne soit posée. »
Ce n’est donc qu’une fois à l’université que l’apprenant devra analyser les textes.
Du coup :
« … analyser un text e, c’est chercher les rapports que les différents éléments-
sons, mots, person nages, fonctions, etc. entreti ennent les uns avec les autres,
car c’est de ces rapport s que se dégage la structure fondamentale de l’œuvre et,
en fin de compte, son sens.
En somme, nous espér ons que les introduct ions, les textes et les questions qui
suivent vous aideront […] à fa ire de la lecture une activité vraiment créatrice. »(1)
Une question demeure : faut- il placer le texte à la fin, au sommet ou au hasard de
la progression méthodologique ? Jean Peytard, en 1982, le regrette en ces termes :
« On aimerait suggérer aux didacticiens qu’il c onvient de ne pas placer le texte
littéraire à la fin ou au sommet, ou au hasard de la progressi on méthodologique,
mais d’en faire, au débu t, dès l’origine du « cour s de langue », un document
d’observation et d’analyse […]
Lire le texte littéraire, c’est chercher à percevoir les mouvements mêmes du
langage là où ils sont les plus forts. »(2)
Dans nos exercices d’écriture, nous proposons souvent comme lectures
préalables – illustrations, catalyse urs – des textes dits littéraires.
I-5. LECTURE, ECRITURE ET LITTERATURE DANS LES
DIFFERENTS NIVEAUX SCOLAIRES
¦ Les premiers enseignement s de lecture-écriture :
Perspective historique
Au dix-septième siècle, en Franc e comme en Angleterre, les deux
apprentissages sont dissociés, nous dit Claudette ORIOL-BOYER:
« D’une part, l’acquisi tion de la maîtrise de la le cture est faite avant sept ans,
généralement hors l’ école, grâce aux so ins de la mère, d’une femme ou d’un
pasteur faisant office de pédagogue ; d’au tre part, ce n’est que dans la huitième
année, généralemen t à la « grammar school », qu’est mené à bien
l’apprentissage de l’écriture.
Or, c’est justement entre se pt et huit ans que des garço ns des milieux les plus
pauvres sont mis au travai l, pour apporter un reve nu complémentaire ou un
surplus de bras […] Il en résu lte que la population des lecteurs pot entiels doit être
plus large que celle des si gnataires(1), surtout en milie ux populaires, puisque les
textes confirment que la si gnature appartient à l’apprenti ssage de l’écriture […] Il
n’est, dès lors, pas possi ble de restreindre aux seuls pourcentages
d’alphabétisation, classiquemen t calculés (d’apr ès la capacité de signer), la
capacité à la lecture des sociétés tr aditionnelles.
Une telle hypothèse est-elle général isable ? Sans dout e, et d’abord de
l’Angleterre à la France. Les mêmes pa ramètres s’y retrouvent en effet : une
identique dissociation à l’in térieur de la petite éc ole des deux apprentissages
élémentaires ; une structure démographiq ue semblable qui fait qu’à sept ans un
enfant sur huit a déjà perdu son père et doit contribuer au re venu familial […]
Généralisation, ensuite des hommes au x femmes. Dans tout es les sociétés
d’ancien régime, et encore au dix-neuvième sièc le, existe en effet une
alphabétisation féminine réduite à la seule lecture, conforme à une représentation
commune qui n’est pas seul ement populaire, de ce que doit être l’éducation des
filles. L’Ecole des Femmes en donne un bon témo ignage. »(1)
Dans une « Histoire de la grammaire scolaire », André Chervel nous apporte
beaucoup de précisi ons à propos de l’écol e au XIXe siècle :
« La progression était réglée d’une manière immuable. On apprenait à lire avant
de commencer l’écriture. Et jusqu’en 18 50, c’est par la lect ure du latin qu’on
débutait, avant d’appr endre à lire en français. On terminait par la lecture de
l’écriture manuscrite […]
Du reste, l’arriération de l’enseignement primaire de ce temp s- là ne doit pas
masquer sa rela tive adaptation aux beso ins d’une société fran çaise qui n’évolue
encore que lentement. Si l’o n enseigne à lire à l’enfant da ns le psautier latin, les
nécessités de la messe y sont bien pour quelque chose. Si, pour les élèves les
plus avancés, l’un des exercices en faveur est la copie de cont rat, de sous-seings
privés, de modèles de quittance ou de re connaissance de dette s, c’est que, pour
beaucoup, l’usage de l’écriture dans leur vie d’adulte ne sortira pas de ce cercle
limité de pratiques. Si la rédaction est et re stera encore longt emps totalement
inconnue, c’est que l’écritu re enseignée aux enfants du peuple veut être une
écriture servile, une écri ture d’imitation, étroitem ent liée à des modèles. On
comprend l’importance que revêt, pour cett e pédagogie, l’exercice de la copie, ou
la pratique du « par cœur » […], appr entissage de la docil ité totale, puisque
l’enfant n’a même pas droit à l’initiative et à la réflex ion personnelle qu’exige la
dictée. Et l’élève copie in terminablement, de s pages de la Bi ble ou d’un manuel
de lecture […] »(1)
Ségolène Le Men(2), cité e par Claudette ORIOL- BOYER, a étudié les
abécédaires du XIXe siècle. Elle souligne l’échelonnem ent des apprentissages et
montre bien que l’écriture est t oujours postérieure à la lecture :
Elle signale (page 121), co mme trait général de la pédagogie traditionnelle, «
l’échelonnement des apprentissa ges, qui fait de la lectur e, de l’écriture et du
calcul des étapes successives ».
Suivant un principe analogue, la classe des peti tes écoles de Démia était
morcelée en niveaux progressifs : « Afin d’enseigner avec une méthode facile à lire aux enfants, le maître divisera
son école en classes différentes, par ra pport à la capacité des écoliers, dont les
uns sont aux lettres, les aut res aux syllabes, ou aux mo ts ou aux phrases, etc.
Ainsi il rangera :
– dans la I, ceux qui appr ennent à connaître le s lettres, que l’ on peut montrer
dans une grande table, ou dans un petit alphabet ;
– dans la II, ceux qui appr ennent à épeler, c’est-à-dire à joindre les lettres pour en
faire des syllabes ;
– dans la III, ceux qui apprennent à joindre les sylla bes pour en fair e des mots ;
– dans la VI, ceux qu i lisent le latin par phrases, ou de ponctuati on en ponctuation
;
– dans la V, ceux qui commencent à lire le français ;
– dans la VI, les plus c apables de la lecture ;
– dans la VII, ceux qui lisent les mots ;
– dans la VIII, ce ux qui écrivent.
Quand l’école est nombreuse, on peut subdiviser chac une de ces classes en
diverses bandes , à savoir :
– la première classe en quatre bandes.
La première bande sera de ceux qui apprennent le nouv el alphabet disposé par
lettres simples comme c, e, o, g, etc. – La seconde de ceux qui apprennent les lettres qu’on appelle mêlées comme a,
d, b, e, etc.
– La troisième de ceux qui apprennent les le ttres abrégées comme a, e, i, o, u.
– La quatrième de ceux qui li sent les lettres doubles co mme ss, st, ct, etc. »(1)
(pages126-127).
Comme le signale Claude tte ORIOL-BOYER(2), nous constatons, nous aussi, à
partir de ces analyses, que les pratiques d’écriture sont (plus encore que celles
de lecture) la conséquence (puis le signe) des inégalit és sociales (privilège des
hommes, privilège des riches).
Ce n’est qu’en 1833 que l’ense ignement de l’écriture es t associé à celui de la
lecture. A la fin du sièc le, et à la lumière de la grammaire historiq ue et de l’étude des
langues vulgaires, les méthode s changent.
« On reconnaît à l’enfant le droit de rédiger lui-même de s textes, dans des limites
étroites bien sûr. Car il ne s’agit pas de laisser s’égarer : ce sont les idées du
maître, préalablement dictées en classe, que l’él ève est invité à développer, dans
un ordre qu’il n’a pas à choisir lui-même […]
« Faites des phras es », dit le maître, c’est-à-di re des phrases de langue écrite,
des phrases « correctes », d’ où auront été expulsées les mille et une facilités que
se donne l’usage parlé. Orthog raphe, grammaire, « frança is national scolaire » :
voilà un ensemble qui fonctionne en symbios e. C’est à cette cr éation originale de
l’école française que tendai t l’évolution de la grammaire scolaire au cours du
XIXe siècle. »(1)
Dans leur étude sur le français national, René e BALIBAR et Dominique
LAPORTE montrent les causes de cette un iformisation linguistiqu e. Celles-ci sont
surdéterminées par « La combinaison dans la format ion sociale de trois éléments
: un marché national « intérieur », une langue commune, un Etat national
centralisé. »(1)
¦ La littérature
– Qu’en est-il du rapp ort à la littérature ?
Dans son ouvrage, « Les Fr ançais fictifs », Renée BALI BAR montre que s’il est
pratiquement inexistant d ans le primaire où l’on tr ansmet aux apprenants les
valeurs fonctionnelles du la ngage, il devient la marq ue distinctive des études
secondaires et supé rieures réservées à la bourgeoisie :
« D’un côté, les dictées, phrases sépar ées, lectures couran tes d’après Victor
HUGO, FLAUBERT, MAUPASSANT, etc ; d’un autre côté, les morceaux choisis
et œuvres complètes des auteurs du pr ogramme qui portaient les mêmes noms.
Par le jeu de l’argen t (les études second aires étaient payantes et très longues),
de la disposition des dipl ômes (le Certificat d’étu des primaires était passé à
douze ans, l’entrée en sixième des lycées se faisait à dix ans en pratique), mais
aussi par le rapport structural des cont enus d’enseignement (les connaissances
primaires, particulièrement en français, n’étaient pas de stinées à être confirmées
mais au contraire « mi ses en question » par l’enseignem ent des français
littéraires), l’enseignement du peuple n’ était pas l’ensei gnement de la
bourgeoisie. »(1) Les classes de Lettres d’abor d, puis de rhétorique, ré servées à des apprenants
privilégiés, conjuraient les dangers de l’ égalité linguistique instaurée dans le
primaire et déterminaient l’é chelle des valeurs littérair es. Le style l’emportait sur
la forme nationale et l’écriv ain représentait le verb e transcendant opposé à la
valeur opératoire de l’écriture primaire.
Du coup :
« La division linguistique inhérente à la scolarisation n’est pas, contrairement à ce
qu’on pouvait observer dans certaines formations soci ales précapitalistes, une
division entre des « langues » différentes (une « la ngue du peuple », dialecte,
patois ou argot, et une « langue de la bourge oisie » ), elle s uppose au contraire
une langue commune, e lle est la contradi ction de pratiques différentes d’une
même langue […] pratique « primaire » de la rédaction -narration, exercice de «
simple » apprentissage de la langue « correcte », exprimant la « réalité », et la
pratique « secondaire » de la dissertation-explication de textes, exercice
formellement « créateur » supposant l’utilisation et l’imitation des textes
littéraires. »(1)
Nous voyons comment la re ncontre de la littérature fonde une éduc ation destinée
à quelques privilégiés. Ces derniers, issus essentiellement de la bourgeoisie, ont
les moyens d’accéder aux classes de seconde et premiè re des lycées.
Par ailleurs, nous retien drons aussi que le parcour s de l’enseignement du
français langue ét rangère (le F.L.E.) en Algéri e se caractérise par :
– la restriction progressive du champ de la littérature ;
– la restriction des prat iques d’écriture à celles métatextuelles (résumé,
dissertation, etc.) et fonctionnelles (grammaire, conjugaison, etc.) ;
– l’inégalité face aux apprentissages.
¦ Hégémonie de la lecture
Le problème de la lecture des textes littéraires domine à la fois la critique, la
théorie et l’enseignement au XXe siècle. Lors d’un colloque sur «L’ enseignement
de la littérature » tenu à Strasbourg en 1975, Pierre KUENTZ, cité par Claudette
ORIOL-BOYER, menti onne qu’il est au cent re du colloque :
« On le voit, au ti tre de la plupart des exposés, on l’a vu dans la plupart des
discussions. » (1)
et il ajoute : « Il semble aller de soi, en effet, que la vo ie de la lecture est la voie « normale »
de la diffusion de la littérature. C’es t même là un des ra res points où se
rencontrent encore, appare mment, littéraires traditi onnels et littéraires
modernistes. Ils ne lisent pas les mêmes textes, mais ils voient, les uns et les
autres, dans la « lecture » le mode de relation « normal » à la littérature […]
Comment en serait-il autrement, dira-t-o n ? Quelle relation à la littérature
pourrait-on concevoir […] ? N’est-ce pas toujours en te rmes d’extens ion de la
lecture que se pose le pr oblème de la diffusion de la littérature. »(1)
Il semble bien que nous ay ons là, exposée et cepend ant non décodée, l’idéologie
dominante en matière d’initia tion à cette forme d’expre ssion esthétique qu’est la
littérature.
Tout l’appareil culturel et scolaire vise le développemen t de la lecture (cf. 1ère
partie) : ceux qui travaillent à une extension quantitativ e, sont amenés à
confondre initiation et publicité, les autres, ceux qui oeuvrent à son extension
qualitative, ont t endance à devenir des instance s de légitimation plus que
d’initiation. « […] Par les uns, les lecteurs sont inci tés à consommer des livres sans qualité
esthétique et, par les autres , ils sont invités à lire q uelques courts extraits de «
bons auteurs » (cf. 1ère partie de notre thèse).
Mais, ni les uns ni les autres ne favorise nt le développement de la lecture des
textes. On aboutit […] à un constat d’échec. »(2)
I-5-1. L’enseignement de la littérature au lycée
Dans l’institution scola ire algérienne, on n’apprend pas à écrire des textes
littéraires. Tout au plus, apprend-on à écrire un résumé, de petites phrases ou
une dissertation rendant compte d’une lecture lo rsque le niveau des apprenants
est bon.
L’enseignement du français dan s les lycées algériens se limite à des études de
textes, souvent réécrits en fonction d’un public hétéroc lite. L’aspect culturel,
civilisationnel ou esthétique n’ est pas étudié.
Les techniques d’expressi on, telles que le résumé, le compte-rendu ou la
synthèse, ne sont pas asse z exploitées, et pour preuv e, les résultats obtenus à
l’examen du baccalauréat, à l’épreuve dite : de l’essai ou du résumé.
L’enseignement de la littérat ure est l’objectif des appr enants de la première
année universitaire, les nouveaux bacheliers qui pr éparent une licence en langue
française.
I-5-1-1. Légitimation et sélection
Les manue ls scolaires utilisés par les appr enants algériens au collège et au
lycée présentent des extraits de textes des « grands écrivains » français et /ou
d’expression française et les accomp agnent de renseignement s sur la vie de
l’auteur et la périod e historique. «X, l’homme et l’œu vre », tel est l’intitulé d’un
grand nombre d’études qui paraissent sur des écrivain s au milieu du vingtième
siècle.
Le « Lagarde et Michard » en est le représ entant le plus connu. La fonction de
ces manuels es t double : à travers eux, s’impose une sélect ion-légitimation des «
grands écrivains du passé » et un mode de lecture des textes littéraires, une
idéologie dirions-nous.
I-5-1-2. Les manuels à cl assement chronologique
« Pratiquement, tous les manuels co mposent un palmarès de s grands écrivains
du passé », nous dit Cl audette ORIOL-BOYER. « S’ils relient l’apprenant au
patrimoine culturel de la production restre inte, déjà légitimée, c’est pour lui
inculquer une liste de noms d’auteurs dont on étudie la biographie sous prétexte
et au lieu d’expliquer l’œuvre. Les textes y sont toujours réduits à être l’expression d’un aute ur préexistant sans
que l’on s’interroge su r les opérations d’écri ture qui ont servi de médiation.»(1)
I-5-1-3. Les manuels thématiques
Une série de manuels t hématiques répond « à un dé sir d’aborder les textes
autrement que dans la perspe ctive intimidante de l’hi stoire littéraire. »(2)
Lire un texte, ce n’est pas apprendre à connaître de spécifiques f onctionnements
d’écriture mais le réel dont il est cens é être la « représentation-reproduction.
« La littérature peut apparaître ains i comme l’art de trans poser l’expérience
quotidienne du temps, de l’es pace et des relations humaines ; e lle favorise donc
une connaissance plus profonde, poétique de la réalité. »(3)
I-5-1-4. Les textes contemporains
Les textes contemporains sont pratiquem ent absents.
Quel est donc le so rt, dans l’école, des textes qu i appartiennent à la production
restreinte contemporaine ? Le cas du Nouveau Roman es t à cet égard exemplaire.
Du coup :
« […] il faut attendre l’année 1970 pour qu’en France, les textes aient droit à une
place quantitativement im portante dans les manuels (c’est-à-d ire 16 ans après
leur prise en compte par la critique […] L’analyse du Nouv eau Roman dans les
manuels scolaires mo ntre cependant qu’à une exc eption près(1) ces manuels
imposent, en toute violence, leurs catégories (expressives et représentatives), à
textes écrits justement pour en dénoncer les limites et inviter à se pencher sur le
travail de l’éc rivain. »(2)
I-5-2. De la lecture à l’écr iture : des alphabétisations
hiérarchisées
I-5-2-1. La première alphabétisation
L’élève apprend à lire et à écrire en même temps. Ecrire, c’ est reconnaître des
formes, savoir saisir et donner du sens à un texte, découvrir, organiser et
interpréter la significati on de ce qui est écrit.
I-5-2-2. La deuxième alphabétisati on : «l’écriture expression-
représentation »
Après la première alphabétisation, quand l’étape du B. A.-BA est franchie,
l’apprenant s’exerce à lire et à écrire de s textes informatifs : il apprend les codes
du langage « correct », le respect de la syntaxe et de l’orthographe et des
logiques du réel.
Du coup :
« La fonction essentielle de cet apprentissage est d’intégratio n et de promotion
sociale. Admis donc comme i ndispensable à tous, il es t dispensé dans des cycles
de formation permanente (tec hniques d’expressions écrite et orale) destinés aux
apprenants adultes qui ne l’ont pas assez maîtrisé lors de leur scolarité. »(1)
Paraphrasant Claudette ORIO L-BOYER(1), nous dirons que les réflexes de
lecture mis en place relèvent de deux ax iomes : savoir lire c’est apprendre à
échanger le texte contre du sens (donc à le résumer), savoir mieux lire c’est
savoir lire plus vite. Sans aucun doute, cet apprentissage est nécessaire : le sujet
social peut se construire grâce à ce t apprentissage (il ap prend à communiquer
selon les codes).
L’apprenant peut dépoui ller rapidement les textes info rmatifs et repérer très vite
l’information, la page où se trouve l’information recher chée. Il déc ouvre comment
conformer le langage aux l ogiques du référent (du vrai ou du vraisemblable).
«Les valeurs (les marques de la compéten ce ainsi acquise) sont : vitesse de
décodage, degré d’exactitude de la reprodu ction du sens (résumé) ou du réel de
référence (compte-rendu, rapport, récit, biographie, description, portrait).
Un premier réflexe se met en place : lire lentement est défendu. Signe d’une
incompétence, la lenteur lect orale entraîne la recherche d’un coupable : s’il n’a
pas fait la preuve de son habileté, ce sera le lecteur, mais, s ’il a déjà donné cette
preuve, on accusera le scripteur.
Un deuxième réflexe s’instal le : celui d’une lecture part ielle, autrement dit d’une
non-lecture… (En effet, apprendre à lire vite, c’est apprendre à construi re le sens à partir de
quelques éléments prélev és sur la page en fonc tion de stratégies qui
s’enseignent). »(1)
Le signifiant est donc occu lté, la matière écrite, au profit des signifiés :
« L’on sait maintenant avec un risque d’erreur accept able, que ce que construit
un individu quand il lit ou éc oute un énoncé , ce n’est pas une re présentation de la
forme linguistique de cet é noncé, mais une représenta tion de ce qui est dit par
cet énoncé […] La première démonstration de ce phé nomène a été fournie par
Bransford et Franks (1971) […] Le résultat le plus intéressant de cette expérience
réside dans le fait que les sujets déclarent avoir déjà vu des phrases qui font la
synthèse de plusieur s idées alors qu’elles ne leur ont jamais été présentées ;
qu’ils les reconnaissent pl us souvent que des phrases qui leur ont effectivement
été présentées et que ces jugements sont d’autant plus nombreux que la phrase
synthétise un plus grand nombre de phrases antérieur ement présentées. »(1)
Cette « promotion » du rôle reproducteur de l’écriture est de masquer le potentiel
producteur de la matière signifi ante que d’autres pratique s de lecture et d’écriture
permettent de comprendr e et d’exploiter.
Nous pensons, bien en tendu, aux textes littéraires dont la lecture requiert la
connaissance d’autres modal ités et d’autres valeurs, contradictoires ou
complémentaires par ra pport à celles qui concernent le s textes informatifs. Une «
troisième alphabétisation » permet d’aborder le s textes littéraires.
I-5-2-3. La troisième alphabéti sation ou la lecture des textes
littéraires
La lecture des textes littéraires es t enseignée aux a pprenants privilégiés, dans
les lycées privés par exem ple : ces apprenants privilégi és qui, au début du siècle,
auraient eu droit à la rhétorique.
Certains professeurs affirment que les apprenants de s milieux socio-
économiquement défavorisés n’ ont et n’auront que fair e des textes littéraires
puisqu’ils n’ont même pas réussi à apprendre à écrire correctement.
Les enseignants qui osent sout enir qu’il faut en seigner la littérature à tous les
apprenants, quels que soient leurs nive aux, font alors figure d’intellectuels qui
cherchent à imposer une cult ure de classe sans que ce la soit justifié par un
quelconque besoin : ce qu i est une position juste et logique si enseigner la
littérature se limite, comme c’ est encore trop souv ent le cas, à faire lire les textes
littéraires. Car l’utilité de cet enseignement est bi en difficile à construire.
Leur utilité n’est admise que par ceux qu i sont appelés à poursuivre des études
supérieures en littérature fran çaise : en ce cas-là, la lecture est effectuée par un
rite de passage mais on ne s’ y installe pas au-delà ou par ceux qui, adultes, ont
accès à ces couches intellectuelles où la culture capitalisée représente un
potentiel de profits c oncrets ou symboliques.
« Un des biais liés à la po sition de lecteur peut consis ter à omettre la question
de savoir pourquoi on lit, s’ il va de soi de lire, s’il exis te un besoin de lecture, et
nous devons poser la question des conditi ons dans lesquelles se produit ce
besoin […] Il est probable qu’on lit quand on a un ma rché sur lequel on peut
placer des discours conc ernant des lectures.
Si cette hypothèse peut surprendre, voire choqu er, c’est que nous sommes
précisément des gens qui ont toujours sous la main un marché, des élèves, des
collègues, des amis, des conjoints, etc ., à qui on peut parler de lecture.
On finit par oublier que d ans beaucoup de milieux, on ne peut pas parler de
lectures sans avoir l’a ir prétentieux. »(1)
Cela dénote, sans doute, que les ense ignants de lettres et /ou de langue, qui
avaient sous la main ce ma rché où placer leur discours, ne se sont pas demandé
à quoi pouvait bien servir la lecture de ces textes.
Et même s’ils se sont posé la question, n’étant pas écrivains, ils ne savent
même pas que lire sert avant tout d’écrire.
Par ailleurs, même dan s le cursus universitaire li ttéraire, rien ne les oblige à
produire eux-mêmes des textes littéraires.
I-5-3. L’enseignement de la littérature à l’université
I-5-3-1. La licence de français à l’U niversité algérienne : les
siècles et les genres
Elle se prépare en quatre années d’étude.
– La première a nnée comporte les modules suivants : les pratiques
systématiques de la langue, les techni ques d’expression écrite et orale,
l’introduction à la linguistiq ue, Texte et histoire (1), étude d’un aute ur français,
lecture critique, langue et littératures arabes.
– La deuxième année comporte sept mo dules : La littérat ure d’expression
française du Maghreb et du tiers-mon de, la phonétique, la phonologie, la
lexicologie et la sémantique, la syntaxe, Texte et histoire (2), lecture critique (2),
langue et littératures arabes. – En troisième année, les étudiants ont affaire aux modules suivants : littérature
française contemporaine et th éâtre, sémiologie 1 et 2, linguistique contrastive et
introduction aux langues de spécialités, texte et histoire (3), introduction à la
psycho et sociolinguistique, la psychologie de l’enfant et de l’adolescent (1) et (2)
et la langue et li ttératures arabes.
– En quatrième année, enfin , l’étudiant se mesure aux modules suivants :
systèmes grammaticaux, la didactique des langue vivantes étrangères, la théorie
de la littérature, les systèmes grammati caux, la psychopédagogie, initiation à la
littérature comparée, didact ique des textes littéraires. Arrivé en quatrième année,
l’étudiant a le choi x entre la présentatio n d’un mémoire de fin d’études (une
initiation à la recherche) et un st age pédagogique intern e… Chacun de ces
enseignements est i ndépendant des autres. Aucune ar ticulation n’est élaborée
entre eux. Le programme de littérature es t conçu pour que tous les siècles soient traités et
certains genres abordés.
Ainsi trouve-t-on par ex emple des travaux dirigé s sur tel ou tel écrivain
(l’homme et l’œuvre) et des cours magistraux qui traitent aussi bien des
mouvements littéraires que de l’év olution d’un genre dans le temps.
Mais, faute d’une théorie du texte artistique, l’histoire li ttéraire se réduit souvent à
un catalogue de noms ou de thèmes privilégiés.
Par contre, on ne rencontre aucun module de méthodologie.
Du coup : « Qua nd nous abordons le problème de l’enseignement, nous devons
d’abord en référer aux contenus d’enseig nement (ou currucula), aux objectifs à
atteindre, au public ciblé (dont le profil d’entrée est établi, et le profil de sortie,
projeté dans une formation diplômante), au potentiel humain prenant en charge
cet enseignement. No us avons constaté, par ailleur s, et cela est vrai pour
beaucoup de filières , que l’étudiant di plômé n’est pas prépa ré à affronter le
monde du travail, n’est pas ap te à exercer une profession.
Cette anomalie, sig ne du dysfonctionnemen t entre un ensei gnement dispensé,
validé par un diplôme, et les offres du marché a été le point de départ de
réflexions, de concertati ons, de constats qui remett ent en cause beaucoup de
paramètres de l’institution universitaire.
Pourquoi ce dysf onctionnement ?
Pourquoi une anoma lie de ce genre ?
La réponse peut être ob tenue dans la mise en rapport des contenus
d’enseignement qui n’ont pas changé : d’un enseignement bilingue, dispensé en
arabe et en français, ce public est passé à un enseignement monolingue,
enseigné entièrement en arabe.
Ce public, arrivé au département de français, rencon tre de sérieuses difficultés,
notamment dans la maîtrise et l’ utilisation du code écrit. »(1)
Pourtant, le français, dans bien des cas, p our ne pas dire tous les cas, reste la
langue qui réunit les chercheurs lors des colloques et sé minaires nationaux et
internationaux.
I-5-3-2. La formation des enseignants
La didactique de la discipline n’est pas prévue dans le curs us universitaire de
la graduation. Elle ne fait l’objet d’ aucune épreuve dans les concours de recrutement
d’enseignants. Pour la plupart des enseignants un iversitaires, former des
enseignants, c’est donc les préparer à la dissertation de la littérature française et
à la dissertation de la littérature comparée.
Par conséquent, la di dactique comme l’é criture des textes litt éraires et artistiques
n’ont pas de raison de fi gurer au menu de la format ion d’un futur enseignant.
Quant aux recherches en didactiques, el les sont généralement regardées avec
un certain mépris : « On pense souvent, en e ffet, que le didacticien es t quelqu’un qui n’a pas les
capacités de faire des rech erches théoriques ! »(1)
I-5-3-3. Recherche littéraire et ensei gnement de la
littérature
L’enseignement de la li ttérature est, à l’université, en relation très étroite avec
les recherches menées par les enseignants. Ce lles-ci ont joué et doivent encore
jouer un rôle dans l’évolution des contenus.
I-6. LA LITTERATURE DANS LES APPAREILS CULTURELS
I-6-1. Initiation et publicité
Comme pour la publicité de n’importe quel produit, l’important n’est pas de
former le consommateur à uti liser le produit mais bien plutôt de créer chez lui le
désir d’acheter en jouant sur ses désirs narcissiques, nous dit Claudette ORIOL-
BOYER(2).
« […] Ainsi l’on promut la co nfusion des catégories de l’av oir et de l’être selon la
rhétorique bien connue : « si vous avez tel produit vous serez comme l’être
enviable qui lui sert de relais.» Un seul désir, alors, chez le spectateur : non pas fa ire mais être comme cet
auteur valorisé par sa prés ence sur le petit écran.
Des pratiques fétichistes en découl ent : fétichisme de l’auteur dans les
cérémonies de signature organisées lors de la sortie d’un livre.
Dédicacé, l’ouvrage contient , même si ce n’est qu’il lusion, la trace d’une
familiarité auteur-lecteur ou, tout au mo ins, la possibilité de rêver une proximité
que le lecteur n’a aucunement le moyen de construire autrement.
Fétichisme de l’objet réifié dans des co llections qui imposent l’achat régulier
d’ouvrages tous identiquemen t beaux, à ranger dans une bi bliothèque achetée au
mètre. Les émissions qui présentent des livres tentent de créer l’impression d’une
familiarité avec l’écrivain alors valorisé en tant que personne et non en tant que
bon technicien du texte. Au lieu de l’inciter à expl iquer les problèmes d’écritu re posés et/ou résolus par
son livre, on l’invite à en dévoiler le sens ou à en fournir un résumé.
Résumé et sens, valeurs d’échange du texte, sont délivrés aux spectateurs-
auditeurs en lieu et place de la lecture précise.
Dans le cours du jeu infini du relais, l’intérieur du livre (le texte, sa disposition sur
la page, son mot à mot) sera remplacé par l’image de sa couverture, dans
laquelle le visage de l’auteu r apparaît, enchâssé, confront ant l’illusion que le texte
c’est l’homme.(1) Quelques instants encore et l’auteur sera identifié à ses personnages tandis que,
par là même, le spectate ur est engagé à pratiquer la lecture aliénante de
l’identification. »(2)
I-6-2. Lire pour écrire, écrire pour lire
La pédagogie de l’ écrit n’est pas pensable sans la prise en compte des
transformations qui ont affecté la pédagogie de la lecture.
L’idée qu’on apprend à lire en lisant, la disparition de l’opinion selon laquelle il
faudrait installer des « prérequis » et pr oposer des apprentissa ges préalables, la
réduction du rôle du déchiff rement intégral dans la compréhension du texte ont
conduit certains enseigna nts à abandonner les « méthodes de lectur e » au profit
de « vrais livres ».
Ceux-là ont le triple avant age de signaler l’objet-livre (couverture, typographie,
illustrations), d’offrir des fictions cohérentes mettant en appétit les lecteurs et
rédigées dans une langue qui a déjà la complexité de s vrais écrits.
La pédagogie moderne de la lecture met l’action su r la construction d’un «
horizon d’attente », sur une précompréhension de l’histo ire qui s’appuie sur les
possibles narratifs (en fonction des type s de héros et d’aventures), sur des
prédictions thématiques et sur des anticipations syntaxiques.
La lecture devient formul e d’hypothèses qu’il faut bi en entendu vérifier par
l’observation du texte, ce qui rend indi spensable la poursuite de travaux plus
techniques ayant pour but de permettre et de consolid er les repérages d’indices
(rapport sons-graphies, ex ercices de contrôle de l’a cquisition lexicale…).
Ces supports et ces appro ches donnent aux apprena nts la notion de texte,
fondamentale pour l’entrée dans l’écrit, sans attendre qu’ils aient la maîtrise
technique des o pérations de la lectur e et de l’écriture.
Inversement, ces nouvelles attitudes de lecture sont mieux développées si elles
s’étayent sur des prat iques précoces de production d’écrits.
Ayant à « penser » leur texte, les apprenants prennent con science de
l’enchaînement des idées, de l’organisa tion interne des énoncés, des contraintes
propres à l’ouverture des réci ts et à leur conclusion.
Rencontrant des difficultés pou r conduire leur texte, ils réclament de voir dans les
livres les solutions choisies par les aut eurs, ce qui apporte une motivation très
forte à la lecture.
Quand ils doivent trouver des noms pour leurs personnage s, ils s’aperç oivent que
l’attribution d’un nom par exem ple n’est pas indifférente et ils sont désormais plus
curieux de l’onomastique pe rsonnelle des écrivains.
Du coup :
« L’écriture d’un texte est un projet complexe , qu’il s’agisse d’ un court récit ou
d’une œuvre longue.
L’observation des brouillons d’écrivains montre que certains d’entre eux(1)
écrivent leurs romans au fi l de la plume, réalisant t out de suite une version
rédigée, alors que d’ autres(2) commencent par faire de s listes de noms (d’objets,
de lieux…) ou des schémas d’ensemble. Pour les premie rs, on parle d’écriture à
processus, pour les seconds, d’écriture à programme. »(1)
Le passage à la rédaction développe de nombreuses fo rmes d’attention portées
au code écrit :
Les apprenants sont pl us vigilants p our tenir compte dans la lecture des marques
typographiques du di scours rapporté (guillemets, tire ts) quand ils les ont utilisées
dans l’écriture et il s apprennent à ne pa s confondre narration et dialogue, à ne
pas mêler les propos de di vers interlocuteurs.
Les marques d’accord, les désinences verbal es retiennent leur attention lorsqu’ils
doivent en respecter la graphie.
Dans leurs exercice s d’écriture, les en seignants proposen t éventuellement
comme lectures préalables – illustrati ons, des textes di ts littéraires.
Cette pratique n’est pas co mmune. Elle s’oppose à d’ autres pratiques, plus
répandues en Algérie d epuis quelques a nnées, qui privilégient les écrits dits «
fonctionnels » – textes « utiles », informatifs ou prescriptifs.
Même s’ils n’affirment pas vo uloir écarter la littérature, les « promoteurs » de ces
nouveaux matériels de lecture, sur les quels les apprenants so nt invités à faire
leur apprentissage, sont tellement prisonniers des notions re strictives
d’information, de communication ou de sa voir-faire, qu’ils s ont amenés à traiter
les textes littéraires de la mê me façon que les autres textes.
A preuve, dans certaines fi ches de lecture, les questions cont raignantes plus
soucieuses de contrôler une lecture littérale que d’ouvri r à une réflexion sur la
mise en langage, sur l’interprétation déchiffrement / compréhension du référent
qui en découlerait.
Nous voudrions nous situer, dans le cadre de notre recherche, dans une
perspective radicalement différente. Nous affirmons que la li ttérature est indispensabl e pour une co mpréhension
approfondie des mécanismes langagiers, ce qui est l’essentiel pour susciter
l’envie et la possibilité d‘écrire.
Sans refuser les autres textes, la littérat ure devrait constituer pour l’enseignant
l’essentiel de ses supports.
La littérature en effet atti re l’attention sur la factur e du texte ainsi que le dit
Jakobson lorsqu’il défini t la fonction poétique :
« La visée du mess age en tant que te l, l’accent mis sur le message pour son
propre compte est ce qui cara ctérise la fonction poétiq ue du langage […] Cette
fonction, qui met en éviden ce le côté palpabl e des signes, approfondit par là
même la dichotomie fondamentale des signe s et des objets.»(1)
« Celle-ci « décolle le mot de la chose » et « le mot est re ssenti comme mot et
non comme simple s ubstitut de l’objet nommé ni comme explosion d’émotion.
»(2) L’écriture littéraire qui favori se ainsi la réflexio n sur le langage va de pair avec les
progrès linguistiques de l’apprenant qui, selon Ja kobson, « dépe ndent de sa
capacité à développer un lang age, c’est-à-dire à comparer des si gnes verbaux et
à parler du langage. »
Nous n’entendons pas reprendr e l’argument connu qui a l égitimé dans les lycées
l’enseignement traditio nnel de la littérature : la connaissance des grands textes
classiques permet à l’apprenant de s’ imprégner d’une l angue de qualité.
Aujourd’hui, des avis plus mesurés mettent en cause moins les textes littéraires
que certaines façons de les aborder.
Les arguments qui nous semblent le mi eux convenir sont les suivants : «
puissance» des fictions ; in térêt porté autant aux choses qu’aux mots ; possibilité
de se donner une inte rprétation personnelle.
Il est impératif de souli gner l’importance, à plus d’un titre, de la fiction.
La littérature à laque lle nous penson s, c’est en premier lie u celle écrite par des
compositeurs d’intrigue. Les apprenants sont fascinés par l’histoire, surtout si elle est bien structurée,
avec une progression thématique, des él éments de répétition et de système
(personnages, situati ons, formules), une conclusion forte.
Les contes, mais aussi tous les récits qui relèvent de l’ar t de raconter une
histoire, sans trop s’attarder ni dans la description ni dans l’explication, encore
moins dans la « mora le », contiennent de plus de s savoirs pratiques (détails
artisanaux, habiletés di verses dont celles qui consistent à user de pièges ou de
stratagèmes, comme dans « Le roman de Renart »). Ces fictions, même si elles n’appartienne nt pas à notre époqu e, même si elles
contiennent du n on-dit ou des allusions « ob scures » pour l’apprenant,
passionnent tous les lecteur s, quel que so it leur âge.
Paul RICOEUR, dans son livr e « Temps et Récit » (Ed. du Seuil), insiste sur les
compétences a priori que requiert la compréhension du réci t : précompréhension
du « monde de l’action » humaine ; compétence symbol ique (qui suppose un
enracinement dans des traditions cultur elles, la connaissance des codes de
valeurs) ; compétence « temporelle» (l a fiction figure toujours un système
temporel).
On pourrait ajouter que c’ est la lecture ou l’auditi on de ces récits qui va
consolider ces compétences indispensab les pour structurer les attentes du
lecteur, ses capacités de pr édiction, pour reconnaître le s genres et les tons, les
attitudes du narrateur, etc., en un mot, indispensables pour savoir lire(1).
C’est que, comme le déclarait Roland Barthes dans un entretien donné à la revue
Pratiques (n° 5, février 1975), la littérature cont ient tous les savoirs.
Les contenus univers els, les grands mythes fonda teurs, les grande s oppositions
archétypales, tous les affects et les désirs sont, dans les textes littéraires, à côté
des coutumes, des faits et des objets localisés dans le temps et l’espace.
Mais la question des co ntenus ne peut être traitée en dehors des langages qui
les prennent en charge. C’est le second argument que n ous avançons en faveur de la littérature : le texte
littéraire conduit à s’inté resser non seulement aux chos es, mais aux mots, aux
locutions, aux figures de discours et mê me aux usages non litté raires du langage.
Si l’on veut que les apprenants manifestent de la curiosité pour l’ écrit, leur
préférence pour une tournure plutôt qu’ une autre, qu’ils se posent des questions
relatives à la façon de co mmencer une histoire ou de la conclure, au titre, aux
techniques de dialogue s, etc., les fictions ont leur secret, contrairement à tant
d’écrits qui n’en ont pas, mais leurs supports matéri els ne doivent pas être
cachés.
La littérature n’est certes pas la seule à privilégier les signi fiants (linguistiques,
graphiques et culturels) ma is, à la différence des textes prescriptifs ou
publicitaires par exemple, elle n’est pas orientée ve rs la saisie d’une seule
signification.
Beaucoup de théoriciens admette nt que c’est là peut-être le seul critère distinctif
de ce qu’on nomme « littérature ». Dans la littéraire et le soci al (Flammarion, 1970), Robert Escarpit écrivait : « Tout
texte informationnel peut être l’objet d’un contresens, mais alor s l’information est
détruite. Il n’y a que sur une œuvre li ttéraire qu’on puisse greffer des sens
nouveaux sans détruire so n identité […] Est littérai re une œuvre qui possède une
« aptitude à la trahison…» (page 28).
Le texte littéraire pourra toujours être l’o bjet d’une reprise de sens, en fonction
d’une étape dans la vie d’ un lecteur ou du rapport qui va s’établir avec d’autres
textes. Il nous paraît do nc essentiel de ne pas di riger une lecture par des
commentaires qui en arrêtent le sens.
I-6-4. La lecture-écriture littéraire
C’est la lecture-écriture qui est en même temps un moyen et une fin. Il ne s’agit
pas de lire (et d’écrire) pour faire, utilis er, appliquer (textes pr agmatiques), ni pour
s’informer (ou informer), s’instruire (texte s scientifiques et t héoriques), mais de
lire (et d’écrire), comme on dit, pour le plaisir.
C’est la lecture de fiction (h istoires, poésie), processus individuel constitutif de la
culture de chaque apprenant, et qui contribue au développement de sa
personnalité.
I-6-5. La pédagogie de la lecture-écriture littéraire
Existe t-il une pédagogie de la lecture-écriture littéraire ?
Les écrivains et artistes ne fixent pas d’emblée un but pédagogique et ne
prétendent pas « offrir un enseignement ». Ils offr ent tout simplement aux
lecteurs la totalité de ce qu’ils ressentent. Si l’appre nant se forme au contact
d’œuvres d’imagination, c’ est parce que ces dernières ont la particularité de
réunir en même temps divers ité de langages, de niveaux d’ intérêt, de points de
vue qui seraient contradictoires dans un autre discours.
Tout en lisant, les apprenant s se familiarisent ainsi avec le monde de la littérature
(déroulements variés d’intrigues différentes, ca tégories de personnages encore
inconnus), affinant leur in tuition quant à l’i ssue du récit, a pprenant peu à peu à
remplir les sous-entendus d’un texte, à se situer malgré les ruptures
chronologiques, à assimiler les règles d’un genre.
Les « bons écrivains » sont ceux qui sav ent suggérer qu’ « il y a des histoires à
l’intérieur de l’histoire », et aussi qu’un texte fait appel à la connaissance d’autres
textes. On comprend donc que la péda gogie de la lecture-écriture concerne tout
apprenant, pas seulement à l’âge de l’apprentissage mais tout au long de son
existence.
Goethe disait : « On appren d à lire toute sa vie».(1)
I-6-6. L’aptitude littéraire
L’institution scolaire peut-elle crée r les conditions favora bles à la lecture-
écriture du texte littéraire ?
Il faut d’abord donner accè s au(x) livre(s).Ceux-ci do ivent entrer dans l’école,
mais ils doivent aussi entrer dans la classe d’une autre manière : il faudrait s’en
procurer, en présenter , en proposer à la discussion, à l’admiration, au choix. Il
faut en parler, mener des actions autour des livres.
Les apprenants ont à savoir qu’on ne lit pas un énonc é de fiction comme un
énoncé de communica tion ordinaire (une informat ion par exemple). Dans ce
dernier, ce qui compte le plus es t la teneur du message et sa bonne
transmission. « Mais dès que le message prend une certaine ampleur, dès qu’il
porte la marque d’une subj ectivité, celle de l’auteur, celle de s personnages mis
en scène, il exige un traitement par leque l, s’éloignant d’une simple situation
d’enregistrement, le lecteur devient producteur de langag e… De ce point de vue,
le travail didactique consiste sans doute à régl er avec les apprenan ts la distance
à l’illusion, à construire la règle du jeu.(1)»
Tout cela impliq ue une tout autre attitude chez l’enseignant, pour commencer,
vis-à-vis de la perception du texte. Philippe Hamon parle de « communication
différée » car décontextualis ée par rapport à la vie quo tidienne par exemple, et
donc dotée d’une certai ne ambiguïté, sinon d’un her métisme. Les textes
proposés par les enseignant s ne doivent pas ébranler une habitude, un mode de
lecture et sa restitution en classe. C’es t donc un bien mauv ais calcul que de
demander aux apprenants de rendre compte du vrai et du faux(2) autant que du
nombre d’informations « délivré » par un texte de fiction : l’i dée qui préside à de
telles pratiques est de vise r l’objectivité en lecture. Elle consiste en réalité à
supprimer l’effet du livre dirions-nous : la compréhension générale d’un texte
n’est pas l’addition de la comp réhension de chaque phrase , mais la capacité de
liaison de l’ensemble. La lecture de reconnaissance fait accéder au stade du plaisir esthétique. Le texte
littéraire s’inscrit dans un un ivers de livres avec lesquels il entretient des relations
qui composent son champ de références propre.
L’aptitude littéraire se construit dans une interférence : d’une part, on lit toujours
avec ses souvenirs que chaque nouveau text e déplace un p eu pour créer
d’autres, d’autre part, ch aque texte renvoie lui-mê me à d’autres textes.
« La littérature, c’est la le cture de la lecture. »(1)
On ne lit pas, on n’écrit pa s, parce qu’on est dans une institution scolaire, ou tant
qu’on est dans cette institut ion, mais pour se trouver et se connaître soi-même,
pour découvrir l’inconnu : d’ autres existences d’autres pensées, pour découvrir
son écriture.
• L'écriture littéraire favorise la réflexion sur le langage
« JAKOBSON affirme que « les progrès li nguistiques de l'enfa nt dépendent de sa
capacité à développer un méta langage, c'est-à-dire de comparer des signes verbaux
et de parler du langage. Il nous suffit donc de montrer le lien entre l'écriture arti stique et l'exercice de la
fonction métalinguistique pour me ttre en évidence les vertus didactiques de l'écriture
littéraire.
D'ailleurs, un étranger qui se trouve souvent fa ce à des mots déco llés des choses, a
l'habitude de cette position de décrypteur qui l'obl ige à déduire le code à partir de ce
qu'il sait déjà, en effectua nt des rapprochements ».
Il est ainsi « naturelle ment » apte à lire des textes li ttéraires qui, pour que leur code
spécifique soit comp ris, réclament, selon Jakobson , « une attitude de cryptanalyste
». Jakobson attribue en effe t ce nom au « linguiste qui aborde une langue totalement
inconnue ». (1)
Voici ce qu'il en dit : « Le destinataire d'un message codé est suppo sé en possession du code et, par son
intermédiaire, il interprète le mess age. A la différence de ce décodeur, le
cryptanalyste tombe en possession d'un me ssage sans avoir au cune connaissance
antérieure du code sous-jacent ; ce n'est que par d'habile s manipulations du
message qu'il arrive à déch iffrer le code […] Il essa ie de déduire le code du
message(2). »
Le lecteur de textes littéraires, tout co mme l'étranger devant un texte en langue
étrangère, doit adopte r une telle méthode hypothético-déductive et observer le
signifiant dans toutes ses composantes.
• La pratique artistique améliore la communication
« En effet, le texte littéraire est une va riation langagière unique. Pour chaque texte,
un code spécifique est à découvrir. Et celui qui écrit un tel text e apprend sans cesse
à décrypter les codes qu'il applique sans en être conscient. Il apprend ainsi à
découvrir l'autre en lui et à accepter plus tard toutes les différences avec les autres.
Au contact d'une telle pratique, l'enfant prend l' habitude de chercher la norme qui
régit les paroles de l'autre et d'accepter co mme normales les différences
langagières, accroissant ainsi ses possibilités communicati onnelles.
Si bien qu'on peut affirmer que la pratique du texte artist ique est ce qui permet le
mieux d'accepter le l angage de l'autre dans sa différence »(1).
• Le texte littéraire est un laboratoire expérimental
« Le texte littéraire, lorsqu'il est fi ctionnel, est le lieu d'une liberté, entendue comme
le droit d'expérimenter toutes les combinai sons que le réel n' a pas permis d'opérer
et aussi toutes les manipula tions langagières q ue l'usage ordinaire n'exerce que très
rarement. Par là même, il permet de s'appr ivoiser progressivement avec le langage
dans toutes ses dimensions »(1).
• Le texte poétique apprend l'art de composer
« S'opposant à l'automatisation de la pa role et du souffle dans ses usages
ordinaires, le texte artistique impo se une distribution non aléatoire des
ressemblances et donc un intense travail d'architecture lié à la mise en place de
parallélismes. C'est grâce à cette recherch e systématique de stru ctures que l'élève
développera sa capacité à construire une dissertation, un commentaire composé ou
une argumentation prenant appui su r la langue mise en jeu »(2).
• La pratique artistique permet l'humour
« Mais il y a plus encore : au cours d'une telle pratique, il découvre que l'on peut
vouloir apprendre une norme afin de la transgresse r selon son bon plaisir, au
service de l'humour et de la connivence. Cet apprentissage de la complicité avec
l'autre est certainement, enfin, un des plus gra nds bénéfices de l' usage artistique du
langage »(1).
I-7. ECRITS LITTERAIRES ET NON LITTERAIRES
Dans les lectures de la cl asse, la littérature tient la plus grande pl ace, qu’elle
soit très contemporaine ( Les Belles Histoires, J’ai me lire) ou plus classique
(contes merveilleux, mythes, lé gendes, fabliaux , nouvelles).
? Les élèves apprennent à lire , et dès qu’ils ont acquis une relative autonomie de
lecture, la puissance de la fiction, le pouvoi r de la langue, la liberté de se donner
une interprétation pe rsonnelle sont des arguments en faveur de la littérature.
? Les apprenants consultent aussi des textes docume ntaires et parfois des
manuels, lisent des textes « fonctionnels ».
I-8. LA « LITTERARITE »
OU LE POSSIBLE LITTERAIRE
Il ne faut pas perdre de vue qu’il s’agi t de cours de langue, et non pas de
littérature.
Nous sommes pourtant co nvaincu que l’enseignement d’une langue étrangère
est efficace si l’on a recours, à côté du manuel scolaire, à des supports
diversifiés, entre autres, à des textes littéraires.
Leur utilisation nous permet d’enrichir le vocabulaire, de décel er des structures
syntaxiques et des construc tions de phrases significati ves : de perfectionner son
français.
Il faut cependant s’ engager à ne pas départir les textes littéraires de leur
caractère artistique en veillant à ne pas le s exploiter comme de simples prétextes
à une étude de grammair e ou de lexique.
On devrait plutôt s’attacher à mettre en avant leurs traits pa rticuliers, uniques :
leur littérarité.
L’avantage de la le cture littéraire en français langue étrangère (FLE), c’est
précisément le fait qu’elle se fait en la ngue étrangère. Non se ulement elle permet
de mieux maîtriser les savoirs li nguistiques et « techni ques » des apprenants,
mais elle les enrichit person nellement : les apprenants entrent en contact avec la
culture de la langue cible, ils acquièrent la connai ssance de l’époque et de
l’auteur et, enfin, ils sont amenés à parta ger leurs impressions, par exemple lors
d’un débat en classe ou sous forme d’une critique à publier dans « le journal du
lycée».
Tout en enseignant le français, lang ue de communication, de sciences et de
travail, les enseign ants doivent cont aminer leurs ap prenants par la lecture, cette
« maladie textuellement transmissible». La lecture des textes littéraires en cla sse de langue a ses qualités et permet des
activités et des exercices impossi bles à faire individuellement.
Par ailleurs, il est évident que la lecture d’un texte li ttéraire, sa « compréhension
», la déduction de son « s ens » sont toujours et avant tout des actes individuels
et personnels. Ils impliquent des interp rétations nécessairemen t diverses que l’on
peut ou doit partager par la suite. Sinon on enlève au texte artistique sa
caractéristique fondamen tale : la richesse, la multipli cité de sens, sans lesquelles
on ne saurait plus parler d’art, de littérature.
Mais les apprenants consultent aussi des textes documentaires et parfois des
manuels, ils lisent des te xtes « fonctionnels » qu i circulent au lycée.
D’ailleurs, ce serait une e rreur que d’opposer radicaleme nt textes fonctionnels et
textes littéraires : dans nom bre de livres, les uns englobent les autres (souvent
par le biais de l’illustration). Parallèlement à ces lectures , les apprenants éc rivent donc prin cipalement des
textes « littéraires », mais aussi des text es « fonctionnels » ou des textes « utiles
», souvent en relation étro ite avec d’autres disciplines. Ils do ivent faire alors
preuve de qualités complémentaires : cherc her l’univocité d’un texte prescriptif
qui ne peut souffrir d’ambigu ïté, par contraste avec la polysémie qu’entretient le
poème ; le respect de la réa lité des faits, dans l’observation et la description de la
faune et la flore par exemple, visant la dénotation, non pas la connotation ; la
précision sans effets de style pour donner ou réclamer des in formations, etc. Ce
sont là autant de difficul tés qui incitent à remettre en cause l’opinion répandue,
selon laquelle les écrits « pratiques » seraient plus ab ordables, plus simples que
les textes « littéraires ».
Le second argument généralem ent avancé, pour rejeter la « gratuité » littéraire
au profit des textes « utiles », est que ces derniers pré parent directement à
répondre aux besoins de la vi e sociale : il est aisé de le réfute r en rappelant que
le détour par la fiction, la distance que confère l’attention au x mots qui évoquent
ou désignent les choses, préparent efficacement à répondre aux nécessités,
même prosaïques, en apport ant aux apprenants une ais ance irremplaçable dans
le maniement de la l angue et de l’écriture.
L’exemple de la lettre est fréquemment cité puisque la correspondance, privée ou
administrative, est pour la plupart des apprenants la seule occasi on ou obligation
d’écriture et parce que la lettre nécessite un appren tissage spécifi que (situation
d’énonciation particulière, mi se en page, formules de polit esse, etc.). Aussi est-il
intéressant de proposer aux apprenants pl usieurs consignes qui permettent de la
travailler selon des appr oches différentes (plus ou moins littéraires) et une
hiérarchie des difficultés.
Certaines consignes permett ent d’écrire des textes, en quelque sorte à la
frontière de la littérature et de l’usage social, avec pour origine un événement
réel, pour référence et modèle des écrits foncti onnels, avec néanmoins
l’ouverture à la fiction et le soutien de l’imagination. Nul doute qu’une classe ac tive et animée, où il se passe des choses, où l’on met
en place et réalise des projets collectifs, multip lie les occasions d’écriture.
Les livres de lecture suivie demeurent l’ origine la plus fr équente des activités
d’écriture. Toutefois, la réciprocité de s apports est telle que l’on ne sait plus, bien souvent,
si c’est la lecture qui sert l’écriture ou l’écriture qui précise et affine la lecture,
en relance l’intérêt. Après plusieurs séan ces de lecture suivie, quand la classe a
déjà bien avancé dans le livre , il est intéressant de pr oposer aux apprenants d’en
écrire l’épisode suiv ant, alors même qu’il s ont l’habitude de fo rmuler oralement, à
la fin de chaque séance, des hypot hèses sur la suit e de l’histoire.
Ils doivent alors respecter les éléments du texte déjà lu ; parfois , dans le cas
d’une succession d’épreuves, rester au plus près des épreu ves précédentes.
Les apprenants ont d onc à travailler les problèmes de cohérence, à tenter de
reproduire le ton, si possible le styl e de l’auteur, qui ont déjà fait l’objet
d’observations nombreuses lors des séances de lecture.
Mais surtout ils sont curieux de connaître les suites qu’ont proposées leurs
camarades et très attentifs à la solution choisie par l’auteur.
I-9. VARIETE DES TEXTES,
PRECIS ION DES CONSIGNES
La question de la typologie de textes n’est pas nouvelle. L’ancienne rhétorique
puis la stylistique ont précisé et multiplié des distinctions, établi des classifications
de textes qui, même si elle s sont loin d’être claires (par manque d’hom ogénéité : les
critères utilisés relevant à la fois du c ontenu, des modalités de représentation, du
style, des images…etc.) ont constitué des modèl es pour des prat iques discursives
(littéraires, religieuses, judiciaires…).
Nous trouverons encore jusq u’à la fin du XXe siècle, dans les manuels de français,
des répertoires de genres qui , variant selon leurs auteur s, attestent ainsi leur
caractère aléatoire.(1) S’ils proposent parfois des sujets inspirés de la rhét orique(2), certains livres de
composition française se c ontentent de mettre en place l’exercice de production
d’écrits « rédaction », qu i n’existe évidemment comme tel ni chez les grands
écrivains ni dans la rhétorique, mais qui emprunte à ce lle-ci l’opposition
traditionnelle entre le narratif et le descriptif, la description restant la forme
privilégiée de la pr oduction d’écrits.
Cette pratique unique et totalisante de la production d’écrits , a été l’objet de
nombreuses étude s critiques.(1)
La production d’écrits se définissant alors par se s thèmes, ses modèles
pédagogiques et stylistiques (l’observation est essent ielle pour « bien faire voir » ; le
style doit être « coloré », « vivant », les mo ts « expressifs », et ses consignes.
Il s’agit toujours de décrire (une scène , une gravure serviront de supports, où il
s’agira de faire le portrait d’ un individu étrange, d’un animal, son prop re portrait, réel
ou imaginaire, etc.) et de ra conter (soit une situation, un événement dont l’apprenant
est prétendument témoin ou ac teur, soit l’histoire d’un autre, y compris l’objet
inanimé). Nous pouvons parfois invi ter l’apprenant à do nner de son sujet une représentation
directe. C’est ce mélange de narration et de description, parfois « assaisonné » de
dialogue, qui explique la c onvenance et la fr équence de sujets dans lesquels les
apprenants sont requis de faire part de leurs impressions lors d’une journée
mémorable.
La production d’écrits fait l’objet d’une préparation qui prend la forme, le plus
souvent, d’une leçon de vocabulaire, mais qui peu t aller jusqu’au canevas de
questions et de notes pour donner des id ées aux apprenants.
Cette préparation porte sur les tournures et les idées, parf ois sur la composition elle-
même, rarement sur la forme ou l’allure du texte : le savoir rhétorique ayant été
perdu. La production d’écrits fait enfin l’objet d’une correctio n, parfois d’un véritable corrigé
dans lequel l’ensei gnant impose ses représent ations du beau style.
Le « texte libre
»(1), introduit par Freinet entre le s deux guerres, s’in scrit dans un
renversement qui concerne no n seulement les différents aspects de la production
d’écrits, mais toute la pédagogie de l’écrit.
Au lieu de partir de thèmes obligatoires et de modèles auxq uels les apprenants
devraient se plier, c’est au contraire en s’appuyant su r le «vécu » de ces mêmes
apprenants que s’organ ise l’apprentissage pour la lecture (méthode naturelle)
comme pour l’écriture qui, cette fois, n’est pas différée. Plus de « sujets », mais des
situations de communication qui invitent à l’expression libre. La pédagogie du texte
libre pouvait permettre une appropriati on authentique de l’écriture par les
apprenants, et cela, pour quelques bonnes raisons :
les apprenants écriva ient beaucoup plus qu e dans les autres cla sses, ils écrivaient
ce qu’ils avaient envie d’écrire, ils écrivai ent pour des lecteurs, et donc accordaient à
la présentation des textes (disposition, usage de l’im primerie) une préoccupation
négligée par l’école mais trouvant ses just ifications dans le fonctionnement de l’écrit
comme acte social.
On reprochera à ces pratiques de se dés intéresser du fonctionn ement interne des
textes, par exemple de leur composition, des ré férences et des modèles culturels
capables de les nourrir
C’est là indiscutablement le point faible de FREINET : il n’y a jamais travail de
l’écriture, si ce n’est la mise au poin t qui s’effectue au gré des enseignants, selon
des intuitions et des représ entations exactement identi ques à celles des partisans
de la rédaction. Le dévoiement, qui, par la suite a été fa it du texte libre (rédaction
sans sujet imposé, mais à un moment fixe de la semaine, ravalé au rang des autres
exercices, soumis à des « corrections » au bout desque lles l’apprenant ne reconnaît
plus son texte qui restera d’ailleurs consig né dans des cahiers), l’a aujourd’hui vidé
de tout intérêt. Roger FAVRY(1) énumère plus ieurs problèmes à pr opos de la pratique du texte (le
texte littéraire) libre au premier colloque sur « L’enseignement de la littérature », en
1969 à Cerisy, sous la direction de S. DOUBROVSKY et T. TODOROV :
« Le premier problème est celui du text e opaque, porteur d’un sens indéchiffrable
[…]. Le second problème es t celui de la correction. On peut envisager des
rectifications élémentaires, ce lles qui portent sur le ‘’bon usage’’. Pratiquement, c’est
le groupe qui propose à l’auteur des co rrections. Cette dém arche éminemment
socialisante donne g énéralement de bons résultats. Le groupe, sauf exceptions,
s’en tient à une tradition du « bien écrire » et, par là, trouve un consensus assez
large. Mais quelques élèves contestent l’aptitude de la collectivité à proposer une
correction, et ceci très tôt, dès l’enseignement prim aire » (page 203).
« Les élèves sentent qu’il faudrait « écrire comme cela » … Mais précisément
comment est-ce écrit ? Par quelles transformation s, par quelles règles
d’applications, une idée si mple ou plusieurs idées simples devient-elle ou
deviennent-elles un récit multivoque ayant sa co hérence propre, attirant
énergiquement le lecteur da ns sa propre vraisemblanc e ? Où est le livre de
grammaire qui traite de ces choses ? Que dire à François qui, me remettant à la mi-
octobre, un manuscrit de trois cents pages, déclare : « Le programme de première
en français ne m’intéresse pas. Je veux passer l’année à travailler mon roman. »
Démarche logique. Mais, comment est-ce fait un roman, une fois écartés la
biographie, les intentions , les personnages, les thèm es, les problèmes, la
composition, le tempo, la co ntexture apparente ? C’était le sens de la question de
François » (page 208). T. Todorov(1) confirme, à la fin du co lloque, la présence de cette préoccupation
chez certains participants :
« Je voudrais ajouter encore quelques re marques sur la poétiq ue et l’analyse des
textes, sur cette approche interne : elle permet de dépasser la dichotomie,
l’antagonisme, souvent évoqué ici, entre écriture et lecture, dichotomie qui, je crois,
doit être dépassée. Pourquoi l’ap proche interne le permet-elle ?
Premièrement, parce que vis ant une œuvre littéraire, el le ne se co ntente pas de
parler de cette œuvre mais elle met aussi en lumière les catégorie s de la littérature,
par conséquent, rend consci ent l’étudiant ou l’élève, de s moyens dont il dispose
quand il se proposera, par exemple, d’écrire un texte littéraire. Dans certaines
expériences rapportées ici, comme dans la mi enne propre, un tel travail amenait
effectivement les élèves à la création. D’autre part, le ma intien de cette dichotomie
repose, me semble-t-il, sur une conception de la lecture et de l’écriture qui sont
toutes deux périmées. Une lecture qui ne serait pas écri ture équivaut à une
soumission totale au texte d’au trui, ce qui n’est, je crois, jamais le cas ; mais grâce
au travail dont je parle, cette soumission s’évanouit, ca r, naturellement, en lisant
nous écrivons le texte que nou s lisons ; et d’autre part, l’éc riture est toujours lecture,
lecture des textes du passé. On nous l’ a bien dit : la sponta néité n’est jamais
vraiment spontanée ; en fait , en écrivant, nous nous situons aussi toujours par
rapport à un texte déjà exist ant ; nous faisons aussi une lecture. » (pages 220-221).
En 1971, nous pouvons lire encore chez Roland Barthes(1) que :
« La théorie du Texte ne peut coïncider qu’avec une pratique de l’écriture. »
En 1975, dans un congrès pédagogique , Roland Barthes(2 ) dira aussi :
« C’est là un problème de civi lisation : mais, pour moi, ma conviction profonde et
consciente est qu’il ne sera jamais possi ble de libérer la le cture si, d’un même
mouvement, nous ne libér ons pas l’écriture. »
Dans les années soixante, soixante-dix, deux phénomè nes vont préparer les
conditions d’une nouve lle réflexion sur la typologie des textes : la percée des
sciences du langage, avec leur application à la di dactique du français, et l’ouverture
de l’école à d’autres textes que le « fragment » de la littérature. La linguistique
critique la vision d’une langue supposée uniforme et invite à réfléc hir sur la diversité
des idiomes et des usages. La distinction français écrit/fr ançais parlé et l’opposition, formulée par André Martinet
dans « Eléments de linguistique générale », entre deux emplois de la langue en
situation, communicati on en présence du, des
Destinataire(s) et en référenc e à une situation commune i mmédiate, hors situation,
qui ne prend pas assi se sur la situation particuliè re dans laquelle se déroule
l’entretien, ont des prolongements p édagogiques : par exempl e, promouvoir une
pédagogie du récit or al, forme intermédiaire entre l’entretien et le récit écrit.
Par ailleurs, l’é cole s’ouvre à d’autres text es, que nous appe llerons sociaux,
pratiques ou fonctionnels : doc uments techniques ou hist oriques, affiches, modes
d’emploi, slogans publ icitaires, articles de presse, etc. Ces nouveaux textes ne
peuvent plus être appréc iés selon les modè les pédagogiques et stylistiques
traditionnels.
A partir du moment où l’on s’avise qu’ils p ourraient servir de su pport à des activités
de production d’écrits, les cons eils et les préparations à l’expression écrite ne sont
plus appropriés ; il est nécessaire de recourir à une analyse préalable de ces textes
pour dégager leur s caractéristiques formelles (situati on de production, destinataires,
types de phrases, forme pronom inale et temporelle, etc.).
La question de la typologi e des textes se trouve à nouveau posée, à partir des
travaux de la linguistique qui prennent en compte le problème de l’énonciation
(Emile Benveniste), des diverses recherches soci olinguistiques autour du
phénomène langagier co mme interaction sociale (certa ines d’entre el les inspirées
des écrits du théoricien soviétique M. BAKHTINE), enfin, des réflexions en
sociolinguistique.
Jean-Paul BRONCKART(1) essaie de se placer au carrefour de tous ces courants. Il
a tenté de définir des types « abstraits » de textes, « ar chétypes discursifs », en
distinguant plusieur s variables : situation de producti on de texte (qui parle ? A qui ?
Dans quel but ? Dans quel lieu social ? dans le même espace-temps que l’auditeur
ou dans un autre ?), statuts des référent s ou contenus (les obje ts de discours sont
présents dans l’espace-te mps de la produc tion, ou ils en sont absents).
En croisant ces paramètres, J.P. BR ONCKART propose le système suivant :
discours en situation / récit conversatio nnel / discours théori que /narration qu’il
entend légitimer en montrant que les textes concrets co rrespondant à ch acun de ces
types se caractérisent par des configurations d’unités linguistiques relativement
spécifiques. Par exempl e, pour le discours en situat ion : fréquence des indices de
première et deuxième pers onne, de déictiques temporels, de verbes, de phrases
non déclaratives ; pour le discours th éorique : effacement de l’énonciateur,
organisateurs argumentatifs, phrases passives, nominalisations, mais utilisation des
temps présent, passé composé et futur simple comme dans le discours en situation
; pour la narration : organisateurs tem porels (ce matin-là…), système passé simple
/imparfait excluant le futu r, pronoms ayant leur référ ent dans le texte, etc. Ces
textes se distingueraient éga lement par leurs types d’orga nisation ou « pl anifications
» : selon que le récit est m ené dans une conversation ou par écrit, il ne progresse
pas de la même faço n ; une argumentation ne se construit pas comme une
narration, etc.
La taxinomie de J.-P. BRONCKART :
La taxinomie de J.-P. BRONCKART présente des inconvénients. L’existence de
nombreux textes « intermédiaires », comme la narration historique ou le récit de vie,
finit par rendre dérisoire l’effort de systémat isation, surtout s’il ne parvient pas à
rendre compte des genres de textes rencontrés dans la lecture (comme le texte
prescriptif ou le poème).
Les choix méthodolog iques conduisent à exclure les th ématiques, ce qui constitue à
notre sens un handica p sérieux (le poème ly rique ou le récit polic ier se définissent
autant par leurs thèmes que par leurs formes).
La nouvelle typologie des text es a néanmoins le mérite de mettre en rapport les
conditions de production des textes et la présence ou l’ab sence de certains
caractères li nguistiques.
Or cela présente un cara ctère pédagogiq ue évident.
Prenons par exemple la quest ion de l’emploi des temps. Depuis longtemps, on a
constaté que les apprenants, dans leurs productions d’écrits, mêlaient allègrement
des temps peu compatibles. Les enseignants n’ont pas les moyens de justifier
rationnellement ce qu’ils re ssentent comme une « faute » et se trouvent incapables
d’expliquer à l’apprenant pourquoi il s’est trompé.
Il est pourtant clair que la formulation de certains suje ts de production d’écrits
accentue la tendance des apprenants à passer de la narrati on pure au récit
conversationnel, donc à passer d’un système temporel à un autre.
Si la narration est conduite d’un point de vue nettement rétr ospectif, les temps
utilisés ne sont pas les mê mes que si elle a pour but de suggér er, par exemple,
une fête à venir (l’Aïd El Adha par exemple).
Il est clair qu’une consigne aussi « tordue » que « Une mouche rêve de devenir
un éléphant. Faites-la parler », induit une confusion d ans l’emploi des temps et
des pronoms que, ma lheureusement, aucune leçon de grammaire traditionnelle
ne pourra consolid er, car il ne s’agit plus de grammaire mais de compétence
textuelle.
Réfléchir sur la typologie des textes et le ur caractérisation lingu istique c’est, pour
l’enseignant, se contraindre, d’une part, à attirer l’att ention des apprenants, au
moment des lectures, sur les marques et le fonctionnement spéc ifique de certains
textes ; d’autre part, à bi en peser la formul ation des consigne s d’écriture, pour
éviter des confusions dans l’emploi des catégories de langue ; il faut être
conscient du type de texte demandé afin de pouvoir re lativement prédire les
catégories présentes ou abs entes, surtout si l’on prét end par la suite en faire
l’objet d’un trav ail particulier.
Il reste que la typologie proposée pa r J.M. ADAM (numéro74 de la revue «
Langue française », pages 51, 52, 53), qui distingue le récit, la description,
l’argumentation, l’exposition (explicati on, compte-rendu d’expérience) ; la
conversation, l’injonction et le texte poétique (incluant non seulement le poème,
mais aussi la chanson et le slogan p ublicitaire).
Cette dernière classification présente encore l’inconvénient d’évacuer les
thèmes, ce que s’était bien gardé de fair e l’ancienne rhétoriq ue grâce au corpus
d’exemples illustrant les « figures ».
Apprendre à écrire ce n’es t pas seulement s’exercer dans la maîtrise et la
variation des formes, c’es t aussi parcourir de nombr eux réseaux thématiques
(lieux, moments, valeurs, affects, etc. ), connaître les codes qui les organisent
(codes linguistique s, mais aussi culturels symboliq ues) et se donn er les moyens
de la variation infinie.
Une bonne consigne d’ écriture devrait croiser un impératif formel avec une
substance thématique.
I-10. APPRENDRE A ECRIRE
Dans quelle mesure l’écriture peut-elle être l’objet d’un apprentissage ?
A cette question, la tradition rhétor ique a répondu positivement par ses
manuels, ses gammes d’exemples et d’exercices. Certains ouvrages
prétendaient encore enseigner l’art d’éc rire et réaffirmaient la conception
classique selon laquelle la lecture est assimilation et l’écriture artisanat.
Aujourd’hui, les ense ignants ne doivent pas restaurer un enseignement dont
les finalités esthétiques et idéologiques sont susp ectes et fondées sur des
représentations de la litt érature avec lesquelles la critique et les écrivains
modernes ont rompu. Il ne s’agit pas non plus de s’enfermer dans des purs exer cices formels qui
n’aboutissent qu’à des textes sans âme.
Mais on peut emprunter à la rhétor ique certains de ces exercices,
l’entraînement aux « retouches » et aux « refontes » et le pr incipe que c’est la
littérature qui offrira le s meilleurs supports.
Certains enseignants s’intére ssent plus au désir d’écrire qu’à l’observation et la
reproduction des modèles, d’autres prennent encore à la fois des situations,
des thèmes et des formes. Dans tous les cas, et se lon les différents registres
où ils se situent, ils accordent une place importante à la réécriture.
Aussi, proposent-ils de cons erver les règles fondamen tales de la pratique de
l’écriture : une cons igne impérative, le respect du temps, la lecture en classe
des textes produits par les différents apprenants, la variété des gammes et
des productions.
Ce que nous pouvons espére r d’un apprentissage de l’é criture, ce n’est pas
seulement l’acquisition de compét ences syntaxiques, lexicales,
orthographiques : d’autres exercices y concourent. On s’apercevra donc que,
dans les différente s leçons présentées par les enseignants, apparaissent une
variété et une complexité dans l’emploi des mots et des phrases auxquelles ne
conduisent pas nécessairement les activités plus tr aditionnelles.
Il est impératif que les ty pes de textes soient reco nnus par les ap prenants. Les
consignes doivent aussi do nner des idées d’écriture, des idées de textes, des
idées tout court. Elles offrent aux app renants des i dées véritables d’exercer
leur imagination, à rebour s de certaines « pédagogies de l’im aginaire », qui
font sans cesse appel à l’imagination des apprenants sans leur proposer des
schémas créateurs permetta nt de les structurer.
Par exemple, à partir du tr avail fait en classe sur la décomposition en syllabes :
les charades et les mots croisé s (lecture et écriture), les apprenant s ont appris
à voir dans la vie courante des détails de charades et de mo ts croisés qui leur
étaient auparavant inaper çus, à les écrire, à en inventer d’autres.
Les principes et les modalit és de l’apprentissage de l’éc riture permettraient une
meilleure éducation de l’apprenant. « La pratique de l’écriture empêche de se
laisser trop impression ner par les livres».
Mais comment mettre en plac e des activités d’écriture ?
CHAPITRE II
MISE EN PLACE DES ACTIVITES D’ECRITURE
La première difficulté qu’éprouve l’ens eignant est de choisir le texte ou le livre
qui conviendra le mieux « au niveau » de ses appren ants, et ce, malgré le
soutien des manuels et même des collect ions qui affichent une tranche d’âge
déterminée.
Mais s’il apparti ent à l’enseignant de dé finir le niveau de diff iculté du texte qu’il
choisit par rapport à sa classe (et il y par viendra avec l’expérienc e), il ne doit pas
s’en préoccuper outre mesure.
Comme l’écrit Geneviève Patte (1) dans un ouvrage au titre signifi catif, tous les
sujets peuvent intéresser le s apprenants, et, « dès qu’une initiation est donnée,
les tranches d’âge pe rdent leur sens ».
Un choix de lectures organisé par rappor t à un objectif précis et comportant
différents niveaux de difficultés constitue déjà en soi un tr avail de lecture.
L’enseignant, comme le s apprenants, doit savoir que l’import ant dans un texte
n’est pas seulement ce qu ’on y comprend d’emblée.
Il s’agit, essentiellement, d’ aller de texte en texte, et, ce faisant, favoriser une
imprégnation.
II-1. LES PREALABLES DE LA LECTURE-ECRITURE ET
L’AVANT-TEXTE(1)
Dans tous les ca s, il faut organiser des préal ables à toute lecture-écriture.
a) Lire-écrire dans un contex te de circonstances : on pe ut partir d’un événement
vécu, de sensations et d’ém otions réellement éprouvées.
b) Lire-écrire dans un cont exte d’activités, par exem ple, on est plongé dans les
récits d’aventures. c) Lire-écrire dans un contexte d’idées : vœux exprimés par l’ensemble des
apprenants, enthousias me de l’enseignant pour une histoire qu’il a découverte.
L’un ou l’autre ou les trois à la fois , pourvu que l’apprena nt n’ait pas cette
impression qu’aucune né cessité ne gouverne les activités dans lesquelles il est
censé s’impliquer et qu ’un texte qu’il n’a pas choisi de lire et d’écrire lui tombe sur
la tête par hasard pour la simple et bo nne raison qu’on est d ans une institution
scolaire. Comme les manuscrits des écri vains, ceux des apprenants sont aussi importants.
Cela relève de la criti que génétique, domaine inc onnu et/ou méconnu de la
majorité des enseignant s de langue française.
« […] la critique génétique instaure un no uveau regard sur la li ttérature. Son objet
: les manuscrits littéraires, en tant qu’ils portent la tr ace d’une dynamique, celle
du texte en devenir. Sa méth ode : la mise à nu du corps et du cour s de l’écriture,
assortie de la construc tion d’une série d’hypoth èses sur les opérations
scripturales. Sa visée : la littérature comme un faire, comme activité, comme
mouvement. »(1)
Claudette ORIOL Boyer (2) nous montre l’importance des brouillons et des
manuscrits quant à la lecture des textes. « […] les textes peuvent maintenant être lus non plus comme le résultat d’un don
ou d’une inspiration d’origine divine, ma is bien comme le pr oduit d’un ensemble
de tâches qui, répertoriées, explicit ées, théorisées, devi ennent accessibles à
quelqu’un qui veut appre ndre à écrire à partir de s lectures qu’il fait. »
II-2. LA DICTEE A L’ENSEIGNANT :
UN PASSAGE OBLIGE
La dictée est en que lque sorte le pendant de la le cture faite à haute voix par
un lecteur pour un non-lecteur : elle vise à initier l’appr enant aux spécificités de
l’écrit en le plaçant dans une situation de production, si la le cture est à l’inverse
réception. La dictée doit être utilis ée comme un moyen de mettre en place des habitudes de
travail et des démarc hes intellectuelles.
Pour féconde qu’elle soi t, l’interaction individ uelle importe moins que
l’organisation d’une écriture en petits gro upes (4 à 5 appren ants par groupe).
L’enseignant les invite à réfléchir à leur texte av ant qu’on commence à l’écrire.
Après une démarche indi viduelle et silencie use, chaque apprenant fait d’abord sa
proposition. Ensuite, le groupe arrête son choix sur l’une des versio ns proposées.
Commence alors la dictée à l’enseignant proprement dite, c’est-à-dire que
l’enseignant écrit sous la dictée des apprenants.
Suivant des yeux le mouvem ent du stylo, ils apprennent à régler le rythme de
l’esprit avec le rythme de la main.
Le ton sérieux, le débit ra lenti et l’articulation ostent atoire qu’ils adoptent au bout
de quelques phrases sont le signe évident qu’il s font la différence entre raconter
et dicter, entre « parler » et « parler l’écrit ».
Se corrigeant les uns et les autres, ils proposent d’ailleur s, le plus souvent, des
phrases complètes et syntaxiquement co rrectes. L’enseignant ne doit pas se
cantonner dans le rôle de secrétai re indifférent.
Outre qu’il peut poser des que stions quand il ne comprend pas le texte, il dispose
d’un mode d’intervention aussi simple qu’efficace : la relecture.
En leur relisant plusieurs fo is dans le cours du travail ce qui a déjà été écrit, en
relisant à la fin l’intégralité du texte, il attire l’attention sur sa cohérence et la
cohésion des phrases, le s conduit à remarquer de s absences, les amène à
employer des substitu ts pour éviter des r épétitions abusives.
Il rappelle également la c onsigne, quand le groupe, empor té au fil de l’histoire,
s’en est écarté.
Enfin, il montre que la première écriture est un brouillon, que l’on peut rayer,
corriger, ajouter des éléments , qu’il est toujours possibl e de revenir sur ce qu’on
vient d’écrire pour l’ame nder, autant de caractères fondamentaux du travail
d’écriture que l’on aborde ainsi dans la pratique au lieu de les évoquer dans des
discours souvent hors de la portée des apprenants.
Claudette ORIOL Boyer nous dit, à propos du phénomène de groupe(1) : « Il est
nécessaire que l’enseig nant connaisse bien les p hénomènes de gr oupe pour
situer leur place dans la production du texte et les laisser transparaître, sans
cependant leur permettre de dominer le travail de l’at elier. Un groupe en atelier
d’écriture est toujours un peu en train de jouer au jeu de la vérité par texte
interposé : il est important que l’animateur d’un tel atelier en ait conscience et ne
se trompe pas d’ate lier : il ne s’agi t pas d’un travail de dy namique de groupe.
Même si cette dynamique es t présente, même si elle est une des composantes
de l’écriture qui se travaille, elle ne doit pas devenir premiè re car ce serait à
nouveau le règne de l’expr essif dans un atelier dont le but est l’apprentissage de
la mise en texte en ce qu’e lle permet précisément un trav ail à partir de l’expressif.
C’est la différence fondamental e qui existe entre un atel ier d’expression écrite et
un atelier d’écriture ains i conçu […] Ainsi, beaucoup d’ateliers « d’expression »
écrite se donnent co mme suffisant objectif le « débl ocage » de l’écriture. Cela
laisse croire que le seul fait d’aligner des mots ou des phrases sur du papier (la
production d’un écrit autrement dit) pourrait être une fin en soi. Cela permet de
confondre la producti on d’un écrit avec le travail très spéc ifique que nécessite
l’écriture d’un texte. »
II-3.PREMIERES LECTURES, PREMIERS ECRITS
Les apprenant s vont écrire eux-mêmes leur texte, et c’est pour eux une grande «
première » qu’il importe de réussir.
Aussi, les enseignants doivent mettre en place des situati ons d’écriture qui tiennent
compte à la fois de leurs goûts, de leurs comp étences et des h abitudes qu’ils ont
acquises. Pour que le s apprenants puissent réinvestir le urs connaissances toutes
fraîches, les enseignan ts doivent utiliser le manuel de lecture (que l’enseignant a
choisi pour ses apprenants) co mme source d’écriture , reprenant ainsi des
personnages qui leur sont familiers.
Dans ce manuel qu ’ils connaissent bien, ils retrouvent facile ment des éléments de
référence indispensables. Ils ont à leur disposition tout e une réserve de mots et de tournures dans laquelle ils
peuvent puiser.
La consigne invite donc à ut iliser un matériau déjà connu , mais elle ne doit pas pour
autant conduire à répéter pur ement et simplement le te xte (quand cette erreur est
commise, certains apprenants ressentent vi te l’absence d’intérêt de l’exercice).
Elle doit offrir une part suff isante à l’invention, par exempl e, en invitant à écrire une
nouvelle aventure, un autre épisode à la manière de ceux du manuel, ou bien en
proposant un retournement de situation ou encore un changemen t de point de vue.
Les conditions de travail ne changent pas : certes ce n’est plus l’enseignant qui
écrit, mais les apprenants éc rivent en groupe, comme ils en ont pris l’ habitude, et
peuvent ainsi s’entraider.
Si l’enseignant veut obtenir un récit, même bref, il es t indispensabl e de prévoir
plusieurs séances pour cette première écriture autonome. En effet, une séance ne
peut généralement d épasser quarante-cinq minutes, après quoi les apprenants ne
sont plus attentifs, et p endant cette durée, ils écrivent court pa rce que lentement :
pour la plupart des mots, ils doivent chercher le mo dèle dans leurs documents ou
auprès de l’enseignant. Ainsi tous les apprenant s parviennent à écrire leur prem ière histoire avec plus ou
moins de difficulté dan s l’élaboration et de qual ité dans le résultat.
Dans « Vipère au poing », Jean Rezeau , dit Brasse-Bouillon, et ses frères livrent
un combat impitoyable à leur mère, femme odieuse, surnommée Folcoche. Ce
roman, largement autobiographique, le prem ier d’Hervé Bazin, es t un cri de haine et
de révolte. Après la lecture entière du roman, intervient une prem ière activité d’écriture
autonome.
La classe est divisée en pl usieurs groupes qui dispos ent chacun d’une feuille
blanche (21 x 27 cm), d’un stylo et du roman « Vi père au poing » d’Hervé Bazin.
L’extrait ci-dessous sert de supp ort d’écriture pour les apprenants :
Le narrateur s’adresse à sa mère Folc oche (folle + cochonn e) et raconte la
pistolétade(1). Il rend compte de se s sentiments à l’égard de Folcoche.
« […] Et la pistolétade ?Tu sa is, Folcoche, la pistolétade !
Moi, je l’ai pistolée pen dant quatre minutes ! », se vantait Frédie.
Pauvre Chiffe ! Petit pr étentieux à paupières fa ibles ! Si quelqu’un
t’a pistolé, c’est bien mo i, je m’en vante. Tu t’en rappelles ? Pardon !
Tu te le rappelles ?…Tu dis toujours :
« Je n’aime pas les regards faux. Regardez-moi dans les yeux. Je saurai ce que
vous pensez. » Ainsi tu t’es toi-même prêtée à notre jeu. Tu ne pouvais pas ne plus t’ y prêter. Et
puis, ça ne te déplaît pas, ma tendre mère ! Au dîner, en silence, voilà le bon
moment. Rien à dire. Tu ne me prendras pas en défaut. J’ai les mains sur la table.
Mon dos n’offense pas la chaise. Je suis terriblement correct. Aucune faille légale
dans mon attitude.
Je peux te regarder fixemen t. Folcoche, c’est mon droit.
Je te fixe donc, je te fixe éperdum ent. Je ne fais que cela de te fixer.
Et je te parle en moi. Je te parle et tu ne m’entends pas. Je te dis :
« Folcoche ! regarde-moi donc , Folcoche, je te cause ! »
Alors ton regard se lève de de ssus tes nouilles à l’ eau, ton regard
se lève comme une vipère et se bala nce, indécis, cher chant l’endroit
faible qui n’existe pas. Non, tu ne mordras pas, Folcoche !
Les vipères, ça me connaît. Je m’en fous, des vipères.
Tu as dit toi-même, un jour, devant moi, qu e, tout enfant, j’en av ais étranglé une… «
Une faute impardonnable de ma belle-mère,
sifflais-tu, un manque inouï de surveillance ! Cet enfant a été l’objet
d’une grande grâce ! » Et, ce di sant, le ton de ta voix re prochait cette grâce au ciel.
Mais ton regard est entré dans le mien et ton jeu est entré dans mon jeu.
Toujours en silence, toujour s infiniment correct comme il convient, je te provoque
avec une grande satisfaction . Je te cause, Folcoche, m’entends-tu ? Oui, tu
m’entends. Alors je vais te di re : « T’es moche ! Tu as les cheveux secs, le menton
mal foutu, les orei lles trop grandes.
T’es moche, ma mère. Et si tu savais comme je ne t’aime pas ! Je te le dis avec la
même sincérité que le « va, je ne te hais point » de Chim ène, dont nous étudions en
ce moment le cornélien caractère.
Moi, je ne t’aime pas ».(1)
Voici la consigne d’ écriture proposée :
Prends maintenant le point de vue de la mère pendant le jeu ; imagine ses pensées.
Tu raconteras la pistolétade( 1) au présent, tu feras en sorte qu’elle s’adresse à son
fils, rendras compte de ses sentiments à son égard.
Tiens compte de ce que tu sais du roman.
1 – Changement de point de vue et respect du temps imposé (présent de l’indicatif).
2 – Respect des caract ères des personnages.
3 – Expression, synta xe et orthographe.
Cette consigne a été ré digée dans le doubl e souci de réutiliser des personnages
bien connus de la classe (des apprenants) ma is aussi de ménager une large part à
l’invention : les apprenants ont à imaginer un retournement de si tuation, à inverser
les rôles ; c’est le t our de Folcoche, la mè re du narrateur, d’être méchante avec son
fils.
Du coup :
« Souligner, selon les perspec tives de la production, la différence qui peut s’inscrire
entre, d’une part, tels anté cédents préalables au texte et , d’autre part, tels sens
conséquents, résultat s du texte, c’est admettre le texte comme un facteur de
transformation de celui qui éc rit, le scripteur. L’auteur es t censé exprimer sa pensée
: le scripteur est un produ it de son produit. »(1)
II-4. DE L’ECRITURE DE GROUPE
A L’ECRITURE INDIVIDUELLE
L’écriture est une chos e exigeante, les appr enants en ont le se ntiment très vif.
Nous le reconnaissons volontiers avec eux, nous le ur proposons des aides : le
travail de groupe en est une.
Outre qu’ils se se ntent moins seuls et donc plus rassurés, il s peuvent mettre en
commun leurs ressources et leurs connaissa nces en matière d’éc rit (elles sont
encore minces…). Ils s’entraid ent pour trouver des idées et discuter leur projet de
texte : répondant aux question s et aux objections de leur s camarades, confrontant
leurs propositions, ils les élucident plus facilement.
Ils associent leurs efforts pour chercher les mots dont ils se souviennent mal. Enfin,
matériellement, ils se relaient dans l’acte graphique (le stylo ch ange parfois de main
à chaque mot ou presque). Il faut bien reconnaître que les séances se dér oulent dans un brui t qui fatigue les
apprenants et pertur be leur concentration. Mais ce que nous taxerions d’agitation
n’est somme toute que l’efferve scence d’un groupe au travail.
De son côté, l’enseignant trouve à ce tte organisation des avantages non
négligeables. Alors qu’il ne peut se partager entre plusi eurs apprenants (parfois les
classes comptent plus de quarante-cinq élèves), il peut suivre dans le détail
l’élaboration de six ou sept textes et répondre aux sol licitations de six ou sept
groupes. Il est donc à même d’aider les apprenants « à chaud ».
S’ils sont incapables de co mmencer ou de poursuivre leur texte, « en panne » pour
ainsi dire, il intervient sans trop attendre. S’ils s’écartent tout à fait de la consigne, il
interrompt le travail d’un gr oupe, éventuellement même de toute la classe, pour
rappeler cette consigne. Dans tous les cas, il discute le texte avec les apprenants,
pose des questions, leur relit ce qu’ils ont écrit.
Les apprenants retrouvent d onc les conditions de trava il auxquelles ils se sont
habitués, jusque dans l’organisation matéri elle : un stylo par gr oupe et une feuille
commune, sur laq uelle s’écrit le texte et converge l eur attention. Ils tirent confiance
de ce que l’activité le ur paraît ainsi familière.
Comme toujours, dès qu’il s’agit de travai ller en groupe, deux questions assorties
d’objections se pos ent : comment constituer le groupe ? Est-il possible que chacun
participe également à l’ouvrage collectif ?
Nous laissons les a pprenants se regrouper pa r affinités, convainc us qu’ils ont plus
besoin, devant une tâche aussi difficile , de s’appuyer sur les amitiés ou les
sympathies que d’être rasse mblés à égalité de ni veau (y parviendrait-on d’ailleurs
?).
Plus encore que la réserv e ou la paresse de certains apprenants si lencieux qui
restent en retrait, nous redoutons l’impuissance de certains groupes où les
apprenants, à égalité de difficultés, ne pa rviennent pas à mener le travail. Il nous
semble que dans un gr oupe très hétérogène l’un des apprenants au moins sera le «
moteur » et que les autres auront un exemple à leur portée.
L’écriture collective n’est pourtant qu’une étape. Outr e que les appr enants auront à
écrire seuls dans la suite de le urs études et qu’ils doivent s’ y préparer sans tarder, le
témoignage des éc rivains de métier attest e que, sauf exceptio n, l’écriture est une
aventure solitaire. Certains apprenants réclament d’ailleurs spontanément, et vite, la liberté d’écrire
seuls. Pour les autres, on les y encoura ge progressivement en diminuant la taille
des groupes.
L’écriture à deux est une transi tion presque nécessa ire, car elle est rassurante. Il est
indispensable aussi de varier les consignes et les genres : si que lques apprenants
ont plus de facilité ou de g oût pour l’écriture poétique,d’aut res préfèrent les récits de
fiction,d’autres encore des « écrits non littéraires ».
On peut aussi introduire des consignes qui ré clament impérativement l’écriture
individuelle : par exemple, lorsque chaque appre nant doit rédiger une lettre à un
apprenant (un correspondant) d’un autre ét ablissement pour l’inviter à visiter son
lycée ou sa ville.
Il ne faut rien précipiter, ceux qui retar dent le plus longtemps le passage à l’écriture
individuelle sont généralement les plus fragiles, ceux qui ont le moins d’idées ; à
trop les bousculer, on risquerait de les blo quer. Ecrire seul est une fin à laquelle
chacun parvient à son rythme. Certains apprenants sont en core incapables de cette
autonomie. Citons l’exemple d’un appre nant de 1ère année sec ondaire qui, en début d’année,
refusait absolument d’écrire, « ne sachant pas quoi dire ».
Dans un échange oral av ec son enseignant, dans la discussion à partir de
consignes, il a trouvé des idées et surtout gagné peu à peu co nfiance ; il est
parvenu à concevoir un texte, en milieu d’année, il écrivait autant que ses
camarades. Transition efficace vers l’écr iture individuelle, l’éc riture collective ne saurait pourtant
se réduire à ce rôle.
Quels que soit l’âge et la compétence des appr enants, elle conserve certains
intérêts : pour certaines consignes, la rédaction des dialogue s par exemple, les
retours à l’écriture par groupe sont particul ièrement fructueux.
Les apprenants de 3ème des coll èges et lycées, après avoi r lu « Vipère au poing »
d’Hervé Bazin, ont travaillé à de ux sur la cons igne suivante :
« Sous la forme d’un dial ogue, écrivez la querelle de Folcoche et de son fils. »
L’un des apprenants écriva it un alinéa que l’autre deva it lire et auq uel il répondait
par un alinéa que le premier li sait et… ainsi de suite.
Cette alternance dans l’écriture a aidé le s apprenants à condui re l’enchaînement
des propos, à trouver des répliques, à rendre le ton et le cresc endo de la querelle.
Claudette ORIOL Boyer(1) nous dit à propos de l’ écriture en groupe :
« C’est le travail le plus difficile car toute décisi on d’écriture donne l’impression
d’être un coup de force.
De plus, il est très difficile de trouver des moyens d’év iter l’affadissement dans les
stéréotypes si l’on essaye d’obtenir un consensus.
Le travail d’un texte collecti f ne peut se faire que dans un atelier spécia lement conçu
pour cela et comportant des participants ayant déjà re çu une formation sérieuse en
matière d’écriture.
Nous ne pouvons en détai ller les modalités ici.
Enfin, il est toujours possi ble et souhaitable, avant de s’engager dans la rédaction
d’un texte long, de multiplie r les exercices d’entraînement ponctuels, afin d’acquérir
une dextérité de base. On peut alors proposer à un grou pe diverses consignes et
laisser chaque particip ant choisir ce qu’il a envie de travailler. La confrontation de
deux ou trois textes écri ts avec une même consigne est passi onnante et ne lasse
pas les lecteurs. Chac un peut ensuite s’entraîner à appliquer d’autres consignes,
comme on fait des gammes. Tous les exercices sont les bienvenus et le travai l de l’ « oulipo »(1) ».
II-5. L’ECRITURE EN CLASSE ET RITUELS
Nous avons déjà insisté sur notre souc i d’installer dans la classe de bonnes
habitudes de travail. En matière d’écriture, deux traditions divergent (parfois opposées, parfois
complémentaires) : l’une qui veut que l’ on attende, pour écri re l’inspiration,
l’envie, une opportunité ; l’autre qui va dans le sens des protocoles réguliers, voire
maniaques. Dans la classe, l’enseignant doit pencher ve rs le respect des « rituels », pour la
double raison que la pratiq ue de l’écriture y est d’a bord un travail imposé, même
si nous pouvons souhaiter qu’ elle soit aussi plaisir, expression personnelle ou «
création » et que le s contraintes de la vie coll ective y sont indéniables.
Sans méconnaître les avant ages irremplaçables du travail autonome, nous
préférons, à l’exemple des at eliers d’écriture, chercher un soutien dans le fait
même du groupe plutôt que de tenter de nous soustraire à ses contraintes. Les
apprenants écrivent tous en même temps et obéi ssent à une même consigne :
c’est l’opposé du « texte libre ».
Au lieu d’être soumis aux al éas d’une « inspiration » trop souvent capricieuse, les
apprenants se plient à des habitudes et s’ aident de l’ordre qu’elles apportent : le
rythme est régulier (les apprenants écrivent chaque semaine par exemple), les
séances sont réglées, aussi bien dans leur déroulem ent que dans l’o rganisation
matérielle.
Comme pour toute activité scolaire, le respect d’usages fi xés pour la classe
permet d’écourter les mises au point prél iminaires et donc de gagner du temps ;
pour celle-ci, plus ardue que d’autres, il apporte également ré confort et soutien
aux apprenants qu i sont rassurés de re trouver leurs habitudes . Enfin et surtout,
les apprenants s’ accoutument à des pr océdures de travail, à des démarches
intellectuelles au poi nt qu’ils pourront se le s approprier et les reproduire seuls et
ailleurs qu’à l’école.
Dans cette perspective, le s enseignants doivent s’efforc er, chaque fois que cela
est possible, de leur proposer un choix afin qu’il s cherchent et se forgent
individuellement le urs propres habitudes : cela va des détails matériels aux
démarches d’écriture, de l’inst rument avec lequel ils préf èrent écrire à la manière
privilégiée qu’ils auront de conduire un récit, les uns, par exemple, l’élaborant en
partie au fil de l’écri ture alors que d’autres seront plus fidèles à un canevas initial.
Au commencement de toute s éance d’écriture, les appre nants « s’installent »,
préparent les objets dont ils ont besoin, s’aménagent de bonne s conditions pour
écrire.
Quand les questions matérie lles sont réglées, l’enseignant énonce la consigne et
la répète, en évitant de mu ltiplier les commentaires . Il demande alors à ses
apprenants de ne pas commenc er à écrire aussitôt mais de réfléchir un certain
temps en silence. Après quoi ils ont souvent besoi n de poser des questions ou de
proposer des idée s, pour vérifier qu’ils ont bien compris ce qui leur est demandé.
Ce rapide échange oral en gr and groupe aide, semble-t- il, beaucoup d’entre eux à
ne pas rester « secs » aussi bien qu’ à ne pas s’écarter de la consigne.
Lorsqu’ils écrivent, les apprenants sont embarrassés par les mots qu’ils ne
connaissent pas et très so ucieux de ne pas faire de fa utes d’orthographe : ils
sollicitent souvent l’aide de l’enseignant et réclament au ssi son avis sur leur texte
au cours même de son élaboration.
Comment répondre à tout es les demandes ?
Ne pas trop en dire tout en donnant les indi cations essentielle s, encourager les
apprenants à se débrouiller pa r eux-mêmes toutes les fois qu’ils le peuvent sans
les abandonner à u ne trop grande solitude, les cons eiller sans dénaturer leur
projet, c’est certainement là la partie la plus délicate.
Pour l’orthographe, tantôt l’enseignant les renvoie aux documents de référence,
tantôt il écrit les mots au tableau. Mais il accorde la plus grande vigilance à ne
pas laisser une séance d’éc riture se transformer en sé ance d’orthographe : il est
nécessaire que les ap prenants comprennent, dès l’orig ine, que l’or thographe est
ici un moyen qu’il faut resp ecter si l’on veut pouvoir être lu mais non une fin.
Autant que la peur des fautes d’orthographe, cert ains apprenants ont la phobie
des ratures : ils veulent blan chir ou effacer plutôt que de rayer ; ils veulent tout
recopier sur une nouve lle feuille plutôt que d’ajouter en marge ou entre les lignes
un groupe de mots ou une phrase qui manquent. L’enseig nant essaie de les initier
au brouillon, de leur apprend re la différence entre un pr emier jet, que l’on rature et
surcharge, et le texte définitif, lisible, mis en pa ge, beau à voir.
Comme dans les at eliers d’écriture, le temps es t limité, condition d’autant plus
importante que certains apprenants se résignent mal à terminer ou à
s’interrompre et voudraient toujours pour suivre, sans reconnaî tre que fatigués,
moins concentrés, ils travaillent moins bien. C’est donc impér ativement qu’une
fois le temps écoulé (généralement quarante-cinq mi nutes), ils cessent d’écrire.
Dans certains établissements scolaires, la séance d’écriture ne s’achève pourtant
qu’après lecture, par l’ens eignant, des textes qui viennent d’êt re produits.
Les apprenants écoutent avec plaisir la version de chac un : ils posent des
questions sur les passages obscurs et signalent ainsi des lacunes ou des
incohérences ; ils donne nt leurs avis, formulent leurs impressions. Ils sont curieux
et intéressés de déc ouvrir comment certains d’entre eux ont eu d’autres idées
pour répondre à la même consigne.
Rapidement, ils apprécie nt d’être ainsi, « à chaud », lecteurs de ce qu’ils viennent
d’écrire et réclament même ce moment privilégié d’écout e où leur texte a un autre
statut et, mis à distance, leur apparaît différemment.
En effet, la lecture de l’enseignant perm et aux apprenants de prendre un peu de
recul par rapport à leur texte, plus de recul assurément que s’ils lisaient eux-
mêmes à voix haute. Et, disp osant d ‘un public critique, ils s’entraînent à devenir
un peu critiques de leur propre texte.
Dans le cas d’une écriture l ongue, elle est reportée à la fin de la dernière séance,
afin que les a pprenants ne soient pas gênés ou in fluencés à l’excès par les textes
des autres. Il faut ajouter que ces habitudes on t, à notre sens, figure de « rituels », c’est-à-
dire qu’une certaine sole nnité est accordée à ces moments où l’on écrit des
textes, moments plus magiqu es et plus grav es que ceux des exercices, parce
qu’ils demandent une implicat ion plus grande et en retour suscitent chez les
apprenants un intérêt plus personnel. Comme par exempl e à l’écoute d’un poème
ou lors de la lecture d’un liv re à haute voix, un climat particulier s’étab lit dans la
classe à l’occasion de la séance d’écritu re, où l’intériorit é de chacun et les
impératifs du groupe sont moins antagonistes que d’ordinaire.
« […] On donne comme premiè re consigne à c haque participant de réécrire le
texte choisi, en lui appor tant des améliorations.
Chacun ensuite présente sa réécriture au groupe : c’es t l’occasion de voir se
déployer les multiple s possibilités d’un même texte lorsqu’il rencontre des lecteurs
différents.
On peut décider ensuite de conserver certaines améliorations, d’en rejeter
d’autres et l’on rédi ge un nouveau texte.
Mais on peut aussi décider d’écrire ensemble, sur des consignes issues de ce
texte, un texte nouveau qui dev ra rester en rapport intert extuel avec le texte de
base. C’est ouvrir la voie à l’écriture d’un texte « collectif ». »(1)
En écrivant lui aussi, l’ens eignant contribue beaucoup à établir ce climat : la
pratique personnelle de l’en seignant est importante pour servir d’exemple, de
modèle, d’encouragements aux apprenants, nous dit Clau dette ORIOL Boyer. Or,
s’ils voient souvent l’enseignant en train de lire, s’ils ont fréquemment la preuve
qu’il lit avec aisance, ils le voient beauco up plus rarement écrire et se figurent
qu’ils maîtrisent l’écriture autant que la lecture.
Dans cette perspective, l’ enseignant ne doit pas leur cacher que la chose est
souvent, pour lui aussi, comp lexe et laborieuse, qu’il « brouillon ne » et corrige.
Les apprenants sont curieu x de la pratique d’écritu re des enseignants et
particulièrement intéressés, lorsque des écrivains vie nnent aux lycées,
d’apprendre comment ils travai llent, de voir leur s manuscrits : ains i un écrivain a
montré à une classe de se conde qu’il rédigeait parfois jusqu’à sept ou huit
épreuves avant de parveni r à la version finale.
Il arrive à l’enseignant d’éc rire selon la même consigne que les appre nants et de
leur lire son texte de la même façon qu’i l lit les leurs, comme un exemple et non
comme le modèle. Mais à la différence des ateliers d’écritu re, l’enseignant ne peut écrire en même
temps que ses a pprenants, parce qu’il s sollicitent trop son attention.
II-6. L’ECRITURE LONGUE OU ECRITURE D’UN TEXTE EN
PLUSIEURS SEANCES
Imposer à des appren ants de poursuivre l’écriture d’un texte sur plusieurs
séances est une gageure ! Même s’il n’est pas vr ai que l’enthousiasme
s’émousse et que l’oubli s’inst alle en quelques j ours, ils répugnent à se remettre à
l’ouvrage et préfèr ent prendre une page blanche p our commencer une nouvelle
histoire plutôt que de poursuivre leur ef fort jusqu’à son terme. Tout travail de
longue haleine es t une épreuve.
Pourquoi souteni r cette gageure ?
Par nécessité dans le cas d’écrits qui s’ élaborent en fragment s échelonnés, tels
chronique, journal de bord, etc. ; par choi x, dans le ca s de l’écriture romanesque :
en effet, les apprenan ts ont besoin de plus de trente minutes pour écrire un récit
et il ne servirait à rien de prolonger abus ivement la durée d’une séance. Le temps
nécessaire à l’écriture est don c réparti sur plusieurs jours. Ils écrivent plus vite
des récits plus longs, mais avec deux ou trois séance s, ils parvie nnent à des
textes différents, moins schématiques, où entrent par exemple des parties
descriptives ou dialoguées.
Pareille méthode présente en outre l’avantage d’initie r les apprenants à une forme
de travail qui n’est pas sans analogie av ec la lecture suiv ie. Ils apprennent à
interrompre et à reprendre l’é criture, constatent que dans les interva lles le texte
mûrit au hasard des lectur es et des événements quotidi ens. Ils comprennent ainsi
que l’écriture n’est pas la simple transcr iption sur le papier d’un texte que l’on
aurait entièrement prémédité, confusion pourta nt répandue.
On conduit trop souven t les apprenants à « bâtir le plan » de l eur histoire avant de
la « rédiger », sous l’in fluence d’une constr uction rigoureuse d’un raisonnement.
Or un récit s’organise à parti r de l’idée initiale qui a suscité les premiers mots,
mais aussi se transforme et s’élabore au fil de l’écriture.
Enfin, la répartition du travail en pl usieurs séances cond uit peu à peu les
apprenants à ne plus co nfondre l’arrêt de l’exe rcice avec la clôtur e du texte et leur
permet d’affiner leur perception du récit et de sa nécessaire unité.
Ces avantages ne sauraient pourtant masquer la diffic ulté essentielle qui se
présente aux apprenants : il s doivent ajuster leur écri t à la durée qui leur est
accordée, c’est-à-dire ne finir ni trop tôt ni trop tard. Il est i ndispensable de leur
annoncer, d’entrée de jeu, qu’ils disposeront de pl usieurs séances et ne doivent
donc pas écrire tout, tout de suite et très vite.
Certains apprenants n’arrivent jamais à te rminer leur texte, soit qu’ils désirent
multiplier les épisodes, soit qu’ils n’acce ptent pas de faire un e fin. Pour qu’ils
parviennent à un résultat, l’enseignant est ob ligé de donner un coup de pouce,
par une consigne qui relance le travail ou une aide individuelle : il rappelle ce
qu’est un récit, en discute avec l’apprenant. On peut même prolonger le travail à
la maison, à l’us age des parents :
« […] les parents et l’enf ant lisent, chacun à leur tour, à voix haute, une des
histoires à la courte paille, en s’a rrêtant juste avant le premier épilogue.
Chacun propose une fin. […] On compare les mérites des uns et des autres, on
se reporte à l’avis de l’auteu r, on l’approuve ou on le cr itique. C’est un moment de
communication familiale tout à fait priv ilégié …mais rien n’ empêche de continuer
le jeu avec d’autres livre s ou sous d’autres formes, en se mettant par exemple à
écrire avec son enfant su r les consignes d onnées par le pr ofesseur. Rien
n’interdit non plus de mont rer ce que l’on a produit à l’enseignant ou à d’autres.
Plus cette formation essaimera hors de la classe, plus son effervescence sera
contagieuse, plus l’apprenti ssage s’enrichira et deviendra, à tout instant, l’affaire
de tous dans des coopérations inouïes. »(1)
Entre les séances, l’ens eignant a le temps de lire tous les textes, d’en corriger les
fautes d’orthographe, de les recopier lisiblement s’il le faut et, donner son avis sur
les qualités et les faiblesse s de tel ou tel passage. Hors situation, loin du groupe,
il peut prendre co nnaissance du travail de chaque apprenant et proposer en
retour une aide individuelle . C’est également l’ occasion de vérifier que la consigne
convenait, sinon de la compléter.
A chaque reprise de travail, l’apprenant doit relire ce qu’ il a déjà écrit, avant de
poursuivre, les i ndications jointes par l’enseignant. Parfois, il cont inue son récit
dans le fil de l’idée pr emière ou, plus souvent, l’a dapte selon ce que lui ont
suggéré les discussions à la maison ou en classe, ses n ouvelles lectures et les
idées de l’enseignant. Le travail échelonné prés ente donc la double qualité de mettre en évidence
certaines réalités de l’écri ture et de respecter le rythme des a pprenants dont
l’attention est soutenue pen dant des durées courtes ma is répétées. Le nombre
optimal est, semble-t-il, de trois séances ma is il est à réduir e ou à augmenter
d’une séance pour certains groupes ou po ur quelques apprenant s avec la plus
grande souplesse.
II-7. LA REECRITURE
Les premières fois où ils écrivent, à la vue de la page pleine, les apprenants
manifestent une grande satisfaction. Ils sont comme étonnés de ce qu’ils ont
réussi à faire, plus éton nés encore qu’on puisse leur demander de reprendre leur
texte. Ils sont tellement soulagés qu’ils n’ont pas envie d’y revenir ; peut-être
certains croient-ils to ut d’abord que « ce qu i est écrit est écrit », sans qu’il soit
possible d’y ri en changer.
Progressivement, ils comprenne nt qu’il ne suffit pas de remplir la page, qu’on
réclame d’eux autre chose : ils sont aidés dans cette percep tion par l’enseignant
et leurs camarades qu i, en lisant les textes, en en parle, en les « critiquant »,
contribuent à les faire exis ter aux yeux de leurs auteurs. Prenant de la distance,
les apprenants commencen t à juger leur écrit, ses qual ités et ses faiblesses ; ils
se font ainsi à l’idée de la « réécriture ». Mais il ne suff it pas de voir les défauts
d’un texte pour parvenir à les corriger, ni de sentir qu’il es t médiocre pour
l’améliorer : la réécriture requiert un apprentissage spécifique et l’enseignant doit
y consacrer certaines séances. A l’école, la réécriture prend place sous sa forme
la plus modeste, celle des corrections orthographiques et grammaticales.
Contrairement à l’école prim aire où il arrive à l’en seignant de corriger lui-même
les fautes d’orthographe, en recopiant lisib lement le texte d’un petit apprenant, au
lycée et au collège, l‘enseignant si gnale les erreurs pour que l ‘apprenant les
corrige, au besoin avec son aide. Pl us subtiles sont les corrections
grammaticales, puisqu’à la classique gr ammaire de phrase s’adjoint désormais la
notion de grammaire de text e. Les apprenants, aidés de l’enseignant, corrigent
non seulement les erreurs da ns la morphologie des ver bes mais aussi les fautes
dans l’emploi des temps, dans la syntaxe (de la né gation, des subordonnées…),
les incohérences, etc. La réécriture cons iste alors à respecte r les normes et, pour
les apprenants, c’ est, dans bien des ca s, de les découvrir.
La consigne est une règle supplémentaire qui, lo rsqu’elle n’est pas respectée,
appelle une réécriture. Mais il est raisonnable de pens er qu’une consigne est
mauvaise quand la majorité des textes ne l’ont pa s appliquée. L’enseignant
cherche avec chacun des appre nants les éléments à garder, à effacer, à déplacer
et les transformations né cessaires ; il essaye de les dissuader d’adopter la
solution radicale qui séduit souvent le s nouveaux apprenants, à savoir tout
recommencer à zéro comme si le premier écrit n’avait pas existé.
Mais force est de reconnaître que la r éécriture n’a pas seul ement pour but la
réalisation d’un exercice co rrect et fidèle à une consigne. Elle vise la qualité du
texte, son style, sa beauté, son intérêt.
Les apprenants de vraient porter le même regard su r ce qu’ils écrivent que sur les
livres qu’ils lisent.
A condition qu’ils aient éprouvé des impre ssions de lecture, ils ont (très tôt) une
intuition de la valeur des text es, une idée implicite de la qualité littéraire : il revient
à l’enseignant de les ai der à formuler et à expliciter ces jugements, à élucider des
critères esthétiques et à ob server les moyens de leur mise en œuvre (pourquoi tel
récit, tel poème est origi nal, beau, intéressant….). Les apprenants ont alors des
repères et des moyens pour évaluer les textes de le urs camarades de classe et
les leurs, pour juger s’ils peu vent être considér és comme achevés ou s’ils doivent,
au contraire, être retravaillés.
Entre les textes littéraires que l’enseignant leur lit ou leur fait lire, les apprenants
établissent des rapprochement s, remarquent des parentés et des différences, et,
se construisant ainsi une première représentation de la littérature, ils sentent
mieux vers quoi faire porter leur effort d’ écriture. Ils puisent, dans cette cu lture qui
s’ébauche, des idées et des références. A l’occa sion de la réécri ture, l’enseignant
leur propose des modèl es plus étroit ement liés à ce qu’ils écrivent, où ils pourront
emprunter des solutions : avec ces fo rmes élémentaires de pastiche, les
apprenants s’inscriven t dans la viei lle tradition des appren ants qui copient et
imitent les œuvres des enseigna nts et / ou des écrivains.
Les apprenants ont de la peine à retoucher leurs écrits parce qu ’ils entretiennent
une grande proximité avec leurs propres textes. Dans cette perspective,
l’enseignant leur donne l’occasion de s’exercer à la réécriture en transformant des
textes dont ils ne sont pas les auteurs.
Reprenant le matériau imaginaire d’un autre, dégagés du souci de l’amélioration,
ils sont plus disponibles pou r s’attacher à l’écriture. Ce la peut aller des exercices
simples à des textes littérair es dont il s’agit de transp oser des points de vue, de
changer le ton, le genre, le registre ; nou s pouvons ainsi ré duire, expanser,
poursuivre, compléter, introduire, etc.
Il est évident qu’un bon text e, un texte d’écrivain, est pl us stimulant et suscite une
réécriture de meilleure qua lité qu’un texte médiocre.
Ces séances que les a pprenants travaillent sur leur pr opre texte ou sur des textes
d’écrivains ont pour but de leur appre ndre à corriger, transformer, adapter,
améliorer ce qu’ils ont écrit et simulta nément à mieux écrire. L’expérience montre
qu’ils acceptent sans trop de mal cette déma rche qui ne leur était pas naturelle et
certains réclament même systématiquement de retravailler leur texte. Pourtant, la
pratique abusive de la réécriture serait nuisible car c’est une tâche trop rude pour
être imposée fréquemment à des apprenants, même si le premier jet ne soit pas à
reprendre. Par ailleurs, si toute séance d’écriture se doublait d’une séance de
réécriture, nous risquerions d’aller à l’e ncontre du but visé : sachant que les
apprenants auront la possibilité de retoucher leurs textes, certains d’entre eux en
bâclent la première vers ion, tandis que d’autres, pa rce qu’ils sont toujours
insatisfaits, ne savent pas mettre un terme aux réécritures successives.
La réécriture imposée par l’enseignant n’a d’ intérêt que si elle conduit l’apprenant
à travailler spontaném ent son propre texte.
II-8. LA DIFFUSION DES TEXTES
Au cours d’une année scolaire où l’on écrit très ré gulièrement, les productions
d’écrits sont abondantes et di verses. Néanmoins, il n’es t pas question de réserver
à toutes le même sort. Les bouts d’essa i (phrases isolées, ti tres, expressions…)
sont seulement griffonnés au brouillon. Les textes les plus achevés méritent davantage d’honneur : ils sont mieux servis
par une présentation so ignée, voire élaborée.
La formule de cahier indi viduel de préparation, où ch aque apprenant co nserve ce
qu’il a écrit, plaît aux élèves, de la même façon qu’ils aiment le cahier où sont
rassemblés les poèmes qu’ils apprennent.
Les apprenants écrivent à la main leurs textes ou au micro-ordinateur, avec le
souci de la mise en page, sur une feuille vierge, sans le quadrillage du papier de
cahier, afin qu’ils se démarquent nett ement des exercices plus scolaires. Ces
productions sont ensuite collé es dans ce cahier qui s’apparente à un recueil, avec
le même soin de la lisibilité, de l’esthéti que de la présentati on et parfois de
l’illustration.
Les productions d’écrits les plus élaborées doiven t être traitées avec respect afin
que leurs auteurs soient encouragés à écri re le mieux possible. Mais ces cahiers
ne sont lus que par l’apprenant et l’enseig nant, éventuellement par la famille. Or
la diffusion des écrits est un caractère intrinsèque de l’ écriture. C’est pour qu’un
texte soit lu que son au teur l’écrit, le travaille, veille à ce qu’il soit lisible, cherche
à retenir l’attention et l ’intérêt de lecteurs futurs.
Dans cette perspective, la pédagogie Freinet joue sur deux motivations
étroitement associées : le plaisir de voir son texte bien présen té et celui de le
savoir lu par de nombreux lecteurs. C’est la socialisat ion des écrits qui peut seule justifie r la pédagogie de
l’expression libre.
Dans une classe de 1ère année secondaire, l’habitude a été prise de rassembler
tous les textes écrits se lon une même cons igne en un rec ueil dont chaque
apprenant reçoit un exemplaire.
L’ensemble de ces recueils constit ue le livre d’une an née d’écriture.
L’enseignant ne choisit pas par mi les textes, il ne fait pas voter le s apprenants :
ceux-ci, sachant que tous les textes sero nt « publiés », sont incités à écrire
chaque fois le mieux possible.
Qu’il soit facile pour les parents de comparer les pro ductions d’écrits n’est pas
une objection majeure, d’autan t plus que, d’une consigne à l’autre, ce ne sont pas
les mêmes appre nants qui font les te xtes les moins bons ou les meilleurs.
Cette publication doit être aussi modeste que rigoureus e et se garder de deux
excès : le premier serait de faire croire aux apprenants que leurs textes sont à
l’égal de ceux des écrivain s, le second de diffuse r des textes incorrects,
incohérents ou remplis de fautes d’orthographe.
Il revient à l’ense ignant, si les appr enants n’ont pas effe ctué les corrections
nécessaires avec son aide, de le faire, en dernier recours, à leurs places.
Aussi, les apprenants peuvent taper eux-mêmes leurs textes . Ainsi, ils voient et
lisent leurs propres textes , non plus manuscrits, mais présentés co mme ceux des
livres de lecture. Ils peuvent faire circuler au tour d’eux, dans et en dehor s du lycée, ces traces de
travail de toute une anné e, effectué dans la cla sse mais qui la déborde.
CHAPITRE III
DE LA CONSIGNE A L’EVALUATION
III-1. LES CONSIGNES
Penser l’écriture de s textes en fonction des co nsignes, c’est évidemment
tourner le dos à la pratique du texte libre, mais aussi à ce lle de la réda ction. La
consigne n’est ni un sujet ni un thème.
C’est « une instruction déter minant les conditions à obser ver pour l’exécution de
la tâche»(1).
La consigne précise et limite les dimensions d’un tr avail, donc de l’évaluation de
ce travail.
Cela suppose que l’enseignant s’est fixé des objectifs dan s le domaine qui est le
nôtre, certains aspects de l’écriture à travailler (t hématiques, linguistiques,
rhétoriques, esthétiques). L’enseignant décide de s situations d’écriture à mettre
en place, des supports utilisables à certains moments des apprentissages.
Il réfléchit à la nature des consignes correspondant à ces situations et à ces
supports. Il cherche le l angage le plus approprié, le moins ambigu, le plus
compréhensible et le plus persuasif pour formuler les consignes devant les
apprenants.
Ecrire à partir des consi gnes, c’est imposer des cont raintes qui ne prennent leur
sens que si elles sont en même temps des aides à l’écriture, pa r exemple, si elles
offrent des outils formel s pour démarrer un genre. L’ enseignant décide alors
d’imposer un objet de travai l : les autres aspects du te xte seront laissés au libre
choix de chaque apprenant. L’enseignant choisit aussi d’ai der plus ou moins ; dans to us les cas de figure, il
s’agit de faciliter une tâche.
III-2. PENSER UNE CONSIGNE
La consigne détermine un ou plus ieurs aspects du texte à écrire.
III-2-1. Les contraintes thématiques
A de rares exceptions près, jeux p oétiques privilégiant des aspects phonétiques
et syntaxiques des énoncés , nous n’utilisons pas de consignes d’écriture
indépendantes de thèmes.
Nous entendons essentiellement par thèm es des types de héro s et de personnages,
de lieux et d’actions, ma is aussi des objets de na rration, de conversation,
d’argumentation. Les contraintes thémat iques aident à avoir des idées, souvent
parce qu’elles renvoien t à des textes-sources . Les consignes qui les expriment
peuvent plus ou moins limit er le champ thématique.
III-2-2. Les contra intes linguistiques
Elles permettent de vaincre la peur de la page blanche. Elles guident l’écriture en
l’amarrant à des signes qui anticipent le sens, qui lui tracent ses chemins. Elles
peuvent aller jusqu’à déterminer le type de texte à produire.
III-2-3. Les contraintes textuelles
Conformément au vœu de l’enseignant, sans que la consigne l’ ait explicitement
réclamé, le texte peut co mporter des éléments narrati fs et descriptifs : la
connaissance de l’espace référentiel induit ce type de texte.
Le texte produit peut aussi êt re un récit conversationnel ou un énoncé prescriptif.
C’est donc le type de text e de départ (le texte source proposé par l’enseignant) qui
oblige les apprenant s à produire leur(s) texte(s).
III-2-4. Rédiger, corriger une consigne
La rédaction d’un e consigne d’écriture demande la plus grande atte ntion. Elle ne
supporte pas l’improvisation : l’enseignant doit m éditer ce que va entraîner le choix
des mots et des tournures, surtout le syst ème d’énonciation : quel temps utiliser ?
Quel pronom ? Va-t-il y avoir un verbe introducteur ? etc.
Une consigne formulée d’u ne manière inadéquate compli querait le travail de
l’apprenant, provoque l’e nlisement de l’écritu re et des dysfonctionnements textuels.
La consigne peut également êt re mauvaise parce que, mê me bien formulée, elle ne
s’ajuste pas à l’univers di égétique (personnage, lieux , sentiments) du texte de
lecture qui sert de support, ou, plus insidi eusement, elle oblige l’apprenant à répéter
ce que dit le texte-source, qui est donc connu de toute la classe.
Dans ce cas, la répug nance qu’ont certains apprenants à écrire ou la faiblesse des
textes des autres doiven t conduire l’ensei gnant à corriger la consigne.
La formulation de la consigne doit éviter toute ambiguïté. Celle-ci se glisse souvent
par l’emploi des pronoms de l’énonciation, première et deuxième personnes.
L’utilisation de la premiè re personne du sin gulier (le je) est encombrante pour les
petits apprenants. La prem ière personne du plur iel (le vous) est meilleure ; mais,
pour un certain nombre de consignes, la troisième personne semble la plus
maniable.
Certaines consignes ont pour objectif d’ amener les apprenant s à reprendre leur
travail, suite à une prem ière consigne qui a été par tiellement mal appliquée.
L’exercice de réécriture risq uant de devenir rébarbatif, pl utôt que de reproposer la
même assortie de commentai re, l’enseignant a tout in térêt à en formuler une
nouvelle pour stimuler et relancer le désir des apprenants.
C’est donc bien souvent la lecture des premiers écri ts des appre nants qui nous
permet de savoir si la consigne était bonne ou si elle nécessite des modifications. Il
est hasardeux d’élaborer des consignes « en chambre» : c’ est dans sa classe, c’est
dans une atmosphère de trav ail particulière, av ec des préoccupations et des intérêts
qui ne sont pas nécessairement ceux de se s autres collè gues, même si les objectifs
généraux restent les même s, que l’enseignant essaie les consignes et les
formulations qui lui paraissent les meill eures. L’absence d’ambi guïté et la plus
grande précision restent les qualités e ssentielles de to ute consigne.
III-2-5. Exposer oralement une consigne
Le moment d’écriture se prépare. Il s’agit d’abord de la préparati on matérielle :
disposition des tables, regroupe ment des cahiers, etc. Un e fois la mise en place
terminée, il faut cr éer une atmosphère d’attention et d’attente : une consigne qui
n’est ni entendue ni attendue ne dé clenche aucun travail profitable.
Les activités d’écritures étan t liées à des séances préalabl es, il convient d’abord de
faire la liaison avec la le cture, qui sert de support.
L’enseignant n’évoque que ce qu’il est indi spensable de rappeler en perspective de
l’exercice ; un court dialog ue peut s’établir avec les appr enants, mais il convient
d’être précis, de dégager l’essentiel, de résu mer clairement et fortement les
éléments dont la conn aissance va être réinvestie. Vi ent le moment d’énoncer la
consigne. Chaque mot ay ant été pesé lors de sa rédaction, l’ensei gnant la formule
exactement dans les mêmes termes, en évitant toute modification syntaxique engendrée par la présence d’un verbe intro ducteur (du genre « j’ aimerais que vous
écriviez…».
L’énoncé est fait très distinctement avec un débit et une intonation qui permettent de
distinguer nettement la consigne de la pr ésentation préalable.
Elle est répétée une seconde, voire une troisième fois. Après un temps de silence
où les apprenants sont invités à réfléchir, ils éprouvent souvent le besoin de poser
des questions ou de proposer des idées pour vérifier qu’i ls ont compris. De courts
échanges peuvent s’instaurer, mais il faut prendre garde que la consig ne ne soit pas
noyée dans un bavardage qui fera it oublier l’instruction et reculerait à plaisir le
moment où il faut commencer. Dès que l’écriture a effectiv ement démarré, mieux vaut év iter d’avoir à répondre à
de nouvelles questions qui obligeraient à une reprise commentée et illustrée de la
consigne.
Une consigne d’écriture ayant été normalement préc édée par des activités qui
rendent possible son exécuti on, si des explications s upplémentaires s’imposent,
c’est qu’elle a été mal préparée.
Une consigne bien pensée et bien formulée non seulement facilite la tâche de
l’apprenant, mais aussi celle de l’ens eignant en lui of frant des critères précis pour
l’évaluation des textes.
CHAPITRE IV
L’EVALUATION ET LA CORRECTION DES
TEXTES
Nous pouvons tenter une définition de l’évaluatio n scolaire en s’interrogeant
sur ses buts. Jean CARDI NET (1) en définit quatre buts, fondamentaux :
– a) « Améliorer les décisions re latives à l’appr entissage de chaque
élève,
– b) informer sur sa progressi on l’enfant et ses parents ;
– c) décerner les certificats nécessa ires à l’élève et à la société ;
– d) améliorer la qualité de l’enseigne ment en général. »
Il précise qu’il ne peut s’ag ir d’évaluer de la même faço n dans tous les cas. En
effet, même si l’évaluation porte sur le même objet, à savoir une production
d’élèves, elle comporte des fonctions différentes : pédagogique, sociale et
institutionnelle.
Évaluer consiste donc esse ntiellement à fournir des informations à différents
destinataires : élève (s), professeur lu i-même, parents, admini stration scolaire,
autres professeurs, soci été… surtout en vue de prendre des décisions : proposer
des activités d’apprentiss age, de soutien ou de rem édiation ; décerner un
diplôme ou certifier de la maîtrise de compétences; tran sformer les méthodes et
les modalités de l’ens eignement, etc.
La diversité des destinata ires engendre d’ailleurs une première difficulté
fondamentale, parce que la nature de l’informati on attendue est différente pour
chacun :
Il y a souvent incompatibilité , voire contradiction, entre les informations fournies
aux uns et aux autres parce qu’elles ne sont pas fondées sur la même « logique
» et parce qu’elles relève nt, par nature, de modèles di fférents de la relation
pédagogique. D’autre part, nous retenons la définition de l’éval uation proposée par G. de
LANDSHEERE (1) : « Estimati on par une note d’une modalité ou d’un critère
considéré dans un compor tement ou un produit. »
Nous sommes conduits à valider l’acception la pl us triviale du terme,
celle qui structure la re présentation la plus largement partagée sur sa
nature, mais aussi certainement la plus réductrice : évaluer, c’est
toujours et principalement attribuer une note (1).
Cette définition s’accorde avec le tr oisième but de l’éval uation défini par
J. CARDINET (décerner le s certificats nécessaires à l’élève et à la
société) ; elle n’ est pas pertinente po ur les autres buts.
G. de LANDSHEERE (2) précis e toutefois que l’évaluation
« … comprend
à la fois la description qualitativ e et la description quantitative des
comportements et comp orte, en outre, des j ugements de valeur
concernant leur désirabilité. »
Il est là question de to ut autre chose que d’une note qui « mesure » un
comportement ou un produit, et c’est en cela que réside t oute la difficulté, mais
aussi toute l’ambiguït é de l’évaluation.
La question de l’évaluat ion est fort complexe.
Elle demande à l’enseignant une clar ification des objectifs visés par
l’apprentissage de la producti on d’écrits, c’est-à-dire no n seulement des objectifs
généraux, mais aussi des objectifs circonscrits en fonction d’un niveau
d’enseignement, d’un mo ment de l’année et d’un aspect localisé du
fonctionnement textuel à travailler, tenant compte de ce qui a déjà été examiné
avec les apprenants.
On distingue trois grands types d’évaluation : l’évaluat ion formatrice, l’évaluation
sommative et l’évaluation formative.
IV-1. L’EVALUATION FORMATRICE
D’après C. HADJI (1), l’évaluation formatrice est une «… évaluation qui, en
fonction de l’idée que s eul l’élève peut vraiment réguler son activité
d’apprentissage, et de la prise en compte de l’impor tance de la représentation
des buts à atteindre, vise l’appropriati on par l’apprenant des critères de
réalisation du produit et d’appréciation de la production, l’ac tivité didactique se
centrant pour cela sur des tâches concrètes et n on sur des objectifs formels. »
Ce type d’évaluation est, on le voit, ess entiellement conçu comme un outil
spécifique d’apprentissage qui a sa place dans le processus même de
l’apprentissage. Elle permet :
a) le progrès vers l’expertise et l’autonomie de l’élève en le co nviant à mettre en
œuvre des procédures mé tacognitives à ch aque moment de son apprentissage;
b) l’émergence de r eprésentations cohérentes néce ssaires à la maîtrise :
représentation du produit, repr ésentation de la tâche, représentation des buts.. .
c) l’implication active de l’élève dans le processu s d’apprentissa ge qui donne du
sens à l’action. L’évaluation formatrice est donc le vecteur d’une réelle appropriation des savoirs
et des savoir-faire.
IV-2. L’EVALUATION SOMMATIVE
L’accent, ici, est mis sur la noti on de produit de l’activité d’un élève. Son
destinataire est prioritairement l’institut ion scolaire et la société. L’objectif
principal de l’évaluation sommative est un obj ectif de certificati on. En effet, elle
permet :
a) de fournir un bilan qui situe l’appr enant par rappor t à une norme ou à des
critères établis; b) de prendre des décisions de type inst itutionnel : obtent ion d’un diplôme,
passage dans une classe su périeure par exemple ;
c) de situer les apprenants les uns par r apport aux autres, à l’ intérieur d’un ou de
plusieurs groupes. L’évaluation sommative, faisant la somme des apprentiss ages réalisés, se traduit
le plus souvent dans une note.
J. CARDINET (1) note que l’évaluation sommative «… porte sur un objectif
terminal, plutôt que su r des savoirs partiels : si l’on fa it l’effort d’établir un bilan,
on voudrait qu’il renseigne sur quelque chose d’importan t et d’utile socialement
[…] Elle porte normalement sur des résult ats acquis de façon relativement stable,
car totaliser des acquisiti ons qui s’oublieraient immé diatement n’aurait pas de
sens. » et il ajoute :« On tend souvent à confond re ces deux évaluations
(formative et sommative), en parlant d’un niveau globa l de compétences
caractéristiques d’un bon ou d’un mauvais élève. Cep endant, tant que l’élève est
encore en train d’apprendre, un bilan est prématuré. Po ur prendre des décisions
d’ordre pédagogique, d ans la pratique journalière d e l a c l a sse, c’est une
évaluation formative dont on a besoin : il faut se garder de juger trop vite le
niveau général de réussite d’un élève. » Une recommandation à méditer, en tout
cas, pour redo nner à l’évaluation sommati ve sa véritable foncti on : faire le bilan
des apprentissages app ropriés et consolidés. Ailleu rs, il distingu e l’évaluation
sommative externe de l’évalu ation sommative interne.
La première : « juge le résultat social de l’enseig nement. […] Elle certifie que le
but final de la formation a été atteint, donc que les élèves ont acquis les
compétences dont la société a besoin. […] Elle cont rôle la maîtrise de situations
réelles, et donc exté rieures à l’école. » (1)
La seconde : « juge les savoirs et les savoir-f aire scolaires. […] Elle ne prépare
pas directement à la vie active. C’est pou rquoi les examens scolaires se centrent
presque exclusivement sur les disciplines ens eignées, conçues co mme des outils
indispensables pour des formations ultérieures. » (1)
IV -3. L’EVALUATION FORMATIVE
« Évaluation intervenant, en prin cipe, au terme de chaque tâche
d’apprentissage et ay ant pour objet d’informer él ève et maître du degré de
maîtrise atteint et, éventuellement, de dé couvrir où et en quoi un élève éprouve
des difficultés d’apprentissage, en vue de lui proposer ou de lui faire découvrir
des stratégies qui lui permettent de progresser.» G. de LANDSHEERE(2)
C’est une évaluation qui per met aussi à l’apprenant d’év aluer lui-même ce qu’il
sait, ce qu’il ne sait pas, ce qui fait qu’il ne réussit pas et, en ce sens, elle est un
chemin vers l’au toévaluation.
Enfin, c’est un type d’évaluation qui pe rmet de mettre en plac e une pédagogie de
la réussite, source de motivation. Son objectif principal est la régulation du
processus d’ap prentissage.
Il s’agit donc, essentiellement, d’un pr ocessus de rétroaction. En fournissant à
l’apprenant, qui en es t le principal destinataire (1), des informations sur ses
progrès par rapport à un object if déterminé, elle permet :
a) d’intervenir dans le pr ocessus d’apprentiss age pour infléchir les modalités de
l’action en cours;
b) de transformer les contenus d’appren tissage, de permettr e à l’apprenant de
transformer ou de varier ses méthodes et ses stratégies d’ apprentissage ;
c) de décider des acti ons d’aide nécessaires (soutien notionnel, aide
méthodologique …).
L’évaluation formative perm et donc de remplir les deux premières fonctions
assignées à l’évaluati on par J. CARDINET. Elle cons iste également à fournir des
informations, des appréciations sur le travail, les acti vités et les productions de
l’apprenant. Elle est irréductible donc à un résultat chiffré.
L’évaluation formative n’est pas, dans tous les cas, qu’ une évaluation terminale,
qui se situerait toujours après une tâch e; elle constitue également, par nature,
une évaluation diagnosti que ou une évaluation pro nostique qui peut donc
intervenir en début de séquence d’apprentissage ou avant une séance de travail
subordonnée à un obje ctif spécifique.
Évaluation diagnostique, car el le permet alors de mettre en lumière les difficultés
liées à l’apprentissage et donne des indi cations sur les obstacles à surmonter ;
en ce sens elle est une év aluation qui sert à mettre en place des activités propres
à lever ces obstacles d’apprentissage. Comme le précise J. CARDINET (1).
« L’évaluation diagnos tique porte […] sur les acqui sitions et les démarches, sur
les aptitudes, sur l’histoire et le contexte social de l’ élève. Elle s’ appuie sur une
analyse de ses productions et sur l’observation de son comportement pour
formuler des hypothèses, et suggérer des remèdes. »
Évaluation pronostique, da ns le sens où elle perme t de déterminer si un élève
maîtrise les pré-requis né cessaires pour la poursuit e des apprentissages prévus
dans une séquence. Elle renvoie, alors, des inform ations sur les apprentissages
prioritaires à consolider, à s’approprier en vue de la réussite des apprentissages
ultérieurs.
Cette évaluation qui nous im porte le plus dans le c adre de notre travail de
recherche exige l’élaborati on et la pratique d’outi ls d’analyse des textes,
conduisant à la fabrication de grilles, à travers le squelles des critèr es préétablis
permettent de juger les productions.
Elle demande en plus l’é laboration d’outils d’in tervention pour aider les
apprenants à réécrire leurs textes en supprimant les dysfonctionnements
constatés.
Une véritable évaluation fo rmative(1)suppose, en outre, chez les enseignants,
des comportements qui font parfois défaut (la reconduction des épreuves bilans
trimestriels est plus facile à installer que l’élaboration de crit ères d’évaluation en
rapport avec les objectifs et les phases d’apprentissage).
Les discours novateurs des sciences de l’é ducation oublient enfin les conditions
de travail : classes surchar gées (jusqu’à soixante élèv es dans une classe de
terminale langue dans un lycée à Oran), multiplici té des épreuves à évaluer. On
ne s’étonnera donc pa s que dans bien des classes la question de l’év aluation soit
recouverte par celle de la correction. L’enseignant y impose arbitrairement des choix qu’il se trouve incapable de
justifier autrement que par le recours à son sentiment personnel. Il est tenté par
le soulignage généralisé des « fautes » et par la note qui vient simplement
sanctionner un su ccès ou un échec parfois m ystérieux pour l’apprenant.
On comprend, en réacti on, la mode à laquelle ont succombé certains
enseignants de se garder de toute note chiffrée.
La question de savoir s’il est préférable d’adopter un codage ou d’éviter l’encre
rouge, symboliquement chargée de l’idée de faute, reste d’une importance
secondaire dans les débats act uels sur l’évaluat ion formative.
Tout en étant pleinemen t conscients de l’écart entre les déclarations d’intention
sur les nouvelles formes d’ évaluation et la réalité du fonctionnement des classes
et des établissements scola ires, nous poserons un cert ain nombre de principes
auxquels nous tenons et nous avancerons des idée s et des outils pour la
construction de gr illes d’évaluation.
IV-4. LES PRINCIPES
A chaque apprent issage, une évaluati on doit permettre à l’enseignant de se
rendre compte des acquisitio ns de ses apprenants, de l eurs erreurs et de leurs
lacunes. Celles-ci sont à considérer comme un moment de l’apprentissage. Leur
analyse doit s’accomp agner de l’offre de moyens pour aide r les apprenants à
progresser. Ce principe, fort général, peut s’app liquer à la production textuelle, à
condition de prendre en co mpte le fait suivant : un texte est une création
complexe, qui s’organise à différents niveaux et qui demande des compétences
multiples. Il n’est possible ni de t out analyser ni d’in tervenir sur les
dysfonctionnements. Il faut donc se résoudre à tr availler sur des po ints précis, en
fonction des occasions qu’offrent les te xtes-supports et le s consignes, et
accepter des faut es de langue.
Les séances de production de textes, surtout dans des classes où le niveau est
faible, ne peuvent pas tourner à la corre ction systématique de l’orthographe, de
la syntaxe, ni même de l’ensemble de la ponctuation. L’orthographe se
constituera à la dem ande, en cours d’écri ture, ou fera l’objet d’une rectification
silencieuse de l’enseignant. Des tableaux pédagogi ques, élaborés tout au long de
l’année, peuvent rappeler q uelques règles syntaxiques si mples et les normes de
la ponctuation. Les corrections varient selon les activités. Dans le ca s de l’écriture longue ou de
la réécriture, elles peuvent être minutieuses. Mais certains exercices constituant
des gammes d’écriture sont déjà en eux-mêmes des corrections. Ce sont des
bouts d’essai, qui ne seront ni repris ni recopiés, et qui peuvent finir à la poubelle.
Il nous paraît bon que la le cture des textes de la classe soit suivie de discussion,
que les apprenants émettent des avis de lecteurs et d’auditeurs. Ils peuvent
proposer par eux-mêmes des critères d’évaluat ion. Ainsi, à la le cture d’un récit,
les apprenants ont dit : « ce n’est pas une histoire, on ne comprend pa s le début ;
où il ne se passe rien à la fin ». Dans d’autres cas, il s ont remarqué que des « il »
ou des « elle » à la dérive faisaient qu’on ne savait pa s qui parlait ou qui faisait
quoi. Ces moment s sont toujours très riches, parce qu’ils témoignent chez les
apprenants des différences dans l’acceptabilité des textes, ce qui invite
l’enseignant à réfléchir sur ses pr opres critères d’acceptabilité.(1)
Certaines obscurités ne gênent pas de jeunes apprenant s, à notre grand
étonnement. Intercaler une phrase ou quel ques détails suffit parfois pour justifie r une série
d’actions.
Les apprenants découvrent de s procédés de fabrique de s textes. Mais ils ne
doivent pas transformer ce s échanges en correction collec tive d’un texte
individuel comme on le voit plus souvent lors de la mise au point des textes
libres.
Dans le système traditionnel et des anno tations d’expression écrite, c’était
l’arbitraire des choix des enseignants qui, souvent, n’ét ait pas accept able. Un tel
interdit d’employer « être » ou « faire », et la phrase « Les fleurs sont jaunes »,
refusée, devient « Les fl eurs deviennent jaunes ».
Pour réduire l’arbitraire, il faut sérieusement prendre en compte ce qu’implique la
consigne, les contrainte s thématiques ou formelle s auxquelles elle engage
(genre, forme, tonalité, et c.) mais aussi toutes les libertés que, heureusement,
elle permet. Sinon c’ est que d’autres interdits, plus sournois parce que mal
formulés, accompagnent tout acte d’écriture, en part iculier en situation scolaire.
Réduire l’arbitraire des co rrections suppose donc au départ u ne bonne co nsigne,
rédigée et formulée avec clar té et précision, allant même jusqu’à proposer une
bribe du texte souhaitée. Ce qui sera évalué posi tivement ne sera pas ce qui plaît
à l’enseignant selon la conception figé e qu’il se fait du beau st yle, mais ce qui est
conforme aux objectifs et au x règles qu’il a lui-même ét ablies dans le moment de
l’apprentissage en cours. Il restera la part subjecti ve de l’apprécia tion des «
qualités littéraires » sur lesquelles nous revi endrons, ainsi que le dosage de mise
en garde et d’encouragem ent que constitue toute annotation destinée à un
apprenant que l’on connaît.
Dans la mesure où ces principes, au demeurant ra isonnables, pe uvent être
appliqués, on ne vo it pas au nom de q uoi certaines des prod uctions textuelles ne
seraient pas l’o bjet d’une annotation chiffrée.
IV-5. VERS LA CONSTRUCTION DE GRILLES D’EVALUATION
Une évaluation de la production d’écrits s’appuie d’abord sur des séries de
critères associés à des ni veaux d’analyse de s textes, tels que ceux utilisés par
les sciences des discours. Par exemple, la sémiologie litté raire, appliquée au
poème, invite à distinguer différents plans : la typogr aphie ; la mytrique et le
rythme ; l’organisati on générale du poème ; l’énonciation (les marques du sujet
dans le texte) ; la syntaxe des phrases, la présence et la signification des
catégories grammaticales ; la rhétorique ; la phonétique, etc. Les analystes des
récits nous ont familiarisés avec les notions de cohér ence, de planification, de
focalisation (ou point de vue) , de modalités d’interven tion du narrateur, etc. Les
réflexions de Roman JAKOBSON (« Le langage poétique »), de Gerard
GENETTE (« La narratologie »), de LA RIVAILLE et de CHAROLLE, publiées
dans des revues comme « Langue frança ise ou Pratiques », constituent des
aides précieuses que ne peut ignore r l’enseignant aujourd’hui, quel que soit le
niveau où il travaille. Mais ces notions et ces techniq ues d’approche doivent être
maniées dans la perspec tive qui convient aux compétences de jeunes
apprenants et aux possibilité s d’intervention de l’enseignant.
Il nous semble que l’éval uation des textes peut ret enir plusieurs séries de
critères, regroupées sur quatre points : la compétence textuel le ; les qualités
littéraires (tous les critères étant ici en re spect étroit avec la nature et le type de
la consigne proposée au x apprenants) ; le rappor t des normes de la langue
française ; la lisibilité (mis e en place de l’éc rit dans la page, po nctuation, soin
apporté à la présentation), les deux derniers points va lant pour toute production
d’écrits.
IV-6. LA COMPETENCE TEXTUELLE
Dans quelle mesure le texte écrit pa r l’apprenant respecte -t-il les contraintes
formelles et / ou thématiques délimitant un type de texte (l’expression type de
texte étant prise dans un se ns beaucoup plus large qu e celui de BRONCKART :
elle inclut son genre, son univers sémantique, sa tonalité…) ? Il faut pouvoir se
donner les moyens de r épondre à cette question. Il n’est évidemment pas
possible de définir in abstracto une compét ence textuelle : on notera seulement
les critères suivants qui conc ernent essentiellem ent le narratif (que le support soit
une histoire écrite, une le ttre, une conversation …).
IV-6-1. La cohére nce logico-temporelle
Elle nécessite une ouverture et une conc lusion (mais il exis te diverses façons
de commencer et de finir, les textes littéraires le confir ment amplement).
Apports renouvelés de cont enus à l’intérieur d’une pr ogression thématique (pour
éviter le piétinement ou au contraire la dissémination des personnages et des
aventures à laquelle se li vrent volontiers les apprenants). Dé veloppement d’une
certaine ampleur pour permettre explications et justif ications (ce qu i fait que le
nombre de mots reste qua nd même un critère d’éval uation, et qu’il existe
indiscutablement des textes trop courts pour répondre à la co nsigne d’une façon
acceptable). Mode d’organisat ion ou de « planification », qui diffère selon que la
narration se fait ou non en présence d’un auditeur pouvant inte rvenir, coupant le
flux du lecteur (le réci t conversationnel n’est peut-ê tre pas pour le s apprenants
plus facile à gérer que le récit à « distance » mais il donne des r éussites plus
visibles, des écrits plus vifs, moins stéréotypés).
IV-6-2. La cohérence de « point de vue »
A la cohérence formelle générale, il faut ajouter un e cohérence relative à la
question : « Qui voit ? » ou « Qui parle? »(1). Ce que le narrateur est capable
objectivement de dire, étant donné ce qu’il sa it et ce qu’il voit, mais aussi ce qu’il
peut inventer (en rapport avec sa psychol ogie, ses idées, ses tics, ses façons de
parler…), tout cela définit des perspectives de récit dont l’enseignant peut évaluer
la cohérence formelle et la vraisemb lance psychologique. Si la consigne
d’écriture s’appuie sur un e connaissance préalable d’ un récit emprunté à un
texte, l’un des critères d’éval uation sera la faço n dont l’apprenant va réutiliser tout
ou une partie des matériaux c ontenus dans le texte support.
Si ces critères de cohérence textue lle en rapport avec la consigne nous
paraissent fondamentaux, nous n’excluons pas la possi bilité d’un détournement
positif de la consigne sous la forme, par exemple, des mises en question des
stéréotypes narratifs.
Récit « raccourci » ou « pressé », culbut e dans une autre histoire. Ces critères
de cohérence valent pour le s perspectives classiques de la narrativité, qui sont
celles de la communication et de l’éclaircisse ment, à l’œuvre aussi bien dans le
récit rapporté, le récit inv enté, la lettre. Lorsqu’un ré cit est coupé pa r un auditeur,
celui-ci peut le conduire d ans un sens différent de ce lui voulu par son narrateur.
Le récit conversationnel av ec interventions de l’autre permet non seulement de
mettre l’accent sur le s techniques du dialogue (synta xe, typographie), mais plus
profondément de faire comprendre un aspect des mécanismes de
l’intersubjectivité. Si un ré cit est fait pour un autre, alor s cet autre doit avoir un
rôle bien privilégié dans la communication. Pour les textes non narratifs, la
cohérence ne peut s’apprécier à l’aide de tous les éléments proposés plus haut.
Les questions « Qui voit ? » ou « Qui parle ? » restent pourt ant centrales, qu’il
s’agisse d’un texte argumentatif, d’un poème ou d’un texte prescriptif.
La cohérence est inst allée dans le texte non seulemen t par un éclaircissement de
point de vue, mais aussi par ce qu’on no mme maintenant la grammaire textuelle
(par opposition à la grammaire de phrase). On ente nd par là les compétences qui
recouvrent un bon usage du système temporel ( temps, modes, certains
adverbes), des pronoms de l’énonciation (je, tu ), des pronoms et déterminants
anaphoriques renvoyant à des êtres ou à des objets dé jà cités dans le texte, des
connecteurs logiques (en 1ère AS par exemple, seul es la coordination, quelques
conjonctives et quelques re latives en « qui » et en « que » peuvent être
travaillées), du discours rappo rté (dialogue et discours in direct). Nous insisterons
seulement, dans le cadre de ce chapitre, sur la question de l’emploi des temps,
calvaire des appr enants et de l’enseigna nt. En simplifiant les analyses savantes
(BENVENISTE, WEINRICH), nou s rappellerons ce ci : les temps sont plus ou
moins compatibles. Il existe en frança is deux systèmes : celui de la « carte
postale » et celui du « conte » (ces deux références sont ch oisies parce qu’elles
peuvent facilement être comprises de s apprenants). Le premier système impose
« je », éventuellement « tu » ou « vous » et une gamme de temps qui exclut le
passé simple ; le second impose la troisième personn e du singulier, les temps
privilégiés que sont le passé simple et l’imparfait (temps non pas du passé qui
dure, mais de l’arrière-plan et de la description), et exclut le présent et le futur
(sauf dans les parties dialo guées). L’imparfait et le plus que parfait étant
communs aux deux systèmes font, si l’on n’ y prend garde, basculer le texte de
l’un à l’autre. Il appartien t donc à l’enseig nant d’évaluer l’emploi des temps en
fonction de choix textuels liés au genre de na rration et de point de vue, donc de
donner des consigne s suffisamment claires, voire avec des segm ents imposés
pour limiter les dérapa ges. En revanche, la re commandation d’écrire
exclusivement au présent nou s paraît inacceptable.
Sous prétexte de simplifier la questi on des accords, elle aboutit à des textes
plats, sans mise en perspec tive temporelle. L’usage absolu du présent ne se
conçoit que dans les morceaux de texte très spécifiques et très courts.
L’intervention de l’ense ignant en grammaire textuelle est fondamental e. Elle doit
faire l’objet de mises au point fréquentes, de discussions et de justification. Seuls
l’imprégnation par des textes de qualité et des exercice s fréquents de réécriture,
en modifiant des temps,
des pronoms, en constatant des bizarre ries, des blocages, peuvent aider les
apprenants à progresser.
IV-6-3. Les qualités littéraires
Il ne faudra pas oublier que ce critère a toujours ét é pris en compte par des
générations d’ensei gnants, et par les meilleurs, ceux qui pensaient aider les
apprenants à entrer dans la culture de l’écrit en leur proposan t des modèles «
littéraires » qu’on est en dr oit de trouver aujourd’hui désuets, mais qui avaient
l’avantage de proposer du text e avec des connot ations affectives et esthétiques,
ce qui fait cruellement déf aut à certains « écrits fonc tionnels » d’aujourd’hui. Ce
critère n’était cependant ni cl arifié ni justifié. Il était manié à l’intuition, s’appuyant
sur des représentations jamais suspectées.
Il ne s’agit pas d’éliminer ce filtre qui correspond à une réalité de la lecture, des
impressions qu’elle communique et qui orientent le j ugement de l’e nseignant.
Certains continueront à être séduits par l’élégance des tournur es, le choix d’un
vocabulaire approprié ; d’autres préfèr ent découvrir un aspect authentique,
savoureux, même si la vu lgarité n’est pas évitée. Lors des corrections des
productions d’écrits, tous les enseignants sont rebutés par la « pauvreté » des
idées, la « lourd eur » de la langue, les « mala dresses » d’exposition, etc.
Nous souhaitons seulement que, pour réduire la part incertaine de l’évaluation,
les qualités littéraires soient appréciées en fonction des cons ignes et des genres
de textes qu’elles im pliquent. La variété et la viva cité du style conviennent au
récit conversationnel et au dialogue, elles ne consti tuent pas des valeurs en
elles-mêmes. Pour le poème , par exemple, une attenti on particulière doit être
portée à la segmentation typographique (strophes, vers), aux répétitions
phoniques et rythmique s. Les qualités d’in vention sont à prendre en compte dans
la mesure où elles enrichissent effect ivement une parole, ce qui n’est pas
toujours le cas. Les stér éotypes thématiques non seul ement ne sont pas des «
fautes », mais c onstituent, pour certains, l’ess entiel des sujets des grandes
œuvres d’art de tous les temps ; pour le s autres, ils appartiennent au corpus des
« livres de lecture » ou des « sujets de production d’éc rits » : comment s’étonner
alors de les retrouver sous la plume des apprenants ? Les stéréotypes formels,
clichés de style doiven t être appris avant d’être critiqués. Un e bonne partie de la
littérature ancienne est fait e de formules répétées, d ’images figées, de propos
obligés.(1)
Par ailleurs, les enseignants doivent fournir à leurs apprenants le trésor des
locutions ou syntagmes qui rassemblent toute une histoire, toute une culture.
Nous disons bien locu tions et non pas vocabulaire. Les locutions associent une
construction grammaticale et un un ivers sémantique, souvent riche en
connotations. Leur emploi invite à réfléchir sur la la ngue, à penser plus aux mots
qu’aux choses qu’elle dési gne. Travailler sur les locutions, gr âce à une bonne
anthologie, aide considérablement, par ex emple, à donner un ce rtain ton à un
texte.
L’appréciation des qual ités littéraires et artistique s s’est très so uvent contentée
du critère relatif à la richesse du vocabulaire ou des im ages. La langue de
Marguerite Duras, celle de Kafka ou Racine sont re lativement « pauvres »
lexicalement. Mais cette « p auvreté » est compens ée par la poésie, le mystère,
ou par la beauté du rythme ou de la syntaxe. Le mot colo ré qui fait image ou évite
un mot plat, le mot préc is doivent être valorisé s dans des textes qui les
demandent, selon la qualité du narrateur ou l’effet à produire. Ils ne constituent
pas à tout coup un haut de gamme. Le poème ou le text e descriptif ne les appelle
pas nécessairement. Aussi, tout ce qui concerne la longueur du texte et surtout
l’équilibre des parties doit êt re évalué là encore en fo nction des textes demandés
: la notion d’équilibre n’a pas toujours la même pert inence. Par exemple, le
poème de Victor Hugo ou de Stéphane Mallarmé est cél èbre parce que les deux
derniers vers disent quelque chose de co mplètement différent du reste du poème
; certaines proses courtes trouvent leur somme t dans la dernière phrase. Si le
souci de l’écrivain est celui de l’effet à pro duire, souci qui situ e son projet dans
une perspective d’aill eurs limitée et discutable, c’es t en fonction de cet effet que
le texte doit être évalué.
IV-6-3-1. Le respec t des normes de la langue
Les déficiences et les maladresses dans l’usage de la langue sont
immédiatement visibles ch ez les apprenants, certaines sont choquantes. Les
apprenants ont une maîtrise très im parfaite de la la ngue écrite, une
méconnaissance sérieuse du code orthographique.
Comment donc à la fois propo ser que des appre nants produisent des textes et
les juger sur la langu e écrite qu’ils sont capables de manier seuls face à leurs
doubles feuilles ?
A notre sens, la solution la plus appropriée est celle de la médiation que procure
l’enseignant. « D’autres réflexions sont utiles pour installer les cr itères de « respect de la
langue » à leur juste place. Elles ont été abondamment dé veloppées depuis les
ouvrages de E. GENOUVRIER et de F. François ». La linguistiq ue appliquée
contraint à une strati fication des fautes. Il faut repérer les dysf onctionnements
dans le système de la langue et les défaillances dans l’usage des différents
codes et registres, impo sés par la « surnorme » ou certaines situations
d’élocution. La distinction n’ est pas toujours facile et ne signifie pas, à notre sens,
de tenir pour négligeables le s fautes du second type dont on mesure l’impact
social. Elle obligera néanmo ins l’enseignant à hiérarch iser ses annotations, à
apprécier l’emploi de la langue écrite par l’apprenant non seulement dans son
rapport aux normes du français, mais aussi dans so n rapport à l’allure qu’il a
voulu donner à son écrit. Ce rtains apprenants sont atte ntifs à des corrections de
registre, même s’ils éprouven t des difficultés à les justif ier. Il faut par ailleurs
envisager les libertés qu’offre la consig ne. Certains thèmes sont traités de
préférence dans une lang ue qu’affectionnent les app renants : langue vive,
émaillée de formulati ons empruntées au milieu fam ilial, dont les maladresses et
les vulgarités n ‘empêchent pas de la trouver pleine de saveur. C’est par le
contact avec la diversité des textes et non un modè le figé, mi-narratif mi-
descriptif, que les appren ants, peu à peu, parviennent à « entendre » puis à
reproduire les différentes faç ons de s’exprimer.
Les fautes de langue doivent être rectifiées par l’en seignant ou par l’apprenant
selon ses moyens. Fautes qui seront évaluées à l’âge et au niveau des
apprenants et surt out à l’existence de séquences dans lesquelles les difficultés
rencontrées ont déjà été l’objet d’un trav ail. Les fautes esse ntielles au lycée
restent : les fautes de segmentation, certaines fautes d’orthographe, les fautes de
morphologie verbale (à so igneusement distin guer des fautes da ns l’emploi des
temps qui relèvent pr esque toutes de la compétence textuelle), les ruptures de
construction qui re ndent incompréhensible le ra pport entre un thème et un
prédicat.
IV-6-3-2. Lisibilité, esthét ique de la représentation
Les critères de lisib ilité sont bien connus : mise en place du texte dans la page
(marges, alinéas) ; us age des majuscules et de la ponctuat ion. En ce qui
concerne la ponctuation et les majuscules, leur emploi complet se généralise au
collège, au niveau de l’enseignement moy en. Mais il est i ndispensable que
l’enseignant présente le s principaux signes que sont le point, les guillemets et les
tirets indispensables (si l’on veut savoir qui pa rle et distinguer la voix d’un
personnage de la voix du narrateur), ainsi que les points d’exclamation et
d’interrogation. Il h abituera progressivement les appr enants à les rema rquer, puis
à les employer. Par ailleurs , certains textes demandent un soin spécial pour la
mise en espace : calligramme s, invitations, etc. Les apprenants peuvent être mis
très tôt au contact de livres, anciens et modernes, de production graphique de
tout genre. Ces exigences ne sont pas vé cues douloureusement à partir du moment où le
rôle du brouillon est compris (son état ou ses divers états étant distingués de la
mise au propre) et si les textes pr oduits par les appr enants donnent lieu à
différentes formes d’impre ssion ou de diffusion.
Un micro-ordinateur dans chaque classe aiderait co nsidérablement à donner aux
apprenants le goût de la mi se en place de l’écri t dans la page. L’enseignant doit
éviter de donner le mauvais exemple : l’usage des polycopiés manuscrits baveux,
à peine acceptables quand il s’agit d’exercices d’ orthographe ou de grammaire,
doit disparaître en lecture ou quand il s’agit de la présent ation de poèmes. C’est
à ces conditions que peut pr endre réellement son sens l’évaluation de la lisibilité
et de la présentation des textes éc rits par les appr enants en F.L.E.
IV-7. CONCLUSION
Nous avons ch oisi de présenter, dans le c adre de notre recherche, une
démarche de travail.
Néanmoins, il revient à cha que enseignant de tr ouver les activités d’écriture et
les consignes, mais aussi les lectures, le s occasions et les prétextes de l’écriture,
afin qu’ils soient adaptés à sa classe, à la culture, aux compétences, aux goûts
de ses apprenants, mais aussi soutenus par sa propre cultur e, son expérience et
son désir. La majorité des adultes n’éc rivent pas, ce qui conduit à penser que la majorité de
nos apprenants n’éc riront plus au sortir de l’école. Pour ce ux-là toutefois, les
activités d’écriture demeuren t particulièrement utiles car elles contribuent avec
efficacité à leurs prog rès en lecture. Pour les autres – et ils sont nombreux -, ces
essais instaurent une pratique, un goût, des habit udes d’écriture.
La démarche adoptée dans not re recherche, fondée sur l’emploi des contraintes,
pourra paraître à certains autoritaire. Po ur nous, la libre ex pression est un mythe.
Tous les textes appartiennen t à des types ou à des genres , c’est en quoi ils sont
lisibles car l’appartenance à un genre crée l’horizon d’attente sans lequel il
n’existe pas de lecture possi ble, et il faut bien apprendr e à les reconnaître. Les
écrivains puisent leurs form es dans les poétiques d’u ne époque ou cr éent leurs
propres formes : mais dans ce cas, par ré flexion sur les textes antérieurs et par
leur transformation. Pour des apprenants en core impuissants à se donner eux-
mêmes des règles et dont la mémoire et l’expérience ne sont guère habitées par
des références culturelles, consignes et situations d’écriture proposent des
modèles et des règles , suggèrent des idée s. Cette démarche a pour effet, hors
les consignes imposées, de susciter des manifestations spont anées d’écriture.
Elle donne des cont enus et des moules pour les années ultérieures aux
apprenants qui seraient conf rontés soit à des sujets pl us traditionnels, soit à des
tentatives d’expression individuelle (les récits de vie par exemple).
Nous n’entendons pas systématiquement imposer des séances d’écriture comme
conclusion aux lect ures, même si nous avons so uvent montré comment elles
étaient prétexte à écrire. Il est impératif de se so uvenir que la lecture a au ssi des objectifs qui ne
concernent qu’elle : nous lis ons pour le plaisir, pour rêver, pour faciliter notre
compréhension du monde.
Ces perspectives se suffisent à elle s-mêmes et ne doiv ent pas donner lieu
chaque fois à une util isation scolaire.
Les activités d’écriture proposées ne pe uvent être mises en place que dans des
classes où les apprentissages techniques ne sont à aucun mo ment dissociés de
la transmission culturelle. La culture ne se réduit pas à la communication par la circulation des écrits
fonctionnels et la transmission de l’in formation, elle est l’ensemble des
expériences, des reco mmandations et des interrogations formulées et transmises
par l’art de racont er des histoires.
La littérature, qui donne un nom aux histoires et qui leur prête une forme
singulière, est un matériau d’autant plus indispensabl e que ses supports sont
faciles à manier. Toutes les classes, du collège au lycée, ont le souc i de rendre présentes les
formes esthétiques que peuv ent prendre les grands th èmes culturels quand ils
sont exprimés aussi par d’autres arts que la littérature. C’est dans cette
perspective que la pé dagogie de l’écriture, que nous proposons dans le cadre de
notre recherche, n’est ni un exercice scolaire « moderne » se réclamant de
nouvelles technologi es ni un projet naïf de communi cation, mais tout simplement
un mode d’entrée dans la culture écrite.
Troisième partie
PROPOSITIONS DE SEQUENCES
DIDACTIQUES
Claudette ORIOL- BOYER (1) nous dit : « Si l’on accorde po ur reconnaître que
la lecture fonde les compétences d’écritu re, on doit cependant admettre que cela
ne va pas de soi. En effet, si lire suffis ait pour que s’effect ue un apprentissage de
la lecture, tout lecteur saur ait écrire : ce qui n’est évi demment pas le cas. Définir
à quelles conditions lire per met d’écrire, c’est ce que nous proposons à travers
des séquences didactiques. Dans toute uni té didactique, lecture, fonctionnement
de la langue et écriture sont en effet des moments d’ une même activité. Si lire
peut, sous certaines cond itions, apprendre à mieux écrire, écrire apprend
toujours à mieux lire. Pour fa ciliter l’accès à la lecture, il faut avant tout faciliter
l’accès à l’écriture et au trav ail de l’écrivain. »
Du coup : « Le plaisir d’ écrire vient natur ellement prolonger celui de lire. Les
compétences d’écriture sont en grande partie dépendantes de l’a ccumulation des
lectures. Chez la plupart des apprenants, cette relation reste implicite. Il est
certainement utile de l’explicit er et de montrer, y compri s dans la li ttérature, que
tout travail d’écriture vien t s’appuyer sur le réseau de lecture antérieures.» (2)
Nous tenterons de voir ici quel est le mo de de lecture qui autorise le passage à
l’écriture. Claudette ORIOL-BOYER nous(1) parle d’abor d de deux positions : la position
fusionnelle et la position dist anciée. Ensuite, elle nous montre co mment se fait le
passage d’une position à une aut re position et vice versa.
« La position de lecture fusi onnelle ou lire pour vivre, c’est lorsque le lecteur ne
fait pas la différence entre sa personn e et le personnage d’un roman, par
exemple, dans lequel, par « sympathie », il se projette : c’est ce qu’on appelle le
mode de lecture fusionne lle qui est le mode de lect ure dominant. Tous ceux qui
regardent les feuill etons de télévision en font usage ». Le lecteur reçoit des
leçons de vie : « Il est amené à traite r les problèmes qu’il rencontre dans sa
propre vie en imitant les personnages de ses romans . Bruno Bettelheim nous
montre bien cela dans son ouvrage intitulé Psychanalyse des contes de fées
»(2). Le plaisir immédiat de la lecture es t lorsque le lecteur est capable d’occuper
cette position fusionnelle.
« Le rôle de l’ens eignant,au cours de cette lecture fusi onnelle, est alors
d’expliciter avec l’apprenant les rappor ts de ressemblance ou de différence entre
la réalité vécue et la fictio n lue, d’inciter à une discussion et d’en faire tirer des
leçons de vie. Mais il faut observer, ce pendant, que, si passi onnante soit-elle, cette manière de
lire ne permet pas d’apprendre à écrire car les mécanismes langagiers mis en
place par l’écrivain ne sont pas perçus par le lecteur. Si le texte est lu comme le
reflet du réel, c’est au prix d’une complète ignorance de sa nature linguistique et
des opérations de langage qui permettent de créer des effets de réel et de
susciter des émotions et des pensées. »(1)
Par ailleurs, il existe un autre mode de lecture que les circonstances imposent
parfois et où le texte peu t conduire à l’écriture : c’est ce que Claudette ORIOL-
BOYER nomme « positio n distanciée ou lir e pour écrire ».
« Parfois, le lecteur n’arrive pas à conser ver la position fusion nelle. Si le lecteur
rencontre, dans un texte, un univers qu i ne lui sied pas, un univers qui ne lui
permet pas de s’y projeter, il prend de la distance et se dit : ‘’Ce n’est pas la
réalité’’, c’est la fiction. »
Il prendra alors conscienc e qu’il est devant un obje t de langage « fabriqué ».
[..] Le lecteur adopte un mode de lecture distanciée où il se permet de discuter et
même de contester le choix de l’écrivain.
Dans cette position, le lecteur, qui s’id entifie au scripteur, est prêt à passer du
côté de l’écriture. C’est évidemment une telle posit ion que l’ensei gnant doit
développer chez l’élève s’il veut l’amener à lire pour écrire.
Car la distance permet de découvrir les r ègles d’écriture du te xte qu’on est en
train de lire et d’en faire usage pour écrire un texte de même nature, à partir d’un
projet d’écriture personnel.
Ayant conscience des opérat ions langagières accomplies par le scripteur, les
ayant mises à jour, les ayan t explicitées, le lecteur peu t se les approprier en les
reproduisant fidè lement (écriture d’imitation) ou avec des variations (écriture
créative ou d’invention).»(1)
Comment passer de la position fusionnelle à la position di stanciée et vice versa ?
Quand l’apprenant arri ve à passer très rapidement d’ une lecture fusi onnelle à une
lecture distanciée, il pourra découvrir que si lire «c’est fictivement vivre plus, lire
c’est aussi effectivemen t écrire un peu , ou même beauco up, vraiment
passionnément… S’ils se contentent d’une le cture où les mots collent aux choses , d’une lecture
réaliste, les élèves n’atteindront ja mais ce moment de distanciation et
manqueront cette intense ac tivité métalinguistique qui est la condition des
progrès langagiers car (sel on Jakobson) ces derniers d épendent de la capacité à
développer un métalangage, c’est-à-dire à comparer des signaux verbaux et
parler du langage.
Chacune des deux positions est nécessa ire et l’apprentissa ge de la lecture est
accompli lorsque l’on es t capable de passer très vite de l’une à l’autre.
Cela définit le rôle de l’enseignant de français : aide r l’élève à basculer d’une
position fusionnelle à une position de lecture distanciée et , inversement, sans
jamais oublier de relier réfl exion sur le sens et réfl exion sur le maniement du
langage.
Les textes sont lus non pl us comme le résultat d’ un don ou d’une inspiration,
mais bien comme le produ it d’un ensemble de tâ ches qui, répertoriées,
explicitées, théorisées, devi ennent accessibles à quelqu’un qui veut apprendre à
écrire à partir des lectures qu’il fait.
Mais les textes doivent aussi être écrits et relus en position distanciée car, si on
fait corps avec ce qu’on écrit, toute su ggestion de modifica tion de texte sera
vécue comme une agression contre la personne.
L’apprentissage ne peut se fa ire que si l’on distingue so igneusement le sujet de
l’objet. Et « seule la position dist anciée permet cela. »(1)
« Il faut donner la priorité aux textes li ttéraires, à tous les te xtes littéraires, quel
que soit leur genre ou leur destinataire », nous dit Claudette ORIOL Boyer avant
d’ajouter : « […] en lisant et en écriva nt un texte-objet d’art la ngagier, dans une démarche
créative de production, on est amené à expérimenter tous les usages de la
langue, sans exception. Il serait en effet absurde de penser qu’il pourrait y avoir, d’une part, un
enseignement de la langue et, d’autre part, un ensei gnement de la littérature.
L’un ne va pas sans l’autre.
On hésite toujours entre deux appellations pour désigner ceux qui sont chargés
d’enseigner la langue et la littérature française s : professeurs de lettres ou
professeurs de français. Ce problème lexical en recouvre un autre : celui de
l’articulation entre l’enseigne ment de la langue et celu i de la littérature dans
l’institution scolaire. Le professeur est en effet un enseignant de lan gue (française) et de littérature
(pratique artistique du langage) : cela signifie qu’il a des
points communs avec tout enseignant de langue mais au ssi avec tout enseignant
de discipline artistique.
Ce qui lui permet, ainsi que cela est recommandé par le s textes officiels, de ne
pas séparer ces deux enseignements et de pratiquer le décloisonnement des
activités de lecture, écriture , orthographe et grammaire.
On s’aperçoit alors que la linguistique et la stylis tique sont les instruments les
mieux adaptés pour observer un texte littéraire à parti r de sa matière verbale,
tandis que la littérature est un magni fique laboratoire d’expérimentation
linguistique. A co ndition toutefois qu’on s’exerce à l’ écrire et qu’on ne se contente
pas de la lire. »(1) C’est dans cette perspec tive que nous comptons proposer des séquences
didactiques qui co ncernent la liaison lecture-éc riture-langue. Les activités de
productions d’écrits sont en effet la résultante de l’observation des textes
littéraires et documentaires et le lieu de réinvestissement des activités réflexives
(Orthographe, gramma ire, vocabulaire).
Séquence 1
JOUER AVEC LE LANGAGE POETIQUE
¦ Objectif de production :
? Ecrire un poème « à la manière de… »
? Compléter un poème.
¦ Savoirs en jeu :
? Lecture
– Découvrir la mise en page d’un poème.
– Découvrir l ’image poétique.
– Identifier les caract éristiques d’un poème.
– Repérer des rimes. – Identifier des rimes différentes. – Utiliser des outils d’analyse pour apprendre à cr éer du sens.
– Identifier le rythme d’une phrase
– Dire un poème
? Grammaire
– Repérer des expansions du nom : l’adjec tif épithète, le GN P, la proposition
subordonnée relative. – Repérer et utiliser des pronoms relatifs.
– Repérer et utiliser des métaphores.
– Repérer des compléments circon stanciels de nature différente.
– Identifier des classes de mots.
– Repérer et utiliser des prépositions.
– Repérer les connecteurs et la ponctu ation qui donne du ryth me à la phrase.
? Conjugaison
– Identifier des te mps et des modes.
? Orthographe
– Faire les accords sujet-verbe.
– Faire les accords dans le GN.
? Vocabulaire
– Repérer des ch amps lexicaux.
– Repérer et analyse r des onomatopées.
– Découvrir et détour ner des proverbes.
– Jouer avec les fa milles de mots.
– Inventer de nouveaux mots. – Repérer et utiliser des homonymes.
? Productions d’écrits
– Jouer avec les mots.
– Jouer avec les sonorités.
– Ecrire un poème « à la manière de »
– Compléter un poème.
A – LECTURE
– Découvrir la mise en page d’un poème.
– Découvrir l ’image poétique.
1 – Voici un texte écrit av ec des mots images. Recopi ez-le en mettant des mots à
la place des images. Respec tez les retours à la ligne, ce sont eux qui signalent
les vers du poème. Soignez votre écriture.
Pour rêver
J’ai vu un ………. .. derrière un ..………..
J’ai vu l’ …….. assis sur un ………………..
J’ai vu une ………. qui traversait la ……….
Mais je n’ai jamais vu, ah ça non, jamais vu
Une ……… dans le ciel qui parlait au………
Et pourtant, j’ai souvent regardé !
2 – Lisez ce texte. Le poète français Victor Hugo voit des images là ou nous
voyons seulement une lettre.
« Avez-vous remarqué combien l’ Y est une lettre pi ttoresque qui a des
significations sans no mbre ? L’arbre est un Y ; l’embranchement de deux routes
est un Y ; le confluent de deux rivières est un Y ; une tête d’âne ou de bœuf est
un Y ; un verre sur so n pied est un Y ; un lys sur sa tige est un Y ; un suppliant
qui lève ses bras au ciel est un Y. »
3 – A partir de la lettre O, vous allez écrire un texte comme celui de Victor Hugo.
Vous pouvez rec opier la première phrase interr ogative de son texte et continuer,
comme lui, en remplaçant la lettre Y par la lettre O.
Vous devez trouvez au moins quatre resse mblances. Utilisez la même façon de
rédiger les phrases, n’oubl iez pas la ponctuation.
4 – Vous pouvez maintenant écrire vos prénom s en plaçant les lettres les unes
au-dessous des autres et di re, à côté, à quoi vous font penser ces le ttres. Vous
écrirez ainsi des vers.
Exemple avec le prénom Paul : P est un vie illard penché,
A est un pas assuré,
U est un verre pour boire,
L est le fauteuil pour se reposer.
Exemple avec le prénom Ali : A est un Algérien solidement planté sur ses deux
jambes ,
L est le lieu du savoir,
I est un intellectuel modeste.
Je retiens :
En poésie, les mots créent les images. Pour jouer au poète, il faut apprendre à
regarder autrement ce qui es t autour de nous et nous amuser avec les mots pour
dire ce que nous avons re marqué. Nous découv rirons alors que les mots ont du
pouvoir, un pouvoir un peu extraordinaire , celui du poète.
B – JOUER AVEC LA GRAMMAIRE pour créer des poèmes (verbes, noms,
adjectifs qualificatifs).
– Repérer un champ lexical
– Repérer une expansion du nom : le complément du nom.
1 – Voici un poème de Ra ymond QUENEAU, écrivain et poète français.
« Je m’embarque
Tu bateau
Il navigue
Nous coulons
Vous ramez
Ils îles désertes. »
Observez les premiers mots de c haque ligne du poème. Ce sont des pronoms
sujets.
A quoi ressemblent ces poèmes ?
Recopiez les mots qui sont des verbes. Recopiez les mots qui sont des noms communs.
Recopiez un adje ctif qualificatif .
Tous les verbes, les noms et l’adjectif qualificatif se rapportent à un domaine
particulier. Lequel ?
2 – Voici un petit texte poét ique créé par de s apprenants :
« La gelée du matin s’est fig ée dans la brume de l’ombre
Une étoile de givr e a glissé sur le dos de ma main
Le vent glacial se plaint et le soleil froid s’éteint. »
Quel est le thème de ce poème ?
Relevez le champ lexical qui illustre ce thème (les mots qui se rapportent à ce
thème).
A quel ensemble appart iennent les mots suivants : gel ée – étoile – brume – vent –
soleil ? Observez la construction de chacune des lignes du text e appelée vers en poésie.
Le premier vers commence par un groupe nominal : la gelée du matin .
Dans ce groupe, on trouve deux noms : gelée, matin . Le deuxième nom
complète le premier. Ils sont reliés par un petit mot outil : du. Ce mot est une
préposition.
Le groupe de mots du matin est appelé groupe nominal prépositionnel (GNP),
c’est la nature de ce groupe de mots (on dit aussi sa classe grammaticale) ; sa
fonction est de compléter le mot gelée.
Dans ce poème, on trouve trois autres noms complétés par un groupe nominal
prépositionnel. Recopiez-les.
Le dernier vers n’est pas construit de la même fa çon. On trouve deux noms
complétés par un adjectif qualificatif épithète . Recopiez ces deux groupes.
On trouve deux verbes au passé composé de l’indicatif et deux verbes au présent
de l’indicatif. Recopiez-les. Présent :…………………………………….
Passé composé :……………………………
Ces verbes rattachent- ils le poème au passé, au présent ou au futur ?
Je retiens :
Un adjectif qualificatif peut qualifier un nom sans verbe intermédiaire.
Exemple : je regarde un adorable chien blanc.
Adorable et blanc sont deux adjectifs qualificat ifs épithètes du nom chien.
Un nom peut aussi qualifier un nom sans verbe interméd iaire. Ce complément est
souvent introd uit par une préposition. On dit que c’est un groupe nominal
prépositionnel. A la différe nce de l’adjectif qualificat if, le groupe nominal
prépositionnel compléme nt du nom se place toujours après le nom qu’il qualifie.
Exemple s : La maison de grand-mère, les clés de la voiture , une tasse à thé,
une montre en or.
C – REPERER ET UTILISER UNE EXPANSION DU NOM : LA
PROPOSITION RELATIVE. – Utiliser toutes les expansions du nom
1 – « Le message »
« La porte que quelqu’un a ouverte
La porte que quelqu’un a refermée
La chaise où quel qu’un s’est assis
Le chat que quel qu’un a caressé
Le fruit que qu elqu’un a mordu
La lettre que quelqu’un a lue
La chaise que quel qu’un a renversée
La porte que quelqu’un a ouverte
La route ou quel qu’un court encore
Le bois que quel qu’un traverse
La rivière ou quelqu’un se jette L’hôpital où quelqu’un est mort.
Jacques PREVERT
suivants : gelée sssssssssssCette histoire se déroule dans des lieux différents.
Lesquels ? Ce poème met en scène un pe rsonnage qui est désigné par un pronom indéfini
qui se répète dans ch aque vers. Lequel ?
Pourquoi le p oète ne précise-t-il pas de quoi il s’agit ?
A partir de quel vers, l’hist oire devient-elle tragique ?
Pourquoi Jacques PREVERT a-t-il donné ce titre à son poème ?
2 -Tous les vers de ce poème sont construits à l’identi que : un déterminant, un
nom, une propositio n relative pour compléter le nom.
Observons
:
La porte que quelqu’un a ouverte.
Déterminant / nom commun / Proposition subor donnée relative introduite par le
pronom relatif que (l e pronom relatif que r e m p l a c e l e n o m porte dans la
proposition relative . On peut dire : quelqu’un a ouvert la porte ).
– Recopiez deux propositions relatives introduites par un pronom relatif différent.
3 – Lis le poème Cortèges de Jacques PREVERT
« Un vieillard en or avec une montre en deuil
Une reine de peine avec un homme d’Angleterre
Et des travailleurs de la paix avec des gardiens de la mer
Un hussard de la farce avec un dindon de la mort
Un serpent à café avec un moulin à lunettes
Un chasseur de cordes avec un danseur de têtes
Un maréchal d’écume avec une pipe en retraite
Un chiard en habit noir avec un gentleman au maillot
Un compositeur de potence avec un gibier de musique
Un ramasseur de conscience avec un directeur de mégots
Un repasseur de Coligny avec un amiral de ciseaux
Une petite sœur de Bengale avec un tigre de Saint-Vincent-de-Paul
UN professeur de porcelaine avec un raccommodeur de philosophie
Un contrôleur de la table ronde avec des chevaliers de la compagnie de gaz de
Paris
Un canard à Saint-Hélène avec un Napolé on à l’orange
Un conservateur de Samothrace avec une victoire de cimetière
Un remorqueur de famille nombreuse avec un père de haute mer
Un membre de la prostate avec une hypertrophie de l’académie française
Un gros cheval in partibus avec un grand évê que de cirque
Un contrôleur à la croix de bois avec un petit ch anteur d’autobus
Un chirurgien terrible avec un enfant dentiste
Et le général des huîtres avec un ouvreur de Jésuites .
Nous remarquons q ue tous les vers sont construits à l’identique :
Déterminant + nom +GNPrépositionnel avec déterminant + nom
+GNPrépositionnel.
Jacques PREVERT a fabriqué son poème en inversant les GNPrépositionnels.
Pour le premier vers, les groupes de départ étaient : un vieillard en deuil et une
montre en or.
– Quels étaient les gro upes de départ pour le deuxième vers ?
– Retrouvez les groupes de dép art pour les mots suivants.
Des travailleurs …………. . Des gardiens …………… Un serpent …..………….. Un moulin ……..…………
4 – Utilisez les groupes no minaux proposés ci-dessous et mélangez- les pour
écrire à la façon de Jacques PREVERT. Ré fléchissez à votre choix : soyez drôles
et imaginatifs.
Une machine à laver …………… un verre à pied
Un moule à tarte ……….. ……..une tasse à café
Un canard à l’orange……….. un chasseur de tête
Un pied à coulisse……………. un meuble à tiroirs.
5 – Relevez les petits mots outils, les prépositions qui unissent le nom à son
complément.
Exemple : un vieillard en or.
Je retiens :
Un nom peut être préc isé à l’aide d’expansi ons qui peuvent être :
– un adjectif qualif icatif épithète : un gentil chien blanc ;
– un groupe prépositi onnel complément du nom : un chien de berger ;
– une proposition relative : je voudrais un chien qui soit bien dressé.
Ces expansions peuvent s’ajou ter les unes aux autres :
Je voudrais un gentil chien de berger qui soit bien dressé .
D – JOUER AVEC LES SONORITES
– Travailler les rimes.
– Dire un poème.
Lisons le poème suivant :
« Pour un art poétique
« Prenez un mot prenez-en deux
Faites cuire comme des œufs Prenez un petit bout de sens
Puis un grand morc eau d’innocence
Faites chauffer à petit feu
Au petit feu de la technique
Versez la sauce énigmatique Saupoudrez de q uelques étoiles
Poivrez et puis me ttez les voiles
Où voulez-vous donc en venir ?
A écrire Vraiment ? A écrire ?? »
Raymond QUENEAU
En observant les verbes du texte, nous devons reconn aître un type de texte.
Lequel ? – Lisons à haute voix les derniers mots des deux prem iers vers. Q uel son entend-
on ?
– Lisons les vers suivants. Quels s ont les sons qui vont par deux ?
La rime est faite de sons qui se répètent.
Complétez ce petit tableau qui an alyse les rimes dans un poème de
LAMARTINE.
Le poème de LAMARTINE Sons des rimesa. Voilà les feu illes sans sève b. Qui
tombent sur le gazon c. Voici le vent qu i s’élève d. Et gémit dans le vallon e.
Voilà l’errante hiron delle f. Qui rase du bout de l’aile g. L’eau dormante des
marais h. Voilà l’enfant des chaumières i. Qui glane su r les bruyères j. Le bois
tombé des forêtsè + v ………………………………….. è + v ………………………………….. …………………………………. è + l ………………………………….. y + è + r ………………………………. R + è
Observons la place de s mots qui riment.
– Quel mot rime avec sève ?
– Quel mot rime av ec hirondelle ?
– Quel mot rime avec marais ?
– Quel mot rime avec chaumières ?
– Quel mot rime avec gazon ?
– Quels sont les quatre mots qui alternent leurs rimes ?
Quels sont les deux mots qu i se suivent à la rime ?
Quels sont les deux mots qui ont la même rime ?
Quels sont les deux mots qui ont la mê me rime, qui se su ivent et qui sont
encadrés par deux à la rime identique ?
1 – Je retiens :
La rime dans un poème consiste à faire correspondre des sons identiques à la
fin des vers.
Lorsque les rimes se suivent (a, a), on dit que ces rimes sont plates .
Lorsque les rimes alternent les sons (a,b, a,b), on appelle ce s rimes des rimes
croisées.
Quand les rimes apparaissent sous la forme (a,b, b,a), on dit que ces rimes sont
embrassées.
On parle dans ce cas de la nature des rimes.
2 – Application
Le poème qui suit est écrit sans re tour à la ligne. Cherchez les rimes : elles vous
aideront pour écrire le texte tel qu’ il a été composé par le poète Maurice
CAREME. N’oubliez pas le titre. Ajoutez une majuscu le à chaque début de vers.
« Tombée du soir »
« Lentement, autour des maisons, les jardins frileux se défont. Pressé, le ciel
met une couche de rouge ardent sur les carreaux. Le val ve rse une pleine louche
de brouillard gris sur le hameau. Les co rneilles rentrent en semble. Un cheval
lassé passe à l’amble. Les vaches fondent dans les pr és. Comme une lettre mal
fermée portée par la chauve- souris, une blanche petite fumée monte vers Dieu…
et c’est la nuit. »
E – LIRE DES POEMES COMPLEXES,
ECRITURE « A LA MANIERE DE… »
– Utiliser des outils d’analyse pour apprendre à créer du sens
Voici un poème d’un aut eur contemporain. René-Guy CADOU. Vous allez
surligner les mots qui form ent le champ lexical de la maison d’une couleur, puis
vous choisirez une autre couleur pour surligner le champ lexical de la nature.
« Celui qui entre par hasard dans la demeure d’un poète
Ne sait pas que les meub les ont pouvoir sur lui
Que chaque nœud du bois renferme davantage
Des cris d’oiseaux que tout le cœur de la forêt
Il suffit qu’une lampe pose son cou de femme
A la tombée du soir contre un angle verni
Pour délivrer soudain mi lle peuples d’abeilles
Et l’odeur de pain frais des cerisiers fleuris
Car tel est le bonheur de la solitude
Qu’une caresse toute plate de la main
Redonne à ces gra nds meubles noirs et taciturnes
La légèreté d’un arbre dans le matin. »
– Observez les groupes de mo ts à la fin du premier et du deuxième vers, le poète
vous donne le thème de ce poème. Quel est ce thème ? Cochez la bonne
réponse. Les meubles de la demeure du poète sont là par hasard.
Le poète trouve son insp iration en observant les meubles de la maison.
Le poète recherche des meub les pour son in spiration.
Le poète vous délivre le se cret de son inspiration. Recopiez un vers du poème
qui montre que le poète consi dère les meubles comme vivants.
Voici ce qu’un autr e poète, Charles BAUDELAIRE, a écrit dans un poème qui
s’appelle Correspondances et qui parle de la nature :
« Les parfums, les couleurs et les sons se répondent. »
– Dans le poème de René -Guy CADOU, relevez une expression qui parle de
parfum , une autre qui traite de couleurs , une troisième uti lisée pour dire un son.
Un parfum : ……………………………………………………..
Des couleurs : ………………………………………………….
Un son : …………………………………………………………
« Celui qui entre par hasard » sont les premie rs mots de ce poème Le poète
s’adresse au fait à ceux qui ne sont pas poètes. Quel repr oche leur fait le poète ?
Quels mots du texte le prouvent ?
1 – Je retiens :
De tout temps, les poètes ont appris aux autres à voir les choses banales
avec un regard différent. Le poète surp rend, il montre aux êtres humains
ce que, sans lui, ils ne verraient pas.
2 – Applications :
1 – observons le poème suivant :
Un poème de Jules SUPERVIELLE , Mathématiques , tiré du recueil
Gravitations. Le poète n ous montre que des c hoses banales peuvent
devenir extraordinaires si on sait bien les regarder .
« Mathématiques »
« A Maria Blanchard
Quarante enfants dans une salle
Un tableau noir et son triangle Un grand cercle hé sitant et sourd
Son centre bat co mme un tambour
Des lettres sans mots ni patrie Dans une attente endolorie
Le parapet dur d’un trapèze
Une voix s’élève et s’apaise Et le problème furieux
Se tortille et se mord la queue.
La mâchoire d’un angle s’ouvre Est-ce une chienne ? Est-ce une louve ?
Et tous les chiffres de la terre, Tous ces insect es qui défont
Et qui refont leur fourmilière
Sous les yeux fixes des garçons. »
– Où se passe ce poème ?
– Un champ lexi cal domine le texte ? Lequel ?
– Relevez cinq mots apparte nant à ce champ lexical ?
– Quel est le deux ième champ lexical qui appar aît au dernier vers de la
deuxième strophe ?
– Relevez quatre mots de ce deuxième champ lexical dans le s strophes 4
et 5.
En vous appuyant sur la deuxième strophe, pouvez-vous dire que les
enfants de cette école sont intéressés par la classe ou bien s’ils s’ennuient
?
A votre avis, comment est né le poème ?
2 a) – Lisons maintenant le poème de l’écrivain Georges PER EC, qui a pour titre
« Déménager » .
« Déménager »
« Quitter un appartement. Vider le s lieux. Décamper. Faire place nette
Débarrasser le plancher
Inventorier, ranger , classer, trier
Eliminer, jeter, fourguer Casser
Descendre, desceller, déclouer, dé coller, dévisser, décrocher
Débrancher, détacher, couper, ti rer, démonter, plier, couper
Rouler Empaqueter, emballer, sangler, n ouer, empiler, rassembler entasser
Ficeler, envelopper, protéger, recouvrir, entourer, serrer
Enlever, porter, soulever Balayer
Fermer
Partir Georges PEREC
– L’organisation des mots dans la page n’est pas habituelle. Décrivez-la
oralement.
– Une classe grammaticale de mots est beaucoup util isée. Laquelle ?
– Observez le premier mot du texte et le dernier. Pouvez-vous dire
comment le poète a ordonné son texte ?
– A l’aide de vos di ctionnaires, recherch ez le sens des mo ts que vous ne
connaissez pas. 2- b) Recherchez maintenant des verbes qui pourraient aller avec le titre suivant :
« Emménager ». Il v ous faut au moins vingt verbes . Vous pouvez vous servir
d’un dictionnaire de synonymes et aller voir, par exemple, embarrasser, établir,
arranger, ouvrir.
Commencez ensuite votre texte comme G eorges PEREC. Vous po uvez réutiliser
certains mots qu’il a employ és. Respectez les retours à la ligne pour composer
des vers comme le poète.
Emménager
Arriver dans un appartem ent – Occuper les lie ux – S’installer –
Prendre la place – En combrer le plancher –
Déballer – dégage r – déposer – dépoussiérer.
F – CREER DES POEMES EN JOUANT AVEC LES MOTS
1 – Travailler la musique des mots avec les rimes.
Lisez le poème « Le château de Tuileplatte », de GLYRAINE.
Observez comment est fabriqué ce poème.
« Le château de Tuileplat te »
« Au château de Tuileplatte
La révolution éclate
J ‘ai trouvé
Vrai de vrai
Le poulet
Dans le lait
Le lapin Dans le vin Le cochon
Dans le charbon
Le cheval Dans le bocal
Le chevreau
Dans le pot Le dindon Sur l’édredon
L’hirondelle
Dans le sel Le pigeon
Dans le son
La tortue Dans le bahut La grenouille
Dans les nouilles
La souris Dans le riz
Et le chat
Tra, la, la Dans le plat De rutabaga.
– Le texte est divisé en paragra phes appelés stroph es. Combien en
comptez-vous ?
– Onze strophes se ressemblent. Pourquoi ?
– Les quatre premières strophes servent d’introd uction au poème. Quel
événement a boulever sé les choses ?
– A l’autre bout du poème, une conclusion ferme le te xte. Quels mots donnent
l’impression d’être une chanson ?
– Observez les strophes 3 à 13, on trouve à chaque fin de ligne un son qui se
répète. Repérez ces sons d ans chaque strophe. Exemple : strophe 3 : le son é ;
strophe 4 : le son in.
– Combien comptez-vous de vers dans ce poème ?
– Ajoutez deux strophes de deux vers au po ème pour compléter la chanson en
utilisant deux autres animau x (le canard – la belette…)
2 – Je retiens :
– Un poème peut être divi sé en strophes. Une strop he est un ensemble de vers.
– Lorsqu’une strophe a de ux vers, on l’appelle un distique , si la stro phe a trois
vers, c’est un tercet , si elle a quatre vers, on l’appelle un quatrain .
– Certains poèmes n’utilis ent pas de strophe s. Les vers se suient sans
espace blanc pour les séparer.
3 – Applications :
1 – Repérez les hom onymes du mot vers et placez le mot qu i convient dans les
phrases :
Vers (la direction), le vert (la couleur), le vers (dans le poème), le ver
(l’animal).
Un petit…….. s’en allait au ras du sol….…. un bois ……… dans lequel il
espérait composer des …….. pour celle qu’il aimait.
2 – Voici un poème de Ro bert DESNOS mal présenté. En effet, on n’est
pas revenu à la ligne po ur montrer les vers. Re copiez-le en séparant les
vers pour construire des strophes de de ux vers. Pour vous aider, appuyez-
vous sur les rimes. N’oubliez pas le titre et la ponctuation.
« Le chat qui ne ressemble à rien »
« Le chat qui ne ressemb le à rien aujourd’hui ne va pas très bien. Il va
visiter le docteur qui lui ausculte le cœ ur. Votre cœur ne va pas bien il ne
ressemble à rien, il n’a pas son pareil de Paris à Crét eil. Il va visiter sa
demoiselle qui lui regarde la cervelle. Votre cervelle ne va pas bien elle ne
ressemble à rien. Elle n’ a pas son contraire à la surface de la terre. Voilà
pourquoi le chat qui ne ressemble à rien est triste aujourd’hui et ne va pas
bien. »
3 – Voici un poème de Vi ctor HUGO. Les mots à la rime sont tombés dans
le bac à mots. A vous de les retrouve r et de les placer au bon endroit.
Certains mots sont difficiles ; serv ez-vous d’un dictionnaire pour en
comprendre le sens.
« Mes deux filles »
« Dans le frais clair-o bscur du soir charmant
qui……………………………………..
L’une pareille au cygne et l’autre à la …………………………………………, Belles, et toutes deux joyeuses, O ! Voyez, la grande sœur et la petite ………………………………………….
Sont assises au seuil du jardin,et sur………………………………………
Un bouquet d’œillets blancs aux longues
tiges……………………………………..
Dans une urne de marbre agitée par le…………………………………………
Se penche, et les re garde, immobile et
……………………………………………
Et frissonnant dans l’ombr e, et semble, au bord
du………………………………………… Un vol de papillons arrêté dans l’……………………………………………
Bac à mots Elle s – vivant – extase – tombe
– douceur – vase – Vent – sœur – colombe – frêles.
G – PRODUCTION D’ECRITS
1 – Jouer avec le langage
1 – Lis attentivement le poème suiv ant, puis réponds aux questions.
« Que tout, blanche plaine…
Que tout, blanche plaine,
En toi me séduit ! La lune si pleine,
L’éclat de la nuit
Ce ciel, cette terre Où la neige luit, Où, loin solitaire,
Un traîneau s’enfuit… »
ATHANASE Feth
Qui est l’auteur de ce poème ?
A qui s’adr esse-t-il ?
Que représente « me » (2ème vers) ?
d) Que représente « toi » (2ème vers) ?
2 – Un poème est compos é de vers (lignes de la poésie) regroupés en
strophes. Les vers ont s ouvent des sonorités (rimes ) qui reviennent à la fin
de deux ou plusieurs vers.
Dans le texte « Que tout, blanche plaine… »
a) Combien de vers ?………………………………..
b) Combien de strophes ?……………………………
c) Comment sont organisée s les rimes ? (A est la première rime, B la
deuxième). Coche la bonne réponse : ABAB, AABB ou ABBA.
3 – L’auteur parle de « blanche plaine ».
S’agit-il : a) d’une plaine bien éclairée ?
b) d’une plaine couverte de neige ?
c) d’une plaine couverte de fleurs ? * Cochez la bonne réponse
.
2 – Je résume :
Quelle est l’idée que l’auteur déve loppe dans le p oème « Que tout,
blanche plaine… » :
– La plaine est triste. – La plaine lui pla ît particulièrement.
– La pleine lune.
Cochez la bonne répons e et dites pourquoi
.
b) Recherchez un ensemble de mots évoquant soit un objet, soit une
personne.
c) Ecrivez un poème à la manière de ATHANASE Feth.
* Règles d’écriture :
– Tu es l’auteur. – Tu l’adresses directement à l’objet ou à la personne.
– Le poème est un ense mble de 2 strophes.
– Chaque strophe co mprend 4 vers.
– Les rimes sont disposées librement : AABB, ABAB ou ABBA.
3 – Je joue avec les mots
a) Lisez attentivement le poème suivant :
« Saltimbanques »
« Dans la plai ne les baladins
S’éloignent au long des jardins Devant l’huis des auberges grises Par les villages sans églises
Et les enfants s’en vont devant Les autres suivent en rêvant
Chaque arbre fruitier se résigne
Quand de très loin ils lui font signe
Ils ont des pied s ronds ou carrés
Des tambours des cerceaux dorés
L’ours et le singe animaux sauvages
Quêtent des sous sur leur passage ».
Guillaume APOLLINAIRE (1909 )
b) Combien de strophes y a-t-il dans ce poème ?
c) Combien de vers dans tout le texte ?………………….
d) Combien de vers dans chaque strophe ?………………
e) Comment sont orga nisées les rimes ?
Cochez la bonne réponse : ABAB, AABB ou ABBA ?
f) Recherchez le sens des mots : – Saltimbanque : – Baladin :
g) A quel mot du langage courant correspond ? :
– L’huis :
– Baladin :
– Saltimbanque. h) Relevez les signes de ponctuation ut ilisés par l’auteur. Qu’en pensez-vous ?
i) Réécrivez les deux dernières strophe s en ajoutant la p onctuation qui vous
convient. j) Vérifiez pa r une lecture à voix haute.
k) Cherchez d’autres poèmes de G. APO LLINAIRE. Recopiez ceux qui vous
plaisent le plus.
4 – J’écris :
a) Ecrivez un poème à la mani ère de Guillaume APOLLINAIRE.
b) Remplacez les « Saltimbanque s » par les « Ecoliers ».
Règles d’écriture
:
– 3 strophes.
– Strophes de 4 vers.
– Rimes libres : AABB, ABAB ou ABBA.
– Ponctuation libre.
5 – Je réécris
Réécrivez le poème « Saltimbanques » en le présentant comme une histoire.
Donnez-lui un titre.
6 – J’analyse
Lisez attentivement le poème suivant :
« Les bagages »
« Une dame avait Pour bagages
Deux valises,
Un coffre, Une cage,
Trois paniers,
Cinq malles, Un faitout,
Plus un joli petit toutou.
Au guichet D’enregistrement,
L’enregistreur
Evidemment Enregistra tous ses bagages :
Deux valises,
Un coffre,
Une cage,
Trois paniers, Cinq malles, Un faitout,
Un tout petit toutou.
Puis dans le tout Dernier wagon,
Le wagon dénommé
Fourgon, On empila tous Ces bagages :
Deux valises,
Un coffre, Une cage,
Trois paniers,
Cinq malles, Un faitout… On y mit tout-
Jusqu’au toutou.
Or, avant même Qu’on roulât,
Le cher toutou
Se défila… Ce ne fut qu’à l’arrêt
Suivant
– A l’arrêt suivant,
Pas avant !-
Qu’on recompta
Tous les bagages :
Deux valises, Un coffre, Une cage,
Trois paniers,
Cinq malles, Un faitout…
Nom d’un bonhomme !
Et le toutou ? Au même instant,
Qu’est-ce qu’on voit ?
Un dogue – à côté du convoi… On l’attrape, et hop ! –
Aux bagages !…
Le mâtin Rejoint Coffre, cage,
Paniers,
Valises, Malles,
Et faitout –
Le dit dogue devient Toutou. »
Samuel MARCHAK
a) Relevez les signes de ponct uation utilisés dans ce poème.
b) Quelle signification donner aux tirets (-) de la 4ème strophe :
c) Ecrivez un poème avec les mots de Clemens BRENTANO.
d) Ajoutez la ponctuat ion et les majuscules.
La lune qui passeChant ez tout basLa lune
Tout bas chantezVous en apprendra l’air
En chuchotant la berce useChantezsilencieuse
e) Voici maintenant le poème de Clemens BRENTANO . Comparez vos textes au
sien. « La berceuse »
« Chantez tout bas, tout bas chantez,
Chantez en chuchota nt la berceuse,
La lune vous en apprendra l’air,
La lune qui passe silencieuse,
Chantez cette chan son si douce,
Aussi douce que les sources sur les cailloux,
Que des abeilles aut our du tilleul,
Qui bourdonnent et fri ssonnent, qui clapotent,
sur la mousse.
Clemens BRENTANO -Traduit par R.L (extrait de l’Allem agne en poésie).
H – J’EXPLORE
1) Lisez attentivement le poème suivant :
« Meg Merrilies »
« La vieille Meg, c’ét ait une bohém ienne ;
Elle vagabondait par les landes,
Son lit, c’était la tou ffe de bruyère brune ;
Elle n’avait de ma ison qu’au dehors.
Ses pommes, c’étaient les mûres noires,
Ses groseilles les cosses de genêt, Son vin la ros ée de la sauvage rose blanche,
Son livre une tom be de cimetière.
Ses sœurs, c’étaient les collines rocailleuses, Ses frères les gr ands mélèzes ;
Seule avec sa nombreuse famille,
Elle vivait à sa fantaisie.
Plus d’un matin elle n’ avait pas de déjeuner
Et point de dîner pl us d’un après-midi,
Puis, au lieu de soup er, elle fixait
En plein la lune.
Mais, chaque ma tin avec le frais liseron
Elle se faisai t une guirlande,
Et chaque nuit, c’était l’if sombre de ravin
Qu’elle enlaçait t out en chantant.
De ses doigts vieux et bruns Elle tressait des nattes de jonc
Et les vendait aux villageois
Qu’elle rencontrait dans les taillis.
La vieille Meg était brave comme la reine Marguerite
Et aussi grande qu’une Amazone ;
Elle portait un vieux manteau de drap rouge
Et un chapeau de copeaux tressés. Que Dieu donne le r epos à ses vieux os ;
Il y a beau temps qu’ elle est morte ».
John KEAT
2 – a) Combien de strophes contient cette poésie ?
b) Combien de ve rs dans tout le texte ?
c) Combien de ve rs dans chaq ue strophe ?
d) Quelle remarque pou vez-vous faire sur les rimes ?
3 – a) Relevez dans le texte des termes que vous ne connaissez pas.
b) Cherchez leur sens dans le dictionnaire.
c) Donnez un titre à chaque strophe.
1 – 2 – 3 –
4 – 5 – 6 –
7 –
I – JE MANIPULE
1 – Lisez le texte suivant : « Le vieux Ali avait un cou de taureau
, des épaules de déménageur et des mains
comme des battoirs. Sa taille de géant impressionnait toujour s et ses yeux de
braise brûlaient dès qu’il s vous fixaient. »
a) Le texte contient une comparaison. Retrouvez-la.
b) Quel mot introduit la comparaison ?
c) Observez la phrase suivante :
«… ses yeux tels de la braise vous brûlaient dès qu’ils vous fixaient ».
d) Quel mot introduit la comparaison ? e) Recopiez la même phras e en introduisant la comparaison av ec un autre mot
outil :
Pareil à…………………………………………………………………….
……………………………………………………………………… f) Observez les mots soulignés dans le texte. Avec quoi compare-t-on ? :
Le cou :…………………………………
Les épaules…………………………… La taille………………………………… g) A-t-on utilisé un mot pour introduire une comparaison ?
…………………………………………
Je retiens :
L’image est un procédé qu i permet de rapprocher deux objets de mondes
différents qu’un élément co mmun permet d’associer.
Exemple : Elle était blonde comme les blés.
Comparé
: la jeune fille. Comparant : les blés Elément commun : la blondeur.
Outil de comparaison : comme.
La comparaison et la métaphore sont deux sortes d’images.
A la différence de la co mparaison, la métaphore n’utilise pas de mot pour
introduire la comparaison. Le but est de créer une surprise en rapprochant des
images inattendues.
Exemple : Il a un cou comme celui d’un taureau : comparaison.
Son cou de taureau impr essionnait toujours : métaphore.
2 – Complétez les comparaisons suivantes :
Être ……………….. comme une carpe .
Être laid comme……………….
Une personne ………………… comme Crésus.
Des enfants bavards comme …………………….
Un garçon………………. comme un pinson .
Devenir rouge comme …………….. .
3 – a) Réécrivez le texte suivant sous forme de poèm e. Donnez-lui un titre.
Règle d’écriture : deux strophes de q uatre vers chacune.
« Parfois il se fait q ue le vent au plafond de la nuit tel un enfant s’éveille et il s’en
vient par les allées solitaires tout doux, tout doux jusqu’ au village. Et à tâtons il
arrive à l’étang et là il éc oute à l’entour et les maisons sont toutes blêmes et les
chênes muets. »
b) Comparez votre production à celle de Rainer Maria RILKE .
« Le vent »
« Parfois il se fa it que le vent
Au profond de la nuit tel un enfant s’éveille
Et il s’en vient par les allées solitaires
Tout doux, tout doux jusqu’au village
Et à tâtons il arrive à l’étang
Et là il écoute à l’entour Et les maisons sont toutes blêmes Et les chênes muets ».
Rainer Maria RILKE (Traduit par R.L).
4) Ecrivez un poème à la manière de John KEATS.
Règle d’écriture : strophes de quatre vers, pas de rimes.
Séquence 2
ECRIRE POUR FAIRE FAIRE
¦ Objectif de production :
? Ecrire une règle de jeu à partir d’ éléments proposés,
? Produire un écrit injonctif.
¦ Objectifs et compétence :
– Mettre en page des textes de façon pertinen te et cohérente : le texte injonctif.
– Comprendre la nécessité de respecte r des règles de présentation et de
cohérence. – Comprendre les consignes.
– Respecter des règles él émentaires d’écriture.
– Donner du sens à un texte.
¦ Savoirs en jeu :
– Découvrir différentes façons de donner un ordre.
– Découvrir des textes injonctifs.
– Comprendre les consignes. – Repérer des verbes dans des consignes.
– Différencier les ty pes de consignes.
– Découvrir et identifier les diff érentes formes de l’injonction.
– Replacer des verbes in jonctifs dans un texte.
– Donner du sens à un texte.
– Identifier l’émetteur et le ré cepteur dans un texte injonctif.
– Utiliser et écrire les verbes injonctifs à l’impératif présent.
– Repérer et conjuguer des ve rbes à l’impératif présent.
– Retrouver la chro nologie des opérations à effectue r dans un texte injonctif.
– Mettre en page un texte pou r le rendre lisible.
– Repérer des indices pour construire un texte.
– Classer des informations.
– Bâtir une chronologie cohérente.
– Analyser un texte.
– Rechercher des informat ions dans un texte.
– Comparer des textes.
– Repérer et identifier un texte injonctif. – Approcher différentes formes de discours. – Eviter les répétitio ns dans un texte.
– Utiliser des substituts.
– Transformer des phrases. – Travailler le lexique à partir d’un texte.
– Eviter les répétitions.
– Production d’un écrit injonc tif, recherche d’informations dans un texte injonctif.
A – DECOUVRIR DIFFERENTES F AÇONS DE DONNER
UN ORDRE
– DECOUVRIR DES TEXTES INJONCTIFS.
Texte 1 : Construire une figure en suivan t le programme de construction.
a) Trace un segment AB de 10 cm, marque son milieu M.
b) Trace un cercle de diamètre AB et un autre de diamètre AM.
c) Colorie en vert la partie intérieu re au premier cercle mais extérieure au
second.
Texte 2 : Riz aux clovi sses, 8 à 10 personnes.
– 1 livre de riz.
– 1/8 de litre d’huile.
– 1 oignon. – 6 poivrons rouges.
– 1 kg de clovisses.
– 3 gousses d’ail.
– 1 bouquet de persil.
– Poivre gris.
– Une pincée de safran moulu. – Un sachet de sa fran en poudre.
Hacher l’oignon. Peler les tomates et coupez-les en mo rceaux. Hachez les
poivrons.
Laver les clovisses. Dans une casserole , faire chauffer l’huile et faire revenir l’oignon, la tomate et
trois poivrons. Quand ils sont frits, ajouter les clovisse s, sans cesser de remuer,
jusqu’à ce qu’elles s’ouvrent. Ajouter l’eau. Assaisonner et porter à ébullition.
Piler l’ail, le persil, le poivre et le safran en poudr e. Ajouter ce mélange, avec le
riz, dans la casserole.
Quand le riz est cuit, sau poudrer de safran moulu. Retirer du feu et laisser
reposer.
Faire cuire les trois poivrons et les couper en lamell es. Servir le plat décoré
avec les poivrons et les citrons.
Texte 3 :
« Quelle est la boisson la plus forte ?
L’eau bien sûr parce qu’ell e supporte les bateaux !
J’ai ressorti cette vieille blague parce que je vais v ous parler maintenant d’une
force insoupçonnée, ce lle du papier. Vous pensez pe ut-être qu’une feuille de
papier ne peut ri en supporter ?
Détrompez- vous.
Prenez une feuille de papier et faites-en un tube. Posez- le sur la table et voyez
quel poids il peut supporter. Etonnant n’ est-ce pas pour u ne seule feuille de
papier !
Une autre façon d’utiliser la force du papier est de le plier en accordéon.
Vérifiez-le avec une feuille de papier en vous assura nt que tous le s plis sont
égaux. Placez votre feuille de papier sur un support et, mieux, empêchez- la de
s’évaser ». 2 – Chaque texte correspond à une catégorie ci-dessous . Notez le numéro du
texte.
– C’est une expérience, texte n°………………….
– C’est un exercice de géométrie, texte n°……… – C’est une recette de cuisine, texte n°………….
Je retiens :
– Une injonction* est un ordre.
– Un texte injonctif * est un texte qui donne des ordres, des conseils, qui
annonce des interdictions, des opérations à effectuer…
Exemples : un règlement, une recette de cuisine, un mode d’ emploi, une notice
de montage, etc.
3 – Certains textes donnent des ordres à ex écuter. Recopiez une injonction*
dans les textes cités ci-dessous :
Texte n°1 :…………………………………………………
Texte n°2 :………………………………………………… Texte n°3 : …………………………………………………
B – COMPRENDRE LES CONSIGNES
– Repérer des verbes dans des consignes.
– Différencier les ty pes de consignes.
1 – Lisez la phrase suivante : « Prends une bassine que tu rempliras d’eau
. »
– Vous avez deux actions à faire : lesquelles ?
– Soulignez le s verbes injonctifs qui les annoncent.
– Réécrivez cette phrase en deux phrases distinctes qui donnent des ordres.
? 2 – Lisez la phrase su ivante. Soulignez les de ux verbes injonctifs.
« Repère les adjectifs qualificatifs et so uligne ceux qui sont au féminin pluriel . »
– Lequel de ces deux verbes vous fait réfléchir ?
– Lequel vous fait manipuler ?
? 3 – Voici une liste de ve rbes. Entourez ceux qui vous font manipuler.
Réfléchir – tracer- relier – écouter- se re nseigner – entourer – vérifier – cocher –
colorier – reconstituer – ranger – trier – apprendre – surligner – barrer.
? 4 – Lisez cette consigne : « Trace un rectangle enfermé dans un cercle et qu i contiendra lui-même un
triangle . »
– Surlignez de trois couleurs différentes le s trois actions que v ous devrez faire.
? 5 – Voici un dessin. Quelle consigne lui correspond ?
0
a -Trace un petit cerc le. Trace un rectangle.
b – Trace un cercle dans un rectangle. Le cercle sera en haut à gauche du
rectangle et ne devra pas toucher les cô tés du re ctangle.
c -Trace un cercle à gauche d’un rectangle. Le cerc le ne doit pas toucher les
côtés du rectangle.
– C’est la consigne : ………
1 – Je retiens :
Quand je lis une co nsigne, je dois :
– Repérer les verbes injonctifs.
– Faire la différence entre le s verbes : ceux qui font réfléchir et ceux qui font
manipuler.
2 – Applications :
Dans les consignes suivantes, so ulignez les ver bes injonctifs.
a) Lisez le texte puis recopiez les passages en caractères gras.
b) Dessinez le crâne humain et donnez le nom des os.
c) A partir de ce document, rédigez une hist oire courte.
d) Mets le crayon de ton compas sur A pu is trace le cercle.
e) Tu prends une fe uille 21/ 27 et tu la plies en deux.
f) Tu ajoutes un peu de sucre que tu auras mélangé avec to n zeste de citron.
g) Ne pas descendre av ant l’arrêt du bus.
2 – Avec les deux consignes données, faites-en une seul e, en une seule phrase,
en évitant la répétition.
Exemple
:
– Trouve les noms féminins. So uligne les noms féminins.
– Réponse : Trouve le s noms féminins puis souligne-les.
a) Lis la phrase. Souligne la phrase .
Réponse : ……………………………………………………
b) Coupe les poivrons. Fa is cuire les poivrons .
Réponse : ……………………………………………………
C – REPERER LES VERBES INJONCTIFS
DANS DES CONSIGNES
Voici une liste de consigne s. Repérez puis ra ngez les verbes in jonctifs dans le
tableau. Attention, lors que la phrase comporte d eux verbes, ils peuvent
appartenir à des co lonnes différentes.
1 – Lorsque le riz est cuit, le me ttre dans le plat et le couvrir.
2 – Entoure les marques du pluriel dans la phrase.
3 – Retrouve l’intrus et barre-le.
4 – Mets les trous de la feuille à gauche.
5 – Ecoute la consigne pu is reproduis la figure.
6 – Imagine et écris une suite à cette histoire.
7 – Lis le texte puis remplis le tableau.
Je réfl échis Je manipule
Application : Voici un exercice pr oposé à un apprenant.
– Consigne : Ecrivez 3 phrases d’un conte puis s oulignez les mots au pluriel : un
trait pour les noms, deux trai ts pour les verbes (dans t on texte, il faut au moins
quatre verbes).
Réponse : Les trois frères partirent à la recherche de leur sœur prisonnière de
l’ogre . Ils traversèrent d’étranges montagnes et d’étonnantes rivières . Enfin, ils
arrivèrent.
1 – Cette réponse contient des erreur s. Lesquelles ? Expliquez-les.
………………………………………………………………………………………
………………………………………………………
2 – Donne deux c onseils à cet élève pour qu’il réussisse mieux son
exercice la prochaine fois. ………………………………………………………………………………………
……………………………………………………….
D – DECOUVRIR ET IDENTIFIER LES DIFFERENTES
FORMES DE L’INJONCTION
a) observez les extraits de textes ci-dessous.
Chacun utilise une façon de donner des ordres.
Recopiez les verbes injonctifs ; pr écisez leur temp s et leur mode.
TextesVerbesTemps/Mode1) De ssinez sur du papier un triangle isocèle de 15 cm
de côté. Tracez les trois haut eurs. A l’intersection, trac ez un cercle de 4 cm de
diamètre. Evidez-le2) Tu ti ens la porte, tu laisses pa sser la dame âgée et tu
l’aides à traverser la rue. 3) Découper 26 b outs de papier. Inscrire sur chacun une
lettre de l’alphabet. Tirer un papier au sort. Ecrire le plus de mots possible
commençant par cette lettre.4) Tu ne te bagarreras pas d ans la cour. Tu
respecteras tes camarades. Tu seras pol i(e) avec les g ens qui t’entourent.
b) A qui s’adresse chacun des textes 1, 2, 3, 4 ? A u ne ou plusieur s personnes ?
Texte 1 ………………………… Texte 2…………………….. ……..
Texte 3 ………………………… Texte 4 …………………………….
c) Cet ordre s’adresse à une personne :
« Descends de l’échelle ! »
– Comment donnerais-tu cet ordre si tu t’adressa is à plusieurs personnes ?
…………………………………………………………………………….
d) Une erreur s’est gli ssée dans ce règlement.
Une injonction n’est pas d onnée de la même fa çon que les autres. Surlignez-la.
Réécrivez-la dans le cadre en accord avec le reste du texte.
– Respectez les pelouses. – Ne cueillez pas les fleurs.
– Ne donnez pas à manger aux animaux.
– Ne pas s’approc her des cages.
– Respectez les zo nes de circulation .
1 – Je retiens :
Il existe plusieurs façons de donner u ne injonction.
On peut utiliser :
Le présent de l’impératif : coupe les pommes, c oupons les po mmes, coupez
les pommes.
Le présent de l’indicatif : tu coupes les pommes.
Le futur de l’indicatif : tu couperas les pommes.
L’infinitif : couper les pommes.
Mais il existe aussi des ex pressions injonctives comme stop ! Chut ! Silence !
Dans un même texte, il ne faut pas mélanger les différents temps ou modes
de l’injonction.
2 – Application :
Parmi les 8 phrases proposée s ci-dessous, soulignez cell es qui sont injonctives.
1 – Tu ne tueras point. 2 – A table !
3 – Le chat est un mammifère.
4 – Qu’il fait beau ! 5 – Entrer sans fumer. 6 – Si tu te ta isais un peu ?
7 – Je sais nager !
8 – Stop !
E – REPLACER DES VERBES INJONCTIFS
DANS UN TEXTE.
– DONNER DU SENS A UN TEXTE.
1) Consigne : Vous allez utiliser un four à micro- ondes pour la première fois. Sur
la notice d’utilisation, des verbes in jonctifs ont été supprimés.
Retrouvez-les dans la liste des verbes propos és (si vous ne connaissez pas le
sens de certains verbes, ut ilisez le dictionnaire).
Le premier verbe vous aide. Beaucoup de verbes de la liste ne seront bien sûr
pas utilisés.
Verbes –––––– Remplissez Placer Ouvrez Mettre Affichez Découvre
Vidons Refermer Refermez Buvez Appuyez Cu isez Fermer Assurez Utilisez
Attends Sélectionnez Régaler Attendez Notices d’utilisation –––––––––
–––––––––––––– 1. Branchez votre apparei l. 2…………..la porte en
appuyant sur la touche (4) 3…………….l’al iment à cuire dans le four sur le
plateau (5) 4. N’…………..jamais de plat métallique. 5……………….la porte.
6……………-vous qu’elle est bien fermée ; dans le cas contraire, le four ne
fonctionnerait pas. 7………………..le programme à l’aide de la touche (1) 8…………….ensuite le temps de cuisso n à l’aide de la minuterie.
9………………sur la touche départ (3) 10… …………..la fin de la cuisson avant
d’ouvrir la porte. 11……………….-vous !
2) Lecture plaisir
Des poètes se sont amusés à écrire des modes d’em ploi, des recettes, des
règlements pour le plaisir des mots. Découvrons quelq ues -uns de leurs poèmes.
3) Pour un art poétique
Prenez un mot pre nez en deux
N’éveillez pas l’objet qui dort.
Faites cuire comme des œufs
Laissez l’objet à son silence.
Prenez un petit bout de sens
Être tranquille c’est son sort
Puis un grand morceau d’inno cence
De pauvre chose sans défense
Faites chauffer à petit feu
N’éveillez pas l’objet qui dort. Au petit feu technique
Il est méchant quand on l’ennuie.
Versez la sauce énigmati que
La descente de lit vous mord. Saupoudrez de quelques éto iles
La porte bat toute la nuit.
Poivrez et puis me ttez les voiles
Où voulez-vous en venir ?
Claude ROY
A écrire ?
La maison qui s’envole, Gallimard.
Vraiment ? A écrire ?
Raymond QUENEAU
Le chien à la m andoline, Gallimard.
Recette : Comment on fait les tartelettes amandines
« Prenez un toit de vieilles tuiles
Battez, pour qu’ils soient mousseux,
Un peu avant midi.
Quelques œufs ; Incorporez à leur mousse Placez tout à côté
Un jus de cédr at choisi ;
Un tilleul déjà grand
Versez-y
Remué par le vent.
Un bon lait d’ amande douce ;
Mettez de la pâte à flan
Mettez au-dessus d’eux
Dans le flanc
Un ciel de bleu, lavé
De moules à tartelettes ;
Par des nuages blancs.
D’un doigt preste, abricotez
Les côtés ; Laissez-les faire.
Versez goutte à gouttelette
Regardez-les.
Votre mousse en ces puits, puis
Guillevic
Que ces puits
Avec, Gallimard.
Passent au four et, blondines,
Sortant en ga is troupelets,
Ce sont les tartelettes amandines ! Edmond ROSTAND, Cyrano de Bergerac.
F – UTILISER ET ECRIRE LES VERBES INJONCTIFS
A L’IMPERATIF PRESENT.
1) Observez le texte suivant :
Pour faire des Maracas, –––––––––––––- il te faut : – 2
bouteilles d’un q uart de litre – du riz – du papier – de la colle – de la peinture
Fabrication ––––––––––––––– 1 – Remplis le quart de tes
bouteilles avec le riz. 2 – Découpe des bandes de papier de 2 cm de large.
3 – Enduis-les de colle. 4 – Recouvre et bouche tes bouteilles avec ces
bandes. 5 – Peins-les. 6 – Ag ite la bouteille pou r ent endre les Maracas.
Ce texte s’adresse à une personne. On la tutoie.
Relevez les verbes injonctifs puis complétez le tableau ci-dessous.
On s’adresse à une per sonneOn s’adresse à pl usieurs personnes ou à
une seule qu’on vouvoieOn s’adresse à plusieurs personnes et on est soi-
même concerné.Infinitif et groupe de ce verbe.Exemple :
Remplis,
Découpe Exemple : Remplissez Exemple : Remplissons Remplir, 2ème
groupe
2) Lisez les phrases et barrez les verbes entre parenthèses qui ne
conviennent pas. a) (Lave – lavons – la vez) – toi les mains av ant de passer à table.
b) (Reviens – revenons- re venez) avec vos cahiers.
c) (Prends – prenons – pren ez) nos valises et partons !
d) N’ (oublie – oub lions – oubliez) pas de te préparer.
e) (Sois – soyons – soyez) attentifs : on nous regarde !
1 – Je retiens
Groupe des verbes Groupe1 Groupe 2 Groupe 3 –
2ème personne du singulier. -1ère personne du pluriel. -2ème personne du
pluriel
Découpe Découpons déc oupez Choisis Choisissons Choisissez
Attends Attendo ns Attendez
Ce mode se conjugue sans pronoms sujets. Les ve rbes qui finissent par e
ne prennent pas le s.
Exemple : Tu cueill es une fleur (indicatif présent).
Cueill e une fleur (impératif présent).
*Dans certains cas, il faut faire la liaison : Manges-en ! Vas-y ! Penses-y !
*Certains verbes sont irréguliers.
FaireVouloirSavoirAllerEtreAvoir Fais Faisons Fait esVeuille Veuillons
Veuillez Sache Sachons Sa chezVa Allons Allez So is Soyons SoyezAie
Ayons Ayez
2 – Applications
a) Mettez les phrases impératives suivant es à la deuxième pe rsonne du singulier
:
– Buvez du jus de fruits . …………………………………………..
– Laissez le ch at tranquille . …………………………………………
– Faites ce que je vous demande
………………………………………
– Ne vous salissez pas les mains . ……………………………………
b) Ne confondez pas le présent de l’indicatif et le présent de l’impératif .
Trouvez la bonne réponse :
– Pourquoi rêv… -tu ? Occu p…..-toi de ton travail.
– Regard… -toi dans une glace. Te trouv… -tu bien coiffé(e) ?
– A quelle heure va …-tu au lycée ?
– Donn…-lui un autre exercice.
G – PRODUCTION D’UN ECRIT INJONCTIF
1 – J’explore
a) Lisez le texte suivant :
Osso – Bucco aux oignons
Pour 4 personnes
Temps de préparation : 20 mn. Temps de cuisson : 2 heures. Ingrédients
1 kg de viande de veau coupée en tranche.
½ litre de bouillon. 1 boîte de concentré de tomates.
2 cuillères à soupe de farine.
1 cuillère à soupe d’huile. 4 oignons. 1 zeste de citron râpé.
1 gousse d’ail hachée.
1 bouquet garni. Sel et poivre.
Garniture
:
1 sachet de 50 g de gruyère râpé.
250 g de spaghettis.
Préparation :
* Pelez et hachez les oignon s et la gousse d’ail.
* Assaisonnez et farinez le s tranches de via nde puis les faire revenir dans une
cocotte dans l’huile et le beurre ; aj outez les oignons.
* Saupoudrez avec la farine restante et le zeste de citron, bien mélanger.
* Délayer le concentré de toma tes dans le bouillon, vers ez la préparation dans la
cocotte en ajoutant le bouquet garni et l’ail.
* Couvrez et laissez mijoter 2 heures.
* A la fin de la cuisson, préchauffez le fo ur thermostat ¾, placez les tranches de
viande dans un pla t, nappez-les du jus de cuisson.
* Glissez le plat d ans le four en le couvrant d’une feuille d’aluminium.
* Pendant ce temps, faites cuire le s spaghettis dans un e casserole d’eau
bouillante salée durant 10 minutes, les égoutter.
* Servez les spaghe ttis et le gruyère râpé séparément.
b) Répondez aux ques tions suivantes :
1) A quoi sert ce texte ?
2) Où peut-on le trouver ? 3) Quel nom lui donneriez-vous ?
c) Parmi les propositions suivantes, quelle est celle que vous retenez pour
représenter l’organisa tion du texte ?:
1) Titre…………………..Informations………………………………….
Ce qu’il faut faire……………………Photo……………………………
2) Nom du plat………………………………………………………… Liste des ingrédients ……………………………………………………………..
Actions à accomplir ……………………………………………………….
Le plat tel qu’il se présente……………………………………………….. 3) Menu…………………………………………………………………. Ce qu’il faut faire………………………………………………………….. Ce qu’il ne faut pas
faire…….. ………………………………………….. Liste des
plats………………………………………………………………
2 – Je manipule
Quel désordre ! Ali, en jouant avec une paire de ciseaux, a découpé la recette
en plusieurs morceaux.
Aidez sa mère à recomposer la recette. Utilisez le schéma retenu dans la partie «
j’explore ».
Au chocolat
3* Fais fondre le chocolat et le beurre F
à feu très doux d ans une casserole.
4* Place le séparateur à œuf sur le verre doseur et casse l’œuf au-dessus. Verse
le jaune dans la terrine bleue.
5* Ajoute la moitié du sucre qui te rest e (1/4 de dose du verre doseur) et fouette
le jaune jusqu’à ce qu’il forme une crèm e lisse et presque blanche. Pour cela,
utilise le batteur comme une fourch ette sans utilis er la manivelle.
*17 biscuits à la cuillère
C * du sucre (1 dose ½ du verre doseur)
* de l’eau (1 dos e ½ du verre doseur)
* 35 g de chocolat
* 1 œuf.
E 6* Ajoute le beurre et le chocolat fond us et mélange bien.
7* Verse le blanc d’œuf dans la terri ne jaunie et bats ce blanc en neige ferme
avec ton batteur. Ajoute le sucre restant et fouette de nouveau.
8* Incorpore très délic atement le blan c et la crème.
H 9* Verse cette crème dans le moule à charlotte.
10* Trempe les 5 derniers biscuits dans le sirop et co uvre la crème en les
serrant les uns contre les autres.
G* Le moule à charlotte
* La terrine jaune
* La terrine bleue * La cuillère jaune * Le batteur
* Le verre doseur
* Le séparateur à œuf
* Une casserole
* 1 moule a manqué
A Charlotte
1* Verse dans le moule a manqué l’eau, et une dose de verre doseur de sucre.
Conserve le reste du sucre pour la crème. Mélange avec la cuillère jaune jusqu’à
ce que le sucre soit fondu.
D 2* Prends 12 biscuits et trempe-les chacun pen dant 10 secondes en les
tournant dans le sirop. Place-les vertical ement dans le moule à charlotte en les
pliant en bas, pour qu e le fond du moule se trouve petit à petit recouvert.
B
* Photo
3 – J’imagine
1 – Ecrivez la recette cont enue dans ce texte en util isant le schéma trouvé dans
la partie « j’explore ». N’oubliez pas, dan s la présentation, de faire un dessin.
« Nids d’oiseaux »
« Avez-vous peu de temps ? Voici une recette dont le temps de préparation est
de 10 min. Vos invités n’attendront pas. Bien entendu, il faudra avoir à sa
disposition les ingrédients nécessaires. Ils sont peu nombr eux et faciles à
trouver.
Munissez-vous de la moulinette et hachez très fi n : 2 oignons, 60g de persil,
300g de betteraves, 1 verre de câpres.
Renouveler le même trava il en hachant très fin 350 g de vi ande et une boîte
d’anchois à l’huile. Vous pourrez réaliser les opérations séparément.
La présentation attisera l’appétit. Prenez 4 assiette s à dessert. Disposez vos
hachés en cercles : persil-viande-câ pres-oignons-bettera ves-anchois-jaune
d’œuf (vous en aurez prépar é 4 puisque le plat prop osé est pour 4 personnes)
qui se trouvera au centre. Servez. Ch aque invité assais onnera à son goût.
2 – Application : Présentez la recette de l’un de s plats de votre mère. »
4 – J’analyse
1) Lisez le texte suivant :
Paella valencienne
(8 à 10 personnes)
1 verre de riz par pers onne 1 poiv ron rouge
3 verres d’eau par personn e 4 to mates
400 grammes de calmar 2 gousses d’ail
200 grammes de seiche 1 verre d’huile
200 grammes de baudroi e 3 citrons
200 grammes de langousti nes safran, sel
200 grammes de gr osses crevettes
1 livre de moules
Préparation
a) Faire chauffer l’huile et le sel dans la poêle.
b) Faire revenir les calmars, la seiche, la baudroie et les la ngoustines. Retirer
tous les ingrédients.
c) Dans la même huile, ajouter la to mate coupée et l’ai l haché. Ajouter une
pincée de sucre, pour neut raliser l’acidité des tomates. Faire revenir jusqu’à ce
que toute l’eau se soit évaporée.
d) Ajouter alors les calmars, la seiche, la baudroie, le s langoustines et le riz.
Faire revenir tous ces ingrédie nts pendant quel ques instants.
e) Faire bouillir l’eau et verser les mo ules ouvertes. Enleve r u n c ô t é d e l a
coquille. f) Ajouter sur le mélange de riz l’eau bouillante et le safran. Ajouter ensuite les
grosses crevettes et le poivron coupé en lamelles.
g) Temps de cuisson : vingt minutes environ.
2) Indiquez quelle est la forme verb ale la plus fréqu emment utilisée.
* Présent * Impératif * Infinitif
3) Comment la chronologi e de l’action est-elle in diquée dans ce texte ?
4) Remplacez les numéros par des mots qui indiquent l’ordre. Vous pouvez
utiliser la liste suivante : Puis – tout d’abord -deuxi èmement – pour terminer –
après – enfin – troisièmement.
1 …………………….. ……. 4 …………………………….. 2 …………………………… 5 …………………………….
3 …………………………… 6 …………………………….
7..……………………………
5 – Je prolonge
Réécrivez la recette « riz au clovisses » en utilisant l’impératif. Vous pouvez
choisir d’utiliser la 2ème personne du singulier ou la 2ème personne du pluriel.
6 – Je construis mes outils
1) Voici une liste de propositions « Pour écrire un texte à consignes ». Notez
celles que vous retene z et indiquez le titre du text e à consignes que vous avez
étudié.
Un texte à consignes est un texte…*
Titre du texte* qui a un titre ; * qui est une suite d’action à réa liser ; * qui
indique l’ordre à suivre ; * dont l’ordre à suivre es t indiqué par de « petits
mots » ; *qui permet de passer d’une liste de parties (ingrédients,
matériels…) à un tout bien construit indiqué par le ti tre ; * dont les verbes
sont conjugués pour donner des ordres ; * dont les verbes sont des verbes
d’action (pour faire faire) ; * dont les phrases sont courtes.
2. Ecrivez un règlement de vie collective (lycée – famille – société nationale, etc.)
en utilisant une suite d’ordres.
7 – J’écris
Ecrivez une règle de jeu à pa rtir des éléments proposés :
Effectif : 10 + 1 voleurs.
Matériel : 1 foulard noué (la pomme).
Règle : sortir la pomme du cercle sans se faire trouver par le gardien.
Titre: Le voleur de pommes.
8 – J’améliore mon texte
a) A l’aide de la grille proposée ci- dessous, relisez votr e texte. Répondez
par Oui ou Non.
1. J’ai présenté les actions à réaliser dans l’ordre chro nologique. 2. Je
n’ai pas oublié des informations impor tantes. 3. J’ai utilisé des « petits
mots » pour introduire l’or dre chronologique. 4. Les verbes utilisés sont
des verbes d’action (pour faire faire) 5. J’ai bien précisé comment débute et
se termine le jeu. 6. J’ai utilisé tout au long du texte le même temps verbal :
impératif ou infinitif. 7. J’ ai utilisé des phrases cour tes. 8. Je suis sûr que
les actions proposées s ont possibles, que le je u peut se pratiquer. Oui Non
b) Réécrivez votre texte en tenant compte des rema rques faites lors de
l’utilisation de la grille de relecture.
SEQUENCE 3
ECRIRE
POUR RACONTER LE CONTE
Objectifs et compétences :
– Réactiver les notions d’analyse littéraire.
– Découvrir les spéc ificités du genre.
– Ecrire un conte en respect ant les contraintes du genre.
A- Découvrir la structure du conte
1) Lisez le conte suivant :
« La Belle au bois dormant »
« Il y avait autrefois un roi et une reine qui disaient chaque jour : « Ah, que ne
pouvons-nous avoir un enfant ! » et jamais il ne leur en venait.
Or, un jour que la reine étai t au bain, une grenoui lle sortit de l’eau , vint à terre et
lui dit : « Ton souhait va êt re exaucé, av ant qu’un an ne soit écoulé tu mettras
une fille au monde. »
Ce que la grenouille avait dit s’accomplit et la reine eut une fille si jolie que le roi
ne put se tenir de joie et donna une grande fête.
Il n’y invita pas seulement ses parents, amis et co nnaissances, ma is aussi les
sages-femmes, afin qu’ell es fussent propices et favorables à son enfant.
Il y en avait treize dans tout le royaum e, mais, comme il ne possédait que douze
assiettes d’or dans lesquelle s les faire manger, il y en eut une qui dut rester chez
elle. La fête fut célébrée en grande pompe et, quand elle fut finie, les sages-
femmes firent à l’enfant leurs dons merveilleux. L’une lui donna la vertu, l’autre la
beauté et la troisième la richesse, et il en fut ainsi de tout ce qu’on peut désirer
dans le monde. Onze d’en tre elles venaient de pr ononcer leurs formules
magiques quand la tr eizième entra soudain. Elle voul ait se venger de n’être pas
invitée et, sans salut ou mê me un regard pour personne, elle s’écria à haute voix
: « Dans sa quinzième année, la princesse se piquera avec un fuseau et tombera
morte. » Puis, sans dire un mo t de plus, elle fit demi-tour et quitta la salle. Tous
étaient effrayés ; alors la d ouzième, qui avait encore un vœu à faire, s’avança et,
comme elle ne pouvait pas annuler le mauvais sort, mais seulement l’adoucir,
elle dit : « Ce n’est pas dans la mort que la princesse to mbera, mais dans un
profond sommeil de cent ans ». Le roi, qui aurait bi en voulu préserver son enfant
chérie du malheur , fit publier l’ordre de brûler tous les fuseaux du royaume.
Cependant, les dons des sages-femmes s’accomplissaie nt, car la fillette était si
belle, modeste, aimable et intelligente que tous ceux qui la voyaient ne
pouvaient s’empêcher de l’aimer.
Or, il advint, juste le jour de ses quinze ans, que le roi et la reine s’absentèrent et
que la jeune fi lle resta seul e au château.
Alors, elle se promena parto ut, visita salles et chambres à son gré, et finit par
arriver ainsi devant un vieux donjon. Elle gravit l’étroit escalier en coli maçon et se
trouva devant une pe tite porte. Il y avait une clé rouillée dans la serrure, et
comme elle tournait, la port e s’ouvrit, et voici que dans un petit galeta s une vieille
femme était assise, qui filait activement son lin avec son fuseau.
– Bonjour, petite mère, dit la fi lle du roi, que fais-tu là ?
– Je file, dit la viei lle en hochant la tête.
– Qu’est-ce donc que cette chose qui sautill e si joyeusement ? di t la jeune fille.
Elle prit le fuseau et voulut filer à son tour. Mais à peine y eut-elle touché que
la sentence magique s’accomplit et qu’elle se piqua le doigt.
Or, à l’instant où elle sentit la piqûre, elle tomba sur le lit qui se trouvait là, et
resta plongée dans un mauvais sommeil.
Et ce sommeil se propa gea à tout le châtea u. Le roi et la re ine, qui revenaient
justement et entraient dans la salle, commencèrent à s’endormir et toute leur
suite avec eux. Alors les ch evaux s’endormirent aussi dans l’éc urie, les chiens
dans la cour, les pigeons su r le toit, les mouches sur le mur, le feu lui-même, qui
flambait dans l’âtre, se tut et s’endormit, le rôti cessa de rissoler et le cuisiner, qui
s’apprêtait à tirer le ma rmiton par les cheveux par ce qu’il avait commis une
bévue, le lâcha et dormit. Et le vent to mba, et sur les arbres devant le château
pas une petite feuille ne continua à bouger.
Or, tout autour du châtea u, une haie d’épines comm ença à pousser, qui grandit
d’année en année et finale ment entoura tout le château et s’ éleva même plus
haut que lui, si bien qu’on ne pouvait plus rien en voir, pas même la girouette
sur le toit.
Cependant, la légen de de la Belle au bois dormant se répandait dans le pays, car
c’est ainsi qu’on appel ait la princesse, si bien que, de temps en temps, il venait
des fils de roi qui tentaient de pénétrer dans le château à travers la haie. Mais ils
ne le pouvaient pas car les épines se tenaient aussi solidem ent que si elles
avaient eu des mains, et le s jeunes gens y restaient sa ns pouvoir se dégager et
périssaient d’une mort lamentable. Au bout de longues, longues années, un
prince passa de nouv eau par le pays et il entendit un vieill ard raconter que,
derrière les haies d’épines, il y avait un château où une princesse d’une beauté
merveilleuse, nommée la Bell e au bois dormant, dormait depuis déjà cent ans, et
qu’avec elle dormaient le roi, la reine et tout e la cour. Il tenai t aussi de son grand-
père que beaucoup de fils de roi étaient déjà venus pour essayer de passer à
travers la haie, mais qu’ils y étaient restés accrochés et avaient péri d’une triste
mort.
Alors le jeune homme dit : « Je n’ai pas peur, je veux y aller et voir la Belle au
bois dormant ». Le bon vieux eut bon de le lui déconseiller, il ne voulut rien entendre.Or, les cent
ans étaient justement écoulés et le jour était venu où la Belle devait se réveiller.
Et quand le prince s’approc ha de la haie d’épines, il ne trouva rien que de
grandes et belles fleurs qu i s’ouvrirent d’elles-mêmes, le laissèrent passer sans
dommage et se refermèrent en fo rmant une haie derrière lui.
Dans la cour du château, le s chevaux et les chiens de chasse tachetés étaient
couchés et dormai ent, les pigeons perchés sur le toit avaient caché leur petite
tête sous leur aile . Et quand il entra dans la mais on, les mouches dormaient sur
les murs, dans la cuisine le maître queux faisait toujour s le geste d’empoigner le
marmiton et la servante était encore assise devant la poule noire qu’elle
s’apprêtait à plumer ; dans la grande salle, il vit toute la cour couchée et dormant,
et en haut, le roi et la reine étendus près du trône.
Alors, il arriva au donjon et ouvrit la porte du pe tit galetas où la Belle était
endormie. Elle était là, si jolie qu’il ne pouvait détacher d’elle ses regards et, se
baissant, il lui donna un baiser.
A peine l’eut-il effleurée de son baiser que la Belle au bois dormant ouvrit les
yeux, se réveilla et le regarda d’un air tout à fait affable. Alors, ils descendirent
ensemble et le roi se réveilla ainsi que la reine et toute la cour ; ils se regardèrent
en ouvrant de grands yeux. Dans la co ur, les chevaux se levèrent et se
secouèrent, les ch iens de chasse sautèrent et re muèrent la queu e, les pigeons
du toit sortirent leur tête de dessous l eur aile, regardèrent autour d’eux et prirent
leur vol vers les champs. Les mouches continuèrent à marcher sur les murs, le
feu dans la cuisin e reprit, flamba et fit cuire le repas. Le rôti se remit à rissoler : et
le cuisinier donna au marmiton une gifle qui le fit crier. La servante finit de plumer
le poulet. Alors les noces du prince et de la Belle furent célébrées en gr ande pompe et ils
vécurent heureux jusqu’à la fin de leurs jours ».
GRIMM, Contes
a) Voici trois pro positions reprenant le début de ce conte ou s ituation initiale*.
Une seule de ces proposit ions correspond à l’histoire que vous avez lue.
Laquelle ?
a) Un roi et une reine ne pouvaient pas avoir d’enfants. Un jour, ils
rencontrèrent une grenouille qui, un an plus tard, se changea en bébé. Le
roi et la reine, fous de jo ie, organisèrent u ne grande fête et invitèrent douze
sages-femmes.
b) Un roi et une reine ne pouvaient pas avoir d’enfants. Un jour, une
grenouille leur annonça qu’il s auraient bientôt une f ille. L’enfan t naquit un
an plus tard. Une grande fête fut donnée et douze s ages-femmes furent
invitées.
c) Un roi et une reine ne pouvaient pas avoir d’enfan ts. Un jour, une
grenouille leur annonça qu’un bébé naîtra l’année su ivante. Quand l’enfant
arriva, ce fut une grande joie. Une gra nde fête fut organi sée et toutes les
sages-femmes du royaum e furent invitées.
b) Dans ce cont e, un personnage va s’opposer au grand bonheur du roi et de la
reine.
Qui est- ce ? …………………………………………………………….. c) Quel événement a pert urbé la vie du royaume ? Cochez la bo nne réponse.
Une sage-femme perd u ne assiette en or.
Une sage-femme jette un mauv ais sort à la princesse.
Une sage-femme meurt.
d) Un personna ge va aussitôt aider la princesse . Il dit : « Ce n’ est pas dans la
mort que la princesse tombera mais dans un profond so mmeil de cent ans . »
Qui est-ce ? ……………………………
Un deuxième événement perturbe la vie de la princesse.
Quel est ce deuxième événement ?…………… ……………… ……….
e) Qui va sauver la princesse ?…. ………………. ……………… ………
De quelle façon ? …………………………………………………..
Retrouvez la phrase dans le texte:
……………………………………………………………(ligne….. )
f) La situation finale termine le conte.
Recopiez la dernière phrase du conte.
………………………………………………………………………
1 – Je retiens :
Dans un conte* , il y a plusieurs étapes :
– La situation initiale * : le lecteur ou l’auditeur apprend où et quand se passe
l’histoire, il découvre les personnages * et se plonge dan s une atmosphère
particulière.
– Les événements : un élément perturbateur * vient modifier la vie des
personnages, quelque chose vient rompre ce qui aurait dû normalement se
passer. Pour triompher de l’obstacle ains i créé, le héros r encontre des gens qui
vont l’aider (on les appelle les adjuvants) ou de s gens qui vont s’ opposer à lui (on
les appelle les opposants).
Il peut y avoir plus ieurs éléments perturbat eurs. On parlera de résolution
lorsque l’obstacle est surmonté.
– La situation finale * : elle termine le conte, c’es t la fin de l’a venture, on y
apprend ce que devie nnent les personnages.
2 – Applications:
Voici les événements du co nte que vous venez de li re : « La Be lle au bois
dormant ». Reproduisez le tableau ci-dessous et reco piez les événements selon
leur place dans le déroulement du conte.
a) La princesse se pi que le doigt av ec un fuseau.
b) Une grenouille annonc e la naissance de la princesse.
c) Le prince épouse la princesse.
d) Le roi et la reine ne peuvent pas avoir d’enfants.
e) Une sage -femme jette un sort à la princesse.
f) Le prince em brasse la princesse.
Situation initialeEvénements : éléments perturbateurs,
résolutionSituation finale
2) Voici cinq phrases tirées de différents contes. Précisez, en utilisant les chiffres
1, 2, 3, si elles apparti ennent à une situation initia le (1), à la suite des
événements (2) ou à une si tuation finale (3).
– N°…… : Il remercia le père Noël qui promit de ne plus jamais l’oublier.
– N°….. : Il rencontra une petite be lette dont la pat te était cassée.
– N°….: Dans un pays très froid vivait un petit garçon du nom de Yorko.
– N°…… : C’était un homme tr ès puissant mais mal aimé dans le pays car il était
méchant.
– N°….. : Il prit la coupe en or et la jeta d ans le ravin.
B – Utiliser et différencier les homonymes :
– comte, conte, compte.
– Connaître le sens de quelques expressions contenant le mot compte.
– Utiliser le dictionn aire pour y trouver le sens d’un mot, d’une expression.
1) Lisez les trois phrases suivantes et su rlignez les mots qui se ressemblent (ils
se lisent de la même façon mais ils ne s’écrivent pas de la même façon) :
a) Avant de s’endormir, Selma écout e un conte que lui lit sa maman.
b) Monsieur le comte vi ent de vendre son château.
c) Ghizlane compte ses économies : elle voudrait bien s’acheter un livre.
2) Réutilisez ces mots d ans les phrases suivantes.
Le banquier demande à son client le numéro de son ……………..
« Le…………….. est bon ! », dit le caissier à son client.
Elle nous ………… une drôle d’histoire de troll.
Le ………………et le marquis discutent.
« ………………. sur moi ! Tu peu x avoir confiance ! »
Je retiens
On appelle homonymes * des mots qui se lisent de la même façon mais qui ne
s’écrivent pas de la même façon. Exemple : compte, comte, conte – mère,
maire, mer – hou x, ou, où, houe.
3) Voici des expressi ons contenant le mot compte .
a) Utilisez votre dictionnaire pour en trouver le sens si vous ne le connaissez pas,
puis reliez l’expression et sa signification. Se rendre compte de… Devenir co mptable. S’aperce voir de quelque
chose. Ouvrir un compte en banque. Tenir compte de …Tout compter et
calculer. Prendre en considération. Teni r les livres de compte. Compter
sur quelqu’un…Avoir confianc e en quelqu’un. Compter sur les doigts. Vivre
sur le compte de quel qu’un. S’en sortir à bon co mpteAvoir de la chance.
Sortir de l’argent de son compte. Avoir des éc onomies sur son compte.
b) Voici d’autres expr essions contenant le mot compte . Cherchez-en le sens
dans le dict ionnaire :
Faire le compte, trouver son compte, faire un compte -rendu, rendre compte,
rendre des comptes, ton comp te est bon, régler son comp te, au bout du compte,
je compte faire quelque chose.
C – Différencier les verbes desc riptifs des verbes narratifs.
– Maîtriser l’emploi du passé simple et de l ’imparfait de l’indicatif.
1) Lisez ce début de conte. « Il était une fois un riche seigneur qui s’était remarié avec une femme très
désagréable. Elle avait un ca ractère épouvantable et ne souriait jamais. Tout le
royaume la détestait. Elle av ait deux filles qui lui ressemblaient. Le mari avait, de
son côté, une fill e très belle, très bonne et très douce. L’horrible femme la
chargeait de tous les travaux pénibles. De plus, elle devait dormir dans le grenier
alors que les deux sœ urs occupaient des chambres luxueuses. »
– Soulignez les verb es. A quel temps so nt-ils conjugués
?……………………………
Ces verbes permettent de présenter la situation des personnages. Il s font une
sorte d’arrière-plan, co mme une scène au théâtre avant que le s personnages
n’entrent en scène.
2) Lisez la suite du conte : « Un soir de grand froid, la méchante femme ordonna à la jeune fille d’aller
chercher de l’eau au puits. Celle-ci partit donc dans la nuit glac iale, un seau à la
main. Elle trébucha tr ois fois sur des racines et a rriva enfin près du puits.
Soudain, une fée apparut […] »
Soulignez les verbes du texte. A quel temps sont-ils conjugués ?
…………………………….. Ces verbes montrent que le s faits se succèdent les uns après les autre s, le récit
se déroule au premier plan, en devant de scène.
1 – Je retiens :
Le passé simple et l’imparfait sont deux temps du passé.
Le passé simple est utilisé pour exprimer des faits succe ssifs ; pour cette raison,
il est le temps du récit écrit. Il pr ésente les événements au premier plan.
L’imparfait présente les faits à l’arrièr e-plan ; pour cette ra ison, il est souvent
employé dans les descriptions.
Exemple : La fée transforma en chevaux les souris qui dormaient dans la cage.
– transforma : Premier plan au passé simple.
– dormaient : Arrière-plan à l’imparfait.
* Rappel de conjugaison :
* Terminaisons de tous les verbes à l’imparfait de l’indicatif : ais- ais – ait –
ions- iez- aient.
Attention aux verbes en ier – yer – gner.
Plier : nous pl iions.
Balaye r : nous bala yions.
Gagner : nous gag nions.
Terminaisons des verb es au passé simple :
Verbes, premier groupe : ai – as – a – âmes – âtes – èrent.
Verbes, 2ème groupe : is – is – it – îmes – îtes – irent.
Verbes, 3ème groupe : is – is – it – îmes – îtes – irent ;
ou : us – us – ut – ûmes – ûtes – urent ;
ou : ins – ins – int – înmes – întes – inrent.
2 – Application :
a) Les verbes du texte ci-dessous sont au présent de l’indicatif.
– D’abord, repérez-les pui s entourez ceux qui décrivent le décor.
– Soulignez ensuite ceux qui mo ntrent les actions de Dracula.
– Enfin, écrivez le texte à l’imparfait et au passé simple selon que le ver be est un
verbe d’arrière-plan (faits simultanés ) ou un verbe de premier plan (faits
successifs).
« La masse sombre du château se dessi ne à peine dans la nu it. Dracula, le
vampire, sort de cette nuit épaisse. La tempête courbe les arbres sur la lande
endormie ; la pluie tombe avec violence. Dracula trav erse le parc, atteint le
château et ouvre lentement la lourde porte de chêne. Les éclairs déchirent le ciel.
Au-dehors, la pluie tombe to ujours. Alors, le vampire entre dans la chambre de
sa future victime. » b) Conjuguez les verbes suivants à l’imparfa it de l’indicatif :
Etre : Nous…………………….sur le point de partir.
Crier : Vous ……………………pour attirer son attention. Vouloir : Ils ……………………le rencontrer.
Faire : Nous ……………………confiance aux enfants.
c) Conjuguez les verbes suivants au passé simple de l’indicatif.
• Aller : Ils ………………. le trouver pour lui parler.
Venir : Il ……………… vers moi et me parla.
Faire : Ils …………….. le tour du château avant d’entrer.
Recevoir : Elle ………… le premier prix. Prendre : Ils ………….. le dernier train.
D – Eviter les répétitions en utilisant des substituts
– Utiliser des substituts : sy nonymes, pronoms, métaphores.
1) Lisez le texte ci-d essous dont les phrases sont numérotées :
N° 1 : « Mohamed avait décidé de jouer un bon tour à ses amis. »
N° 2 : « Il rendit visite aux uns et aux autres et leur annonça qu’une soucoupe
volante venait de se pose r sur la colline. »
N° 3 : « Tous se précipitèrent pour voir le mystérieux engin. »
N° 4 : « Arrivés sur place, ils découvrirent q ue le véhicule spat ial n’était rien
d’autre que la lune, énorme ce soir-là, d’une incroyable clar té, et qui semble
posée sur le sommet de la colline. »
a) Retrouvez dans ce texte les mots qui rempla cent les mots donnés ci-
dessous : – Mohamed (phrase n° 2) : ………………………………………..
– Ses amis (phrase n° 2) : …………………………………………
– Mohamed et ses amis (phrase n°3) : ………………………….. – La soucoupe volante (phrase n° 3) : …………………………… – La soucoupe volante (phrase n°4) : …………………………….
b) Soulignez ceux qui sont des pronoms:……………………….
2) Lisez cette phrase :
« C’est en ouvrant les yeux que j’aperçu s avec horreur cette petite main noire
et
poilue crispée dans se s cheveux. »
A votre avis, de quoi s’agit-il (m ots soulignés) ?
– La main d’un animal bizarre ?
– Une araignée ?
– Une barrette à cheveux ?
1 – Je retiens :
Pour éviter les répétitions, on peut rempla cer un nom ou un groupe
nominal par des substitu ts qui peuvent être :
– Des pronoms . Exemple : Le chat dort. Il ronronne. Ne le réveillons pas.
– Des synonymes (un mot qui veut di re la même chose). Exemple : un chat
= le matou. – Des métaphores
. Exemple : Alger = la capitale de l’Algérie.
? Une métaphore est une comparaison, une image exprimée sans utiliser le
mot comme .
Comparaison *. Exemple : La puce est comme un grain de tabac à ressort.
Métaphore. Exemple: La puce : Un grain de t abac à ressort (le point commun est
l’aspect : un grain noir). Pour qu’il y ait métaphore, il faut un point commun entre
les deux élémen ts associés.
*Jules Renard (1864-191 0) était maître dans l’art de la métaphore. En voici
quelques exemples extraits du livre « Histoires naturelles ».
a) La pintade. Exemple : C’est la bossue de ma cour.
b) Le ver luisant. Exemple : Ce tte goutte de lune dans l’herbe .
c) L’araignée. Exemple : U ne petite main noire et poilu e crispée sur des cheveux.
e) La puce. Exemple : Un grain de tabac à ressort.
f) Le papillon. Exemple : Ce billet doux plié en d eux cherche une adresse de
fleur.
? Des mots qui ont un sens tr ès proches sont des synonymes . Exemple :
Casser, briser, rompre so nt des verbes synonymes.
2 – Application : Cherchez d’autres mét aphores pour désigner des
animaux :
– Le lion,…………de la forêt.
– Le perroquet…………………………….
– Le hérisson, une boule de …………….
E – Production d’écrits
– Ecrire pour raconter un conte.
– Ecrire un conte en resp ectant les contraintes du genre.
1 – J’explore :
Lisez le conte suivant :
« Les trois plumes »
« Il était une fois un roi qui avait trois fils : deux étaient intelligents et
instruits, alors que le troisièm e ne parlait guère : il était simple d’esprit et tout le
monde l’appelait le simplet. Le roi, en vieillissant, sentant se s forces décliner * et
songeant à sa mort, ne savait pas auquel de ses trois fils il devait laisser le
royaume en héritage. Il leur dit à chacun :
« Partez, et celui de vous trois qui me rapportera le plus fin tapis ce sera lui le
roi après ma mort ». Afin d’éviter toute dispute et toute contestation entre se s fils, il les conduisit lui-
même tous les trois de vant la porte du chât eau, où il leur dit :
« Je vais souffler trois plumes en l’air, une pour chacun de v ous, et dans la
direction que sa plume aura prise, chacun de vous ira. » La prem ière plume
s’envola vers l’est, la sec onde vers l’ouest, et la troisième resta entre les deux et
ne vola pas loin, retombant presque tout de suite par terre. L’un des frères partit
donc à droite, l’autre à gauc he, non sans se moquer du simplet qui devait rester
où sa plume était retombée , c’est-à-dire tout près.
Le simplet alla s’asseoir à côté de sa plume, et il se sent ait bien triste. Mais voilà
tout à coup qu’il s’aperçut de l’e xistence d’une trappe, juste à côté de la plume ; il
leva cette trappe, découvrit un escalier et descend it les marches sous la terre. En
bas, il arriva devant une seconde porte et frappa. Il entendit une voix à l’intérieur
qui criait :
« Mademoiselle la rainette,
Petite grenouille verte, File de race grenouillère, Grenouillante gambette,
Va vite voir qui est dehors ! »
La porte s’ouvrit et il vit une grosse grasse grenouille entourée de t out un monde
de petites grenouilles saut illantes. La grosse grenouille lui dem anda quel était
son désir.
« J’aimerais bien le pl us beau et le plus fin tapis », dit-il.
La grosse appela une petite rainet te et lui dit :
« Mademoiselle la rainette,
Petite grenouille verte,
Fille de race grenouillère, Grenouillante gambette,
Apporte-moi la grosse boîte. »
La jeunette grenouille alla chercher la boîte, et la grosse mère l’ouvrit pour
remettre au simplet le fin tapis qui s’y tr ouvait : mais un tapi s si merveilleusement
fin qu’on n’en pouvait plus ti sser un pareil en haut, dans le monde. Il remercia la
grenouille et remonta sur terre.
Les deux autres frères étaien t convaincus que leur cadet, qu’ils tenai ent pour un
complet idiot, ne trouvera it rien de rien et ne pourrait rien apporter.
« A quoi bon nous fatiguer à chercher ? », se di rent-ils ; et ils se contentèrent
d’enlever à la première bergère qu’ils re ncontrèrent des tissus grossiers qu ‘elle
avait sur le corps pour revenir au chât eau les apporter à l eur père. Au même
moment le Simplet rev enait lui aussi, apportant son superbe tapis.
Le roi, en le voyan t, fut tout étonné.
« Selon la stricte justice », dit-il, « le ro yaume devrait revenir au cadet ». Mais les
deux autres ne laissèrent pas de repos à le ur père, lui disant qu’ il était tout à fait
impossible que le Simplet, qui ne comprenait rien à rien, devînt le roi, et qu’il
fallait imposer une n ouvelle condition. Ils insist èrent tellement que le père y
consentit. « Deviendra roi celui qui me rapporte ra la plus belle bague », dit-il.
Il descendit avec ses trois fils devant la porte du château, souf fla les trois plumes
qui s’envolèrent comme la premiè re fois : l’une vers l’est, l’autre vers l’ ouest et la
troisième entre les deux, volant à peine pour aller de nouveau tomber à côté de
la trappe. Les deux aî nés partirent donc à droite et à gauche, et le Simplet alla
devant lui, ouvrit la trappe et descendit ve rs la grosse grenouill e, lui disant cette
fois qu’il avait besoin de la plus belle bague. La grosse grenouille se fit apporter
la boîte et en sortit une b ague, qu’elle lui re mit : une bague étince lante de pierres
rares, si belle et si fine ment montée qu’aucun orfèvre su r la terre n’en pourrait
travailler une pareille. A l’idée que leur Simplet de frère eût à chercher un anneau d’or, les deux aînés
se moquèrent et se rirent, estimant une fois de plus qu’il n’était pas utile qu’ils se
fatiguassent à chercher. Il s se contentèrent d’arrach er les vieux clous d’une
vieille jante de roue à une vieille charrett e, et apportèrent chac un son clou au roi,
leur père. Mais le Simplet vi nt et lui donna la bague d’or où scintillaient les feux
des pierres précieuses, et le roi déclara cette fois encore que le royaume lui
revenait de droit. Les deux aînés ne cessèrent de tracasser, de tourment er leur père pour qu’il
imposât une troisième c ondition ; le roi fini t par y consentir et promit le royaume à
celui qui reviendrait avec la femme la plus belle. Il souffla les trois plumes, qui
s’envolèrent exactement co mme les fois précédentes.
Le Simplet ne s’embarrassa de rien et ne fit ni une ni deux, mais de scendit tout
droit chez grosse grenoui lle à laquelle il dit :
– Il faut que je revi enne avec la plus be lle femme au château.
– Hé, comme tu y vas ! s’exclama la gro sse grenouille. La femme la plus belle ?
Mais je ne l’ai pas comme cela, sous la main ! Attends seul ement un peu : tu
l’auras tout de même !
Elle lui donna une carotte creusée, à laquelle six petites souris étaient attelées.
– Qu’est-ce que je vais fa ire ? demanda le Si mplet tout éberlué et tout triste.
– Tu n’as qu’à y installer l’une de mes petite s rainettes, répondi t la grosse mère
grenouille.
Il ne choisit pas mais attrapa dans le cercle la première venue et la mit dans la
carotte creusée. A peine y fut-elle, qu’elle se tr ansforma et devint une
merveilleuse demoiselle ; la carotte était un carrosse, et les six petites souris de
magnifiques chev aux. Le Simplet embra ssa la belle, fouetta les chevaux et arriva
devant le roi. Ses frères, pendant ce temps, ne s’étaient donné auc un mal, se contentant de
ramener avec eux le s deux premières paysa nnes venues. « Elles seront toujours
plus belles que la femme qu’i l pourra trouver ! », se di rent-ils. Mais quand le roi
les vit, ce fut pour leur dire que le royaume reviendr ait à leur cadet.
Ils ne voulurent toujours rien entendre et fatiguèrent le s oreilles du roi à lui
répéter : « Nous ne pouvons pas admettre q ue le Simplet devie nne roi ! » Ils
voulaient une nouv elle épreuve entre les femmes.
« Qu’elles sautent à travers le lustre suspendu au milieu de la salle, dirent-ils, et
que la préférence aille à celui qui aura amené la plus capable ».
C’était un grand anneau de fe r, suspendu asse z haut, et ils pensaient que les
paysannes seraient assez fortes pour cet exercice, tandis que la belle demoiselle
s’y romprait les os. Le roi céda une fois de plus à leurs instances, et les deux
paysannes sautèrent, réussissant l’une et l’autre à passer dans le cercle ; mais
toutes les deux retombèrent si lourdem ent et si maladroi tement qu’elles se
cassèrent bras et jambes, aussi gr os et tout épais qu’ils fussent.
Alors ce fut le tour de la belle demoise lle du Simplet, qui sauta elle aussi, mais
avec toute la grâce et la lé gèreté d’une biche, à travers le gros anneau de fer. Il
ne pouvait plus y avoir de ré sistance ni d’opposition aprè s cela ; et ce fut ainsi
qu’il hérita de la couronne et qu ’il régna longtemps dans sa sagesse.
GRIMM, Les trois plumes et douze autres contes.
Editions Gallimard
a) Quelle expression marque le début du conte ?
Citez d’autres expressions qu i peuvent débuter un conte.
b) Quel est le problème qui se pose au roi au début du conte et qu’il faut
résoudre ?
c) Quel est le héros du co nte ? Que savez-vous de lui au début du conte ?
Et à la fin ? d) Quels sont les autres personnages et que savez-vous d’eux au début du conte
? Et à la fin ?
e) Citez les différentes ép reuves subies par le héro s pour résoudre problème
posé.
f) Je prolonge
:
Faites la même exploration du c onte « Le brique t » d’Andersen.
2 – Je résume :
1) En utilisan t les éléments proposés , résumez le conte «L es trois plumes ».
Situation initiale : Il était une fois………………………………..
……………………………………………………………………..
………………………………………………………………………………………
……………………………………………………… Elément déclencheur
: Le vieux roi souffla… ………………. ………
………………………………………………………………………
………………………………………………………………………………………
………………………………………………………
Epreuves : 1……………………………………………………………………
2…………………………………………………………………… 3.…………………………………………………………………… 4 ……………………………………………………………………
Situation finale
:
……………………………………………………………………… ………………………………………………………………………………………
………………………………………………………
2) Je prolonge
:
– Faites le même travail à part ir d’un conte de votre choix.
3 – J’imagine
a) Le conte se termine à : « Au mê me moment, le Simplet revenait lui aussi,
apportant son superbe tapis. Le ro i, en le voyan t, fut étonné. »
Imaginez la fin du conte. N’oubliez pas de bien préciser ce que devi endraient le
roi et les deux frères.
b) Recherchez dans différents contes l’événement qui déclenche toute
l’histoire.
4 – J’analyse
a) Relevez les différents temps ve rbaux utilisés dans le texte « Les trois
plumes ». Donnez po ur chacun d’eux quelques exemples.
b) Conju guez les verbes de cet extrait au te mps qui convient.
Il (descendre)…………………… avec ses trois fi ls devant la porte du château,
(souffler)……………… Les trois plumes qui (s’envoler)…………………………….
Les deux aînés (partir) ……………… donc à dr oite et à gauche et le Simplet
(aller)………………devant lui, (lever)………….. la trappe et
(descendre)………………. vers la grosse grenouille.
c) Dans les phrase s suivantes, remplacez le mot souligné par le nom du
personnage. * Il
les conduisit lui-même tous les troi s devant la por te du château.
(Il ……………………… les ………………………….). * Il
vit une grosse grenouille ( ……………………………).
* La grosse grenouille appela une petite rainette et lui dit (……………………).
* Ils se contentèrent d’arracher les clous d’une vieille jante (………………….).
* Il régna longtemps dans sa sagesse (……………).
d) Dans le texte « Le briquet » d’Andersen, relevez l’ensemble des
personnages et classez-les en deux catégories : ceux qu i aident le so ldat et
ceux qui s’opposent à lui.
5 – Je construis mes outils
a) Ecrire un conte c’est :
Recherchez dans les contes étudiés où se trouvent le s réponses aux différentes
propositions. Notez-le s dans le tableau.
Ecrire un conte c’est…
J’ai trouvé la réponse Titre du texte ………………. ligne ………* débuter par
une formule comme : « Il était une fois… » ou « En ce temps-là » ; *
introduire dans le texte un événement qui déclenche les actions ;* proposer
une situation finale qu i nous dit ce que sont de venus les principaux
personnages.* Présenter un héros que l’on retrouve tout au long du texte ; *
désigner les personnages de différente s façons ; * préciser le rôle des
différents personnages : aides ou opposants du héros ;* écrire à l’imparfait
et au passé simple ;* donner un titre
b) Ajoutez dans ce tte liste les proposition s absentes et qui vous
paraissent importantes.
6 – J’écris
a) Lisez le texte suivant
« Le briquet »
(Christian ANDERSEN)
« Il vint un soldat qui marchait au pas cadencé sur la route : Une, deux ! Une,
deux ! Il avait son sac d’or donnance sur le dos et un sabre à son côté, car il avait
été à la guerre, et il rentrait chez lui. Et il rencontra une vieill e sorcière sur la
route : elle était affreuse, sa lèvre inférieu re lui pendait jusque sur la poitrine.
Elle dit : – Bonsoir, soldat ! Comme tu as un grand sac et un be au sabre, tu es un vrai
soldat ! Tu vas avoir autant d’argent que tu voudras !
– Merci, vieille sorcière, dit le soldat.
– Vois-tu ce grand arbre ? dit la sorcière, montrant l’arbre qui était près d’eux. Il
est tout à fait creux en dedans. Tu grim peras au sommet, tu verras un trou, dans
lequel tu pourras te lai sser glisser au fond de l’arbre. Je t’attacherai une corde
autour de la taille, af in de pouvoir te remont er, quand tu m’appelleras.
– Qu’est-ce que je ferai au fond de l’arbre ? demanda le soldat.
– Tu rapporteras de l’arg ent, dit la sorcière. Sach e que lorsque tu seras
descendu, tu seras dans un grand couloir qui est très clair, car plus de cent
lampes y brûlent. Et tu ve rras trois portes. Tu pourra s les ouvrir, la clef est
dessus. Si tu entres dans la première chambre, tu ve rras au milieu du plancher
une grande caisse ; un chien est assis dessus ; il a des ye ux grands comme des
tasses de thé, mais ne te soucie pas de ça ! Je te donne m on tablier, ouvre la
caisse, et prends autant de pièces que tu vo udras. Elles sont to utes en cuivre.
Mais si tu préfères de l’argent, tu iras dans la c hambre suivante ; là est assis un
chien qui a des yeux grands comme des roues de moulin, mais ne te soucie pas
de ça, pose-le sur mon tablier et prends de l’argent. Et si tu veux avoir de l’or, tu
peux aussi en avoir, et autant que tu pou rras en porter, en allant dans la
troisième chambre. Seulement, le chien qui est assis là sur la ca isse a deux yeux
qui sont grands chac un comme une tour ronde. C’es t un vrai chien, tu peux me
croire, mais ne te soucie pas de tout de ça. Pose-le simplement sur mon tablier, il
ne te fera rien, et prends dans la caisse d’or auta nt d’or que tu voudras.
– Ce n’est pas mauvais, ça ! dit le soldat. Mais qu’est- ce que je don nerai, vieille
sorcière ? Car tu ve ux avoir aussi quelque chose, je suppose !
– Non, je ne veux pas av oir un sou, dit la sorcière . Tu prendras seulement pour
moi un vieux briquet, que ma grand-mère a oublié, la de rnière fois qu’elle est
descendue là.
– Eh bien, mets-moi la corde autour de la tail le, dit le soldat.
– La voici, dit la sorcière, et voilà mon ta blier à carreaux bleus. Et le soldat grimpa
dans l’arbre, se laissa to mber dans le trou, et se trouva, comme l’avait dit la
sorcière, dans le grand couloir où brûlaient des centaines de lampes.
Il ouvrit alors la première po rte. Aïe ! Le chien était assi s là, et le fixait avec des
yeux grands comme des tasses de thé.
– Tu es un bon garçon, dit le soldat : il le posa sur le tablier de la sorcière, et prit
autant de pièces de cuiv re que sa poche pouvait en contenir, puis ferma la
caisse, remit le chien en plac e, et entra dans la seconde chambre. Ouh ! Là était
assis le chien aux yeux grands comme des roues de moulin.
– Tu ne devrais pas tant me regarder, dit le soldat, tu pourrais en avoir mal aux
yeux, et il posa le ch ien sur le tablier de la sorc ière, mais lorsqu’il vit les
nombreuses pièces d’ argent dans la caisse , il jeta bien vite toute la monnaie de
cuivre qu’il avait, et remplit sa poche et son sac avec l’argent seul. Et il entra
dans la troisième chambre.
Non, c’était affreux ! Le chien y avait réellement de s yeux grands comme des
tours rondes, et ils lu i tournaient dans la tê te comme des roues.
– Bonsoir, dit le soldat, et il porta la main à son képi, car il n’av ait jamais vu un
chien pareil ; mais lo rsqu’il l’eut un peu regardé, il se dit que c’était assez, il le
descendit sur le plancher, et ouvrit la ca isse, non, sapristi ! Qu elle quantité d’or !
Il pourrait acheter avec ça tout Copenhague*(1) et les cochons en sucre des
pâtisseries, tous les soldats de plomb ; le s fouets et les chevaux à bascule ! Oui,
c’était une richesse !
Alors le soldat jeta bien vite toutes les pièces d’argent dont il avait rempli ses
poches, le sac, le képi et les chaussures furent remplis, si bien qu’il pouvait à
peine marcher. Ah, il en avait de l’argent ! Il remit le ch ien sur la caisse, ferma la
porte et cria dans le tr onc d’arbre : « remonte-moi maintenant, viei lle sorcière.
C’est vrai, dit le soldat, je l’avai s oublié », et il al la le prendre.
La sorcière le remonta, et il fut de nouveau su r la route, les poches, le sac, les
souliers et le képi pl eins de pièces d’or.
– Qu’est-ce que tu veux faire de ton briquet ? dem anda le soldat.
– Ça ne te regarde pas, dit la sorcière, tu as de l’argent maintenant Donne-moi
seulement le briquet.
– Tatata ! dit le soldat. Veux-t u me dire tout de suite ce que tu veux en faire, ou
bien je tire mon sabre et je te coupe la tête !
– Non, dit la sorcière.
Et le soldat lui coupa la tête . Elle était par terre de tout son long. Mais il serra tout
l’argent dans son tablier, qu ’il mit comme un p aquet sur son dos, fo urra le briquet
dans sa poche, et a lla droit à la ville.
C’était une belle ville, et il descendit dans la plus belle auberge, demanda les
plus belles chambres et les plats qu’il aimait le mieux, car maintenant il était
riche, puisqu’il avai t tant d’argent.
Le garçon qui devait cirer se s souliers trouvait bien qu ’un monsieur si riche avait
de drôles de vieux souliers, mais le so ldat ne s’en était pas encore acheté de
neufs ; le lendemain, il eut des souliers pour marcher, et des vêtements
superbes. Il était devenu un monsieur élégant, et on lui parla de tout ce qu’il y
avait de beau d ans la ville, et du roi, et on lui dit comb ien était gracieuse la
princesse, fille du roi.
– Où peut-on la voir ? demanda le soldat.
– On ne peut pas du tout la voir, répondait-on toujours , elle habi te un grand
château de cuivre av ec tant de murs et de tours ! Nul autr e que le roi n’a ses
entrées libres chez elle, pa rce qu’il a été prédit qu’elle épousera un si mple soldat,
et le roi ne veut pas de ça. « Je voudrais bien la voir », se dit le soldat, mais c’ét ait tout à fait impossible.
Et il vécut gaiement, alla au théâtre, roula en voit ure dans les ja rdins du roi,
donna aux pauvres bea ucoup d’argent, très gentimen t, il savait bien par ses
souvenirs d’autrefois co mbien les pauvres ont de peine à poss éder quelques
sous. Il était riche, et bien habillé, il eut alors de nombr eux amis qui disaient tous
qu’il était un charmant homme et un vrai gentilhomme, et cela lu i faisait plaisir.
Mais comme il dépe nsait de l’argent tous les jours et n’en gagnait pas du tout, il
finit par n’avoir plus que de ux skillings*(1), et dut quitt er les belles chambres qu’il
avait habitées, et alla loge r dans une toute pet ite pièce sous le toit, brosser lui-
même ses souliers, les rapi écer avec l’aiguill e à repriser, et aucun de ses amis
ne vint le voir, parce qu’il avait trop d’étages à monter.
C’était un soir tout à fait sombre et il ne pouvait même pas s’acheter une
chandelle quand il se rappela qu’il avait un pe tit bout de chandelle avec le briquet
qu’il avait pris dans l’arbre creux où la sorcière l’avait ai dé à descendre. Il sortit le
briquet et fit jaillir des étin celles du silex, la porte s’ou vrit brusquement, et le chien
qui avait des yeux grands co mme des tasses à thé, et qu ’il avait vu au fond de
l’arbre, fut devant lui,et dit :
– Qu’ordonne mon maître ?
– Qu’est-ce que c’est, dit le soldat ? Voilà un drôle de br iquet, si je peux avoir
ainsi ce que je veux ! Procure-moi de l’ar gent, dit-il, au chi en. Et houp ! Le voilà
parti ! Et houp ! Le voilà re venu ! Et il tient dans sa g ueule une bourse pleine de
billons. Le soldat savait désor mais quel délicieux briquet c’étai t. S’il le battait une fois
arrivait le chien qui était assis sur la cai sse aux pièces de cuivre. S’il le battait
deux fois, arrivait celui qui avait la monnaie d’argent. Et s’il le battai t trois fois,
arrivait celui qui avai t de l’or. Le soldat retourna dans les belles chambres, mit
ses bons vêtements, et ses amis le re connurent tout de suite et ils eurent
beaucoup d’affect ion pour lui.
Et il se dit un jour : « C’ est tout de même drôle que l’on ne puisse pas voir la
princesse ! Il paraît qu’elle est charmante, à ce qu’ils disent tous. Mais à quoi
bon, si elle doit indéfiniment rester dans le grand c hâteau de cuivre aux
nombreuses tours ! Où est mon briquet ? »
Et il battit le briquet, et houp ! Le chien au x yeux grands comme des tasses à thé
fut là.
« C’est vrai qu’on est au milieu de la nuit, dit le sold at, mais je voudrais tant voir
la princesse, rien qu’un instant ! »
Le chien fut aussitôt dehors, et avant que le soldat eût le temp s d’y penser, il le
vit de retour avec la prince sse, elle était couchée sur le dos du chien et dormait,
et elle était si gracieuse que chacun pouvait vo ir que c’était une vraie princesse ;
le soldat ne put y tenir ni s’empêcher de lui donner un baiser, ca r il était un vrai
soldat. Le chien courut ram ener la princesse, mais lors que vint le matin, comme
le roi et la reine lui offraient le thé, la princesse dit qu ’elle avait eu cette nuit un
rêve singulier, où il y avai t un chien et un soldat. E lle avait chevauché sur le
chien et le soldat lu i avait donné un baiser.
« Voilà vraiment une belle hi stoire ! », dit la reine.
Une des vieilles dame s de la Cour dut alors veiller près du lit de la princesse,
pour voir si c’était réellement un rêve, ou savoir ce que c’était.
Le soldat éprouvait un terrible désir de re voir la gracieuse pr incesse et le chien
revint la nuit, la prit et co urut de toutes ses forces, mais la vieille dame de la Cour
mit des bottes hautes, et co urut aussi vite derrière lu i ; et lorsqu’elle les vit
disparaître dans une grande ma ison, elle se dit : « Je sais mainte nant où c’est »,
et avec un morceau de craie, elle traça une grande croix sur la porte. Puis elle
rentra se coucher et le chien revint avec la prince sse ; mais lors qu’il vit qu’une
croix était tracée sur la porte de la maison où habitait le solda t, il prit aussi un
morceau de craie et traça des croix sur les portes des ma isons de toute la ville,
et c’était malin, car la dame de la Cour ne pouvait plus trouv er la porte exacte,
puisqu’elles portaient toutes des croix.
Le matin, de bonne heure, le ro i et la reine, la vieille dame de la Cour et tous les
officiers sortirent pour voir où la pr incesse avait été.
– C’est là ! dit le roi, lorsqu’il vit la première porte avec une croix.
– Non, c’est là, mon ch er mari ! dit la reine, qui vo yait la deuxième porte où il y
avait une croix. Et ils comprirent bien qu’il était inutile de chercher.
Mais la reine était une femme très ingénieuse qu i savait mieux faire que de
monter en carrosse. Elle prit ses grands ciseaux d’or , coupa une gran de pièce de
soie en morceaux, et cousit une jolie petite bou rse ; elle la remp lit de farine de
blé très fine, l’attac ha au dos de la princesse et, lorsque ce fut fait, elle tailla un
petit trou dans la bourse, de façon que la farine pût se ré pandre le long du
chemin que suivrait la princesse.
Le chien revint la nuit, prit la princesse sur son dos, et courut avec elle chez le
soldat, qui l’aimait tant, et qui aurait voulu être prin ce, pour en faire sa femme.
Le chien ne s’aperçut pas du tout que la semoule se répandait depui s le château
jusqu’à la fenêtre du soldat, où il grimpait avec la princesse. Le matin, le roi et la
reine virent bien où leur fille avait été, il s prirent le soldat et le mirent en prison.
Hou ! Comme c’était sombre et lugubre, et on lui dit :
« Demain tu seras pendu ».
Ce n’était pas amusant à entendre et il avait oublié son briquet chez lui… à
l’auberge. Le matin, entre le s barreaux de fer de la petite fenêtre, il put voir les
gens qui se dépêchaient de sort ir de la ville pour aller le voir pendre. Il entendit
les tambours et vit les soldats marcher en cadence. Tout le monde courait ; il y
avait aussi un apprent i cordonnier en tablier de cuir et pantoufles, qui galopait si
fort qu’une de ses pantoufle s sauta en l’air droit cont re le mur où le soldat
regardait entre les barreaux de fer.
« Hé ! Apprenti cordonnier, ne te presse pas tant, lui dit le soldat. Il ne se
passera rien avant q ue je ne sois arrivé. Mais ne ve ux-tu pas courir à la maison
que j’habitais et me rappor ter mon briquet, tu auras q uatre skillings. Mais il faut
prendre tes jambes à ton cou ». L’apprenti cordonnier voulai t bien avoir les qu atre skillings et partit comme une
flèche chercher le briquet, le donna au soldat, et…oui, on verra bien !
En dehors de la ville était maçonné un grand gibet, tout autour se tenaient les
soldats et des centaines de m illiers de gens. Le roi et la reine étaient assis sur un
superbe trône en avant des juge s et de tout le conseil.
Le soldat était déjà sur l’échelle, mais lorsqu’on voul ut lui passer la corde au
cou, il dit que l’on permettait toujours à un condamné, avant de subir sa peine, de
satisfaire un désir inoffensif. Il aurait voulu fumer une pipe, ce serait la dernièr e pipe qu’il fu merait en ce
monde.
Le roi ne voulut pas lu i refuser cela, et le so ldat prit son briquet, et battit le briquet
; un, deux, trois ! Et, tous les chiens fu rent là, celui aux yeux grands comme des
tasses à thé, celui aux yeux comme des ro ues de moulin, et celui qui avait les
yeux grands comme des tours rondes.
« Aidez- moi maintenant à ne pas être pendu ! », dit le soldat.
Et les chiens se précipitèrent sur les juges et tous les membres du conseil
saisirent l’un par les jambes et l’autre par le nez et les l ancèrent en l’air à
plusieurs brasses de hauteur , si bien qu’en retombant ils furent brisés en
morceaux.
« Je ne veux pas ! », dit le roi, mais le plus grand chien le prit, lui et la reine, et
les lança en l’air à leur tour . Alors, les soldats furent effrayés, et tout le monde
s’écria : « Petit soldat, tu seras notre roi et tu aura s la gracieuse princesse ! »
Et ils placèrent le soldat dans le carrosse du roi, et les trois chiens dansèrent
devant et crièrent hourra !
Et les jeunes garçons poussèrent des a cclamations et les soldats présentèrent
les armes. La princesse sortit du château de cuivre et devint reine, et elle en était
bien contente. Les noces durè rent huit jours, et les ch iens se mirent à table et
roulèrent de grands yeux.
Hans Ch ristian ANDERSEN
Editions Gallimard.
b) « Le soldat sortit le briquet mais au ssitôt qu’il l’eut battu, le chien qui avait
des yeux grands comme des tasses de thé apparut… »
Mais attention ! Le ch ien va venger la sorcière. Il n’aidera pas le soldat, au
contraire………………………………………………
Ecris cette nouvelle fin de conte
7 – J’améliore mon texte
a) A l’aide de la grille ci-dessous, relisez votre texte. Répondez par : Oui ou
Non.
b) Je réécris
* Réécrivez votre texte en tena nt compte des rema rques faites lors de l’utilisation
de la grille de relecture.
Oui Non * Le nouveau rôle du chien est bien présenté. * Les actions présentées
sont en rapport avec ce que l’on sait dé jà. * Les actions présentées sont en
rapport avec le rôle des personnages * Les différents personnages sont nommés
de différentes façons. * A la fin du conte, on sait ce que sont devenus les
différents personnages. *J’a i utilisé des dial ogues correctement ponctués. * Le
personnage qui parle peut être facilement recon nu. *J’ai correctement ponctué
mon texte. *J’ai vérifié les accords sujet/ verbe.
F – Conclusion
Notre principal objectif est de décloiso nner orthographe – Gr ammaire et mise
en texte, de rendre effective la liaison langue et littérature et d’ articuler la lecture
méthodique avec l’écriture méthodique .En d’autres termes, notre démarche
cherche à donner au texte littéraire sa portée linguistiq ue et culturelle.
Le travail en séquences est ainsi conçu pour pe rmettre aux enseignants
d’élaborer facilement et li brement leur travail. Cha que texte doit aborder une
notion que l’on peut considérer comme un objecti f opérationnel de séance au
sein d’une séquence :
– par l’ét ude des outils de la langue en liaison très étroite avec les
Notions abordées lors de l’étude des textes ;
– par la présence d’une producti on d’écrits en fin de séquence.
Cette démarche pédagogique est confor me à toute démarc he d’appropriation
active, prenant en compte les différent s rythmes d’acquisit ion des apprenants.
Les activités de production d’éc rits doivent être la résu ltante de l’observation de
textes littéraires et documentaires et le lieu de réinvestissement des activités
réflexives (orthographe, grammaire, vocabulaire).
Les variantes d’un texte révèlent le trav ail de l’apprenant – scr ipteur et montrent
qu’un texte est le pr oduit d’une élaborati on complexe, et non le simple fait d’une
inspiration géniale. Les prin cipales opérations de réécritu re visant à enrichir le
texte sont les suivantes : ajout, suppression, déplace ment, remplacement. Toute
production d’écrits peut rele ver du même trava il de révision : « Une rature n’est
pas un raté », mais traduit la volonté de produire un effet sur le lecteur.
CONCLUSION GENERALE
Le statut de l’écrit au lycée et au collège se trouve prof ondément transformé.
Les apprenants algériens ne li sent pas pour écrire comme ils le faisaient avant.
L’effort porte d’abord sur la lecture. Les enseignant s font lentement apprendre
aux élèves à travailler av ec le livre et l’informat ion écrite, fa isant de la
compréhension des textes lus le ur seul véritable objectif.
Inventer une pédagogie de la compréhension ne va pa s de soi. Il faut que les
enseignants se donnent le s moyens « d’enseigner comment on comprend »,
inventer des situations qu i permettent aux apprenants de prendre co nscience de
leur capacité de co mprendre, de construi re une appropriation véritable de l’écrit.
Une conclusion s’impose : la pédagogie de la co mpréhension des textes
passe par celle de la production du texte écrit .
Sur le plan méthodologique, toute pratiq ue lectorale devra être effectuée dans le
but de fonder une ac tivité scripturale.
Toute activité scripturale devra être in tégrée dans une séque nce didactique et,
articulée à d’autres, elle concourra à la mise en pl ace d’un appren tissage complet
et assez vite complexe, à la réalisation d’objectifs explicites, à l’élimination des
obstacles déjà reconnus ou déc ouverts en cours de route.
Les enseignants des co llèges et lycées doivent acco rder une place importante à
la littérature : listes d’ouvrages, livrets d’accompagnement, etc. En liaison avec
des activités de lecture littéra ire, on prescrit des pratique s d’écriture littéraire qui
interrogent les représentatio ns des élèves. Ces pratiques sont vraiment efficaces
auprès des élèves.
Ces écritures dites créatives – écriture dans, sur, avec la littérature, contribuent à
la formation personnelle des apprenants. Elles permettent d’instituer des savoir-
faire (savoir-lire et savoir-écrire) et des sa voir-être. Si la le cture littéraire est un
jeu distancé avec les textes, qu’en est-il al ors de l’écriture litt éraire comme jeu ?
Nous dirons tout simplement qu’elle permet de mener des apprentissages, de
conduire à des savoirs implicites ou explicites en littérature.
Manipulation/transformation des textes et maîtrise de la langue s’articulent
ensemble pour permettr e à l’apprenant de produire son propre texte.
L’enseignant évaluera ces nouvelles écritures prises entre norme scolaire et
créativité.
On ne peut pas induire et rendre possibl es des projets d'écri ture à partir de
propositions (d'écritur e) ponctuelles et mo rcelées (cf. exempl es 1ère partie de
notre réflexion).
Seuls des réseaux de lectur e peuvent permettre de cons truire et d'élaborer les
composantes discursives ou narratives (système des personnages, planification,
notamment). Seules des relectures en réseaux, en répons e à des problèmes
d'écriture identifié s, peuvent rendre possible l'él aboration effective d'un texte
(littéraire) par tous le s élèves d'une classe.
Production d’écrits, expé riences sensibles du monde et culture des textes
peuvent s’entrecroiser dan s la vie d’une classe et s’enrichir mutuellement .
L’analyse d’un projet d’écriture à partir de la lecture d’un texte valide
l’hypothèse didac tique selon laquelle le transfert des comp étences de lecture
littéraire critique en compét ences d’écriture littéraire cr itique et fictionnelle est
possible . Le texte-support proposé es t un texte ouvert, ambigu, polysémique,
poétique, symbolique qui sème à foison les points d’interrogation, c’est-à-dire
qu’il favorise l‘activité in terprétative du lecteur qui se pose des questions sur le
texte. Si ce lecteur appar tient à une communauté interp rétative comme peut l’être
la classe, il sera d’autant plus enclin à participer à un débat interprétatif.
Le protocole didactique révèle que les él èves sont capabl es de prendre en
compte un problème d’écriture littéraire en écrivant un texte ouvert qui engage à
son tour un véritable débat in terprétatif. Le lecteur critiq ue devient un auteur qui a
conscience des effets de lecture qu’il veut produire tout en acceptant que son
texte devienne in fine la propriété interpréta tive de ses lecteurs.
Tout au long du projet, les élèves apprennent à parti ciper à un débat
interprétatif sur un texte d’auteur et sur les textes des pairs. Ils prennent
conscience du jeu sur l’implicite, sur le sens propre et le sens figuré. Ils
réfléchissent sur ce qui caractérise un texte littéraire, à savoir un texte qui
appelle les questions et pe rmet le débat, voire le conflit interprétatif.
Lecture et écriture sont donc deux moments d'une même activité. Si lire
peut, sous certaines cond itions, apprendre à mieux écrire, écri re apprend
toujours à mieux lire. Les tentatives d'éc riture ne s'oublient jamais et
entretiennent le besoin ou l'envie de lire.
R?F?RENCES BIBLIOGRAPHIQUES
I – BIBLIOGRAPHIE G?N?RALE
– BALIBAR, Renée, Laporte Dominique, Le français national , Hachette, Paris,
1974.
– BALIBAR, Renée, Les français fictifs, Editions Hachette , Paris, 1974, 290
pages. – BARTHES, Roland, in « Le bruissement de la langue » (Essais critiques IV),
Editions du Seui l, Paris, 1984.
– BARTHES, Roland, Sur la lecture , écrit pour la Writi ng conférence de Luchon,
repris in « Le brui ssement de la langue » (Essais cr itiques IV), Edit ions du Seuil,
Paris, 1984.
– BETTELHEIM, Bruno, Psychanalyse des contes de fées , Editions Robert
Laffont, 1976. – BOURDIEU, Pierre, La distinction , Minuit, Paris, 1979.
– BOURDIEU, Pierre, La lecture : une pr atique culturelle, di alogue avec Roger
Chartier », in « Pratiques de la lecture », direction Roger Chartier, Rivages, 1985.
– BRONCKART, Jean-Paul, Le fonctionnement des discours , Delachaux et
Niestlé, Neuchâtel, Paris, 1983.
– CARDINET, J. : (1988), Pour apprécier le travail des élèves, De Boeck, 2ème
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– CHAMBERLAND, P., L’objectivation en lecture , in « Les Actes de lectures », n°
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– CHARTIER, Roger, Du livre au lire , in « Pratiques de lecture », Rivages,
Marseille/Paris, 1985. – CHERVEL, André, Histoire de la grammaire scolair e… et il a fallu apprendre à
écrire à tous le s petits Français , Payot, Paris, 1977.
– CHERVEL, André, Histoire de la grammaire scolaire … et il a fallu apprendre à
écrire à tous le s petits Français , Payot, Paris, 1977.
– DE LANDSHEERE, G. : (1992), Dictionnaire de l’évaluatio n et de la recherche
en éducation , Presses Universitaires de Fr ance, 2ème édition revue et
augmentée.
– DENHIERE, Guy (Textes présentés par…), Il était une fois, Compréhension et
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L’enseignement de la littérature » (Langa ges nouveaux, prati ques nouvelles pour
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ANNEXE
QUESTIONNAIRE D’ENQUETE DESTINE AUX
ENSEIGNANTS DU CYCLE SECONDAIRE
Âge :
Sexe : M – F
Expérience professionnelle :
Niveau d’études :
Lieu de travail : urbain rural
Classe (s) attribuée (s) :
1ère A.S. L. 2ème A.S. L. 3ème A.S.L.
1ère A.S. S. 2ème A. S. S. 2e A.S.S.
1ère A.S.M. 2ème A. S.M. 3ème A.S.M.
Autres:……………………………………………………………………..
Question n°1 : Suivez-vous à la lettre, le pr ogramme de frança is proposé par
l’Institut pédagogique nati onal ? Pourquoi ?
………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
Question n° 2 : Parmi les textes pr oposés dans le(s ) manuel(s) scolaire(s),
lesquels préférez-vous ?
1 – 2 – 3 – 4 –
5 –
Pourquoi ? ………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
Question n° 3 : Ces textes sont-ils tous à la porté e de vos apprenants ? Oui
– Non.
Pourquoi ?
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………
Question n° 4 : Les textes proposés dans le(s ) manuel(s) scola ire(s) poussent-
ils vos apprenants à aller vers d’autres textes ?
a) Oui…….. Donne z un exemple de textes qui va inspirer et orienter vos
apprenants vers d’autres textes.
……………………………………………………………………………… b) Non…….. Pourquoi ?
………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………… ………………………………………………………………………………
Question n° 5 : Quels sont les textes que vous privil égiez le plus ? Pourquoi ?
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………
Question n° 6 : Utilisez-vous les même s textes pour toutes le s filières? Pourquoi
?
………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………….
Question n° 7 : Les textes proposés dans les ma nuels de lecture sont-ils, selon
vous, adaptés à l’apprent issage de la lecture ?
Oui…….. Non……..Pourquoi ? ………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
Question n° 8 : Vous arrive-t-il d’exploiter ces textes d’une autre manière
(personnelle) ?
Oui – Parfois – Souvent – Toujours – Jamais.
Question n° 9 : Les textes proposés dans les manuels scolaires permettent-ils à
vos apprenants de devenir des le cteurs autonomes ?
Oui…….. Non…….. Pourquoi ?
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………
Question n° 10 : Quelle définition donneriez-v ous à un texte littéraire ?
………………………………………………………………………………………………
…………………………………………………………….…
Question n° 11 : Quelle est la finalité d’un texte littéraire ?
………………. ………………. ……………… ………………. ……………… ……………. ……………… .
………………. ………………. ……………… ………………. ……………
Question n° 12 : Qu’entendez-vous par lire un texte ?
………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………….
Question n° 13 : Combien de séances consacrez-vous à la lecture lors de
chaque unité didactique ?
……………………………………………………………………………… ………………………………………………………………………………
Question n° 14 : Quelles sont les difficultés que rencontrent vos apprenants
pendant la séance de lecture ? Pourquoi ?
………………………………………………………………………………………………
………………………………………………………………
Question n° 15 : Quel est votre principal objectif lors de la séance de lecture ?
Pourquoi ?
………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………….
Question n° 16 : La séance de lecture doit- elle seulement amener vos
apprenants à la maîtrise de la langue et du langage ou bien vi se-t-elle autre
chose ? Pourquoi ? ………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………….
Question n° 17 : Si vous devez choi sir des textes, quels au teurs français et /ou
d’expression française proposeriez-vo us à vos apprenants ? Pourquoi ?
………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………
Question n° 18 : Selon vous, qu’est -ce qu’une unité dida ctique réussie ?
Pourquoi ?
………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………….
Question n° 19 : Que manque-t-il aux unités di dactiques proposées dans le
programme ? Pourquoi ?
……………………………………………………………………………….
……………………………………………………………………………….
Question n° 20 : Qu’entendez-vous par lectur e, écriture, réécriture ?
………………………………………………………………………………………………
……………………………………………………………….
* * *
Résumé
Notre réflexion se propo se d'exposer les raisons et les modalités d'un
apprentissage du français qui ne dissocie pas les usages ordi naire et artistique
du langage. Son orientat ion est donc à la fois th éorique et didactique.
C'est la place de la littér ature dans l'enseignement du FL E qui est, bien entendu,
l'enjeu de notre recherche. Notre objecti f est de développer ch ez l'apprenant des
compétences à utiliser dans son enseignement de la le cture et de l'écriture ,sa
compréhension des textes de types narra tif et poétique, de mê me que de types
descriptif et dialogal , et du processus d'apprentissage retenus par le programme
d'études de français au lycée.
Lecture et écriture sont do nc deux moments d'une même activité. Si lire peut,
sous certaines conditions, apprendre à mieux écrire, écrire apprend toujours à
mieux lire. Les tentatives d'écriture ne s'ou blient jamais et en tretiennent le besoin
ou l'envie de lire.
Mots -clés
Analyse -Apprenants- Avant-texte – Brouillon – Communica tion -Consignes –
Didactique – Echec- Ecrire – Ecriture – Ecriture littéraire – Enseignants –
Enseignement /Apprentissage – Evaluation – Groupement de textes- Interactions –
Interactivité – Lecture – Lire – Littératu re – Littérarité -P ratique artistique-
Pédagogie de l’écriture- Pédagogie de lecture- Pré-re quis – Réécrire – Réécriture-
Séquences didactiques- Texte à contraintes – Texte libre -Textes littéraires -Texte
poétique – Théorie de l’écriture.
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Acest articol: FACULTE DES LETTRES,LANGUES ET ARTS DEPARTEMENT DES LANGUES LATINES SECTION DE FRANÇAIS DIDACTIQUE DES TEXTES LITTE RAIRES OU LA LITTERATURE COMME… [600414] (ID: 600414)
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